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La Morelle douce-amère

Dernière mise à jour : 8 oct.




Étymologie :


Étymol. et Hist. I. Bot. mil. du xiiie s. morele (Gloss. Glasgow, 157a ds T.-L.). II. Zool. 1. 1775 « variété de canard » (La Nouvelle maison rustique, 2, 535 d'apr. FEW t. 6, 1, p. 550a) ; 2. 1781 «foulque» (Valm. d'apr. FEW. loc. cit.). I du lat. médiév. maurella « id. » (cf. Blaise Lat. chrét. et CGL), dér. de Maurus, v. maure ; II dér. de more (var. de maure*), suff. -elle (v. aussi morillon).


Lire également la définition du nom morelle afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Solanum dulcamara - Bois-mâchant - Bonbon de crapaud - Crève-chemin - Crève-chien - Diable en haie - Douce amère - Doucette - Folle vigne - Herbe à la carte - Herbe à la fièvre - Herbe de Judée - Loque - Mère-douce - Morelle douce-amère - Morelle grimpante - Morelle rouge - Réglisse de rivière - Réglisse de saule - Réglisse sauvage - Vigne de Judée -Vigne sauvage - Vigne vierge -


Pour en savoir plus sur la Morelle furieuse, voir la fiche Belladone.

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Botanique :


Jacques Lefrêne (pseudonyme d'Elie Reclus), auteur de Physionomies végétales, Portraits d'arbres et de fleurs, d'herbes et de mousses (In : La Société Nouvelle, avril-mai-juin 1914 ; Éditions Héros-Limite, 2012) s'appuie sur la description botanique de la plante pour en déduire des traits symboliques :


La dualité de Douce-Amère : De dualités le monde est plein. L'épine noire sert de véhicule à la magie noire puisque perfide. Cette influence néfaste, on la neutralise par l'emploi de l'épine blanche. L'épine noire ou prunellier doit forcément périr dans le voisinage de l'épine blanche ou aubépine, croit le peuple, car les deux arbres se détestent, comme deux poisons qui se rencontrent dans l'intestin ou deux taupes qui s'abordent dans leurs allées souterraines.

L'épine noire et l'épine blanche sont deux forces opposées ; entre elles, il n'y a de rapport qu'à cause de leur contradiction. La Solanée, qu'on appelle Douce-Amère, évoque les contrastes qui amènent l'unité.

Comme la plante Douce-Amère, telle est la vie. Les joies et les souffrances alternent et se juxtaposent ; le plaisir et la douleur se succèdent. Les contrastes se complètent et s'unissent de façon souvent harmonieuse, toujours inextricable. En quoi se différencient encore l'esprit et la matière ?


Cette plante abonde dans les lieux humides. Elle s'enchevêtre dans les branches des saules, se cramponne aux roseaux des marécages et grimpe dans les haies du jardin potager. De racine petite et fibreuse s'élèvent à la hauteur de un à deux mètres des sarments grêles, fragiles, qui cherchent soutien auprès des arbrisseaux des alentours. Les jeunes rameaux ont l'écorce verte, celle des vieux et celle du tronc est sèche extérieurement, mais à l'intérieur d'un beau vert. La moelle est cassante et fongeuse. Les feuilles alternent, elles sont oblongues, pointues, lisses, vert-foncé. les fleurs violettes sont réunies en grappes pendantes. Le fruit est une baie rouge de saveur vineuse.

Le dulcamarin, la substance qui est d'abord amère, puis douce, est une glucosine transformable par le ferment salivaire. A hautes doses, la plante produit des effets narcotiques. Elle est un dépuratif ; on se sert des tiges contre les catarrhes pulmonaires et les douleurs rhumastismales chroniques. Les baies ont une réputation sudorifique. La douce-amère, qui compte parmi les plantes vénéneuses a, entre autres, trouvé emploi pour guérir la goutte, la jaunisse et l'hydropisie.

 

Selon Elena Ciobanu, Cătălina Croitoru, Gheorghe Ostrofeţ, Ala David et al. auteurs d'un cours magistral intitulé Fondements de l'hygiène alimentaire (Chișinău • 2018) :


La morelle douce-amère est un arbuste à fleurs violettes et se rencontre partout : au bord des rivières, des lacs, des marais. Les fruits ont la forme de baies ovales, de couleur rouge. À savoir, ils causent des empoisonnements graves, en se manifestant par la dyspnée, la tachycardie, la diarrhée.

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Vertus médicinales :


Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Morelle douce-amère :


Propriétés Physiques. ― Les tiges dont se sert en médecine doivent avoir un an au moins ; on les recueille au printemps ; elles sont alors demi-ligneuses ; on les conserve en petits morceaux fendus longitudinalement. Elles ont à l'état frais une odeur forte, désagréable, repoussante ; sèches elles sont presque inodores. Leur saveur est d'abord amère, puis douceâtre et sucrée. Ces propriétés sont aussi celles des sommités et des feuilles. Cette plante contient des sels à base de chaux et de potasse, une matière douce et sucrée (Pycroglycion de Pfaff) et un alcali pulvérulent, d'un blanc brillant, micacé (Solanine rencontrée par MM. Legrip et O. Henry). Les fruits sont légèrement sucrés au goût, âcres, acerbes et d'une amertume assez persistante ; ils contiennent de l'eau, de l'albumine, du sucre, de la gomme, de la résine, de la solanine, des acides et des sels.


Action Physiologique. La douce-amère jouit de propriétés faiblement narcotiques ; elle augmente les secrétions rénale et cutanée. A plus haute dose, elle produit des nausées et des vomissements, puis de l'abattement, des vertiges et des mouvements convulsifs musculaires . Tous ces symptômes se dissipent sous l'action des stimulants. Les baies paraissent inoffensives (Dubois).


Usages Médicaux.  La douce-amère a été prescrite autrefois dans un très grand nombre d'affections ; comme diurétique dans le traitement de l'hydropisie (Dioscoride) ; comme sédative dans la pleurésie et la péripneumonie ; pour ses propriétés narcotiques dans la phtisie, l'asthme et la coqueluche. On l'a recommandée aussi dans la goutte et le rhumatisme. Aujourd'hui elle est principalement usitée pour son action dépurative et prescrite dans le traitement des affections cutanées, surtout de celles qui présentent un caractère écailleux, lépre, psoriasis, pytiriasis, ichthyose (Guersant, Fages, tonneau). Contre ces maladies et aussi contre le prurigo, elle fait le mieux sentir ses bons effets lorsqu'on l'associe aux antimoniaux ; peut-être a-t-elle dans ces cas une influence sédative sur la circulation capillaire. D'après Bretonneau, les tiges de douce-amère constituent le dépuratif le moins infidèle ; on doit commencer, dit cet auteur, par une faible dose et l'élever jusqu'à ce que le malade commence à éprouver des troubles du côté de la vue et des vertiges ; on maintient longtemps le malade sous l'action du médicament. On prépare avec cette plante une pâte pectorale (Pichon, Duval) qui est recommandée dans l'angine tonsillaire, la pharyngite et la stomatite ulcéreuse, l'aphonie et les affections syphilitiques de la gorge et du palais. La décoction convient particulièrement comme complément du traitement mercuriel pour prévenir l'invasion des accidents secondaires. Nous traiterons de la solanine à l'article suivant.


Formes et doses. Infusion ou décoction des tiges, 8 à 30 grammes par kilogramme d'eau. - Poudre, 2 à 8 grammes. - Extrait, 50 centigrammes à 10 grammes et plus. - Sirop.

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Usages traditionnels :


Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


La douce-amère, [...] plante qui jouit d'une vogue variable selon les pays, [est utilisée] comme ayant des propriétés dépuratives.

 

Victoria Hammiche, Rachida Merad, et Mohamed Azzouz, auteurs de Plantes toxiques à usage médicinal du pourtour méditerranéen. (Paris : Springer, 2013) rapportent les usages suivants de la morelle douce-amère :


La plante reste utilisée au Maghreb. La tige feuillée était utilisée comme dépuratif au changement de saison, surtout, au printemps ; les baies sont employées comme aphrodisiaques, diurétiques, sudorifiques, laxatives, antirhumatismales. Des extraits de la plante ont la réputation d'être antitumoraux et antisyphilitiques.


Utilisations thérapeutiques : La tige, qui a figure à la pharmacopée française jusqu'en 1949, a été utilisée comme laxatif, diurétique, dépuratif et pour traiter certaines dermatoses comme Ie psoriasis et l'eczéma chronique. Un extrait alcoolique de Solanum dulcamara a montré des propriétés inhibitrices vis-à-vis du sarcome chez la souris ; ceci est attribue à la bêta-solamarine.

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Symbolisme :


Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme de la morelle douce-amère :


MORELLE DOUCE-AMÈRE - VÉRITÉ.

Les anciens pensaient que la Vérité était mère de la Vertu, fille du Temps et reine du monde. Nous disons, nous, que cette divinité se cache au fond d'un puits, qu'elle mêle toujours quelque amertume à ses bienfaits, et nous lui donnons pour emblème une plante inutile, qui, comme elle, aime l'ombre et reverdit sans cesse. La Morelle douce-amère est, je crois, la seule plante de nos climats qui perde et reproduise ses feuilles deux fois dans la même année.

 

Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :


Morelle douce-amère - Vérité.

Parce que la vérité est souvent, quoique toujours utile, dure à entendre.

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Dans son Traité du langage symbolique, emblématique et religieux des Fleurs (Paris, 1855), l'abbé Casimir Magnat propose une version catholique des équivalences symboliques entre plantes et sentiments :


MORELLE DOUCE-AMÈRE — VÉRITÉ.

Soyez ennemis du mensonge : ne parlez jamais aux hommes que le langage de la vérité. Que la vérité soit la ceinture de vos reins.

Ephésiens : IV 25 - VI, 14.

La morelle douce-amère est un arbrisseau sarmenteux dont les fleurs violettes et disposées en cimes se succèdent pendant une partie de l'été, et produisent un effet très agréable par l'élégance de leurs bouquets au milieu des haies, des buissons et sur le bord des bois. Elle demande une terre un peu fraîche ; on la multiplie par ses nombreux rejetons.

RÉFLEXIONS.

Qu'est-ce que connaître la vérité ? Homme, c'est d'abord te connaitre toi-même, t'appliquer à être ce que tu dois être et à corriger ce qui en toi a besoin d'être réformé ; ensuite c'est connaitre et aimer ton créateur : car par là seulement tu peux arriver au bonheur qui est ta destination.

(SAINT AUGUSTIN, Man.)

La vérité est une reine qui a dans le ciel son trône éternel, et le siège de son empire dans le sein de Dieu ... Elle nous découvre tout ce qui est beau, et elle est elle-même le plus beau de tous les objets qu'elle nous découvre.

(BOSSUET, Méditations.)

Quoi qu'il n'y ait rien de si naturel à l'homme que d'aimer et de connaitre la vérité, il n'y a rien qu'il aime moins et qu'il cherche moins à connaitre.

(FLÉCHIER, Oraisons funèbres.)

 

Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Morelle, Douce- Amère - Vérité.

Les feuilles de la morelle sont douces et amères en même temps ; il en est ainsi de la vérité qui est pénible à entendre, mais qui nous rend meilleurs.

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Dans Physionomies végétales, Portraits d'arbres et de fleurs, d'herbes et de mousses (In : La Société Nouvelle, avril-mai-juin 1914 ; Éditions Héros-Limite, 2012) Jacques Lefrêne (pseudonyme d'Elie Reclus) relie la Douce-Amère à l'amour :


[...] Il est impossible d'aimer sans mélange. Aussitôt qu'on a dépassé la naïveté de la passion, il n'est plus possible de prendre parti. L'égoïsme est bon, le dévouement est mauvais. le mal n'est qu'une forme inférieure du bien ; autrement dir, c'est le bien qui forme le mal. Chaque sentiment évoque son antithèse, et par les contrastes seulement, nous pouvons nous créer une opinion quelconque.

On ne peut aimer jusqu'au bout, on est incapable d'aimer entièrement. toujours on trouve un revers à toute médaille. Au début d'une amitié, à l'éclosion d'n amour, dans le ravissement de tant de lumière - à si beau jour, à si belle aurore - je demande : quel ennui, quelle tristesse, quelle vulgarité m'apportera le jour ? On ne peut pas aimer Bouddha, ni Confucius, ni Lao-Tse, ni Meng-Tse, sans mélange - ni un peuple, ni une civilisation. J'ai aimé les Grecs tendrement, jusqu'au jour où j'ai découvert ce qu'ils avisèrent à Megare. Là ils coupèrent les pouces à tous leurs prisonniers. Même, ils firent mourir un citoyen pour le seul motif qu'il avait tué quelques passereaux nichés dans le temple d'Esculape. J'ai admiré les Spartiates ; mais ce ne sont que d'affreux soudards, qui massacraient les ilotes. J'ai admiré les Parsis, mais chez eux fleurit le despotisme. je me trouve obligé de haïr tous ce que j'aime, de mépriser tout ce que j'admire.

L'amour est la concentration de la douceur et de l'amertume. Vous rappelez-vous dans Faust la double scène d'amour ? Vont et viennent dans les allées du jardin fleuri le beau Faust et la belle Marguerite, Méphisto et Marthe, l'impudique créature. Vont et viennent, Faust, costumé de vert et de blanc, Marguerite, à robe blanche et bleue, puis Marthe, jaune et noire, Méphisto, grande chauve-souris, noire et vermillonne. Vont et viennent les deux couples ; ici l'extase de la tendresse, là la gaillardise de l'impudicité. Là il roucoule, là il ricane. Et paillardises alternent avec transports d'amour, chastes baisers d'amour naissant sont suivis des attouchements impudiques d'un diable avec une vieille coquine. Tout ça se joue sur le même air ; la même mélodie exprime les douceurs et les malpropretés, le même clair de lune, le même parfum des œillets et des cytises, des iris et des tubéreuses sont chargés ici de volupté, allument ici de tendres flammes, là des feux impurs. Ce n'est qu'une différence de degré.

Faust et Marguerite sont des papillons d'amour. Marthe et Méphisto sont des chauve-souris d'impudicité.

Un dualisme semblable est exprimé par ce duo dans les opéras italiens : l'un bénit, l'autre maudit ; l'un hurle, l'autre roucoule, l'un et l'autre sur le même air, à la même mesure, avec accompagnement du même orchestre.

Dans La Favorite, on frémit de plaisir et d'effroi. C'est partout et toujours la même identité des contraires que la philosophie de Hegel a érigée en principe.

Le savoir est de l'eau-de-vie et l'ignorance est de l'eau fraîche. La sagesse semble inutile et pour certains spéculateurs elle devient meme nuisible. En fait de science matérielle et mathématiques, on ne sait jamais assez, mais en fait de science morale et de sentiment, mieux vaut l'ignorance.


Sapho décrit l'amour comme un monstre charmant, doux et amer. Elle raconte qu'à la vue de la beauté, le corps est saisi d'une sensation douloureuse, la langue se colle au palais, l'œil s'obscurcit, une sueur froide couvre nos membres qui tremblent et frissonnent. Comme Sapho, Socrate relève aussi l'union constante du plaisir et de la douleur. « A lui la gloire ! », s'écrie Léonore. « A moi la douleur ! » Et la douleur, c'est la joie. L'un vaut l'autre. Tant pis pour qui tire un mauvais lot. Les affirmations qualitatives sont toujours identiques l'une à l'autre, ce que Kant a exprimé par la formule : « A vaut A » ; mais à cette formule, Hegel a ajouté : « A ne vaut pas B ». Les conceptions quantitatives ne peuvent être comparées aux conceptions qualitatives. Mais l'ombre et la lumière, qui forment une antithèse quantitative, sont inséparables. On ne se représente pas l'une sans l'autre.

La même image s'adapte à la paralysie, précédée d'une exaltation de faculté et d'un sentiment d'orgueil.

Et en quoi donc l'orgueil diffère-t-elle de la vanité, la dignité de l'orgueil, et la vertu du vice, du vice qui est le rebours ou l'exagération d'une qualité ?

Combien faut-il de tristesse et d'endurance pour faire ce qu'on appelle le bon sens ? Comme la vie humaine est triste et stupide, mais en même temps sublime et intelligente ! Comme nous nous heurtons partout à la mélancolie des choses, si nous cherchons à approfondir nos sentiments et à pénétrer dans les causes occultes qui font agir, qui font vivre !

La raison d'être de l'Etat, c'est la liberté et l'indépendance de l'individu. Mais on aboutit au despotisme, à l'abnégation de l'individu.

Le Touran n'est pas si haïssable. L'Iran n'est pas si admirable. La douce-amère, tel est le nom qu'on devrait donner à a vie, car cette plante la représente tout entière.

On est heureux comme on a bonne santé, sans s'en douter. Et quand on tombe dans l'affliction, on s'aperçoit tout à coup qu'on était heureux quand on n'en savait rien !

Et l'on est porté à croire que l'homme qui pourrait s'élever jusqu'à la sublimité de la Nature, éprouverait la douleur comme une espèce de volupté.

Le plus beau spectacle du monde, disaient les Stoïques, est le juste en proie à l'adversité. La joie suprême pour l'homme qui connaissant la vie s'y est résigné, et qui a fait mieux, qui la comprenant, la pratique suivant ses lois, serait de passer volontairement par l'alternative de joies et de douleurs, se procurant lui-même la souffrance, si elle était trop longue à venir.

Le héros souffre, le héros est supplicié, le héros est martyrisé, et sa jouissance admirable est dans la conscience qu'il domine l'adversité. Le héros est un travailleur moral.


Dès que la science reparaît en Europe, le mieux doué, le plus intuitif des philosophes, Abélard, qui, au fond, était un moderne fourvoyé dans la scolastique, donne le Sic et Non comme le résumé de la science.

La douce-amère, c'est Proserpine, c'est Vénus Libitina, charmante et redoutable. De la fleur de cette Solanée part un effluve bleu, un effluve jaune. toute chose a un côté lumineux et un côté sombre. L'analyse de la tige si douce et pourtant si amère, suggère l'analyse de l'amour, si amer et pourtant si doux.

La proie fait la joie de la bête féroce. La douleur de la victime inférieure d'un mal supérieur à elle, forme une différenciation quantitative. Il y a un peu plus, un peu moins. D'octave en octave, les sons se succèdent. Christ et Mohammed, Bouddha et Djelaleddin Rumi ont prêché une sagesse qui n'est contradictoire qu'en apparence.

Bornés et limités comme nous le sommes, tous les extrêmes nous sont funestes. Nous ne pouvons supporter ni de grandes douleurs, ni de longues privations, et, même pour notre être physique, le mieux est l'ennemi du bien. La lumière qui nous vivifie est aussi celle qui nous brûle et nous consume. Le froid qui nous rafraîchit est aussi celui qui nous engourdit et nous paralyse.

Si grand qu'il paraisse, le monde solaire n'est qu'un point, comparé à l'immensité sidérale, tandis qu'un grain de poussière, si petit qu'il soit, est tout un monde inconnu.

Il suffit que l'action du milieu sur nous ne varie pas, pour que nous n'en ayons pas connaissance. L'air pèse sur nous d'un poids énorme sans que nous nous en doutions. Nous ne sentons pas la matière ; nous sentons ses variations.

Si notre main droite est maintenue quelque temps dans de l'eau très chaude, et la main gauche dans de l'eau très froide et que nous les plongions toutes les deux ensuite dans de l'eau tiède, cette eau nous paraîtra très froide à la main échaudée, très chaude à la main glacée.


Tout ce qui est doux devient amer et tout ce qui est amer devient doux. C'est la grande contradiction qui est dans les choses et fait le fond de la morale et de la vie. Celui-là qui veut aimer tous, doit se résigner à vivre seul. Celui-là qui veut aimer tous, doit se résigner à vivre seul. Celui-là qui veut concilier tous, sera contesté par tous, précisément parce qu'on ne comprend bien un individu, un caractère que lorsqu'on a démêlé les deux contraires dont il se compose.

Ce dualisme universel est exprimé par la Douce-Amère, qui a revêtu deux couleurs qui se haïssent : le violet et le jaune. C'est une dissonance chromatique et, en fait, une beauté, une harmonie supérieure.

Adonnez-vous, adonnez-vous aux premières joies de l'amour, aux délices de l'amitié.

On finit par découvrir toujours quelque tache au soleil, quelque défaut dans l'idéal, quelque mesquinerie dans le grand réformateur, quelque coquinerie dans le messie. On découvre une toute petite chose, une toute petite seulement... Seulement, cette toute petite chose, c'est ce qu'on ne peut pardonner.

J'aime le nomde la Douce-Amère, car il me fait rêver. Elle est ceci, elle est cela. J'aime la Douce-Amère, car elle me rappelle ceci, elle me rappelle cela. J'aime la Douce-Amère. Elle me dit de belles choses et je me souviens de beaucoup par les visions qu'elle évoque. Car cette fleur est ceci, elle est aussi cela.

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Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), la Morelle douce-amère (Solanum dulcamara) a les caractéristiques suivantes :


Genre : Masculin

Planète : Mercure

Élément : Air

Pouvoirs : Protection ; Guérison.


Un bouquet de douce-amère mis extérieurement à la fenêtre d'une fille indique symboliquement que son prétendu est un douceâtre, un mou pas bien malin.


Utilisation magique : Autrefois, on ligotait certains malades avec les sarments grimpants de douce-amère, puis on sommait le mal d'abandonner ce corps. Si le malade était trop atteint, il en mourait. Mais dans la plupart des cas.

Une recommandation toutefois : n'attendez pas un pouvoir transcendant des graines achetées chez le grainetier; elles sont parfaites pour vos canaris qui s'en régaleront, mais un stockage souvent assez long et généralement en contact avec d'autres produits leur a fait perdre en grande partie les émanations subtiles que, précisément, nous utilisons en magie. Recherchez les sommités fleuries quand elles montent en graines et récoltez-les fraîches. Cette herbe est très commune en France : lieux frais et humides, prairies, jardins, bords des chemins, etc.

Alors pourquoi mauvais œil ? Parce que, en filant ainsi le parfait amour sous la protection du Mouron, vous ferez de nombreux envieux ; et il n'est malheureusement pas impossible que l'un d'eux en pleine crise de jalousie fielleuse, tente de vous jeter un sort. Si cette fâcheuse éventualité, devait se produire, pratiquez immédiatement un contre-envoûtement au chardon béni ou au chardon Marie.

 

Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :


Un rameau de morelle douce-amère suspendu au cou prévient les insolations, et les feuilles de la plante, placées dans un oreiller, dissipent un chagrin d'amour et aident à retrouver le sommeil.

Une ancienne tradition voulait qu'on attache un malade avec des sarments de douce-amère en ordonnant au mal de s'en aller : "Si le malade était trop atteint, il en mourait. Mais dans la plupart des cas, croyait-on, le mal était bel et bien expulsé, parfois avec pertes et fracas, et il ne restait plus qu'à donner un cordial au patient pour le voir se lever en réclamant une bonne soupe au lard".

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Mythes et légendes :


D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),


SOLANUM. — Il donne un sommeil irrésistible. « Cum Sueno Norvegorum rex (Johnston, Thaumatographia Naturalis, Amstelodami, 1670, p. 227) Duncanum regem Scotiae in oppido Bettha obsideret, evocato hic Maccabaeo consobrino, clanculum de deditione agere coepit, commeatu promisso. Hector Boet. 22. Scot. Hist. : Receperunt conditionem Dani, et una commeatum ; quem cum dégustassent, tum alto oppressi sunt sopore (solano enim vinum et cerevisia infecta erant), ut a Maccabeo opprimerentur. Decem, dona hostium suspecta habentes, sobrii fuere ; qui etiam regem Suenonem veluti exanimem, piscaria scapha, ad Thai detulere ostia, inde domum. »




Littérature :


Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque ainsi la douce-amère :

21 juin

(Fontaine-la-Verte)

Douce-amère : légende hawaïenne

Vols de colibris violet et jaune

Figés en grappes de corail de feu

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