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Le Frêne


Étymologie :


  • FRÊNE, subst. masc.

Étymol. et Hist. Ca 1100 nom d'un arbre et du bois de cet arbre (Roland, éd. J. Bédier, 2537 : hanstes de fraisne). Du lat. imp. fraxinus « frêne ».


Lire aussi la définition du nom pour amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Fraxinus excelsior - Arbre à regrets - Aréchou - Cantaridier - Frâgne - Fraisse - Fréchô - Frêne à feuilles aiguës - Frexo - Grand frêne - Hracho - Langue d'oiseau - Quinquina d'Europe - Oyarde - Rèche - Tantaliké -

Fraxinus americana - Franc frêne - Frêne blanc - Frêne d'Amérique -




Toponymie et patronymie :


Koni Häne et Michèle Kaennel Dobbertin, auteurs de "Le frêne, arbre aux mille vertus." (in : La Forêt, 2006, vol. 59, no 9, pp. 20-21) rapportent quelques noms issus du Frêne :


De nombreux noms de lieux témoignent de la présence de cet arbre, notamment en allemand :

- Eschenz, Eschental ou Eschenbach.

En France et en Suisse romande, les toponymes sont en général dérivés de la racine latine fraxinus ou du vieux français fraisse, frasse :

- Franoz, Fragnolet, Fregnolay, Fresnoy, Le Fraysse, Fraissinet, Freney, Frenière, Franière, Fragnire.

Dans le Nord et l’Est de la France, la racine germanique asch a ainsi donné

- Villeneuve d’Ascq, Eschbach, Achevilleb, ou encore Esch-sur-Alzette au Luxembourg…

Certaines familles bien connues en Suisse doivent leur nom au frêne. C’est le cas des Defresnoz, Dufresne, Dufrasne, Dufraisne et aussi des Esch, Escher, Eschenbach, Eschenmoser, Aschmann…

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Botanique :


Selon Koni Häne et Michèle Kaennel Dobbertin, auteurs de "Le frêne, arbre aux mille vertus." (in : La Forêt, 2006, vol. 59, no 9, pp. 20-21) :


Ses abondantes régénérations naturelles, son fort potentiel de croissance et la qualité de son bois font du frêne une essence importante en forêt de feuillus. En écologie, il est aussi, et à plus d’un titre, remarquable. Il accueille en effet de nombreuses espèces d’insectes et d’oiseaux et parfois de mammifères. Une cinquantaine d’espèces appartenant à tous les grands groupes d’insectes le fréquentent, parmi lesquels 17 lui sont exclusivement inféodés. Les samares mûres sont très appréciées des oiseaux granivores mais aussi des écureuils, qui en font une grande consommation. Les rameaux et les bourgeons des jeunes frênes font le régal de la faune, ce qui n’est pas toujours pour réjouir les forestiers! En automne, les feuilles tombent encore vertes et se décomposent très rapidement, produisant une litière riche en éléments minéraux.

Grâce à son réseau racinaire étendu et dense, le frêne contribue à la stabilisation de pentes menacées par des mouvements de terrain et tout particulièrement à celle des berges de torrents et rivières

 

Dans La Magie des Plantes, Douze mois avec la Sagesse des Plantes (Édition originale, 2017 ; Éditions Danaé, 2017), Sarah Kynes en propose la description suivante :


Le frêne commun peut atteindre 25 à 40 mètres de haut, et le frêne blanc 15 à 30 mètres.


Ils ont un tronc gris très droit et une couronne de feuillage dense. Le nom du frêne vient de la couleur claire de son écorce. Chaque tige de feuilles soutient neuf à treize folioles lancéolées et légèrement dentelées. Leurs petites fleurs jaune-vert produisent des grappes de graines qui restent sur l'arbre jusqu'au printemps, quand elles sont emportées par le vent. Aussi appelées samares, ces graines plates sont ovales et droites, au contraire des graines d'érable, qui sont courbes.

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Utilisations traditionnelles :


Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


Les feuilles de frêne jouissent encore d'une certaine réputation [en tant que diurétique].

[...]

Les femmes combattent l'embonpoint avec la tisane des feuilles de frêne, avec la prêle des bois, Equisetum sylvaticum. L'effet en est peu appréciable ; aussi les filles de la campagne qui viennent servir en ville et dont un travail moins pénible et une nourriture meilleure et plus abondante développent le système adipeux, préfèrent-elles prendre matin et soir une cuillerée de vinaigre. Le résultat est fâcheux quand le vinaigre est de vin ; mais quand c'est l'acide pyroligineux que l'on vend couramment comme vinaigre, les conséquences de son absorption sont déplorables.

[...]

Dans beaucoup de maisons en montagne on conserve avec soin de petites planchettes en bois de frêne, de 15 à 20 centimètres de longueur, pour les appliquer bien chaudes sur les névralgies intercostales, les points pleurétiques.

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Koni Häne et Michèle Kaennel Dobbertin, auteurs de "Le frêne, arbre aux mille vertus." (in : La Forêt, 2006, vol. 59, no 9, pp. 20-21) nous rapportent des usages ancestraux liés au Frêne :


Dans le frêne, tout est bon. Dès le Mésolithique récent, son feuillage fut utilisé en tant que fourrage. Les feuilles étaient séchées puis engrangées pour l’hiver. Dans certaines vallées reculées de Suisse, des frênes destinés il y a encore quelques décennies à l’alimentation du bétail sont reconnaissables à leur taille en têtard pratiquée pour augmenter la production de feuillage. Très dur et élastique, le bois de frêne compte parmi les plus solides et les plus résistants à la flexion et aux chocs. La duraminisation commence lorsque l’arbre atteint 70 ans. Par ce processus plus ou moins fréquent selon les conditions des stations, l’aubier brun-jaune se transforme progressivement en duramen brun à brun foncé, une couleur qui ne correspond pas à la mode actuelle du bois clair.

Ses nombreuses qualités technologiques font du bois de frêne un produit très recherché. Il est très résistant, se rétracte peu et se prête bien au façonnage manuel ou mécanique. En aménagement intérieur, le bois de frêne à duramen clair est très demandé pour la production de parquets, de meubles, de marches ou de rampes d’escalier. Son élasticité est mise à profit dans la fabrication d’articles de sport : skis, luges, barres parallèles, avirons, javelots et arcs. Bien qu’il n’ait plus la même importance qu’à l’époque des charrons et des tourneurs sur bois, il est toujours très apprécié pour la confection de manches d’outils. L’usine de production de manches d’outils de Fischbach-Göslikon (Argovie), qui fut de son temps la plus importante de Suisse, utilisait chaque année environ 15 000 m3 de bois de frêne.

Amère et astringente, l’écorce des jeunes rameaux fut pendant longtemps utilisée en qualité de fébrifuge, ce qui valut au frêne le surnom de « quinquina d’Europe ». Reconnu comme anti-goutteux et anti-rhumatismal, le frêne est aussi appelé et à juste titre « l’arbre des centenaires ».

Mises à macérer dans de l’eau sucrée additionnée selon les recettes d’écorce d’orange, de houblon ou de chicorée, les feuilles de frêne produisent une boisson tonique, dépurative et rafraîchissante appelée frênette, cidre du pauvre, champagne de forêt, ou boisson des moissons. Dans certaines régions de France, ce soda primitif s’inscrit dans une tradition très ancienne.

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Symbolisme :


Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme du frêne :


FRÊNE - GRANDEUR.

Dans l’Edda, la cour des dieux se tient sous un frêne miraculeux, qui couvre de ses branches toute la surface du monde ; le sommet de cet arbre touche aux cieux, ses racines aux enfers. De ses racines coulent deux fontaines : dans l'une, la sagesse est cachée, dans l'autre on trouve la science des choses à venir.

 

Dans son Traité du langage symbolique, emblématique et religieux des Fleurs (Paris, 1855), l'abbé Casimir Magnat propose une version catholique des équivalences symboliques entre plantes et sentiments :


FRÊNE ÉLEVÉ - GRANDEUR.

Dieu n'a égard à la grandeur de personne, car il a fait également les grands et les petits, et il a également soin de tous, mais les grands sont menacés des supplices les plus grands.

Sagesse VI, 8, 9. -

Le frêne est un grand et bel arbre qui croit naturellement dans les forêts de l'Europe et qui fleurit en avril, un peu avant le développe ment des feuilles. Son tronc est droit , bien proportionné dans sa grandeur, terminé par une cime assez élégante quoique un peu lâche et médiocre ; il ne craint ni l'ombre ni le voisinage des autres arbres au-dessus desquels il s'élève assez ordinairement. Son écorce est unie et cendrée, ses bourgeons noirâtres. Ses jeunes rameaux contiennent une moëlle très abondante. Cet arbre croît avec beaucoup de rapidité ; on peut en former de beaux massifs et de superbes avenues dans les lieux humides, mais il ne faut pas le planter trop près des habitations, car il attire les cantharides. Son bois est ferme, souple, élastique, d'un blanc mêlé de jaune et prend un beau poli. On l'emploie au charronnage et dans les constructions : on en fait des moyeux, des rayons de roues, des pièces de charpente, des solives, des planches, des tables, des brancards, des chaises, etc. Il est fort recherché par les tourneurs, les ébénistes et les armuriers. D'après Ovide et Claudien, on en faisait au commence vient des piques, des lances qui servaient dans les combats. Miller prévient qu'il faut se méfier des ravages du frêne, aucun arbre n'étant plus nuisible aux autres végétaux que celui-là. Partout où s'étendent ses racines, tout périt ou languit. Prairies, moissons, arbustes, vergers, tout se ressent du frêne : c'est un voisin puissant qui veut vivre dans l'aisance et qui s'inquiète peu de ce que les autres souffrent pourvu que rien ne lui manque.

Il est dit dans l'antique Edda, que les dieux tiennent leur cour sous l'ombrage d'un frêne mystérieux dont les branches couvrent l'univers. Sa tête est dans le ciel, et dans l'enfer sont ses racines dont coulent deux fontaines : l'une est celle de la sagesse, l'autre celle de la science des choses de l'avenir.


RÉFLEXIONS.

Le mépris pour les grandeurs de ce monde est la mesure de la véritable grandeur de l'homme.

(OXENSTIERN.)

Il est vraiment grand celui qui est petit à ses yeux , et pour qui le comble des honneurs n'est que néant.

(L’Imitation de J.-C., 1, 3.)

Aspirons à la véritable grandeur, elle ne se trouve qu'en s'abaissant sur la terre. Dieu confond le superbe dès cette vie ; il lui attire l'envie, la critique et la calomnie, il lui cause mille traverses et enfin il l'humilie éternellement. (FÉNELON, Méditations.)

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D'après le Dictionnaire des symboles (1ère édition, 1969 ; édition revue et corrigée, Robert Laffont, 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,


"Chez les Grecs de l'époque d'Hésiode, le frêne est un symbole de solidité puissante. Dans le fameux mythe des races, c'est le frêne qui engendre la race de bronze, bien différente de la race d'argent, filles des frênes, terrible et puissante. Le frêne, bois dont on faisait les hampes de lance, désigne aussi la lance elle-même.

Dans les traditions scandinaves, il est un symbole d'immortalité et de lien entre les trois niveaux du cosmos. Un poème scandinave le décrit :


Cet arbre sagement édifié qui plonge jusqu'au sein de la terre...

Je sais qu'il existe un frêne qu'on appelle Yggdrasil.

La cime de l'arbre est baignée dans de blanches vapeurs d'eau. De là découlent des gouttes de rosée qui tombent dans la vallée

Il se dresse éternellement vert au-dessus de la fontaine d'Urd.


Il est le géant, dieu de la fécondité :

Yggdrasil tremble,

Le frêne érecte,

Gémit le vieux tronc,

Et le géant se délivre ;

Tous frémissent

sur les chemins d'enfer...

(traduction de Régis Boyer)


Pour les peuples germaniques, le frêne Yggdrasil est l'arbre du monde : l'univers se déploie à l'ombre de ses branches, d'innombrables animaux s'y abritent, tous les êtres en dérivent. Il est toujours vert, car il puise une force toujours vive et renaissante à la fontaine d'Urd. Il vit de cette eau et en fait vivre l'univers. La fontaine est gardée par une des Nornes, qui sont les maîtresses du destin.

Le frêne enfonce ses trois principales racines, l'une dans la fontaine d'Urd ; l'autre dans le pays des glaces, Niflheim, pour atteindre la fontaine Hvergelmir, origine des eaux qui s'écoulent dans tous les fleuves du monde ; la troisième dans le pays des Géants où chante la Sagesse, Mimir. Les dieux germaniques se rassemblent au pied d'Yggdrasil comme les dieux grecs au sommet de l'Olympe, pour rendre la justice. Lors des grands bouleversements cosmiques, où un univers s'anéantit et cède la place à un tout autre univers, Yggdrasil reste immobile, debout, invincible. Ni les flammes, ni les glaces, ni les ténèbres ne l'ébranlent. Il sert de refuge à eux qui, ayant échappé aux désastres, repeupleront la terre. Il est le symbole de la pérennité de la vie, que rien ne peut détruire.

Dans les anciennes républiques baltes, frêne se dit d'un homme étourdi ou niais : car il est considéré comme aveugle. Il ne sait pas quand vient le printemps et reste très longtemps dénudé. Puis, à l'automne, craignant à nouveau de paraître ridicule, il se débarrasse de toutes ses feuilles d'un seul coup, et le premier (Latvi esu Tautas paskas un teikas, Riga, 1925-1937).

Le frêne est censé mettre en fuite les serpents : il exercerait sur eux une sorte de pouvoir magique, de telle sorte que si un serpent avait à choisir entre passer par les branches d'un frêne ou pas les flammes d'un foyer, il choisirait le chemin de ces dernières. Pline et Dioscoride signalent ces particularités, ajoutant qu'une tisane de feuilles de frêne mélangée au vin est d'une grande efficacité contre la puissance du venin. En Grande Kabylie, comme dans l'Europe nordique, nous retrouvons le frêne comme symbole de fécondité. Le frêne taslent est l"arbre de la femme par excellence, elle doit l'escalader pour couper les feuilles nécessaires à la nourriture des bœufs et des vaches ; c'est au frêne que doivent être suspendues certaines amulettes, tout particulièrement celles qui font battre le cœur des hommes. Premier arbre de la création, il n'est cependant que le second pour son utilité, venant tout de suite après l'olivier. Mais ce frêne fourrager n'est pas rassurant en tout point ; il est menaçant, comme tout ce qui comporte des pouvoirs magiques. Si un homme plante un frêne, il perdra un mâle de sa famille, ou sa femme ne mettra au monde que des enfants mort-nés ; tout ce qui est fécondité et vie est aussi, par compensation, un risque de prélèvement de vie et de fécondité."

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Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), le Frêne a les caractéristiques suivantes :


« Quand le Frâgne boute, l'ivér est oute. »


L'espèce la plus connue en France est le Frêne élevé (Fraxinus excelsior). Toutefois les magiciens européens se sont servis plutôt des Frênes à fleurs des régions méditerranéennes, dit Frênes à la manne ; tels sont les Fraxinus ornus et Fraxinus rotundifolia.


Genre : Masculin

Planète : Soleil

Élément : Feu

Divinité : Odin (Wuotan) et ses trois femmes : lord, la terre inhabitée ; Frigg, la terre cultivée ; et Ring, la terre engourdie par l'hiver.

Pouvoirs : Protection ; Santé ; Rites marins ; Victoire à la guerre.


Le Frêne élevé occupe une grande place dans les légendes et croyances des anciens peuples établis sur les bords de la Baltique. Sa symbolique se rattache donc essentiellement aux mythologies germaniques et scandinaves. À mesure qu'on descend vers le sud, cet arbre perd sa suprématie. En Afrique du Nord, il a une réputation très Inférieure à celle du chêne. Voici ce qu'en disent les Kabyles : « C'en est fait des hommes qui guidaient les tribus; tout ce qui était intelligent est mort. Le zen [chêne] et le Frêne sont devenus égaux. Malheur 1 Prenez le deuil, ô mâts des navires [qui sont en chêne]. Ils disent aujourd'hui que les intestins et la bonne viande sont des parties égales. »

Pour les Allemands aussi, malgré le rôle cosmogonique dévolu au grand Excelsior dans les traditions de l'ancienne Germanie, le Frêne a souvent une signification sinistre. L'Askafroa n'était pas bienveillante ; elle pouvait faire beaucoup de mal, et on la fléchissait par un sacrifice fait le mercredi des Cendres (aschermittwoch), jour sinistre et funéraire. C'est la raison, sans doute, pour laquelle les rites de magie blanche font appel aux Frênes à la manne, laissant à la magie noire le Frêne élevé. Depuis très longtemps, les Scandinaves et les Anglo-Saxons sont pratiquement les seuls à attacher à cet arbre des vertus bénéfiques.

Utilisation rituelle : Pour les anciens Teutons, Cimbres, Goths, Sicambres, etc., le grand Frêne excelsior était l'arbre sacré par excellence : il représentait les piliers du ciel. Ils pensaient en effet qu'un Frêne géant, nommé Ygdrasill, soutenait le toit du monde. Là-bas, au fond des forêts de Germanie, ou sur les côtes battues par les tempêtes de la Frise, c'était sous des Frênes que les prêtres-sorciers accomplissaient les sacrifices humains dont les dieux du Nord sont gloutons..


Utilisation magique : La situation s'est modifiée au Moyen Age lorsque les magiciens du nord de l'Europe purent se procurer les ingrédients tirés des Frênes à la manne. Ceux-là poussent à Malte, en Crète et sur tout le littoral d'Afrique du Nord. Des incisions faites sur leurs tiges laissent échapper la manne, suc visqueux renfermant des huiles, essences et résines extrêmement intéressantes. On distingue en magie la manne en larmes, recueillie en juillet-août, et la manne en sorte, recueillie pendant les mois pluvieux et moins chauds d'octobre et novembre. L'une n'est pas plus recherchée que l'autre. Leurs utilisations sont simplement différentes.

Pour tous les rites liés à la santé, aux guérisons, à la protection, c'est la manne en sorte qui est employée. Tout herboriste en comprendra aussitôt la raison : nous sommes à la sève descendante ; l'arbre se prépare au repos hivernal; ses sucs vitaux retournent lentement vers les racines et la terre après s'être chargés pendant tout l'été en énergies telluriques et solaires.

Pour les rites liés à l'action, à l'emprise sur l'environnement, à la possession et au contrôle de choses matérielles, c'est bien sûr à la manne en larmes qu'on a recours : la terre bande ses énergies, craque, explose, le mouvement se fait cette fois-ci de bas en haut, comme si les forces puissantes mais aveugles de la densité voulaient s'élancer à l'assaut du Cosmos...

Ces résines sont soit brûlées comme encens, soit dissoutes dans des onguents, soit portées directement comme talisman. Un onguent destiné à un usage bien précis est composé de manne en larmes, mêlée à des essences de vanille, d'œillet, de musc, le tout finement incorporé à de la pulpe d'avocat ou de sagoutier (arbre à pain). Travaillez au mortier jusqu'à obtenir une crème lisse. Vous préparerez cela un mardi. Le fin du fin est d'ajouter à cette pâte trois ou quatre fourmis rouges carnassières. Travaillez, lissez. Le jour J, passez-vous un peu de cette pommade sur les reins, le tour de taille, l'intérieur des cuisses. Revêtez votre plus belle et plus soyeuse robe de chambre, allumez des bâtonnets d'encens, mettez une musique qui vous inspire, et attendez l'heureuse élue. L'homme qui s'est ainsi préparé pour recevoir sa dame doit être prêt à tout !

Mais le bois et les feuilles du vieil Excelsior des brumes du Nord ne sont pas dédaignés pour autant : sculptez une pièce de bois de Frêne en forme de croix aux branches égales. Portez-la comme protection contre la noyade lorsque vous êtes au bord de la mer. Dans les rituels marins, une croix identique représente le pouvoir des eaux.

Des feuilles de Frêne placées sous l'oreiller favorisent les rêves prophétiques.

Ainsi que la plupart des arbres, le Frêne est protecteur. Un bâton taillé dans son bois et suspendu au-dessus de la porte vous gardera des influences malignes ; de même qu'un bracelet d'écorce porté sur soi était jadis supposé protéger contre les pouvoirs négatifs, les ensorcellements et les conjurations. Des feuilles peuvent également être dispersées aux quatre coins de la demeure pour la protéger, ou être placées dans des sachets protecteurs.

Les baguettes magiques spécialement destinées à restituer la santé sont souvent confectionnées en bois de Frêne; quelques feuilles placées dans un bol d'eau qu'on laissera toute la nuit auprès du lit garderont contre la maladie.

Si une personne ou un animal a été mordu par un serpent, confectionnez-lui un collier en branches de Frêne. Il agira. Avoir avec soi une trousse de secours ne fera cependant de mal à personne, pas plus que de conduire l'intéressé à l'hôpital lorsque l'accident est arrivé...

Ce charme, parfaitement authentique et efficace, agit sans doute parce que les serpents éprouvent une répulsion naturelle pour les lieux où poussent des Frênes. Quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, aucun reptile ne passera sous leur feuillage. Si vous brûlez du Frêne à Noël, vous aurez une surprise agréable avant le jour de l'An.

Si vous en brûlez à nouveau le soir de la Saint-Sylvestre, la prospérité vous visitera pendant l'année qui s'annonce. C'est en tout cas ce qu'affirme une croyance populaire norvégienne. Quoi qu'il en soit, profitez donc des soirées d'hiver pour sculpter des poupées, des statuettes, dans ses racines. La tâche ne sera pas aisée car le bois est excessivement dur -l'un des plus durs que l'on puisse trouver. Mais la récompense vous fera vite oublier le mal que vous vous serez donné : ces poupées agissent comme médiatrices entre votre foyer et les mondes supérieurs. Celles qui sont habillées en filles intercèdent pour vous auprès des déesses ; celles qui sont habillées en garçons sont vos fidèles commissionnaires auprès des dieux.

Dernière précaution : le Frêne élevé au nord de l'Europe est l'un des arbres qui attire le plus la foudre. Ne restez jamais sous ses branches pendant un orage

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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


Le frêne, symbole de solidité et de grandeur, fut dans le monde gréco-latin un arbre vénéré et bénéfique.. les grecs s'en servaient pour fabriquer les hampes des lances auxquelles ce bois était censé donner de la puissance en outre, le javelot d'Achille était en frêne, tout comme l'arc de Cupidon.

Dans la tradition scandinave, le frêne, particulièrement bénéfique, « est un symbole d'immortalité et de lien entre les trois niveaux de cosmos ».

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Arnaud d'Apremont auteur de B. A.- BA Tradition nordique, (Éditions Pardès, 2000), nous apprend que :


"Selon les textes eddiques, Yggdrasil est le plus grand et le meilleur des arbres. Il est le Cosmos vivant. Après qu'Ymir ait été démembré, le grand 'Tout' devient un nouvel être vivant, organique, et c'est Yggdrasill. Littéralement, e nom signifie "destrier du redoutable" (le "Redoutable", Ygg, étant un surnom d'Odin). On a donc, outre l'association homme-arbre/microcosme-macrocosme, une liaison arbre-cheval qui caractérise l'imprégnation chamanique de la tradition nordique. Nous aurons l'occasion de reparler de cette dimension chamanique d'Yggdrasil en évoquant le dieu Odin.

Yggdrasill est un élément - l'élément - de stabilité dans le monde. Sans arrêt, il est exposé aux agressions des forces de dissolution. Des serpents rongent ses racines en permanence. Au moment de Ragnarök, il "frémit de toute sa hauteur. il gémit le vieil arbre" (Völuspa, st. 47). Mais il ne rompt pas. "Fer ni feu ne l'entament" (Fjölvinnsmal, 14). Et finalement rien peut en venir à bout.

D'après les textes eddiques, Yggdrasill serait un frêne (comme le premier home Ask). Mais il existe d'autres versions du mythe nordique faisant de l'arbre du monde un if (notamment au Danemark ou en Suède) ou un chêne (notamment en Germanie continentale). Il est toutefois intéressant de noter qu'en vieux norrois, "if" se dit parfois barraskr, c'est-à-dire littéralement "frêne à aiguilles". Au demeurant, un professeur de l'université de Greiz (Allemagne). M. Kukowka, aurait découvert qu'en période de chaleur, l'if émettrait une toxine gazeuse tenace, émanation susceptible de provoquer des hallucinations chez un individu se trouvant en-dessous. On ne peut s'empêcher de songer à la relation entre Yggdrasil et les pratiques runico-divinatoires.

Yggdrasill est le pilier-axe de la cosmogonie nordique. Autour de celui-ci, les textes anciens disent que se répartissent, selon les versions, trois ou neuf (3 x 3) mondes. Les trois sont Asgard (le monde des dieux), Midgard (le monde du milieu, autrement dit, celui des hommes) et Utgard (littéralement, le monde extérieur, autrement dit, celui qui incorpore tous les êtres ou choses n'entrant pas dans les deux précédents)."

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Selon Didier Colin, auteur du Dictionnaire des symboles, des mythes et des légendes ( (Hachette Livre, 2000) :


"Cet arbre à la hauteur parfois vertigineuse fut un symbole de grandeur. Cela n'empêchait pas les hommes des temps jadis d'en couper les branches et les rameaux pour nourrir leurs chèvres, car elles en sont friandes et leurs vertus, dit-on, les immunisent contre toutes les maladies de ces animaux à la constitution fragile.

Les Celtes employaient du bois de frêne pour confectionner leurs javelots, leurs lances et leurs flèches. A l'instar des chamans indiens d'Amérique, les druides invoquaient le frêne pour faire venir la pluie durant les périodes de sécheresse. Mais c'est surtout dans la mythologie germanique et scandinave que cet arbre joue un rôle essentiel. Il est Yggdrasill, le cheval d'Odin, le père des dieux, le dieu des poètes, des morts, de la guerre, de la magie, de l'extase et des runes.Il est l'Arbre du Monde. Selon l'Edda, le récit mythique et poétique de la création et de l'histoire du monde des Germains, Yggdrasill, le Grand Frêne, est planté au centre du monde, qu'il domine et recouvre de ses branches gigantesques touchant et pénétrant le ciel. Il est pourvu de trois racines tout aussi fabuleuses. La première d'entre elles se trouve dans le monde des dieux. La seconde est dans le monde des géants de glace qui peuplèrent la Terre avant que l'homme n'apparaisse. La troisième plonge dans le Niflheimer, littéralement "le monde nébuleux", l'équivalent de l'Hadès des Grecs ou de l'Au-delà des Égyptiens. Mais au-dessous de cette troisième racine, prend naissance la source de toute vie, la source du Monde, Hvergemir, dont le nom signifie "le chaudron qui gronde", qui alimente toutes les sources, rivières et fleuves de la Terre. Ainsi, selon la légende mythique de l'Edda, le frêne est à l'origine de la vie. C'est l'axe du monde, l'Arbre de vie.

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Selon Koni Häne et Michèle Kaennel Dobbertin, auteurs de "Le frêne, arbre aux mille vertus." (in : La Forêt, 2006, vol. 59, no 9, pp. 20-21) :




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Diana Cooper, auteure du Guide des archanges dans le monde animal (édition originale 2007 ; traduction française : Éditions Contre-dires, 2018) nous délivrent un :


Message des arbres :

Nous venons du cœur de Dieu. Nous n'avons rien

à apprendre et beaucoup à offrir. Nous avons été ensemencés

sur la Terre pour le bien du règne humain et animal, incluant

les oiseaux et les insectes, et pour nourrir la planète elle-même,

physiquement, émotionnellement et spirituellement. Nous

diffusons l'amour et la guérison pour vous.


Les frênes : Les frênes détiennent la sagesse féminine divine et confèrent ses qualités aux humains et aux animaux. Ils choisissent souvent de se développer le long des lignes ley, afin de pouvoir utiliser le féminin divin pour adoucir le flux d'énergie qui se répand autour d'eux. Cela apporte une énergie douce et équilibrée dans les zones où ils poussent.

Leurs bourgeons noirs symbolisent le maintien de la nouvelle croissance dans le cocon yin pendant la formation des feuilles.

Si vous vous tenez sous un frêne ou si vous méditez près d'un frêne durant une nuit de pleine lune, vous recevrez un surcroît d'énergie. Il aide également la magie.

Le sorbier de la famille des rosacées est très protecteur. Demandez à un arbre de cette espèce qu'il vous protège et vous serez exaucé.


VISUALISATION POUR AIDER LES ARBRES

  1. Aménagez un espace où vous pourrez vous détendre sans être dérangé.

  2. Faites appel à l'archange Purlimiek, l'ange de la nature, et sentez sa belle énergie vert-bleu.

  3. Permettez à n'importe quel arbre d'apparaître dans votre esprit.

  4. Bénissez-le et remerciez-le d'être venu vers vous.

  5. Demandez au rayon doré du Christ de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.

  6. Demandez au feu lilas de la Source de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.

  7. Demandez à l'énergie protectrice bleu foncé de l'archange Michaël de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.

  8. Demandez à la lumière aigue-marine de la sagesse féminine divine de l'ange Marie de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.

  9. Demandez à la lumière argentée de l'archange Sandalphon de l'équilibre et de l'harmonie de se déverser dans l'arbre et de se répandre à travers ses racines.

  10. Prenez un moment pour invoquer toutes les énergies qui vous attirent et voyez-les se déverser dans l'arbre.

  11. Imaginez les couleurs qui s'écoulent d'une racine à l'autre en connectant le réseau d'arbres et en dynamisant les lignes ley.

  12. Ouvrez les yeux ensachant que vous avez aidé les arbres.

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Selon Annie Pazzogna, auteure de Totem, Animaux, arbres et pierres, mes frères, Enseignement des Indiens des Plaines, (Le Mercure Dauphinois, 2008, 2012, 2015),


"Vigoureux, Psehtin (Fraxinus americana) peut atteindre quarante mètres. Ses racines s'enfonçant dans la Terre à une profondeur égale à sa futaie dans le Ciel, il est le médiateur qui obtient la communion entre le Bas et le Haut, entre l'être humain et le Grand Mystère.

Les Lakota ont élu Frêne pour représenter tous les arbres de la création ainsi que l'homme en son individualité en façonnant le tuyau de la Pipe Sacrée dans son bois. C'est lorsqu'il est jeune et bien droit qu'il est choisi, de préférence par temps orageux, "avant le premier coup de tonnerre. L'arbre sentant la foudre, retient sa sève sans ses racines ; ainsi le bois ne fendra pas"... Mais le cueillir fin décembre, alors que la sève est au plus bas, reste sans doute la simplicité. Si autrefois le morceau sélectionné était coupé en deux, évidé dans le sens de la longueur et les bords recollés afin de permettre à la fumée de circuler, aujourd'hui, la moelle fraîche est bien vite percée à l'aide de baguettes métalliques rougies au feu. Écorcé, le tuyau devra sécher quelques temps avant d'être travaillé.

Dans les temps anciens, les Indiens préparaient Frêne bien avant qu'il devienne véhicule de la fumée. Sur pied, ils enlevaient "les yeux", les petites branches, afin qu'il sot droit. Les tuyaux pouvaient être très longs et sculptés. La Pipe activée était alors passée de l'un à l'autre des fumeurs par un Servant.

La beauté des objets était importante, car elle engendre une émotion qui conduit au monde spirituel. Ne pas oublier de prier et d'offrir du tabac avant de prendre et de panser les plaies causées à l'arbre avec de la terre.

Les Anciens qui avaient l'expérience, la connaissance et n'étaient plus très mobiles, confectionnaient les arcs avec Frêne jeune. Il devait être haut du pied à la taille de l'utilisateur. Après l'avoir cintré et mis sur une forme pour une bonne préhension, ils le frottaient avec de la graisse. Lorsque le bois était sec, ils pratiquaient des entailles à chaque extrémité pour tendre une corde tressée avec des tendons de Bison ou autre gros animal. La stabilité s'exerçait, puis l'arc était alors poncé et décoré. Les Anciens effectuaient aussi les réparations.

"Le club" du jeu lacrosse pouvait être façonné dans les rameaux de Frêne Commun. Le bois était aminci, taillé pour être recourbé et ligaturé avec des liens de cuir cru. Une sorte de panier permettait de recevoir et de renvoyer la balle qui était en peau. Le jeu du cerceau était dédié à la chasse. Sur un cercle de Frêne, étaient entrecroisées des lanières de cuir cru qui laissaient apercevoir un orifice. Le but était de faire passer un bâton fourchu, alors que le cerceau roulait, au travers du centre, le "cœur".

Il y a bien longtemps les épieux étaient de Frêne ; la pointe passée au feu devenait aussi dure que la pierre.

Une lamelle de Frêne, prélevée par éclatement du fil du bois, servait de support pour le tambour individuel. Elle était courbée et ligaturée pour lui donner sa forme arrondie. Une peau de Cerf ou d'Antilope venait couvrir ce support. Percée en bordure et tenue au dos par des bandes de cuir cru tressés, la finition symbolisait la roue médecine, la route des Directions dans un cercle, le Cercle de Vie."

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Liz Marvin, autrice de Grand Sage comme un Arbre (Michael O’Mara Books Ltd, 2019 ; First Éditions, 2021 pour la traduction française) transmet les messages qu’elle a pu capter en se reconnectant aux arbres :

Célèbre tes qualités : le Frêne

Il est tentant de se comparer aux autres. Mais les arbres savent que la véritable confiance en soi consiste à valoriser ses qualités. Le Frêne produit un des bois les plus solides, et sa croissance est rapide. Mais au printemps, il ne se précipite pas pour bourgeonner. Alors que le Hêtre et le Chêne ont une frondaison très dense qui ne permet guère à la végétation de se développer en dessous, le feuillage du Frêne est plus aéré, et d’autres plantes s’épanouissent à son pied. Pour résumer, le Frêne est fort et sûr de lui, mais en cas d’averse, mieux vaux chercher un autre abri !

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Symbolisme celte :


Selon Sabine Heinz, autrice des Symboles des Celtes (Édition originale, 1997, traduction française : Guy Trédaniel Éditeur, 1998),


"Le bois de frêne sert lui aussi de matière brute. Avec le chêne et l'if, le frêne est l'arbre le plus important de la littérature irlandaise. Dans l'histoire The Fairy Palace of the Wuicken Trees, ("Le Palais des Elfes près des frênes"), ils forment, recouverts de leurs fruits rouges, la frontière entre l'Autre Monde et l'ici-bas.

D'autres aspects du frêne, comme par exemple le motif de l'homme (sauvage) habitant un arbre ou celui de la source nourricière, sont bien décrits dans l'histoire de Sharvan, the Surly Giant and the Fairy Quicken Tree ('Sharvan le Géant et le frêne aux fées") :


Le peuple des Dedannans se nourrissait de noix, de pommes et des baies du frêne rouges qu'ils avaient amenées de la Terre Promise. Ces fruits avaient certaines propriétés cachées. C'est pourquoi les Dedannans prenaient soin de ne jamais faire tomber une noix, une baie ou une pomme sur le sol irlandais. Lorsqu'ils traversèrent la forêt de Doores, une baie tomba par terre. Ils continuèrent cependant leur chemin sans se laisser troubler. De cette baie commença alors à pousser un grand frêne, comme il en existait en Terre Promise : ses baies avaient le goût du miel ; ceux qui en mangeaient sentaient la joie envahir leur esprit, comme lorsqu'on abuse de l'alcool ; même ceux qui avaient cent ans, n'en avaient plus que trente après en avoir mangé. Lorsque les Dedannans entendirent parler de l'arbre et de ses propriétés, ils envoyèrent un guerrier Fomori, le géant borgne Sharvan, pour garder les baies, afin que personne n'en goûte ne serait-ce qu'une seule.

Dermat et Grania, qui fuyaient toujours pour échapper à Finn, arrivèrent eux aussi dans cette forêt (Grania avait choisi Dermat comme mari et non Finn). Pendant un certain temps, ils vécurent paisiblement ; ils s'entendaient bien avec le géant : Dermat chassait certes sur ses terres, mai il ne faisait pas attention à l'arbre. Un jour, il vit arriver deux guerriers envoyés par Finn pour venir chercher soit la tête de Dermat, soit une poignée de baies. Faisant fi de l'avertissement d'Oisin et espérant un plus haut grade et la célébrité, ils s'étaient mis en route. Dermat les vainquit rapidement. Grania entendit alors parler des baies et offrit sa vie en échange. Dermat fit grâce aux deux guerriers et promit d'aller chercher les baies. Mais le géant refusa catégoriquement de les lui donner. Dermat, dépourvu de toute arme, se jeta alors sur lui ; le feu ne pouvait le brûler, l'eau ne pouvait le noyer et les armes ne pouvaient le blesser. Il sauta sur le géant qui ne s'y attendait pas, le fit tomber et le frappa trois fois avec sa massue de sorte que son cerveau se répandit sur le sol. Il put alors donner les baies à Grania. Il donna aussi une poignée de baies aux deux compagnons de Finn et les congédia. Dermat et Grania purent se nourrir longtemps des baies qui, en haut de l'arbre, étaient particulièrement délicieuses.


Lorsque les guerriers arrivèrent auprès de Finnn et lui remirent les baies, ce dernier se rendit immédiatement compte qu'elles n'avaient pas été cueillies par ses hommes, mais qu'elles portaient le parfum de Dermat. Il rassembla alors ses hommes , et partit livrer bataille à Dermat. Arrivés dans la forêt de Doores, Finn s'assit sous un frêne avec sa horde de guerriers et commença à jouer aux échecs avec Oisin. Oisin et ses conseillers jouaient bien et Oisin en arriva au coup qui déciderait de l'issue du jeu. Dermat jeta alors une baie sur la pièce qu'Oisin devait bouger et Oisin gagna. On recommença une partie qui se termina comme la première. La troisième partie se déroula de la même manière. Mais Finn était offensé et parla de l'aide que Dermat, assis dans l'arbre, avait apporté à Oisin. Quelques mots suffirent pour deviner que Finn voulait toujours la tête de Dermat ; Dermat, grâce à son célèbre saut, se catapulta hors de la portée des guerriers de Finn et put s'enfuir.

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Dans La Magie des Plantes, Douze mois avec la Sagesse des Plantes (Édition originale, 2017 ; Éditions Danaé, 2017), Sarah Kynes propose des recettes rituelles liées à de nombreuses plantes :


18 février : début du mois celtique du frêne

Dans la mythologie scandinave, l'Arbre du Monde, Yggdrasil, était un frêne qui reliait le ciel et la terre. Le frêne est aussi associé au dieu celtique Manannan, et selon le mythe, cet arbre vient de son royaume sous-marin. Avec le chêne et l'aubépine, le frêne faisait partie d'une triade de puissants arbres aux fées. De plus, on disait que c'était le manche de prédilection pour un balai de sorcière.

[...]

Cueillez ou ramassez quelques samares de frêne pour mettre sur votre autel, et faites-en un cercle autour de la base d'une bougie sur laquelle vous aurez gravé les runes et/ou l'ogham associé au frêne. Servez-vous de cette installation durant une séance de divination ou pour renforcer l'énergie de vos sorts. Enveloppez quelques samares dans un tissu doux et mettez-le sous votre oreiller la nuit pour aider le travail onirique. Le frêne apporte un lient avec les autres royaumes, que ce soit en rêve ou en voyage astral.

Allumez une bougie gravée de l'ogham ou de l'une des runes, et mettez-la sur votre bureau ou dans votre espace de travail quand vous cherchez l'inspiration créatrice. Servez-vous des samares dans des sorts et des charmes de protection contre toute forme de magie négative. Faites brûler une petite brindille de frêne pour les sorts d'amour.

Le frêne est associé aux quatre éléments, et son influence astrologique vient de Mercure, de Neptune, du Soleil et d'Uranus.

Cet arbre est associé aux divinités suivantes : Arès, Bélénos, le Dagda, Freyr, Frigg, Holle, >Macha, Mars, Minerve, Neptune, Odin, Poséidon et Thor.

Il est aussi associé aux fées et aux elfes.

Le frêne est associé à l'ogham Nion et aux runes Ansuz, Ehwaz, Gebo, Hagalaz et Wunjo.

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Mythes et légendes :


Le Glossaire théosophique (1ère édition G.R.S. MEAD, Londres, 1892) d'Helena Petrovna Blavatsky propose plusieurs entrées relatives au frêne :


ARBRES DE VIE. Depuis la plus haute antiquité, les arbres furent rattachés aux dieux et aux forces mystiques de la nature. Toutes les nations avaient chacune son arbre sacré, avec ses caractéristiques et attributs particuliers fondés sur des propriétés naturelles et aussi occultes occasionnellement, comme cela est présenté dans les enseignements ésotériques. Ainsi [...] Le frêne, Ygdrasil, est l'arbre mondain des Hommes du Nord ou Scandinaves.


ASK (scandin.), ou Frêne. L' "Arbre de la Connaissance". Le Frêne et l'Aune (Embla) sont les arbres à partir desquels les dieux d'Asgard créèrent le premier homme.


FRENE YGDRASIL, Le. (scandin.). L' "Arbre du Monde". Symbole du monde pour les anciens Nordiques, "arbre de l'univers du temps et de la vie". Il est toujours vert car les Nones du Destin l'aspergent chaque jour avec l'eau de la fontaine d'Urd qui coule en Midgard. Le dragon Nidhogg ronge sans cesse ses racines, le dragon du Mal et du Péché. Cependant le Frêne Ygdrasil ne peut se dessécher jusqu'à ce que la dernière bataille soit livrée (la septième race de la septième ronde), lorsque la vie, le temps et le monde s'évanouiront et disparaîtront.


HONIR (scandin.). Dieu créateur qui pourvut le premier homme d'intellect et de compréhension après que l'homme eût été créé par lui, avec la collaboration d'Odin et de Lodur, à partir d'un frêne.


LODUR (scandin.). Second personnage de la trinité des dieux dans l'Edda des Nordiques et le père des douze grands dieux. C'est Lodur qui dote de qualités le premier homme – fait de frêne (Ask), avec du sang et de la couleur.


YGDRASIL (scandin.). L' "Arbre mondain de la cosmogonie des Nordiques ; le frêne Ygdrasil ; l'arbre de l'univers, du temps et de la vie". Il possède trois racines qui descendent jusqu'au froid Hel, et de là s'étendent à Jotunheim, la terre des Hrimthurses, ou "Géants de la Gelée", et à Midgard, la terre et la demeure des enfants des hommes. Ses rameaux supérieurs se déploient dans le ciel et ses plus hautes branches protègent Valhalla, le Devakhan des héros tombés. L'Ygdrasil est toujours frais et vert, parce qu'il est journellement arrosé par les Nornes, les trois sœurs fatales, le Passé, le Présent et l'Avenir, avec les eaux de la vie de la fontaine d'Urd qui s'écoulent sur notre terre. Il fanera et disparaîtra seulement le jour où la dernière bataille entre le bien et le mal sera livrée ; lorsque le premier prévalant, la vie, le temps et l'espace sortiront de la vie et de l'espace et du temps.

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D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),


FRÊNE. — Le frêne a été regardé par les anciens Hellènes, Romains et Scandinaves, comme un arbre sacré cosmogonique et d’abondance, comme un arbre bienheureux. Le nom même de ìåërá (fraxinus ornus) rappelle le miel, le madhu, l’ambroisie que l’on goûtait sur l’arbre açvattha du paradis indien, remplacé en Occident par le chêne et le frêne. Pline (XVI, 13) attribuait sérieusement au frêne un pouvoir magique contre les serpents. Voici ses propres mots : « Procera haec ac teres, pennata et ipsa folio ; multumque Homeri praeconio et Achillis hasta nobilitata. Contra serpentes vero, succo expresso ad potum, et imposita ulceribus, opifera, ac nihil aeque reperitur. Tantaque est vis, ut ne matutinas quidem occidentesve umbras, quamvis sint longissimae, serpens arboris ejus attingat, adeo ipsam procul fugat. Experta prodimus ; si fronde ea gyro claudatur ignis et serpens, in ignem potius quam in fraxinum fugere serpentem. » Pline rapporte aussi, comme un fait intéressant, que le frêne fleurit avant que les serpents se montrent. Il est curieux de rapprocher de cette citation le passage suivant de l’Ornithologie d’Aldrovandi : « Peridexion, inquiunt (c’est-à-dire Kiranides et Albert le Grand), arbor est in India, cujus fructus dulcis est, et gratus columbis, cujus gratia in hac arbore diversari solent. Hanc serpentes timent, adeo etiam ut umbram ejus fugiant. Nam si umbra arboris ad orientem vertatur, serpentes ad occidentem recedunt et e diverso. Itaque vi hujus arboris serpentes columbis nocere non possunt. Si qua autem forte aberraverit, serpentis flatu attracta, devoratur. Nam si gregatim degant, aut volitent, nec serpens nec ocypteros (id es sparverius), eas laedere potest vel audet. Hujus arboris folia aut cortex suffitu omne malum avertunt. » Il s’agit évidemment ici de l’arbre sacré hanté par les kapotâs, ou colombes, qui mangent les doux fruits du pippala védique.

Chez les Kabyles, au contraire, il paraît que le frêne a une réputation très inférieure à celle du chêne ; on peut en juger par le passage qui suit : « C’en est fait des hommes qui guidaient les tribus ; tout ce qui était intelligent est mort. Le zen (le chêne) et le frêne sont devenus égaux. Prenez le deuil, ô mâts des navires (qui sont faits avec le chêne). Ils disent que les intestins et la bonne viande sont des parties égales. » Pour les Allemands aussi, malgré le rôle cosmogonique dévolu au frêne dans la tradition scandinave, le frêne a souvent une signification sinistre. L’Askafroa 185 n’était pas un esprit bienveillant ; elle pouvait faire beaucoup de mal ; et on la fléchissait par un sacrifice, le mercredi des cendres (Aschermittwoch), jour sinistre et funéraire. Notez ici une équivoque de langage entre l’ancien mot Aska, Esche (frêne) et le mot Asche (cendre). D’après Porta, les cendres du frêne et du genévrier enlèvent la lèpre. — La déesse Némésis ou Adrastée des Grecs est représentée parfois avec un bâton de frêne. Aux noces de Pélée et de Thétis, Chiron se montra avec une branche de frêne, dont il fit, dit-on, la lance de Pélée, qui devait devenir ensuite l’arme d’Achille.

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Dans "Le symbolisme de la forêt et des arbres dans le folklore." (Perception des forêts. Unasylva, 2003, vol. 213, n°54, pp. 37-43), Judith Crews rappelle à son tour le mythe d'Yggdrasil :

[...]

Dans la mythologie norvégienne, Yggdrasil («Le cheval du terrible»), appelé aussi l’arbre cosmique, était un frêne géant qui reliait et abritait tous les mondes. Sous ses trois racines se trouvaient les royaumes d’Asgard, de Jotunheim et de Nifl heim. On disait que trois puits gisaient à son pied: le puits de la sagesse (Mímisbrunnr), gardé par Mimir ; le puits du destin (Urdarbrunnr), gardé par les Norns ; et la Hvergelmir (Bouilloire ronflante), la source de nombreuses rivières. Quatre cerfs, représentant les quatre vents, couraient, disait-on, le long des branches et mangeaient les bourgeons. Parmi les autres habitants de l’arbre il y avait l’écureuil Ratatosk (« dents rapides »), notoire pour ses potins, et Vidofnir (« le serpent de l’arbre »), le coq doré perché sur la branche la plus haute. On disait que les racines étaient rongées par Nidhogg et d’autres serpents. D’après la légende, le jour de Ragnarok, le géant du feu Surt aurait incendié l’arbre. Les autres noms d’Yggdrasil comprennent le bois d’Hoddmimir, Laerad et le cheval d’Odin.

Les mythes norvégiens racontent qu’Yggdrasil est l’arbre où le dieu Odin a été sacrifié, est mort et a été pendu. Régénéré, il est ressuscité aveugle, mais a reçu des dieux le don de la vue divine. Dans le mythe d’Yggdrasil, le frêne pourrait avoir représenté le symbole de l’axe du monde en raison de la résistance particulière et de la grande souplesse de son bois qui se plie avant de se briser. Certaines sociétés précédentes à l’âge du bronze fabriquaient leurs ustensiles et leurs armes avec des rameaux de frêne durcies par le feu. Dans l’Iliade, le poème épique d’Homère qui narre la guerre du XIIe ou XIIIe siècle environ avant J.-C. entre la ville de Troie et ses assaillants grecs, le même mot grec signifie « frêne » et « lance ».

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Koni Häne et Michèle Kaennel Dobbertin, auteurs de "Le frêne, arbre aux mille vertus." (in : La Forêt, 2006, vol. 59, no 9, pp. 20-21) rapportent différentes croyances relatives au Frêne :


Le frêne fait une carrière plutôt discrète dans la poésie, la musique et la mythologie.

Chez les Grecs anciens, il incarnait la stabilité absolue, l’arbre de Poséidon, qui était notamment le dieu des séismes. Dans l’Iliade d’Homère, Achille possédait un javelot en frêne. Pour les Germains et les Scandinaves, c’est Yggdrasil, la charpente de l’univers. Il est relié à la voûte céleste par sa couronne, à la terre par son tronc et au monde souterrain par ses racines.

Nos ancêtres étaient convaincus que le frêne possédait de nombreuses vertus. Il avait notamment le pouvoir d’éloigner le mal. Les Slaves attribuent au frêne la faculté de repousser les serpents: on peut se reposer à son ombre sans crainte. Pline l’Ancien, auteur du premier siècle de notre ère, en parlait déjà comme « existant en grande antipathie avec les serpents ». Sa sève protège paraît-il des morsures de serpents.

Un petit morceau de bois de frêne, cousu dans les vêtements, doit accélérer la cicatrisation des plaies ouvertes – cette croyance est probablement due à la forte teneur en tannin de son écorce.

Les pêcheurs prêtaient au bois de frêne des pouvoirs magiques. Ils étaient persuadés que, utilisé pour la fabrication des avirons et de l’ossature d’une barque, il protégeait de la noyade.

Lors de la famine de la pomme de terre en 1846 à 1851 en Irlande, les émigrants en partance pour l’Amérique emportèrent chacun, en guise de talisman contre la noyade, un petit bout du Frêne sacré de Creevna.

Le frêne était également sensé protéger des tempêtes – et pas seulement au sens météorologique du terme ! Chez les Romains, il représentait le symbole du bonheur conjugal, et chez les Ecossais, un rameau de frêne accroché au-dessus du lit passait pour mettre les époux à l’abri des disputes. En Europe du Nord, le frêne est le symbole de la fécondité, dans le midi de la France, celui de la sagesse et du bonheur, et en Wallonie, c’est l’arbre de l’hospitalité.

Les grenouilles météo connaissent le dicton populaire qui s’appuie sur l’observation de la phénologie du Frêne :

« Regardez bien la pousse des arbres

Si le chêne est vert avant le frêne

Vous serez secs jusqu’à l’automne

Si le frêne est vert avant le chêne

Tout l’été sera mouillé ».


Curieusement c’est l’inverse en allemand (!) :


« Treibt die Eiche vor der Esche,

Hält der Sommer grosse Wäsche

Treibt die Esche vor der Eiche

Hält der Sommer grosse Bleiche. »

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Jean-Loïc Le Quellec, auteur de " L'arbre dans les mythes". (In Francis Hallé & Pierre Lieutaghi (Eds.), Aux origines des plantes. Des plantes et des hommes (pp. 416-439). Paris : Fayard, 2008) précise le mythe liée à Yggdrasil :


L’Axis mundi est très souvent un arbre planté au centre de l’Univers, et dont les racines plongent dans l’autre monde alors que sa partie aérienne peut traverser plusieurs étages célestes. Dans les mythes, l’arbre cosmique assure la communication entre les divers niveaux du monde – fût-ce temporairement car ce végétal est parfois coupé ou abattu (dans l’épopée finnoise du Kalevala ; et chez divers peuples d’Amérique : les Kayapó, Tule, Talamank, Witoto) –, il est régulièrement assimilé à l’« arbre de vie », source de fécondité et de régénération, et les chamans l’utilisent lors de leurs ascensions célestes, selon les aires culturelles.


En Europe : Chez les anciens Scandinaves, le grand frêne Yggdrasil supporte « les neuf mondes », sa triple racine est rongée par le dragon Níöggr, sa cime est la demeure d’un aigle, et entre ces deux animaux circule indéfiniment l’écureuil Ratatöskr, qui excite leur inimitié. Cet arbre mythique est source de toute vie, de tout savoir, et il est aussi le siège du tribunal des dieux et le dispensateur du destin. En Irlande, le Dindshenchas en prose rapporte qu’un arbre cosmique se dresse en chacune des cinq provinces – if, chêne ou frêne selon le cas –, mais tous sont issus d’un arbre originel dont l’espèce n’est pas précisée. L’arbre cosmique joue encore un grand rôle dans le folklore russe, et le souvenir de cet axe mythique se retrouve dans les contes du type « Jean de la Fève », fréquent en France et en Angleterre, où le héros grimpe sur un végétal géant dont la pousse est instantanée, ascension qui lui permet de rencontrer la divinité et de solliciter ses faveurs – selon un schéma typiquement chamanique.

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Selon Véronique Barrau et Richard Ely, auteurs de Les Plantes des fées et des autres esprits de la nature (Éditions Plume de Carotte, Collection Terra curiosa, 2014), le frêne est "l'arbre de l'univers".


Arbre de dames : Sous le frêne légendaire d'Yggdrasil, arbre cosmique de la mythologie germanique, se réunissaient jadis les Nornes. Ces trois déesses déterminaient la destinée de chaque être, qui'il soit divin ou humain. Bien plus tard, l'imagination populaire donna naissance aux fées marraines connues pour attribuer des qualités aux nourrissons et prédire leur futur. La correspondance évidente entre ces deux types de personnages fit du frêne un végétal consacré aux bonnes dames et par extension à d'autres esprits féminins.

Les peuples germain et suédois croyaient par exemple à l'existence de l'Askafroa, la femme du frêne. Malveillante, cette créature transmettait des maladies à celui qui cassait, même par inadvertance, une branche ou une brindille. Chaque année, à l'aube du mercredi des Cendres, les anciens déversaient de l'eau sur les racines de l'arbre en priant son habitante de bien vouloir les épargner de son terrible courroux.


Cohabitation boisée : La mythologie germano-nordique présente le frêne Yggdrasil comme étant relié à neuf mondes. Parmi ces univers, on relèvera plus particulièrement Jotunheim le royaume des géants, Nidavellir le pays des nains, Svartalfheim le domaine des elfes noirs et Alfheim où règnent les elfes blancs. Les poèmes scandinaves d'antan associaient ces derniers à la lumière. Le peuple leur rendait hommage notamment au solstice d'hiver où le jour gagnait sur la nuit.


Chasse aux indésirables : Dans le Yorkshire et le Lancashire, le Boggart est un esprit domestique connu pour sa grande susceptibilité. S'il ne trouve pas sa quotidienne tasse de lait en échange de son travail, il n'aura de cesse de troubler le sommeil de ses maîtres, de déchirer leurs habits et pourra même répéter des secrets compromettants. Quand la situation devient ingérable, il faut se résoudre à se défaire des services de cet être versatile. Rien de plus simple heureusement : il suffit de placer quelques objets fabriqués en bois de frêne ici et là pour qu'il quitte la maison à jamais. Cet arbre repousse bien d'autres êtres de féerie. Ainsi, les paysans du Berry et de Sologne ne manquaient jamais de placer quelques branches dans leur poulailler. Ils pensaient par là même chasser la Cocadrille, un serpent fabuleux capable de transmettre de graves maladies aux poules. Les fermiers du Somerset croyaient aussi dans les vertus du frêne et plantaient de tels arbres dans les prés où paissait leur bétail pour le protéger des mauvais esprits comme des sorcières. Le frêne est également très efficace pour préserver les humains des créatures maléfiques. A l'instar des Français et des Écossais, on peut fixer un bâton de cet arbre au-dessus de sa porte le 1er mai. Coure une brindille dans un revers de son habit ou manger les samares, les fruits du frêne préalablement passés au four, a le même effet.


Abandon : plusieurs genres d'arbres possèdent leurs propres nymphes et le frêne n'échappe pas à ce principe. Précisons néanmoins qu'il s'agit du frêne à fleurs (Fraxinus ornus) évoqué par la mythologie grecque lorsqu'elle fait référence aux méliades. Ces dryades étaient réputées protéger les nourrissons non désirés qui étaient déposés sous les branches de leur arbre."

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Sophie Lacoste dans Les Plantes qui guérissent (Éditions Leduc. s, 2015) fait part de rituels spécifiques mettant en jeu le Frêne :


Légendes et magie : En Scandinavie, les Anciens croyaient que le monde était soutenu par un Frêne. Mais, dans tous les autres pays, le frêne commun, celui qui peuple le nord de l'Europe, est plutôt considéré comme le petit frère du Chêne. Un petit frère hargneux, voire négatif et son symbolisme est souvent sinistre. Bien entendu, comme dans tous les rites magiques, il existe des exceptions : si vous sculptez une petite croix dans du Frêne commun et que vous la portez autour du cou, vous ne pourrez pas vous noyer. Malgré ce talisman, je vous déconseille de vous baigner en eaux profondes si vous ne savez pas nager ! Le Frêne à fleurs, quant à lui, est bénéfique et c'est lui qui est utilisé en magie blanche ou plutôt sa sève, la manne, recueillie par une incision sur l'écorce. La manne en larme, récolté de mai à juillet, durant les chaleurs et la sécheresse, sert aux rites de guérison. A l'automne, durant les pluies, on récolte aussi la manne, mais on l'appelle "manne en sorte" et elle devient un ingrédient de choix pour tous les rites d'action, c'est-à-dire l'influence sur les biens matériels. Dans les deux cas, les résines sont brûlées pour faire des fumigations ou introduites dans la composition d'onguents. "Une petite recette magique pour séduire l'élue (ou l'élu) de votre cœur : ajoutez à de la manne le larme quelques gouttes d'essence de musc, une pincée de safran et une cuillerée d'huile d'olive. Écrasez, triturez, travaillez jusqu'à obtenir une pâte molle et onctueuse que vous vous étalerez sur les reins, les hanches et l'intérieur des cuisses." Le livre de magie blanche dans lequel j'ai pioché cette curieuse idée précise que c'est plus efficace le mardi (ce qui semble encore plus curieux !) mais ne dit pas si la lune doit être croissante, ascendante ou pleine !

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Croyances populaires :


D'après Véronique Barrau, auteure de Plantes porte-bonheur (Éditions Plume de carotte, 2012) : le frêne commun (Fraxinus excelsior) nous révèle "le mystère de la branche verte".


Le Norvégien est prudent : La nuit de Noël apporte son lot de cadeaux et contre toute attente, le frêne brûlé dans l'âtre en ce soir-là aussi ! Les impatients devront toutefois prendre leur mal en patience car, selon les Norvégiens, une bonne surprise surviendra mais on ne sait quoi ni quand... En revanche, précisent-ils, une bûche de frêne brûlée lors du réveillon de la Saint-Sylvestre apportera la prospérité toute une année aux habitants de la maisonnée. Cependant aucun jour précis n'est requis pour chercher une feuille de frêne dont le nombre de découpes est égal de part et d'autre. En cueillant cette rareté qui, selon les Anglo-Saxons est un gage de bonheur, il faut exposer tout haut son souhait d'obtenir la bonne fortune. Ce n'est qu'ainsi que le feuille portée à sa boutonnière, à son chapeau ou placée dans sa poche attirera la chance.


Toujours vert pour l'amour : dans la forêt de Juigné (Pays de Loire), un vieux frêne se distinguait par sa "branche verte" qui se couvrait de feuilles avant toute autre ramure de l'arbre ou de la forêt. Les demoiselles aspirant au mariage s'agenouillaient sous cette fameuse branche pour prier la statue de la Vierge nichée dans un creux de l'arbre. Elles gravaient ensuite leur initiale, et éventuellement celle de leur prétendant, sur le tronc avant d'entourer les lettres d'un cœur. Le rituel s'achevait par la confection et la plantation d'une petite croix de bois dans un fossé avoisinant


Brindille bienveillante : En France comme en Écosse, il état d'usage de coudre une brindille de frêne dans le col de ses habits pour se prémunir des enchantements. Les habitations étaient tout autant protégées des mauvais esprits grâce aux feuilles de frêne placées aux quatre coins des logis. Sur l'île de Man, on clouait une croix de frêne derrière la pote des maisons le 1er mai pour repousser les malheurs durant une année entière. De tels objets façonnés servaient également à d'autres causes. Ainsi, une croix réalisée avec deux rameaux de frêne de longueur égale mettrait à l'abri de la noyade celui qui la porte. D'autre part, pour écarter les risques liés aux orages, les Basques espagnols fixaient à leurs fenêtres des croix réalisées avec des feuilles de frêne préalablement cueillies le jour de la Saint-Jean.


A vous dégoûter du jardinage : La plantation d'un frêne ne devrait jamais être opérée par un homme. Selon une croyance funeste, il condamnerait de la sorte sa femme à mettre systématiquement au monde des nourrissons morts-nés à moins qu'"il ne provoque la mort d'un membre masculin de sa famille.


Un géant invincible : Célébré par la mythologie germanique, Yggdrasil est un frêne géant pourvu de trois racines et de branches étendues soutenant le monde. Il est l'Arbre Cosmique reliant la terre au ciel, celui qui a assisté à la destruction d'un univers et à la renaissance d'un nouveau monde sans en pâtir.

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Littérature :


Frêne hautain, forestier et champêtre


« Frêne hautain, forestier et champêtre

L’arbre premier de tant d’arbres divers,

L’arbre immortel au renom de mes vers,

L’arbre aux serpents toujours odieux maître ;


Le coudre rompt, mais tu te fais connaître

Propre à la guerre et jamais de travers

De toi tortu les monts ne sont couverts,

Ainsi haut et droit toujours as voulu naître ;


Je fais mes dards, pour tous mes arcs, de toi,

Les forestiers en font de même moi,

Et Panarèthe en fait les siens encore :


Phébus aussi en patronne ses traits,

Sa chaste sœur son carquois en décore,

Ainsi au bois as tous noms satisfaits ».


Jean Vauquelin de La Fresnaye, "Frêne hautain, forestier et champêtre" in Diverses poésies, 1605.

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Voir aussi la fiche sur l'Orne.


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