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Rosmerta, parèdre de Smertrios ?





Etymologie :


Selon Paul Marie Duval auteur d'un article intitulé « Le dieu Smertrios et ses avatars gallo-romains. » (In : Travaux sur la Gaule (1946- 1986) Rome : École Française de Rome, 1989. pp. 289-302. (Publications de l'École française de Rome, 116)) :


Le sens du nom Smertrios peut être défini assez exactement. La racine smer- contient « l'idée de la prévision et de la provision, des préparatifs à faire et des précautions à prendre, ... de la destinée réglée par une Providence » (J. Vendryes, o.l.). Ainsi s'expliquent le nom de la déesse Ro-smerta (avec ro- intensif), « la Grande Pourvoyeuse, celle qui fait ou aide à faire un grand pécule » (J. Loth, o.l., p. 288), et les surnoms de même racine appliqués à son parèdre Mercure, protecteur des gains. A partir de là, on peut interpréter Smertrios comme une incarnation masculine de la Providence : « Le Prévoyant, le Pourvoyeur ».




Symbolisme :


Le site Deo Mercurio propose une page bien documentée consacrée à Rosmerta.

 

Daniel Droixhe, auteur de L'étymon des dieux : mythologie gauloise, archéologie et linguistique à l'âge classique. (Vol. 21. Librairie Droz, 2002) fait le point sur les attributs de Rosmerta :


Rosmerta l'occultée

[...] Rosmerta est une des compagnes de Mercure, lequel est également associé à sa mère, Maïa. On connaît diverses statuettes représentant des déesses dont la tête est couronnée de deux ailettes, à l'image du pétase de Mercure. Mais rien ne permet de certifier qu'il s'agit de Maïa ou de Rosmerta. Par contre, la statuette trouvée vers 1930 à Champoulet dans le Loiret, aujourd'hui au Musée des Antiquités nationales, possède le nom de la divinité. Les deux mains tenaient des objets aujourd'hui disparus : on a supposé qu'il s'agissait pour la main droite, largement ouverte, d'une patère ou d'un vase rituel ; on peut par ailleurs songer à une bourse à un caducée, ses attributs occasionnels. Rosmerta est en effet, comme Mercure, une "déesse de paix", protectrice du commerce et du gain. [...] D'autres découvertes confirmèrent l'association de Rosmerta à Mercure comme présidant aux transactions du marché.

 

Adolfo Zavaroni, auteur de "Les dieux gaulois à la bourse". (Gerion, 2008, vol. 26, pp. 327-347) nous apporte d'autres précisions :


[...] note p. 329 : Hatt, 1989, 227. Quelques pages après Hatt, analysant les représentations du couple Mercure/Rosmerta, affirme que ce n’est pas Mercure, qui apporte la richesse, mais Rosmerta. Selon Hatt (1989, 250) “le couple formé par Mercure et Rosmerta n’est autre que la transposition gallo-romaine restée à moitié celtique par le nom de la déesse, du couple Teutatès-Rigani”. Teutatès serait l’allié, le protecteur du couple Rigani-Esus, contre Taranis, l’adversaire saisonnier d’Esus. On peut apercevoir une partie de vérité dans ces affirmations, mais il ne me semble pas qu’elles fassent émerger les différences fonctionnelles vraies entre ces dieux.

[...]

De la comparaison entre les différents compositions on peut déduire que la fonction symbolique du gobelet (ou de la patère) et de la cuve (ou du seau) de Rosmerta-Maia est semblable à celle du sachet de Mercure: tous ces objets font allusion à la renaissance, à la reproduction. Cela justifie que la compagne de Mercure pouvait avoir une bourse soit qu’elle le reçût de Mercure ou qu’elle le lui donnât. Par exemple, sur un bas-relief de Metz la déesse tient la paume de sa main droite sous une bourse que Mercure tient par le cou. Hatt affirme que le monument représente “Rosmerta donnant la bourse à Mercure” et que “ce n’est pas, initialement et dans le sens de la tradition celtique, Mercure qui apporte la richesse, mais Rosmerta”. Selon Hatt, Mercure qui reçoit la bourse des mains de Rosmerta serait représenté aussi sur d’autres bas-reliefs, mais il me semble que le passage de la bourse de la déesse au dieu ou vice versa ne soit pas perceptible sur les autres bas reliefs cités par Hatt. Quoi qui l’en soit, ce qui importe est que la déesse possède la substance de la régénération : elle reçoit de Mercure les germes (ou âmes) à régénérer et il les lui remet revitalisés.

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Mythologie :


Marie-Claude Groshens, dans un article intitulé "Michèle Bardout, La paille et le feu." (In : Études rurales, n°86, 1982. pp. 125-126) rend compte de sa lecture :


[...] Car ce sont bien des ensembles thématiques que M. Bardout a reconstitués en associant à des données de terrain, des descriptifs des folkloristes alsaciens du XIXe et du XXe siècle et des récits de chroniqueurs ou prédicateurs — tel Geiler de Kaysersberg — plus anciens. Cette méthode rend passionnantes certaines pages comme celles relatives aux valets de la Pentecôte, aux danses des épées et au lancement des disques enflammés du Carnaval, à la déambulation du cerf violoneux, du putois ou de l'homme de paille de la Mi-Carême, aux magnifiques tours du feu de la Saint-Jean d'été, etc. Les interprétations de ces ensembles sont moins convaincantes. Ainsi l'auteur rattache ces thèmes au mythe gaulois du mariage de Cernunnos et de Rosmerta : l'hiver, Cernunnos emprunte la forme d'un cerf et se métamorphose chaque printemps en dieu de la végétation ; Rosmerta est la déesse-mère. Cette direction pourrait être étoffée à partir de données contenues dans le texte lui-même, notamment en analysant les thèmes mélusinéens (dames blanches, poissons, crapauds tournant autour de Rosmerta) ainsi que ceux de « l'homme sauvage » qui seraient à rapprocher des géants dont M. Bardout ne parle pas, malgré la riche mythologie alsacienne sur ce point.

 

Jean-Jacques Hatt, auteur de "Le mythe de Léda et le rituel de l'œuf en Gaule romaine." (In : Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France, 1985, 1987. pp. 40-45) s'interroge sur la mosaïque du Marché aux céréales de Trêves :


[...] Rite de l'offrande de l'œuf à la déesse.

Je pense d'autre part que la scène mythologique du Musée de Saverne comporte une allusion à un rituel, accompli annuellement, et qui consistait à offrir à la déesse un œuf. Ce rituel indigène, probablement antérieur à toute interprétation, a pu être exprimé ici à la faveur de l'affabulation mythique.

Le rite de l'offrande à une déesse, en l'espèce Rosmerta, qui est à mon sens l'un des aspects de la grande déesse celtique, est représenté sur une des quatre faces de la base de la colonne de Mayence. Sur la scène, reconstituée par les ateliers du Musée, figure, en effet, à gauche, Rosmerta, tenant le caducée de la main droite baissée, au-dessus d'une sorte d'omphalos ovoïde aplati, autour duquel s'enroule un serpent, qui touche de sa tête le caducée. De la main gauche levée, la déesse tient une galette. En face d'elle, Mercure tient le caducée de la main gauche, et de la main droite présente à la déesse un œuf, tandis qu'un coq descend de son épaule (pl. II, 3).

Je pense que c'est là exactement une allusion directe au rituel de sacrifice qui a été parodié sur la mosaïque de Trêves, sous la forme d'une séance de prestidigitation, aboutissant à la transformation illusoire d'un œuf en poulet rôti.

A mon sens, ce rituel était destiné par l'effet magique de l'offrande et du sacrifice de l'œuf et du coq, et par la voie de l'omphalos, à mettre en communication pour les fidèles le monde supérieur avec le monde inférieur, et à favoriser ainsi pour leur plus grand bénéfice, la reproduction animale, la fertilité et la richesse. Je pense aussi que c'est dans cette voie, qu'il convient de chercher la signification du talisman de l'œuf de serpent, « urinum », c'est-à-dire de l'oursin fossile, assimilé par les Gaulois à un œuf magique de serpent mythique. Cet œuf de serpent était garant de bonheur et de réussite, parce qu'il assurait la liaison de son porteur avec les divinités du monde inférieur. Cette superstition était considérée comme une preuve de fidélité aux druidismes, d'où le jugement et l'exécution du Gaulois qui, sous Claude, le portait dans le pli de sa toge au cours d'un procès.

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