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L'Oreille de Judas



Étymologie :

  • AURICULAIRE, adj. et subst.

ÉTYMOL. ET HIST. I.− a) 1532 doigt auriculaire (Rabelais, Pantagruel, éd. Marty-Laveaux, XIX, p. 35) ; d'où 1866 subst. auriculaire (Lar. 19e) ; b) 1561 confession auriculaire (Calvin, Comm. s. l'harm. evang., f°700 vods Gdf. Compl.) ; c) 1690 témoin auriculaire (Fur.). II.− 1824 anat. « qui concerne les oreillettes du cœur » (Nysten). I empr. au lat. auricularius, méd. « qui a rapport à l'oreille » (Celse, 5, 28, 12, p. 215, 32 ds TLL s.v., 1496, 25) ; cf. lat. médiév. auricularius, subst. « confesseur » (1204-09, Arnold. Lub., Chron., 3, 8, p. 150, 24 ds Mittellat. W. s.v., 1252, 14) ; II dér. de auricule* ; suff. -aire*.


Lire également la définition du nom auriculaire afin d'amorcer la réflexion symbolique.

Autres noms : Auricularia auricula-judae ; Auriculaire ; Mu-erh ("l'oreille d'arbre") ; Oreilles de chat ou Oreilles de chauve-souris pour les noirs ; Oreilles de nuage pour les blancs (Chine) ; Oreille-de-Juif ; Pézize-oreille.

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Mycologie :


D'après Jean-Baptiste de Panafieu, auteur de Champignons (collection Terra curiosa, Éditions Plume de carottes, 2013), "les avis sont partagés. Selon l'apothicaire Nicolas Lémery, spécialiste des plantes médicinales, "on ne doit point s'en servir intérieurement, car c'est une espèce de poison".


A consommer sans excès : Cette oreille veloutée, d'un brun-gris plus ou moins sombre, est le "champignon noir" de la cuisine asiatique. En Chine, les premiers écrits concernant le mu-erh, l'oreille d'arbre, dateraient du VIIe siècle, faisant de cette espèce la première à avoir été cultivée ! La production chinoise est très élevée, le plaçant au quatrième rang des champignons de culture.

La médecine traditionnelle chinoise l'utilise pour soigner les troubles veineux tels que les thromboses. Cette activité explique peut-être de bizarres intoxications qui ont été attribuées à ce champignon. Découvertes par des dentistes, elles se traduisaient par des hémorragies au niveau des gencives et de la peau. Ce "syndrome de Szechuan" (ou Sichuan, une région chinoise) serait provoqué par une consommation très excessive d'oreilles-de-Judas. Et pour oublier les vicissitudes d'une santé chancelante, mais également pour apprécier les plaisirs de la vie, les Russes n'hésitaient pas à produire un alcool à base d'oreilles-de-Judas, c'est du moins ce que rapportaient certains voyageurs du XVIIIe siècle.

Un nom incorrect : Selon Nicolas Lémery, "son nom vient de ce que ce champignon a la figure d'une oreille et qu'il se trouve attaché au sureau où l'on dit que Judas se pendit après avoir trahi le Sauveur du monde". Dans le monde anglo-saxon, Judas-ear a été très souvent modifié en jew's ear, oreille-de-Juif. Aujourd'hui, certains proposent l'appellation plus "politiquement correcte" de jelly ear, oreille-de-gelée !


Anti-angine : En Europe, il n'était autrefois pas cuisiné, sinon de façon médicinale. Le philosophe et naturaliste Francis Bacon, par ailleurs chancelier d'Angleterre au XVIIe siècle, l'avait décrit dans son livre Sylva slyvarum : "Il est un autre genre d'excroissance, connue en Angleterre sous le nom d'oreille-de-juif, qu'on trouve ordinairement sur les racines (et autres parties basses) de certains arbres ou arbrisseaux, entre autres sur celles du sureau et du hêtre. Elle est d'un brun obscur, et remarquable par la propriété qu'elle a de s'enfler et d'acquérir un volume prodigieux, lorsqu'on la jette dans l'eau chaude. C'est un remède éprouvé pour les esquinancies (les angines) et les inflammations à la gorge."


Escroquerie : L'oreille-de-Judas était autrefois proposée dans les drogueries, mais des escrocs vendaient parfois aux pharmaciens d'autres espèces plus faciles à trouver dans la nature, notamment des pézizes ou des lichens gris. Dans le Journal de pharmacie et de chimie de 1854, Alexandre Malbranche, pharmacien des hôpitaux de Rouen, dénonce les tromperies pratiquées à propos de ce champignon et décrit les moyens de démasquer les fraudeurs : "Souvent avec un léger examen le pharmacien peut reconnaître de semblables substitutions et démasquer l'ignorance, l'incurie ou la mauvaise foi de ceux qui mettent dans le commerce des substances ainsi dénaturées. Cela nous fait voir une fois de plus quelle confiance il faut avoir dans les matières que nous livre la droguerie et la nécessité d'apporter dans leur réception un sérieux examen." Les scandales sanitaires ne sont pas des problèmes récents !

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Francis Martin dans son ouvrage intitulé Sous la forêt. Pour survivre il faut des alliés. (Éditions HumenSciences, 2019) retrace l'histoire des champignons lignivores :


L'histoire débute il y a près de 290 millions d'années, à la fin du Carbonifère. En ces temps très anciens, aucun être vivant n'est capable d'altérer le bois inventé par les premiers arbres. Je vous ai déjà décrit les forêts de cette époque : d'immenses espaces peuplés d'arbres primitifs très lignifiés et constitués de prêles et de fougères géantes, ainsi que des premiers gymnospermes. Ces vastes forêts ont laissé, en mourant et en se fossilisant, les gisements de charbon que nous exploitons encore aujourd'hui. Une telle accumulation d'arbres morts a été facilitée par l'absence de champignons lignivores capables de digérer la couche protectrice de lignine imprégnant et protégeant les fibres de cellulose.

Quand, un beau matin, un mutant surgit au sein d'un groupe de mycètes qui devait fort ressembler à l'oreille de Judas d'aujourd'hui Cette espèce ancestrale, déjà équipée des cellulases indispensables au découpage de la cellulose, inventa alors l'enzyme capable de décomposer la lignine, autrement dit de casser l'incassable. Cette propriété extraordinaire est la conséquence d'une seule mutation dans la séquence d'un péroxydase. Je ne vias pas vous assommer aec la réaction chimique d'oxydation facilitée par cette innovation, mais c'est une superbe démonstration de l'inventivité sans cesse renouvelée de la nature. Si une nouvelle moécule apparaît sur notre planète, soyez assuré qu'un jour ou l'autre un mutant verra le jour pour la dégrader et l'utiliser pour se nourrir et acquérir ainsi un avantage adaptatif.

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Propriétés médicinales :


Jean Baptiste Barla, dans son ouvrage intitulé Les champignons de la province de Nice et principalement les espèces comestibles. (Imprimerie Canis frères, 1859) nous apprend que :


Le Bolet de mélèze (Boletus laricis) et la Pezize oreille de Judas (Peziza auricula) sont deux violents purgatifs fort préconisés contre l'hydropisie. La Pezize est aussi donnée en décoction dans le lait et en gargarismes contre les maladies de la gorge et contre les esquinancies.

 

Marie Rampin, propose une synthèse des vertus thérapeutiques de l'Oreille de Judas dans Champignons "médicinaux" : de l'usage traditionnel aux compléments alimentaires. (Thèse d'exercice en Pharmacie, Université Toulouse lll - Paul Sabatier, 2017, p. 44) :


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Symbolisme :


Selon la symbolique chinoise expliquée sur le site http://www.tao-yin.com/,


Le noir du champignon représente l'Eau (Shui), l'hiver, le Grand Yin, le Nord, les os et articulations. [...] Les champignons noirs sont de nature tempérée et de saveur douce. Ils agissent sur le méridien des reins et ont une action profonde sur les méridiens de la rate. Ils facilitent le transit intestinal et sont légèrement laxatifs. Ils permettent de faire baisser le taux de mauvais cholestérol.

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