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Le Bélier




Étymologie :


  • BÉLIER, subst. masc.

ÉTYMOL. ET HIST.1. 1412 « mâle de la brebis » empl. comme nom de pers. (Bibl. de l'Ec. des Chartes, 5e série, I, 225 dans Gdf. Compl. : Despense faite le quatriesme jour de juillet 1412 en l'ostel de Belier [nom d'un chanoine de la Ste Chapelle]) ; p. anal. 2. a) 1548 milit. « poutre de bois armée en son extrémité d'une tête de bélier en airain et employée par les anciens et au Moy. Âge pour renverser les murailles des places assiégées » (Rabelais, Quart Livre, 61, éd. Marty-Laveau, t. 2, p. 486) ; b) 1796-1821 p. ext. « tout élément de force capable de briser ou renverser un obstacle matériel ou moral » (J. de Maistre, Correspondance, t. 1, p. 113) ; 3. 1587 sens libre « mari trompé (à cause des cornes que l'on lui prête) » (Cholières, 2e Ap. Disnee, p. 67 dans Hug. : Le Seigneur Rodolphe mourroit, ou il faudroit qu'elle mourut, si elle le faisoit belier) ; 4. technol. a) 1660 « machine servant à enfoncer des pieux » (Oudin, Tresor des deux lang. espagnolle et françoise, 2e part.) ; b) 1797-98 bélier hydraulique « machine servant à élever l'eau, inventée par les frères Montgolfier et Argant » (Annales de l'agric. fr., t. 1, an VI, p. 310) ; 5. 1680 astron. (Rich.). Issu, avec changement de suff., de l'a. fr. belin « bélier » (ca 1178, Renart, éd. M. Roques, branche I, 1368 et passim, nom propre donné au mouton) ; déjà ca 1151 Belinus nom propre du mouton dans l'Ysengrimus, cf. renard*), qu'il finit par évincer. Belin est − soit une adaptation du néerl. belhamel (Gallas) composé de bel « cloche » et de hamel « mouton » littéralement « mouton à sonnaille », celui qui marche en tête du troupeau, bien que le composé néerl. ne semble pas attesté av. le dict. de Kiliaen [1599] d'apr. FEW t. 15, 1re part., p. 92b ; cf. cependant le corresp. angl., de formation analogue, belwether, attesté dep. 1284 dans MED ; − soit empr., avec suff. -in* au m. néerl. belle « cloche » (Verdam), d'où la désignation, en fr., de l'animal porteur de cloche, le bélier ; à l'encontre de cette hyp., le fait que le m. néerl. belle n'a pas été empr. par le fr. au sens de « cloche »; aussi est-il difficile d'affirmer avec EWFS2 que belin a été à l'origine adj. dans mouton belin « bélier » (v. cependant bélière). Même objection contre l'hyp. de A. Schossig dans Rom. Forsch., t. 71, 1959, pp. 27-43 pour qui belin est dér. du m. néerl. bel non au sens propre de « sonnaille » mais au sens de « testicules » (cf. le sens de cloche dans Renart, éd. Roques, 928) ; le m. néerl. bel étant à rapprocher du néerl. bal « balle, boule » dont les corresp. en diverses lang. ont connu le même sens dér. (FEW t. 15, 1, p. 44, s.v. balla). L'hyp. d'une dér. de l'a. fr. beler (bêler*) d'orig. onomatopéique (Barb. Misc. t. 2, n°6 ; Valkh., pp. 57-58) offre moins de vraisemblance; cependant les objections d'ordre phonét. formulées par Meyer-Lübke dans Die Neueren Sprachen, t. 35, 1927, pp. 569-570 (l'a. fr. ayant selon lui connu beeler et non beler) ne semblent pas justifiées (v. dans T.-L. les nombreuses attest. de l'a. fr. beler).


Lire également la définition afin d'amrocer la réflexion symbolique.

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Zoologie :


Dans le Hors-série de Causette (été 2018) intitulé « Histoires d'A...mours », Claudine Colozzi nous propose un petit "Kama-sutra des animaux" sous forme d'abécédaire :


Z comme Zigounette

Le sexe mâle peut prendre des formes inimaginables. Celui du crocodile est en crochet, celui du cochon, en tire-bouchon... Le pénis de l'échidné, un mammifère australien, est, quant à lui, doté de quatre têtes qui éjaculent en alternance ! Au rayon des étrangetés, on trouve aussi le bélier. L'extrémité de son sexe tourne pour mieux projeter le sperme dans le col de l'utérus.

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Symbolisme :


Dans le Dictionnaire des symboles (1ère édition, 1969 ; édition revue et corrigée Robert Laffont, 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,


"Ardent, mâle, instinctif et puissant, le bélier symbolise la force génésique qui éveille l'homme et le monde et assure la reproduction du cycle vital, au printemps de la vie comme à celui des saisons. C'est pourquoi il allie la fougue et la générosité à une obstination qui peut conduire à l'aveuglement. Tel l'entendent bien les astrologues pour lesquels le signe du Bélier - que franchit le soleil tous les ans le 21 mars, jour de l'équinoxe de printemps - est une représentation cosmique de la puissance animale, ou animante, du feu, à la fois créateur et destructeur, aveugle et rebelle, chaotique et prolixe, généreux et sublime, qui, d'un point central, se diffuse dans toutes les directions. Cette force ignée s'assimile au jaillissement de la vitalité première, à l'élan primitif de la vie, avec ce qu'un tel processus initial a d'impulsion pure et de brute, de décharge irruptive, fulgurante, indomptable, de transport démesuré, de souffle embrasé. On est en présence, dans la tradition hermétique, d'un verbe dont les sonorités sont en rouge et or, en affinités astrales avec Mars et le Soleil. Un verbe essentiellement agressif qui correspond à une nature tumultueuse, bouillonnante, convulsive. L'astrologie assimile un caractère humain à chaque signe zodiacal, mais en précisant qu'il ne suffit pas d'être né dans le mois zodiacal, ni qu'il est nécessaire d'y être né pour ressemble au type de ce signe. Or, le type Bélier appartient au Colérique (émotif-actif-primaire) de la caractériologie moderne avec sa vitalité incandescente, son ardeur à vivre à bride abattue, dans le tumulte et l'intensité, les émotions fortes, les sensations violentes, les dangers, les prouesses, les chocs d'une existence suractivée.

Ces caractéristiques sont attestées de par le monde à travers de nombreux mythes, coutumes et images symbolisantes. Ainsi Amon, divinité égyptienne de l'air et de la fécondité, plus tard reconduit sous le nom de Jupiter-Amon, est-il représenté avec une tête de bélier, tout comme Hermès-Kriophore, ou porteur de bélier, qui était célébré dans un temple de Béotie pour avoir détourné une épizootie en portant un bélier sur ses épaules autour de la ville pour en écarter le fléau. Des rites pastoraux identiques faisaient adorer par les Doriens Apollon-Karneiros, dieu du bélier, également célébré à Sparte pour écarter les fauves, protéger les troupeaux, éduquer les bergers. Sans doute ces rites et croyances méditerranéennes sont-elles à l'origine du Christ bon pasteur et des nombreuses représentations chrétiennes de bergers portant un agneau ou un bélier sur leurs épaules. Le Bélier deviendrait alors une variante de l'Agneau de Dieu, qui s'offre à la mort pour le salut des pécheurs, et le symbole non seulement du Christ mais des fidèles qui, après lui et en lui, acceptent la mot expiatrice, ceci dans une sublimation de la symbolique du feu, du sang et de la fécondité régénératrice.

On pourrait multiplier à l'infini les exemples. Ainsi Knoum, le Dieu potier qui, selon les croyances de l'Egypte ancienne, a modelé la création, est le Dieu bélier par excellence, le bélier procréateur. Des béliers momifiés ont été retrouvés en abondance. En eux résidaient les forces qui assuraient la reproduction des vivants ; leurs cornes entraient dans la composition de plusieurs couronnes magiques, propres aux dieux et aux rois, elles étaient le symbole même de la crainte qui rayonne du surnaturel.

Même symbolique au temps des Ptolémées chez qui, rapporte Jean Yoyote, un prêtre de Mendès, ayant dressé son image dans le temple du Bélier, seigneur de la ville et maître de la fécondité, peut compter sur les pèlerins pour prier en sa faveur : - Ô vous qui naviguez d'amont en aval pour venir voir les grands béliers sacrés, priez le Dieu en faveur de cette mienne statue.

De la Gaule à l'Afrique noire, de l'Inde à la Chine, même célébration de cette chaîne symbolique associant feu créateur, fertilité et même, par le truchement de la vie principielle, immortalité.

Ainsi, dans les Véda, le bélier est-il en rapport avec Agni, régent du feu, et notamment du feu sacrificiel. Dans le Yoga tantrique le manipûra-chakra, qui correspond à l'élément feu a pour allégorie le Bélier. C'est enfin, selon la Bâskala-mantra Upanishad, sous la métamorphose d'un bélier que le sage Indra enseigne la doctrine de l'unicité du Principe Suprême :


Je me suis changé en bélier pour ton bonheur.

Tu es parvenu au chemin de la Loi, pour ton bien-être.

Accède donc à ma véritable nature unique.

Je suis la bannière, je suis l'immortalité,

Je suis le lieu du monde, ce qui fut, est et sera.


Le bélier est également la monture de la divinité hindoue Kuvera gardienne du nord et des trésors, ce qui n'est pas sans évoquer la Toison d'Or. Mais si les quêtes de la Toison d'Or sont surtout celles d'un trésor spirituel, c'est-à-dire celles de la sagesse, elles sont peut-être aussi des ordalies royales (Ramnoux). Or, dans la Chine ancienne, le bélier participait aux ordalies judiciaires, dans lesquelles il jouait le même rôle que la licorne. A la même époque et dans la même aire culturelle, le bélier est aussi parfois la monture d'un immortel (Ko Yeou), voire, comme en Inde, la métamorphose de l'Immortel lui-même. Retenons, quant à l'Afrique noire, parmi d'autres témoignages, celui de Marcel Griaule, qui a vu représenté sur le mur d'un sanctuaire, le Bélier Céleste, divinité agraire, dominant un épi de maïs dressé et la queue terminée par une tête de serpent : symbolisme d'une vigoureuse fécondité.

Pour revenir à l'Europe, signalons qu'on a trouvé en Gaule de nombreux chenets d'argile cuite et de pierre à tête de bélier, ce qui n'est pas sans relier le symbolisme igné de l'animal et la fécondité familiale. Après la Toison, c'est la Corne du Bélier qui se charge d'une valeur symbolique source d'innombrables coutumes, traditions et images dérivées du même symbolisme original, dont la plus vivace est sans doute la corne d'abondance. L'analyse et la psychologie moderne en savent l'importance qu'évoque et résume ainsi A. Virel : le bélier générateur du troupeau, est aussi la machine qui permet d'abattre les murs et les portes des villes assiégées, donc d'ouvrir la carapace des collectivités. La forme en spirale de se cornes ajoute encore une idée d'évolution et renforce la valeur d'ouverture et d'initiation évoquée par le V de toutes les cornes d'animal. Le bélier représente bien l'initiation : il est doué de verbe et de raison. Il symbolise la force psychique et sacrée, la sublimation : il vole et sa toison est d'or. Sa force de pénétration est toutefois ambivalente : elle fertilise, blesse ou tue."

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Selon Ted Andrews, auteur de Le Langage secret des animaux, Pouvoirs magiques et spirituels des créatures des plus petites aux plus grandes (Édition originale, 1993 ; traduction française, Éditions Dervy, 2017), le Bélier (Mouflon canadien) a les caractéristiques suivantes :

Points clés : Recherche de nouveaux départs.

Cycle de puissance : Fin de l'automne et début de l'hiver.


Le bélier est depuis longtemps un grand symbole au sein de nombreuses civilisations et sociétés humaines. Et pour nombre d'entre elles, il était en particulier un symbole de sacrifice. On le tuait dans le cadre de traditions ritualistes à des fins diverses. Cet aspect se retrouve souvent dans la Bible. Moïse, par exemple, initia la Pâque avec le sacrifice d'un agneau. Le bélier symbolisait aussi la quête de grandes récompenses ou de sublimes trésors, comme le rapporte le récit héroïque grec de Jason et de sa quête de la Toison d'or. En outre, cet ovin est encore un symbole de grande force et de grand pouvoir. De nombreux peuples se sont servis d'engins de guerre appelés "béliers" pour enfoncer les portes et les murs des ennemis.

Si le bélier se montre dans votre vie, préparez-vous à vous mettre en quête de nouveaux départs. N'oublions pas que le bélier est aussi le premier signe du zodiaque, c'est-à-dire le premier mois de l'année astrologique. Il tombe au printemps, précisément un temps de recommencements. Le bélier nous invite à nous affirmer dans de nouveaux secteurs.

Dans l'astrologie chinoise, la chèvre et le mouton (bélier) sont souvent interchangeables et personnifient une année tous les douze ans. C'est un signe associé à la sensibilité et à la persévérance. Les individus de ce sine sont quelque peu stoïques, ne se livrant jamais et ne révélant pas directement ce qu'ils ont en tête. Et, dans la tradition chinoise, ils peuvent avoir une inclination vers tout ce qui est impraticable.

Dans la vie réelle, les béliers incarnent nombre des caractéristiques que la mythologie et la tradition leur prêtent. Leur pouvoir et leur force sont souvent illustrés dans des documentaires sur la Nature où on les voit se cogner la tête les uns contre les autres dans des duels visant à montrer leur force.

Les béliers et les brebis de la famille des mouflons (et des mouflons canadiens en particulier) vivent en montagne au-dessus de la limite des arbres. Ils broutent de l'herbe et certaines fleurs. Tout au long du printemps et de l'été, ils accumulent des couches de graisse et un épais manteau de laine leur permettra de survivre à l'hiver.

Les cornes sont un trait prédominant du bélier. Chez les individus ayant ce totem elles stimulent une grande activité mentale. Elles manifestent une curiosité et une imagination active qui ont besoin d'être constamment alimentées et qui croissent chaque année, comme les cornes du bélier.

Les cornes du bélier sont des armes, une forme de défense et un symbole de statut. Elles croissent tout au long de la vie de l'animal pour finir par former une volute ou spirale. Cette dernière est un symbole de grande créativité. Et parce qu'elle est associée à la tête dans le cas du bélier, elle a une signification encore plus importante. Par son intermédiaire, pour ceux qui ont ce totem, il va y avoir une nouvelle stimulation des facultés mentales, de l'imagination et de l'inspiration - et l'énergie nécessaire à leur activation arrivera corrélativement.

Les jeunes béliers jouent souvent à une sorte de tournoi pour savoir qui sera le roi de la montagne. Ils mesurent leur force et testent leur position au sein du groupe. C'est particulièrement évident en automne quand la hiérarchie s'exacerbe. C'est à ce moment-là que commencent les affrontements pour le droit à s'accoupler avec les brebis. Les béliers se toisent, puis fendent l'air et les têtes se fracassent, cornes contre cornes. Et cela continue jusqu'à ce que l'on s'avoue vaincu. Pour les individus qui ont le bélier pour totem, l'automne sera le moment de montre leur force et d'aborder de nouveaux défis.

Un bélier eut vivre jusqu'à quatorze ans environ, mais son espérance de vie décroît en fonction de la taille de ses cornes. Plus celles-ci sont grandes, plus les duels seront fréquents. Les anneaux de la corne marquent l'âge de l'animal.

[...]

Si le bélier entre dans votre vie, procéder à quelques examens - mais n'y passez pas trop de temps. C'est généralement l'indication d'un temps pour de nouveaux commencements et de nouvelles entreprises - et non de simplement y penser. Tirez-vous avantage des opportunités qui se présentent ? Restez-vous en équilibre lorsque vous accomplissez des sauts ou des ascensions ? Entamez-vous les choses de manière appropriée ? Mettez-vous en œuvre vos idées ou vous contentez-vous d'en parler ? Quand le bélier se montre, il vous apprend à manifester les pouvoirs de l'esprit et l'imagination, et à les utiliser pour atteindre de nouvelles hauteurs ou partir vers de nouvelles aventures.

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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


Générateur du troupeau, [le Bélier] est aussi la macine qui permet d'abattre les portes et les murs des villes assiégées, donc d'ouvrir la crapace des collectivités. la forme es spirale de ses cornes ajoute encore une idée d'évolution et renforce la valeur d'ouverture et d'initiation évoquée pa rle V de toutes les cornes d'animal. Le bélier représente bien l'initiation : il est doué de verbe et de raison. Il symbolise la force psychique et sacrée, la sublimation : il vole et sa toison est d'or. (André Virel, Histoire de notre image, Genève, 1965, p. 174).

Fougueux, indomptable et puissant, le Bélier symbolise la vie et la fertilité. En Égypte, le dieu Khnoum, qui avait créé les êtres sur un tour de potier, et qui était adoré à Éléphantine comme le gardien des sources du Nil, était représenté avec une tête de bélier à double encornure. Amon, dieu de l'Air et de la Fécondité, portait des cornes de bélier. On attribuait également la fondation de la première dynastie égyptienne aux fameux béliers alignés dans une allée devant le temple de Karnak. On dit en outre qu'à la conquête de l'Égypte, on prit Alexandre le Grand pour un « envoyé céleste, car la chevelure du conquérant, relevée sur son front en nattes pointues, le faisait ressembler à un bélier ».

En Béotie (Grèce centrale), on vénérait Hermès-Kriophore, qi avait écarté une épizootie en transportant, sur ses épaules, un bélier, tout autour de la ville. A Sparte, le dieu du Bélier, Apollon-Karneiros, protégeait les troupeaux, des fauves en particulier, et éduquait les bergers : « Sans doute ces rites et croyances méditerranéennes sont-elles à l'origine du Christ bon pasteur et des nombreuses représentations chrétiennes des bergers portant un agneau ou un bélier sur leurs épaules ». Comme l'agneau de Dieu, le bélier était la victime sacrificielle qui expiait les péchés des fidèles.

Les nécromanciens de l'Antiquité se servaient d'un bélier noir « pour fixer le lieu de leurs exploits » : ils « promen[aien]t l'animal qu'ils retenaient par les cornes et les pattes de devant et laissaient brusquement retomber sur le sol ».

Un des mythes les plus célèbres de la Grèce antique est celui de la Toison d'or ou du bélier ailé, qui sauva Phrixos et sa sœur Hellé, enfants d'Athamas, roi de Béotie : après consultation d'un oracle, ils étaient sur le point d'être sacrifiés quand un bélier à toison d'or et doué de parole les arracha à l'autel et s'envola. Phrixos parvient en Colchide (Hellé, autant à elle, tomba dans la mer et se noya), sacrifia le bélier et offrit la fameuse toison du roi AEtès. Gardée par un dragon, elle sera dérobée par Jason, un des Argonautes partis à sa recherche. Signalons que symboliquement, les « quêtes de la Toison d'or sont surtout celles d'un trésor spirituel, c'est-à-dire de la sagesse ». On pense par ailleurs que les mines d'or de Colchide ont donné naissance à ce mythe.

La divinité hindoue Kuvera, gardienne du Nord et des richesses ou trésors de la terre, chevauche un bélier, tout comme Agni, dieu du Feu, tandis qu'« Indra, le dieu roi des Brahmanes, dieu des Pluies et de la Guerre, se transforme en bélier pour transmettre à l'humanité son message spirituel ». Le Veda fait dire à Indra :


Je me suis changé en bélier pour ton bonheur

Tu es parvenu au chemin de la Loi, pour ton bien-être

Accède donc à ma véritable nature unique

Je suis la bannière, je suis l'immortalité,

Je suis le lieu du monde, ce qui fut, est et sera.


En Inde encore, où entendre un bélier présage de l'argent, un Immortel peut se métamorphoser en bélier, tandis qu 'en Chine ils sert de monture à Ko Yeou, un des huit Immortels de la mythologie.

En Gaule, où l'on a retrouvé de nombreux chenets d'argile cuite et de pierre à tête de bélier, l'animal semble avoir été associé au feu créateur, à la fertilité, et même à l'immortalité.

Le bélier attrapé par Abraham et sacrifié à Yahvé à la place d'Isaac fait partie des dix animaux admis par Mahomet au paradis.

Au Moyen Âge, le bélier servait souvent à une sorte de jugement de Dieu : on le faisait combattre cont ele coupable présumé d'un crime. « Si l'homme sortait vainqueur de ce combat, il était déclaré innocent. Sinon, il avait peu de chances d'échapper à la potence ».

En même temps, peut-être en raison de son importance dans les mythologies et de sa puissance incontrôlable, le bélier était une des formes que pouvaient prendre le diable ou les sorciers. Selon un récit recueilli dans la Creuse, un laboureur vit un jour un bélier noir qu'il se mit en tête de porter. « Tu pèses comme le diable ! » dit-il à l'animal, qui répondit avant de se sauver en ricanant : « Je suis le diable en effet ». Autrefois, parmi les apparitions fantastiques, celles de béliers noirs vomissant des flammes comptaient parmi les plus redoutées, notamment en Bretagne et en Normandie.

Les rognons de bélier étaient des mets fort recherchés par les sorciers ; Léonora Galigaï, femme du maréchal d'Ancre, fut accusée d'en consommer pendant qu'elle opérait des maléfices.

Toutefois, en Russie, la présence d'un bélier dans une écurie passait pour empêcher les lutins d'importuner les chevaux. En Sardaigne, suspendre des cornes de bélier aux arbres fruitiers les protège des maléfices qui les rendraient stériles. En Calabre, on en dessine au-dessus de la porte de étables pour refouler le mauvais œil.

Selon une croyance française, si on enterre des cornes de l'animal dans un jardin, une grande quantité d'asperges poussera au-dessus.

En Belgique, les jeunes filles allaient, la veille des Rois, dans l'étable des brebis : « Si leurs mains s'arrêt[ai]ent sur le bélier elles se marier[ai]ent pendant le cours de l'année ».

Les Grecs modernes recommandent, en guise de protection, d'arroser de sang de bélier la première pierre d'un maison en construction, puis d'enterrer dessous l'animal.

Selon un dicton provençal, « quand les béliers se battent, ils présagent la pluie ». Dans le Dauphiné, on est sûr qu'il va pleuvoir lorsque « les béliers bêlent en levant la tête ».

Signalons encore qu'au Dahomey « on égorgeait rituellement un bélier devant les divinités locales (des arbres), en souvenir d'une ancienne légende, celle d'un paysan dont les semences étaient détruites par une araignée vorace. L'homme parvint à s'emparer de l'insecte, lui fit revêtir un vêtement magique, qui le soumettait à son pouvoir et il le força à biner ses champs. Un jour, un grand bélier passa près de l'araignée, qui le convainquit de se parer de l'habit ensorcelé. Il en devint le prisonnier et l'araignée s'enfuit. Lorsque le paysan revint vers ses terres, il découvrit le bélier travaillant à la place de sa minuscule captive. Depuis la coutume exige de sacrifier un bélier devant les arbres sacrés ».

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D'après Madonna Gauding, auteure de Animaux de pouvoir, Guides, protecteurs et guérisseurs (2006, traduction française Éditions Véga, 2006) :


Guide d'interprétation


En tant que symbole onirique

Virilité ; Force ; Intelligence ; Créativité ; Nouveau commencement ; Vision.


En tant que gardien ou protecteur

Protège les nouveaux projets créatifs ; Garde la propriété intellectuelle.


En tant que guérisseur

Soigne l'énergie faible ; Aide à recommencer.


En tant qu'oracle ou augure

Agissez en partant de vos idées ; Auto-évaluation.


Mythes et contes

Pour les Grecs et les Romains, les cornes spiralées du bélier étaient des symboles d'illumination. Le bélier est aussi associé au dieu romain Mars et à la force au combat.


Si le bélier est votre animal de pouvoir

Vous êtes très intelligent et avez une imagination active Votre mental vorace a besoin d'une stimulation extérieure constance. Vous avez le pouvoir d'inspirer et d'initier de nombreux projets créatifs. Votre entourage vous voit comme puissant, charismatique et visionnaire. Vous ne craignez pas d'attaquer directement les situations, mais le faites impulsivement, sans trop planifier. Sous votre meilleur aspect, vous inspirez spirituellement au pire, vous êtes très agressif et aveugle aux besoins des autres.


Demandez au bélier de vous aider

  • à intégrer vos côtés masculin et féminin, symbolisés par sa virilité énergique et la féminité de ses belles cornes spiralées

  • à être moins combatif et plus sensible à votre famille et à vos collègues.

Accéder au pouvoir du bélier en :

  • imaginant de grandes cornes torsadées poussant de votre tête intelligente et en notant toute idée créative qui émerge

  • envisageant le meilleur avenir pour vous-même, votre nation et le monde.

Le bélier peut trouver pied sur une corniche de 5 cm et sauter de là par-dessus des vides de 6 mètres de large. Comment ferez-vous le saut depuis les idées à peine esquissées aux entreprises florissantes ?


Élément Terre."

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D'après Le Livre des symboles, réflexions sur des images archétypales (2010) dirigé par Ami Ronnberg et Kathleen Martin, avec le concours des auteurs de ARAS,


"[...] Si l'agneau rappelle la nouveauté du soleil printanier, le bélier adulte, signe zodiacal de l'équinoxe de printemps, signifie la lumière et la chaleur du soleil renaissant hardiment après les ténèbres de l'hiver. Depuis le Paléolithique, ses magnifiques cornes enroulées ou en spirale ont été associées à la souveraineté du soleil et au rut vital des mâles en compétition. Au cours de la saison du rut, les mâles s'affrontent dans un combat direct et frontal afin de déterminer la hiérarchie du groupe. Ils s'accrochent par leurs cornes et tordent le cou ou se dressent sur leurs pattes arrière et se jettent l'un contre l'autre. Le grondement et le fracas des combats de béliers, qui peut s'entendre à des kilomètres à la ronde, évoquant le tonnerre fertilisant de dieux tels que Zeus, Indra et Thor. Amon-Râ, le dieu solaire de l'ancienne Égypte, était représenté comme un bélier, tandis que Khnoum, le démiurge à tête de bélier, était dépeint avec un tour de potier sur lequel il modelait l'être matériel. Agni, le dieu védique du feu, transportait ses bâtons à feu sur le dos d'un bélier ; il est l'emblème du troisième chakra situé au niveau du plexus solaire, le siège brûlant de la force vitale, des affects violents et des passions audacieuses.

Le bélier mythique pote une toison d'or étincelante comme le soleil, évoquant le trésor de la conscience solaire "difficile à obtenir" et objet convoité de quêtes initiatiques et héroïques. La plus célèbre est celle de Jason, qui remporte la toison d'or après avoir été avalé et recraché par le dragon primordial qui la gardait dans un lieu de l'Hadès. Dans les mystères de la renaissance de la Grande Déesse Mère, le dieu Hermès, guide des âmes, est le "bélier" qui engendre l'enfant divin ; celui-ci, ressemblant au nouveau soleil, signifie la montée de l'âme depuis les ténèbres nocturnes du monde souterrain."

Karl Kerényi, Hermes der Seelenführer, Rhein-Verlag, Zürich, 1944.

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Dans son jeu de carte L'Oracle du peuple animal (Guy Trédaniel Éditeur, 2016), Arnaud Riou regroupe les animaux par famille. Le bélier appartient selon lui à la famille de l'action, avec l'éléphant, le colibri, l'ours, le renard, le cheval, le bison, le requin, le castor et le dragon.


"Au-delà de nos concepts, de nos belles théories, de nos idées et de nos valeurs, le passage à l'acte est une dimension fondamentale de notre humanité. Nous avons beau avoir le plus bel idéal, nous ne serons pas heureux tant que nous ne l'aurons pas réalisé. De la même façon, si nous passons à l'action en permanence sans prendre le temps de ressentir à quels besoins fondamentaux correspondent les actions que nous entreprenons, nous ne resterons que dans la dimension superficielle de notre être et notre vie manquera de sens. Notre santé s'appuie sur notre inspiration et notre expiration. Plus nous respirons profondément, plus nos perspectives s'élargissent.


L'inspiration correspond à l'intuition, la méditation, l'introspection, la sagesse. L'expiration correspond au passage à l'acte, à la décision, à l'action compatissante.

C'est alors tout un art de passer à l'action en s'appuyant sur une intention claire, sans pour autant y mettre trop de volonté. C'est tout un art de n'être ni dans la procrastination, l'art de remettre à demain ce qu'il serait juste d'entreprendre aujourd'hui. C'est tout un art aussi de travailler quotidiennement sans tomber dans la surchauffe, la dépression ou le découragement.

[N.B. La syntaxe fautive de cette fin de paragraphe n'est pas de mon fait (ni... ni ?) : je recopie scrupuleusement l'article afin que chacun puisse se faire sa propre opinion.]

La volonté égotique est dure et empêche la fluidité de nos actions. Lorsqu'il tire à l'arc, le samouraï est précis sur le centre de la cible qu'il vise. Toute sa concentration est posée sur la qualité de sa posture. Puis, il détend le pouce et l'index, et libère la flèche. Il ne met aucun volonté dans ce dernier mouvement. Poser une intention claire et passer à l'acte avec douceur et précision est tout un art.

C'est à cet art que nous invite cette famille d'animaux. [...]


Se fixer un défi et le relever quotidiennement est plus réaliste

Que d'entretenir un rêve sans oser le déranger.

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La carte représente un Bélier. Le Bélier est de face. Il est déterminé dans sa posture. Il prend tout l'espace. Nous sommes dans un environnement où l'humain est proche. Nous sommes au début de la journée.

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Le Bélier est celui qui ouvre les portes qui nous semblaient fermées. C'est un animal associé à la persévérance, à la constance, à l'effort, à la percée et à l'aboutissement de projets qui jusqu'ici stagnaient. Si le Bélier peut se montrer doux et affectueux, c'est aussi un animal de pouvoir. Il aime la confrontation et le combat. Il se réalise dans l'affrontement. Il a besoin de se mesurer à l'autre pour affirmer qu'il est le plus fort, le plus robuste et le plus solide. Comment cet herbivore de taille modeste a réussi à s'imposer au fil du temps comme symbole de la force et de la puissance ? C'est là tout le paradoxe du Bélier. Le Bélier incarne l'énergie de l'action, du passage à l'acte. C'est un animal lié à la jeunesse , à la fougue.

Le Bélier aime prendre la tête de la gouvernance. Il n'aime pas qu'on lui dise ce qu'il a à faire. Il aime affronter son leadership. Cette posture lui a valu d'être un animal régulièrement sacrifié par les Celtes qui espéraient ainsi posséder sa force et sa détermination.

Les guerriers celtes ornaient leur casque avec les cornes du Bélier. Ils affirmaient ainsi leur puissance et leur suprématie. Autrefois, les guerriers qui avaient projet d'envahir une citadelle utilisaient un tronc sculpté, un "bélier", pour défoncer la porte et établir une faille. Porté par les courageux soldats, le bélier, par ses coups répétés venait à bout des obstacles les plus solides.


Lorsque le Bélier vous apparaît dans le tirage, c'est pour vous interroger sur l'avancement de vos projets. Mettez-vous tous les moyens en œuvre pour faire aboutir ce qui vous tient à cœur ? Faites-vous tous les efforts nécessaires ou avez-vous tendance à laisser faire, à vous décourager ? Le Bélier met fin à toute procrastination. Il vous montre qu'avec la constance et la persévérance, vous pourrez faire aboutir votre projet de vie. Le Bélier peut aussi vous apparaître pur vous inviter au changement. Car le Bélier n'aime pas ce qui est terne, dans éclat, morne, tiède. C'est un animal de feu associé à la jeunesse, à la création, à l'innovation, au printemps et à la naissance. Le Bélier est un chef de file, un leader, un innovateur. Lorsque vous avez la sensation de tourner en rond, de ne pas oser taper aux portes. Lorsque vous remettez en question votre légitimité, et que vous êtes en déficit d'estime de vous, faites appel à l'énergie du Bélier. Vous incarnerez alors rapidement la constance nécessaire à la levée de tous vos idéaux.


Mots-clés : La persévérance - La ténacité - La constance - La pugnacité - La jeunesse - La prise de risque - La naissance - La confiance - Le passage à l'acte.


Signification renversée : Lorsque le Bélier vous apparaît dans sa signification renversée, c'est pour vous avertir d'un probable entêtement. Vous vous confrontez si fort à l'autre que vous finissez par ne plus savoir ce que vous désirez profondément vous-même. Vous êtes dans la confrontation, la rivalité, la compétition. Si ces dimensions peuvent être stimulantes par endroits, cette attitude génère surtout du conflit et de la distance. Le Bélier renversé peut vous inviter à prendre du recul, à revenir à vous, à sortir du conflit par la grande porte. A prendre conscience que tout conflit extérieur n'est qu'un reflet d'un conflit intérieur. Peut-être êtes-vous trop réactif, émotionnel. Car le Bélier renversé peut signaler une obstination qui peut aller jusqu'à la tyrannie ou à l'égoïsme exacerbé. Revenez à vous, à votre respiration, et à ce qui vous tient à cœur, alors vous pourrez vous recentrer et retrouver l'inspiration juste.


Le message du Bélier : Je suis le Bélier. Je suis associé à la planète Mars. Le dieu des conquêtes et des victoires. Pour qu'il y ait victoire, il faut qu'il y ait combat. Es-tu prêt à rassembler tes forces pour partir au combat ? Ne réponds pas trop vite et prends le temps de ressentir la source du combat. Je ne pose pas la question à la part de toi belliqueuse qui souhaite se venger d'une blessure du passé. Je m'adresse au maître en toi.. Celui qui est porteur de ta destinée. Le véritable guerrier est le guerrier du cœur. Celui-là a compris que le premier des combats n'est pas un combat contre l'autre, mais un combat pour soi. Un combat pour affirmer au monde ta virilité, ton courage et la beauté de ton cœur. Tu es une belle personne. Tu es inspiré. Tu es le gardien de ton âme et de tes idéaux. Tu sais profondément comment apporter la lumière sur le monde. Tu sais ce qui te tient à cœur. Lorsque tu t'apaises, tu es en lien avec le meilleur de toi et le meilleur de l'humanité. Ne doute pas de toi. Si tu le veux, avec moi, tu iras au bout de tes projets. tu feras aboutir ce qui te tient à cœur. Je t'aiderai à dépasser le masque de confiance pour affirmer ta lumière et transmettre au monde la plus belle partie de soi-même.


Le rituel du Bélier : Je m'accorde quelques instants pour revenir à mon centre. Je respire profondément. Je me relie à ce qui me tient à cœur, à mon projet de vie. Je maintiens ma colonne vertébrale droite. Je tapote avec la main au niveau de mon plexus et répète sept fois cette phrase : "Je suis digne de faire aboutir mes projets. Aujourd'hui, moi, (mon prénom), je m'associe à 'énergie du Bélier. J'incarne la persévérance nécessaire pour faire aboutir ce qui me tien à cœur. Je renouvelle ma foi. J'ai confiance en moi. Même si je sais pas toujours comment faire, je me réjouis de me relier à mes ressources. Je révèle ma détermination, mon ardeur et la flamme de mon cœur. J'utilise l'épreuve, le refus, pour trouver d'autres pistes, d'autres voies, d'autres ressources. chaque nouvel obstacle est une occasion de me dépasser. je fais confiance en la vie, et je me fais confiance pour apprendre de mes erreurs, me relever de mes chutes." Je respire profondément, je laisse résonner cette phrase en moi."

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Symbolisme celte :

Selon L'Oracle des Druides, Comment utiliser les animaux sacrés de la tradition druidique (édition originale : 1994 ; traduction française Guy Trédaniel, 2006) de Philip et Stephanie Carr-Gomm, le bélier (Reithe) est associé à trois mots-clefs :

Sacrifice - Percée - Réussite.


La carte représente un bélier, une brebis et un agneau. A gauche pousse la fausse scabieuse (qu'on appelle "reins de bélier" en anglais), à droite l'oseille, et au premier plan la ronce. Un serpent à tête de bélier est sculpté sur le rocher.

Le bélier donne la possibilité d'une percée, l'énergie permettant de pénétrer, de surmonter et de réussir. Il est particulièrement attaché à son lieu de naissance et représente donc aussi l'enracinement, le lien, l'équilibre. Il vous aidera à trouver en vous la force de réussir. Mais ne craignez pas que le succès vous fasse "tourner la tête" ; le bélier sait rester accroché au sol et vous rappeler aux réalités quotidiennes. Soyez persévérant et patient, occupez-vous de vos besoins au jour le jour, travaillez à la réalisation de vos projets, et le jour de la percée viendra. Vous accomplirez ce que vous aviez prévu et vous découvrirez que vous êtes enfin "arrivé".


Renversée, la carte indique qu'un sacrifice de votre part est peut-être nécessaire. Même si vous aimez la compétition, et les coups de cornes échangés entre amis et ennemis, il est parfois nécessaire de lâcher prise, aussi pénible que ce soit. Une porte s'ouvrira peut-être sur une vie à laquelle vous ne pensiez pas pouvoir prétendre. Plutôt que de vous cogner la tête contre un mur, tenter de contourner celui-ci. Sinon, c'est peut-être le signe que vous devez changer de direction ; le mur est certainement là pour une raison, même si elle vous reste obscure pour 'instant. Demandez-vous où vous vous sentez bien, puis suivez votre instinct et faites confiance à votre sens pratique ; vous créerez autour de vous un environnement confortable qui vous donnera toute satisfaction.


Le Bélier dans la Tradition


Jeudi, jour léger de Saint Columba,

conduits les moutons au pâturage

Adage de Haute Écosse

Les Celtes élevaient les moutons principalement pour leur lait et leur laine, mais aussi pour leur viande. Le mouton, tout comme l'arbre, était révéré pour son immense contribution à la vie humaine. Ils symbolisaient tous deux le sacrifice : l'arbre donnait sa vie pour fournir la chaleur, les meubles et les abris, après avoir produit l'ombre, l'oxygène et les fruits, le mouton fournissait la nourriture après avoir donné de la laine et du lait en abondance. Les druides gaulois appelaient le dieu des arbres "Esus", deux cents ans au moins avant la naissance de Jésus-Christ. Esus était venu lui aussi pour symboliser le sacrifice, croyance qui pourrait bien signaler un mystérieux point commun entre le druidisme et le christianisme des origines. De plus, une légende raconte que l'enfant Jésus serai arrivé à Glastonbury avec son oncle, Joseph d'Arimatie, dans un endroit où on produisait de la laine en grande quantité.

Malgré la valeur économique des moutons vivants, les béliers avaient une grande valeur sacrificielle. On les faisait rôtir lors de fêtes se déroulant à proximité des menhirs à Beltane et au milieu de l'été. On attachait le bélier à la pierre et on lui tranchait la gorge, puis on laissait la place aux danses, aux jeux et aux luttes. On pensait que la viande du bélier portait chance à ceux qui en mangeaient. Une telle fête a lieu de nos jours à Kingsteignton pour la Pentecôte, mais le mouton n'est pas abattu en public.

On racontait en Écosse que les moutons savaient parler et qu'ils auraient dit en quittant le paradis : "Ne brûlez pas nos os." Il fallait donc faire très attention en rôtissant le mouton et éviter de jeter ses os dans le feu. D'autre part, les chenets se terminaient souvent par des têtes de béliers, rappelant peut-être le rôle sacrificiel de ces animaux.

Lorsqu'on tuait un mouton, on attribuait traditionnellement son foie au charpentier, son cœur au berger et son épaule à l'astronome, qui dans les temps anciens devait être aussi l'astrologue. D'ailleurs, les druides ou ovates écossais, gallois et parfois anglais utilisaient une méthode de divination basée que l'observation d'une omoplate de mouton.

On disait que les moutons savaient parler parce que leur os "parlaient" lors des divinations et que leurs peaux servaient à confectionner les tambourins et les cornemuses.

On pensait que les moutons avaient de grandes propriétés médicinales : les maladies chroniques pouvaient être guéries en dormant au milieu d'eux, leurs rotules guérissaient les crampes et on recommandait une décoction de leurs excréments pour soigner la coqueluche et la jaunisse.


L'enseignement des Contraires

Le héros du Voyage de Maelduin et se vingt compagnons abordent une série d'îles magiques où règnent des animaux. Sur l'une d'elle, l'île du noir et du blanc, une clôture de cuivre sépare deux troupeaux de moutons ; l'un comprend uniquement des moutons blancs, l'autre des moutons noirs. Un berger jette les moutons un par un d'un troupeau à l'autre : les moutons noirs jetés dans le troupeau blanc deviennent noirs. Cette histoire énigmatique est en fait un enseignement sur la nature des contraires dont les druides font souvent mention mais qui est encore plus claire dans le taoïsme. Elle rappelle aussi qu'un mouton noir dans un troupeau blanc est censé porter chance.

Un autre conte, Le Voyage de Teigue, évoque une île peuplée de moutons aussi grands que des chevaux. L'un des troupeaux est composé de béliers géants, dont l'un doté de neuf cornes, attaque les hommes de Teigue. Ce dernier réussit à tuer l'animal et à le faire emporter, mais vint hommes sont nécessaires à cette tâche. On trouve un autre bélier géant dans la vieille ballade anglaise The Derby Tup qui décrit une bête dont "les cornes grandirent tellement qu'elles raclaient bruyamment le ciel chaque fois qu'elle secouait la tête. Ce conte semble faire allusion à des sacrifices de béliers au solstice d'hiver.


Le Serpent à tête de bélier

Les Celtes et les druides attachaient une signification symbolique très importante au serpent à tête de bélier qui apparaît trois fois sur le chaudron de Gundestrup. On a retrouvé en France des sculptures sur bronze et sur pierre représentant le dieu Cernunnos, entouré de deux serpents cornus. Ces créatures apparaissent également sur des gravures gauloises représentant la déesse accompagnée d'un jeune homme. Sur une image retrouvée dans le Gloucestershire, les jambes de Cernunnos sont remplacées par des serpents dont les têtes cornues émergent des deux côtés de sa propre tête. La tête du bélier, rajoutée au corps du serpent, devait amplifier le symbolisme de la force masculine et de son pouvoir de pénétration. Ce symbolisme est également renforcé par l'association iconographique du serpent à tête de bélier et des dieux du ciel et du soleil. Le lien entre le bélier et le serpent prouve qu'on n'utilisait pas le bélier pour symboliser la guerre mais pour représenter la puissance, la fertilisation et la guérison."

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Selon Divi Kervella, dans Emblèmes et symboles des Bretons et des Celtes (2001),


"Dans l'ancienne civilisation celtique on trouve un drôle d'animal au corps de serpent et à la tête de bélier. C'est le symbole de l'énergie, union de l'eau et du feu, sorte de version celtique du yin et du yang asiatique. On le retrouve souvent en compagnie du Dieu Cornu. Il est très présent également dans les figures représentant des divinités guerrières ou des cavaliers, dans ce dernier cas, il pourrait avoir évolué en dragon.

Par jeu de mot (ce qu'on nomme en héraldique armes parlantes, c'est également l'emblème de la Cornouailles bretonne dont le nom breton est Kernev et qui peut se décomposer phonétiquement en kern "cornes" + knev (forme ancienne de krev "toison"), or quel est l'animal qui possède à la fois des cornes et une toison si ce n'est le bélier ? Les Cornouaillais sont encore assimilés à des béliers par leurs voisins. On a par exemple l'expression "An dra-se ne c'hoarvezo biken pe me 'vo maout e Kernev !" (si jamais cela se produit, je veux bien être transformé en bélier de Cornouailles = en Cornouaillais !), ce qui équivaut à un très haut degré d'improbabilité.

Le bélier se trouve encore de nos jours sur les armoiries de la ville de Kemper, le chef-lieu de cette province et les habits bigoudens sont ornés du motif de broderie appelé korn-maout (corne de bélier).

Le maout est l'emblème du gouren (lutte bretonne), car le premier prix des tournois était autrefois - et parfois est encore - un mouton. Cette expression est d'ailleurs devenue idiomatique en breton. Quand on dit : Gant piv eo aet ar maout ? "Qui a gagné ?" ; "Qui est arrivé premier ?" ou Aet eo ar maout ganin ! "J'ai gagné ; je suis premier", plus personne ne pense au sens littéral de "Qui a gagné le mouton ?" ou "J'ai gagné le mouton !"

(En breton, maout a le sens de mouton mâle sans distinction d'âge, le bélier adulte se dit précisément hourz, et le bélier étalon tourz)."

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Mythologie :


Selon Aurore Petrilli auteur d'un article intitulé "Le trésor du dragon : pomme ou mouton ?" (paru In : Gaia : revue interdisciplinaire sur la Grèce Archaïque, numéro 16, 2013. pp. 133-154) :

[...]

Le bétail doré est toujours considéré comme un signe divin, ou d’appartenance à la divinité : les troupeaux du Soleil, le fait de dorer les cornes d’une victime dédiée à une divinité avant le sacrifice, l’apparition d’un animal doré dans un troupeau…

Si l’on remonte suffisamment loin dans le mythe des Argonautes, on découvre de plus que le fameux bélier à la Toison d’or n’est autre qu’un rejeton des amours de Poséidon et de la vierge Théophanè (Lacarrière, 2005, p. 394). Après l’avoir enlevée, il la transforma en brebis et se métamorphosa lui-même en bélier pour s’unir à elle. Un agneau à la toison dorée, un « chrysomallos » naquit de cette union. Adulte, il développa les aptitudes extraordinaires que nous connaissons. Il sauva aussi d’une mort prochaine Phrixos et Hellé, les deux enfants de Néphélée, en les prenant sur son dos et en s’envolant par-dessus la mer avec eux. C’est là qu’Hellé mourut noyée dans l’Hellespont après être tombée du dos de l’animal. Seul Phrixos atteint l’autre rive, la Colchide. Le bélier, quant à lui, y fut sacrifié en l’honneur de Zeus et sa magnifique toison offerte à Aiétès, roi de Colchide. Celui-ci fi t suspendre l’objet à un chêne dans un bois consacré à Arès. La naissance de ce bélier est donc surnaturelle. Les amours d’un dieu et d’une mortelle ne sont jamais sans conséquences et les fruits qui en résultent ont souvent un caractère monstrueux. Celui qui se cache en « Chrysomallos » n’est pas tant dans son aspect physique, car c’est un bélier normalement constitué, mais plutôt dans ses facultés prodigieuses.

Quant à l’or de sa toison, elle marque d’évidence son ascendance divine et sa grande valeur. Il est presque étonnant de constater le sort qui échut à l’animal. Son sacrifice servant de plus à remercier un autre dieu que son propre père, puisque c’est à Zeus qu’il est sacrifié. Sa peau, offerte en présent à Aiétès, n’en finira pas moins dans un lieu consacré à la divinité locale : Arès.

L’une des tentatives, la plus célèbre sans doute, d’expliquer l’or de la toison du bélier est celle qui la rapproche de l’orpaillage. En effet, on dit souvent que la technique utilisée à l’époque par les chercheurs d’or était d’utiliser une peau de mouton pour filtrer l’eau des rivières charriant des paillettes d’or. Le métal, suffisamment lourd, restait accroché dans les poils de la toison. Ce procédé est notamment expliqué par Strabon (IX, 2, 19). Cette théorie est commentée par Faure, puis par Dacosta ( p. 99).

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Littérature :


Jean Giono dans Le Grand Troupeau (Editions Gallimard, 1931) raconte le départ des hommes et notamment celui des bergers, à la guerre de 1914 :


Devant les moutons, l'homme était seul. [..] Et derrière lui, il n'y avait pas de bardot portant le bât, ni d'ânes chargés de couffes, non ; seulement, devançant les moutons de trois pas, juste après l'homme, une grande bête toute noire et qui avait du sang sous le ventre.

La bête prit le tournant de la route. Cléristin avait mis ses lunettes. Il plissa le nez et il regarda :

"Mais, c'est le bélier, il dit, c'est le mouton-maître. C'est le bélier !"

On fit oui de la tête tout autour de lui. On voyait le bélier qui perdait son sang à fil dans la poussière et on voyait aussi la dure volonté de l'homme qui poussait tous les pas en avant sur le malheur de la route.

[...]

Vint un autre bélier, et on le chercha d'abord sans le voir ; on entendait sa campane, mais rien ne dépassait les dos des moutons et on cherchait le long de la troupe. Et puis on le vit : c'était un mâle à pompons noirs. Ses deux larges cornes en tourbillons s'élargissaient comme des branches de chêne. Il avait posé ses cornes sur les dos des moutons, de chaque côté de lui et il faisait porter la lourde tête ; sa tête branchue flottait sur le flot des bêtes comme une souche de chêne sur la Durance d'orage. Il avait du sang caillé sur ses dents et dans ses babines.

Le détour de la route le poussa au bord. Il essaya de porter sa tête tout seul, mais elle le tira vers la terre, il lutta des genoux de devant, puis s'agenouilla. Sa tête était là, posée sur le sol comme une chose morte. Il lutta des jambes de derrière, enfin il tomba dans la poussière, comme un tas de laine coupée. Il écarta ses cuisses à petits coups douloureux : il avait tout l'entre-cuisse comme une boue de sang avec, là-dedans, des mouches et des abeilles qui bougeaient et deux œufs rouges qui ne tenaient plus au ventre que par un nerf gros comme une ficelle.

[...]

Le bélier était toujours là par terre, les jambes écartées. Le sang s'était mis à couler de lui ; toute sa laine basse, mouillée de sang, défrisée, lourde, pendait comme une mousse sous une fontaine. Il ne se plaignait pas ; il respirait de toutes ses forces et le souffle de ses naseaux avait creusé deux petits sillons dans la poussière.

[...] Et le bélier vient de mourir. Il a relevé d'un seul coup sa lourde tête branchue, comme sur un ordre ; il a regardé le ciel d'entre les branches de ses cornes : un long regard interminable. Le cou tendu, il a eu un petit gémissement gémissement d'agneau : il a écarté les cuisses, étiré les jambes ; il a lâché un paquet de sang noir et de tripes avec un bruit de ballon qui se crève.

[...]

A l'aube, Clara ouvrit les portes de son petit café, au tournant de la route. Au milieu du carrefour vide, il y avait une chaise toute seule. Le troupeau était tari, le berger parti, un chien léchait, à grands coups de langue, le sang du bélier.

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