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  • Photo du rédacteurAnne

Mon amie la Rose



Étymologie :


  • ROSE, subst. fém.

Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1140 « fleur du rosier » (Pélerinage Charlemagne, éd. G. Favati, 266) ; 2. 1360 rose d'outremer (Invent. d'Anjou, n°515 ds Gay t. 2) ; xive s. roses sauvages « églantines » (Moamin, éd. H. Tjerneld, IV, 33, 4) ; 1562 rose de Jericho (A. Du Pinet, Hist. du monde, t. 2, p. 334) ; 1660 rose d'Inde (Oudin Fr.-Esp.) ; 1803 rose de Noël (Boiste) ; 1823 rose du Japon « camélia » (ibid.) ; 1842 rose d'hiver (Ac. Compl.) ; 3. 1552 fig. un front de rose (Ronsard, Amours, éd. P. Laumonier, t. 4, p. 21) ; 1557 teint de rose (O. de Magny, Souspirs, éd. Courbet, p. 24) ; 1685 l'Aurore aux doigts de rose, cf. le gr. homérique η ̃ μ ο ς δ'η ̓ ρ ι γ ε ́ ν ε ι α φ α ́ ν η ρ ̔ ο δ ο δ α ́ κ τ υ λ ο ς (La Fontaine, Le Remède ds Contes, éd. G. Couton, p. 368) ; 4. 1228 eve rose (Jean Renart, Guillaume de Dole, éd. F. Lecoy, 4265) ; ca 1393 eaue rose (Ménagier, II, 252 ds T.-L.) ; ca 1480 eau de rose (Mist. Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 40012) ; 1739 fig. (Voltaire, Lettre au pr. roy. de Pr., 1er juin ds Littré : c'est une pièce toute d'amour, toute distillée à l'eau rose des dames françaises) ; 5. 1694 bois de rose (Corneille) ; 1909 id. adj. « couleur » (La Mode illustrée, 28 nov., p. 576a ds Quem. DDL t. 16). B. 1. 1461 se baigner en roses « éprouver un vif plaisir » (Georges Chastellain, Chroniques ducs de Bourgogne, éd. Kervyn de Lettenhove, t. 3, p. 154) ; 2. 1578 les roses de la vie « ses plaisirs, ses charmes » (Ronsard, Second livre des Sonnets pour Hélène, éd. M. Smith, p. 148) ; 3. 1626 cueillir la rose « prendre la virginité d'une fille » (Sorel, Francion, éd. E. Roy, t. 3, p. 179) ; 4. 1611 nulle rose sans épine (Cotgr.) ; 1651 il n'est point roze sans epine (Scarron, Virgile travesty, l. VI, p. 122) ; 5. 1640 c'est la plus belle rose de son chapeau « le plus grand honneur, le plus grand avantage » (Oudin Curiositez) ; 6. 1666 être sur un lit de roses (La Fontaine, Oraison de St Julien ds Contes, p. 82) ; 1844 être sur des roses (Balzac, Paysans, p. 98) ; 1961 envoyer qqn sur les roses « éconduire » (J. Cau, Pitié de Dieu, Paris, Gallimard, p. 28) ; 7. 1801 voir tout couleur de rose « tout considérer avec optimisme » (E. Despréaux, in Les Dîners du Vaudeville, n°47, thermidor an 9, p. 24 ds Quem. DDL t. 19). C. 1. 1380 « ornement en forme de la fleur » (Invent. de Charles V ds Havard 1890) ; id. rose d'or (ibid. ds Laborde) ; 2. 1634 rose « étoile à 32 divisions représentée sur une boussole, des cartes marines » (E. Cleirac, Explic. des termes de marine ds Jal) ; 1678 rose des vents (Guillet, 3e part.) ; 3. 1689 « marque ronde que le teinturier laisse au bout de l'étoffe » (Règlem. sur les manuf., Teinturiers en laine, art. 34 ds Littré) ; 4. 1690 « baie circulaire garnie de vitraux dans une église » (Fur.) ; 5. 1723 grande rose « linge damassé fabriqué en Flandre et en Normandie » (Savary t. 1, p. 546) ; 6. id. diamant en rose (ibid., p. 1694) ; 1740 diamant rose (Ac.) ; 1752 « diamant taillé par dessus en facettes et plat en dessous » (Trév. Suppl.) ; 7. 1736 rose du gouvernail « femelot des ferrures du gouvernail » (Aubin) ; 8. 1923 rose des sables (Lar. univ.). Empr. au lat. rosa « rose (fleur), rosier »

  • ROSE, adj. et subst. masc.

Étymol. et Hist. 1. Ca 1165 « qui a la couleur rouge clair » (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 5531) ; 1852 rose thé (Gautier, Émaux, p. 53); 1909 rose saumon (La Mode illustrée, 3 oct., p. 457 ds Quem. DDL t. 16) ; 2. 1809 tout n'est pas rose (Les Méditations d'un hussard, xj-xij, ibid., t. 19) ; id. voir tout en rose (Brazier, in Le Chansonnier du vaudeville, V, p. 8, ibid.). Empl. adj. de rose sens n°1*.


Voir aussi la définition détaillée du nom qui propose quelques éléments de symbolisme.

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Expressions populaires :

Claude Duneton, dans son best-seller La Puce à l'oreille (Éditions Balland, 2001) nous éclaire sur le sens d'expression populaires bien connues :


A l'eau de rose : On ne croirait guère que l'expression à l'eau de rose si simple, si courante, si limpide, réservât des surprises au détective du langage... Tout le monde sait ce qu'est « un roman à l'eau de rose » - chacun en a lu : c'est un roman assez mièvre, déroulant une histoire d'amour gentillette, voire un peu niaise, où des sentiments conventionnels, mais toujours élevés, s'expriment dans un style convenu, plutôt fade, et généralement bourré de clichés. Ces jolis récits destinés aux jeunes filles rangées d'autrefois, ont du reste repris du poids dans la littérature contemporaine repris du poids dans la littérature contemporaine ; ils font le régal des jeunes filles dérangées d'aujourd'hui, de leurs père et mère, du cousin informaticien, de l'ex du grand-père et de ses petites nièces, de tous ceux et celles qui se recomposent un goût littéraire sûr - la collection Harlequin a pénétré chez les notaires et les académiciens.

Il est donc urgent de définir la tendance ; cette locution à l'eau de rose, avec sa fraîcheur de tonnelle, son parfum désuet de table de toilette marbrée, a de quoi retenir. Or, premier mystère, la lexicographie du XIXe siècle l'ignore totalement. Ni Littré, ni Larousse, ni Bescherelle, ni aucun des rapporteurs du langage familier ou "vert", ne la connaît. Au point que le Robert des locutions d'Alain Rey et S. Chantreau, de 1981, précise : « Avec cette forme et ce sens la locution est récente (fin XIXe siècle, sans doute). »

Entendons-nous ! Les dictionnaires connaissent « l'eau de rose », la substance, le liquide cosmétique, « distillat de rose », ou décoction de pétales de roses simplement filtrée - produit fort ancien, au Moyen Âge eve rose, puis eau rose jusqu'au XVIIIe siècle apparemment, eau de rose ensuite… Je veux parler de la métaphore, image de mollesse, d'indolence, découlant de cette eau-là. On la relève déjà chez Voltaire en 1759 sous la forme archaïque à l'eau de rose (in Wartburg) ; Stendhal parle encore dans son Journal (1813-1818), d'« artistes à l'eau rose ». Faudra-t-il donc vraiment attendre la fin du siècle romantique pour qu'elle se reformule de la manière que nous connaissons ?... Eh bien non ; la locution à l'eau de rose existait bel et bien dès la fin du XVIIe siècle, j'en apporte la preuve avec ce texte rare d'une comédie de Dumoncel, L'Intérieur des comités révolutionnaires, créée à Paris le 27 avril 1795. Un membre du tribunal y brocarde un citoyen modéré qui renâcle pour coiffer le fameux bonnet rouge :

« Aristide [avec ironie] : Monsieur Dufour n'est pas l'ami du signe de la liberté ?

Dufour : Non, depuis que vous en avez fait un signe de sang !

Aristide [avec ironie] : Nous ferons en faveur de Monsieur Dufour des révolutions à l'eau de rose. »

De plus, une investigation dans le Trésor de langue française (1979) fait paraître la locution sous la plume de Rodolphe Toepffer, dans les Nouvelles Genevoises en 1839 : « Leurs phrases précieuses et leurs sentiments à l'eau de rose. »

Mais alors intervient un second mystère : comment se fait-il qu'une expression pareille n'apparaisse pas dans l'énorme masse des écrits publiés au XIXe siècle, par les auteurs les plus fameux comme les plus effacés ?... Où est-elle passée entre-temps ? La seule hypothèse que je puisse émettre à la rigueur, est que la locution appartenait à un registre interlope - trop familière peut-être pour s'intégrer au langage officiel, Hugo, Flaubert, ou Littré, tout en n'étant pas suffisamment « peuple » pour figurer dans les œuvres et les lexiques d'argot… Son utilisation par le suisse Toepffer - un homme en dehors des modes et des courants dont Sainte-Beuve a dit : « Il s'est fait un mode d'expression libre, franc , pittoresque » - et son utilisation par les membres du tribunal révolutionnaire, d'évidents originaux,semble appuyer cette version des faits.

Mais je ne suis pas certain d'avoir découvert... le pot aux roses !


Découvrir le pot aux roses : Découvrir le pot aux roses - le secret, le mystère d'une affaire - est une façon de parler qui date au moins du XIIIe siècle où on la rencontre déjà bien établie dans un Dit de vérité :


Car je tanstost descouvreroi

Le pot aux roses.


Comme le remarque P. Giraud, « ces mystérieuses roses ont depuis longtemps exercé la sagacité des linguistes ». Certains ont formulé l'hypothèse d'un pot de fleurs ; le « pot aux roses ornant la fenêtre ou le balcon des belles, et sous lequel les galants plaçaient les billets doux qu'ils leur adressaient », propose M. Rat - un pot que, naturellement, le mari jaloux pouvait « découvrir ».

Plusieurs détails rendent cette proposition irrecevable étant donné l'ancienneté de la locution. D'abord, le « pot de fleurs » ne s'emploie que depuis le XVIIe siècle et le mot « découvrir » n'a pris le sens de « faire une découverte » que vers le XVIe siècle. Enfin, inconvénient majeur, les rosiers ne se cultivent pas en pots ! Du moins la rose actuelle, persistante, embellie, est une fleur relativement récente, qui s'est surtout développée avec les progrès de l'horticulture au début du XXe siècle. Les roses d'antan dérivaient directement de la simple églantine avec laquelle elles étaient plus ou moins confondues, comme en témoigne le vieux proverbe pessimiste : « Il n'est si belle rose qui ne devienne gratte-cul ! » C'était une fleur fragile, passagère, éclose à midi, fanée le soir, de tout temps le symbole de la fugacité de belles choses.

C'est à cause d'une observation botanique directe, et non par hyperbole, que les poètes se désolent de voir la rose fanée au soir de son éclosion :

Les roses overtes et lees (épanouies)

Sont en un jor toutes alees


dit le Roman de la Rose, plus tard Malherbe lançait sa fameuse lamentation :


Et rose elle a vécu ce que vient les roses,

L'espace d'un matin.


Autre supposition, le pot aux roses serait un « pot au rose », c'est-à-dire un « pot qui contient le rose dont les femmes se fardent » ; le découvrir serait alors découvrir l'artifice, le « secret de la toilette d'une femme ». La même objection reste valable quant au sens tardif du mot découvrir ; de surcroît « la locution est d'une époque où la prononciation maintient distincte l'opposition au rose / aux roses et le pluriel est solidement attesté ».

En fait les exemples montrent que le sens ancien de l'expression est non pas « trouver » une chose cachée, mais au contraire « découvrir » au sens de « dévoiler, révéler un secret » qui devait normalement être gardé par la personne qui le laisse échapper. C'est ainsi que l'emploie notamment Charles d'Orléans au XVe siècle :


De tes lèvres les portes closes

Penses de sagement garder ;

Que dehors n'eschappe parler

Qui descouvre le pot aux roses.


Comme le démontre judicieusement P. Guiraud, il s'agit donc de « découvrir », au sens tout à fait matériel d'« enlever le couvercle » d'un pot qui contient des roses. Le secret apparaît alors...

Malheureusement, en ce qui concerne la locution, c'est à partir de là que le mystère s'épaissit ! Pourquoi ces roses ans un pot ? A quel usage ? Et surtout pourquoi recèleraient-elles un secret ?... On peut penser très matériellement à « l'eau de rose », cet ancêtre des parfums, en grande faveur au Moyen Âge, que l'on obtenait par distillation de pétales de roses macérés. L'eau (de) rose était considérée comme un liquide particulièrement pur et précieux. La jeune fille du Guillaume de Dole, calomniée par le vilain sénéchal, pleure de bien jolies larmes :


Lermes plus cleres d'eve rose

li couroient aval le vis (visage).


Comme tout parfum elle s'évente et s'évapore si on laisse le pot découvert... L'odeur se répand dans la pièce et révèle le secret de son existence ?... Ce n'est pas particulièrement concluant.

Pierre Guiraud aborde la même voie, mais en orientant son hypothèse sur la fabrication de l'essence de roses : « La Grande Encyclopédie en décrit longuement la distillation dans une "vessie" ou cornue qui était une "sorte de marras de la panse duquel sort un tuyau, etc. Ce récipient dont les parfumeurs ont autrefois fait mystère, peut servir commodément aux distillations des huiles essentielles un peu précieuses". »

« On voit l'intérêt de cette citation et de la phrase que j'en souligne ; le mystère est peut-être imaginaire et dérive tout simplement de notre expression, mais il n'est pas interdit cependant de voir dans le pot aux roses la cornue des parfumeurs. »

« Par ailleurs, Littré et le Larousse du XIXe siècle définissent rose comme un terme d'alchimie, la rose minérale étant une poudre résultant de la sublimation de l'or et du mercure. Je n'ai pu nulle part retrouver la trace de cette opération, mais elle fait songer à la pierre philosophale, qui est le symbole même du secret et du mystère. Notre pot aux roses pourrait donc bien être la cornue des alchimistes.

Nous nous garderons, ajoute P. Guiraud, de défendre ces hypothèses, nous ne les donnons au contraire que pour mieux montrer comment l'imagination se laisse entrainer sur la pente étymologique. »

Il est vrai que l'on ne voit pas clairement comment ces cornues, contrairement à un « pot » ordinaire, pourraient être « découvertes ». En revanche ces indications renvoient pertinemment à l'idée de secret attachée depuis toujours à la rose. L'expression latine sub rosa, « sous la rose » qui signifie « en grand secret », est employée un peu partout dans les langues européennes. L'origine de cette locution est elle-même obscure. La légende veut que Cupidon ait donné une rose à Harpocrates, le dieu du Silence, pour lui demander de ne pas trahir les amours de Vénus. La rose en serait devenue le symbole du secret. Autrefois on sculptait une rose au plafond des salles de banquets pour rappeler aux hôtes que les confidences échangées à la faveur des libations n'étaient pas destinées à courir les rues... Au XVIe siècle on prit également l'habitude de graver une rose sur les confessionnaux !

La rose bien gardée, symbole de l'amour et du mystère qui l'envelope, constitue précisément l'argument du célèbre Roman de la Rose Le poète est amoureux d'une rose ou plutôt d'un bouton vermeil, qui embaume le jardin d'Amour. mais les rosiers sont entourés d'une haie « fete d'espines mout poignant », et gardés par des figures allégoriques celles que Danger, Honte, Peur… Devant la hardiesses de l'amoureux qui a osé prendre un baiser. Jalousie fait construire une puissante forteresse pour protéger les rosiers. Il ne reste au poète qu'à se lamenter de ne plus voir la rose « qui est entre les murs enclose ».


Et quant du bessier me recors (je me souviens)

qui me mist une odor au cors

assez plus douce que de basme,

par un pot que je ne me pasme,

qu'encor ai ge au cuer enclose

la douce savor de la rose.


Ces tours d'horizon replacent certes le pot aux roses dans un contexte auquel il n'a probablement pas échappé à l'époque où il s'est formé, sans pour autant éclairer son origine de façon déterminante. Il y a quelque ironie à penser que cette expression gardera sans doute éternellement son secret !

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Botanique :


Robert Castellana et Sophie Jama, auteurs de "Floriculture et parfumerie : les origines de l’acclimatation végétale sur la cote d’azur." (Issued by The Phoenix Project, 2012) nous apprennent les vertus de la Rose de mai (Rosa centifolia) en lien avec la parfumerie :


Connues depuis l'Antiquité pour la finesse de leurs senteurs, ces essences orientales constituent l'âme de la plupart des compositions parfumées modernes.


L'origine du rosier aux cent feuilles demeure l'objet de discussions. Souvent présentée comme une variété méditerranéenne, elle est plutôt considérée de nos jours comme un rosier hybride, créé par des sélectionneurs néerlandais entre le XVIIe et le XIXe siècle, voire même dès la fin du XVI° siècle. A cette époque, on recensait en Hollande quelques 200 variétés de cet hybride, dont au moins une vingtaine existerait encore. La dénomination Rosa centifolia remonte à Linné en 1753. Parmi les variétés dont elle serait issue, on mentionne notamment Rosa damascena, une rose orientale bien connue pour ses qualités odoriférantes et encore largement cultivée en Bulgarie et en Turquie. Les parfumeurs azuréens comprirent très tôt le riche potentiel aromatique de cette variété de rose, qui demeure un modèle en matière de parfum. La rose de mai est plantée dans des sols frais, en décembre-janvier et commence à produire dès l’année qui suit. On taille alors les pieds pour leur donner une forme d’arceaux. La partie chaude du terrain était généralement réservée au jasmin, et l’on pratiquait souvent des cultures maraichères entre les lignes. Les fleurs sont récoltées dans un tablier spécialement destiné à cet usage, dès 2/3 heures le matin, et éventuellement aussi le soir

 

Dans L'effet guérisseur de l'arbre (2016), Clemens G. Arvay nous interroge :


"Saviez-vous que le parfum envoûtant et sucré de la rose a un lien avec votre passé ? Le parfum d'indole de la rose se trouve dans l'utérus. Là, le parfum a été créé par nos propres déchets dans le liquide amniotique et la substance est entrée en contact avec nous pare notre bouche et nos muqueuses. L'indole en fait ne sent pas la rose, mais les fruits trop mûrs, et c'est en se combinant avec d'autres parfums qu'il sent la rose. Mais nous le reconnaissons inconsciemment. La rose nous rappelle donc, de manière inconsciente, le temps que nous avons passé dans le ventre de notre mère. C'est pour cela que nous associons cette odeur avec la chaleur et la tendresse, l'amour et le soin."

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Phytothérapie :


Dans Des hommes et des plantes (Éditions Opéra Mundi, 1970), son autobiographie, Maurice Mésségué évoque le savoir ancestral de son père sur lequel il a construit ses connaissances :


Cet homme [Konrad Adenauer] commençait à me plaire. Avec une seule phrase, il m'a gagné tout à fait.

- Aimez-vous les roses ?

- Je les adore. Je ne peux pas vivre sans elles et je souffre beaucoup quand je coupe une fleur. Je préfère les rouges, sentimentalement, parce qu'elles sont le symbole de la passion. La légende prétend qu'autrefois la rose était blanche. Au banquet des dieux, Cupidon voltigeant autour de Vénus renversa d'un coup d'aile une amphore de vin qui teignit les roses en rouge ; d'autres disent qu'il se piqua à une épine et que son sang teinta la rose qu'il offrit alors à Vénus...

- Ach ! ces Français, ils ne sont jamais sérieux ! Ils mêlent toujours le sentiment à tout !...

- Et les Gascons encore plus, Monsieur le Président. Je crois les roses rouges meilleures que les autres, plus efficaces pour soigner.

- Vos raisons ?

- La rose rouge de Provins est la seule qui soit utilisée en « médecine par les plantes » depuis qu'elle fut, dit-on, rapportée des croisades par Thibaud de Champagne. Elle est plus forte, plus riche en tanin.

- Peut-être, mais les roses pâles et les roses jaunes ont des propriétés laxatives que la vôtre n'a pas... Je vais, pourtant, vous faire une concession. Au XVIIIe siècle, en Allemagne, le Docteur Kruger, en utilisant de la « conserve » de rose rouge, s'est guérie d'une phtisie. J'ajoute qu'il a complété son traitement avec de la tisane d'orge. Et vous, vous utilisez vos roses pour quoi ?

- Les troubles de l'intestin, les leucorrhées, les hémorragies, les migraines d'origine ophtalmique, et surtout pour la toux. C'est un excellent expectorant.

- Je préfère les roses jaunes, elles sont aussi efficaces. Je n'en sers beaucoup. Je tousse facilement et elles sont plus douces que les rouges.

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Huile essentielle :


Dans L'Aromathérapie spirituelle, Christine Salvador nous apprend que :


L'huile essentielle de rose est certainement la première huile essentielle que l'on ait extraite d'une fleur. L'on rapporte que l'huile essentielle de rose aurait été distillée pour la première fois par Avicenne, le grand médecin l'aurait fabriquée par hasard au cours d'une de ses expérimentations, dès le Xè siècle.

Son parfum est créateur d'inspiration, elle est la rose du poète.

Et rose elle a vécu ce que vivent les roses... Soit 40 millions d'années, à en croire certains fossiles du tertiaire. La rose en sa beauté pourrait bien avoir précédé l'homme sur terre, comme pour se préparer à la passion qu'il lui porte, les soins dont il l'entoure, l'inlassable dialogue qu'il a avec elle. La rose est universellement chérie en ses innombrables variétés et son parfum fut et demeure l'or absolu d monde olfactif.

A l'origine, la rose est d'une importance indéniable dans la théorie et la métaphysique de l'alchimie, en effet les roses rouges et blanches étaient considérées comme appropriées aux différentes étapes du travail de l'alchimiste ; il les plaçait dans des cornues et les chauffait avec d'autres matériaux, tout cela dans le but d'obtenir la transformation des métaux de base en or. C'est ainsi que fut produite par accident la première eau de rose et la première huile essentielle de Rose. L'eau de rose et l'huile de rose étaient toutes deux connues dans les pays de langue arabe à la fin du Xè siècle.

Aujourd'hui, la plus grande partie de l'huile essentielle de Rose ne s'obtient pas par distillation, mais plutôt par la méthode dite de l'enfleurage ou par l'extraction aux solvants. L'huile essentielle de Rose est très onéreuse, non seulement parce qu'il faut une énorme quantité de pétales pour produire très peu d'huile, mais ceci demande en plus beaucoup de main d'oeuvre. Cependant les attars, entendez parfums végétaux naturels, de rose qui sont extraits de cette manière sont ultra concentrés, ainsi seules de quantités infimes sont employées pour chaque traitement.

L'attar de rose est de consistance solide dans le flacon à température d'ambiance, il ne se liquéfie en huile épaisse que lorsqu'on réchauffe le flacon entre les mains. D'un brun rougeâtre profond, l'attar de rose ne s'emploie qu'à petites doses, car son parfum est très puissant. Deux variétés de rose sont utilisées pour la production de l'huile essentielle de Rose ; il s'agit de la Rosa centifolia et de la Rosa damascena. Il existe donc de légères différences d'arôme et de couleur en fonction des variétés utilisées, la couleur varie d'orange verdâtre à brunâtre profond. Rosa centifolia se cultive dans la région de Grasse au beau milieu de l'industrie française du parfum, et aussi dans les pays du Maghreb, elle s'appelle dans ce cas Rose Maroc. Rosa damascena se cultive de manière intensive en Bulgarie pour produire de l'huile essentielle. La composition de l'huile essentielle de rose est d'une complexité inégalée, elle contient plus de 300 composants connus représentant à peu près 85% de la totalité. Les 15% restants qui constituent une multitude de composés différents, en très petite quantité, chacun est vital à l'huile en ce qui concerne son parfum et ses vertus thérapeutiques.

En Occident, sa beauté et son parfum en ont fait la reine des fleurs. Avec son alter ego oriental, le lotus, elle symbolise la roue ou le mandala, la présence divine au centre du monde, comme l'illustre la rosace gothique ou la rose des vents. Dans la plupart des civilisations, la rose symbolise l'amour, la pureté et la passion. La mère du Christ est souvent représentée avec une rose à la main. Dans la mythologie, la rose est associée à de nombreuses divinités féminines, comme Vénus la Romaine, Lakshmi l'Indienne ou encore Aphrodite la Grecque. En Egypte, Cléopâtre aurait fait recouvrir le sol de sa chambre d'un tapis de roses afin que l'empereur Marc-Antoine succombe à ses charmes. Mais, la mythologie grecque raconte aussi que la rose est née des larmes de la déesse de l'amour, Aphrodite, qui pleurait Adonis en train d'agoniser. Par son rapport avec le sang répandu, la rose symbolise donc également la renaissance mystique ou la régénération. C'est ainsi qu'au VIIè siècle, le tombeau du Christ aurait été peint d'une couleur "mélangée de rouge et de blanc" et que, depuis l'Antiquité, on orne les tombes de roses.

Amène le lâcher-prise, idéal pour accompagner une personne en fin de vie ou affronter un deuil (associer avec du nard).

Certes elle peut pallier bien des maux, mais elle est surtout un baume pour l'âme, et dans ce sens elle apporte à chacun ce qu'il espère en retirer. La rose nous ouvre à notre conscience et, pensons-nous, conduit à la foi. Et surtout au respect du principe féminin, de la femme dans tout ce qu'elle représente de vertu, de beauté, de pureté, de tendresse et de sacrifice. De fragilité aussi. Elle nous montre que la beauté, la véritable beauté, se contemple, se respire, mais ne se profane pas. La vraie beauté, comme l'amour, se vit, simplement. Divinement. Remercions-la d'exister.


Qu'elle soit issue du sang de Vénus, d'Adonis, la rose, reine des fleurs est immémoriale. Célébrée par les poètes, vénérée dans les livres sacrés, offerte aux dieux et aux rois, la rose est symbole de l'amour. Des bouquets de roses furent trouvés dans le sarcophage de Toutankhamon, gage d'amour de la reine Ankhesamon.

Elle possède aussi des propriétés beaucoup plus subtiles, élévation de tous les niveaux vibratoires du corps humain.


Propriétés et indications énergétiques :

  • puissant harmonisant, psycho-émotionnel en cas d'anxiété nerveuse, de dépression, d'insomnies ou de palpitations.

  • dissout les blocages au niveau des corps subtils.

  • chasse les pensées et les sentiments négatifs, l'irritabilité.

  • amène le lâcher-prise idéal pour accompagner une personne en fin de vie ou affronter un deuil (en association avec du nard de l'Himalaya).

  • aide à surmonter les blessures sans amertume ni désir de vengeance et à restaurer la confiance.

  • ouvre à l'amour universel, la compassion, la tendresse.

  • rides, couperose, peau asphyxiée, certains eczémas, inflammations cutanées, ulcères variqueux : hémostatique, bactéricide, puissant cicatrisant et régénérateur cutané majeur.

  • infections buccales, aphtes : bactéricide, cicatrisant.

  • bronchites chroniques (surtout d'origine psycho-émotionnelle), asthme, tuberculose, troubles du rythme cardiaque, anxiolytique, tonique général.

  • asthénies sexuelles, frigidité, impuissance : aphrodisiaque.

  • dérèglements digestifs : régulateurs de l'appétit, apaise le feu dans le foie et l'organisme en général.

  • chagrin, chakra du cœur, choc émotionnel, dépression, eczéma, frigidité, hémorragie, impuissance, peau sensible, peau sèche, peau vieillissante, rides, système de reproduction féminin, tension nerveuse, tristesse.

  • elle possède aussi des propriétés beaucoup plus subtiles, élévation de tous les niveaux vibratoires du corps humain."

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Symbolique de la rose :


Louise Cortambert et Louis-Aimé Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) nous livrent leur vision de la rose :


Eté - Juin. SUR LES ROSES.

Qui jamais a su chanter, et n'a pas chanté la rose ? Les poëtes n'ont pu exagérer sa beauté, ni parfaire son éloge ; ils l'ont appelée, avec justice, fille du ciel, ornement de la terre, gloire du printemps ; mais quelle expression a jamais rendu les charmes de cette belle fleur, son ensemble voluptueux et sa grâce divine ? Quand elle s'entr'ouvre, l'ail suit avec délice ses harmonieux contours. Mais comment décrire les portions sphériques qui la composent, les teintes séduisantes qui la colorent, le doux parfum qu'elle exbale ? Voyez-la au printemps s'élever mollement sur son élégant feuillage, environnée de ses nombreux boutons ; on dirait que la reine des fleurs se joue avec l'air qui l'agite, qu'elle se pare des gouttes de la rosée qui la baignent, qu'elle sourit aux rayons du soleil qui l'entr'ouvrent : on dirait que la nature s'est épuisée pour lui prodiguer à l'envi la fraicheur, la beauté des formes, le parfum, l'éclat et la grâce. La rose embellit toute la terre : elle est la plus commune des fleurs. Le jour où sa beauté s'accomplit, on la voit mourir ; mais chaque printemps nous la rend fraiche et nouvelle. Les poëtes ont eu beau la chanter, ils n'ont point vieilli son éloge, et son nom seul rajeunit leurs ouvrages. Emblème de tous les âges, interprète de tous nos sentiments, la rose se mêle à nos fêtes, à nos joies, à nos douleurs. L'aimable gaieté s'en couronne, la chaste pudeur emprunte son doux incarnat ; on lui compare la beauté, on la donne pour prix à la vertu, elle est l'image de la jeunesse, de l'innocence et du plaisir ; elle appartient à Vénus, et, rivale de la beauté même, la rose possède, comme elle, la grâce plus belle encore que la beauté.

Anacréon, le poëte des amours, a célébré la rose, et, pour la bien louer, il ne faut qu'emprunter ses chants. [...]

UNE FEUILLE DE ROSE - JAMAIS JE N'IMPORTUNE.

Il y avait, à Amadan, une académie dont les statuts étaient conçus en ces termes : « Les académiciens penseront beaucoup, écriront peu, et parleront le moins possible. » Le docteur Zeb, fameux dans tout l'Orient, apprit qu'il vaquait une place à cette académie : il accourt pour l'obtenir ; malheureusement il arrive trop tard. L'académie fut désolée : elle venait d'accorder à la puissance ce qui appartenait au mérite. Le président, ne sachant comment exprimer un refus qui faisait rougir l'assemblée, se fit apporter une coupe, qu'il remplit d'eau si exactement qu'une goulle de plus l'eût fait déborder. Le savant solliciteur comprit, par cet emblème, qu'il n'y avait plus de place pour lui : il se retirait tristement, lorsqu'il aperçut une feuille de rose à ses pieds . A cette vue, il reprend courage ; il prend la feuille et la pose si délicatement sur l'eau que renfermait la coupe, qu'il ne s'en échappa pas une seule goutte. A ce trait ingénieux tout le monde battit des mains, et le docteur fut reçu, par acclamation, au nombre des silencieux académiciens.


Origine des Rosières. UNE COURONNE DE ROSES - RÉCOMPENSE DE LA VERTU.

Saint Médard, évêque de Noyon, né à Salency, d'une illustre famille, institua, aux lieux de sa naissance, le prix le plus touchant que la tendre piété ait jamais offert à la vertu. Ce prix est une simple couronne de roses ; mais, pour l'obtenir, il faut que toutes vos rivales, toutes les filles du village, vous reconnaissent pour la plus soumise, la plus modeste et la plus sage. La sæur même de saint Médard fut nommée en 532 , d'une commune voix, première rosière de Salency : elle reçut sa couronne des mains du fondateur, et elle la légua, avec l'exemple de ses vertus, aux compagnes de son enfance. Les siècles, qui ont renversé tant d'empires, qui ont brisé le sceptre de tant de rois, ont respecté la couronne de Salency : elle a passé de protecteurs en protecteurs, sur le front de l'innocence ; puisse-t- elle la couronner toujours, et mériter le bonheur à toutes celles qui l'obtiendront ! Lorsque M. de Fontanes chantait les vergers, et n'était que poëte, il a dit :


Hélas ! belle rosière,

D'autres amis des moeurs doteront la chaumière ;

Mes présents ne sont point une ferme, un troupeau ;

Mais je puis d'une rose embellir ton chapeau.


ROSE MOUSSEUSE - AMOUR - VOLUPTÉ.

En voyant la rose moussense avec ses épines, sans aiguillons, et son calice environné d'une molle et douce verdure, on dirait que la Volupté a voulu disputer cette belle fleur à l'Amour. Ma dame de Genlis assure qu'à son retour d’Angleterre, ce fut chez elle que tout Paris vint admirer le premier rosier de cette espèce. Alors, madame de Genlis était déjà célèbre, et le rosier n'était sans doute que le prétexte de la foule qui se pressait autour d'elle : la modestie put seule l'induire en erreur ; car ce rosier, qui est originaire de Provence, nous est connu depuis plusieurs siècles.


UN BOUQUET DE ROSES OUVERTES. Ces belles fleurs semblent inviter les grands à faire du bien : la reconnaissance est plus douce que leur parfum, et la saison de la puissance est souvent plus courte que celle de leur beauté.


UNE ROSE BLANCHE ET UNE ROSE ROUGE.

Le poëte Bonnefons envoya à l'objet de ses amours deux roses ; l'une blanche, et l'autre du plus vif incarnat : la blanche, pour imiter la pâleur de son teint, et l'incarnate pour peindre les feux de son cœur : il avait joint à son bouquet ces quatre vers :

Pour toi, Daphné, ces fleurs viennent d'éclore :

Vois , l'une est blanche, et l'autre se colore

D'un vif éclat : l'une peint ma pâleur,

L'autre mes feux : toutes deux mon malheur.


UN ROSIER AU MILIEU D'UNE TOUFFE DE GAZON. IL Y A TOUT A GAGNER AVEC LA BONNE COMPAGNIE.

Un jour, dit le poëte Saadi, je vis un rosier environné d'une touffe de gazon. Quoi ! m'écriai-je, cette vile plante est-elle faite pour se trouver dans la compagnie des roses ? et je voulus arracher le gazon, lorsqu'il me dit humblement : « Épargnez-moi, je ne suis pas rose, il est vrai , mais à mon parfum on connaît au moins que j'ai vécu avec des roses.


DE LA PHILOSOPHIE DES ROSES. Pour orner les leçons de la sagesse, souvent les Muses ont emprunté une rose aux Amours. Ces belles fleurs, emblèmes du plaisir, marquent aussi sa courte durée. On peut dire de la beauté ce que Malherbe disait d'un jeune enfant :

Elle était de ce monde, où les plus belles choses

Ont le pire destin ;

Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,

L'espace d'un matin.


Le célèbre Roman de la Rose, qui fit les délices de la cour de Philippe le Bel, semble n'avoir été écrit que pour nous apprendre combien il est dangereux d’écouter un séducteur. Un amant passionné qui s'inquiète, s'agite pour devenir possesseur d'une rose , voilà le sujet du livre. Mais cet amant si tendre, qui ne trouve rien d'égal à la rose qu'il adore, n'a pas plustôt joui de son doux parfum qu'il la néglige et l'abandonne. Ce roman versifié fut composé en 1260, par Guillaume de Lorris , et terminé, quarante ans après, par Jean de Meun.


Aimable rose ! au lever de l'aurore,

Un essaim de zéphyrs badine autour de toi ;

Chacun d'eux jure qu'il t'adore,

Chacun d'eux te promet une éternelle foi.


Mais le soleil, en se couchant dans l'onde ,

Voit à leurs tendres soins succéder le mépris :

La troupe ingrate et vagabonde

Déserte sans scrupule avec ton coloris (Les amours de Leucippe.).


L'attente du plaisir est au plaisir ce que le bouton est à la rose.


Aimable fleur, à peine éclose,

Défiez-vous de Cupidon ;

Il regrettera le bouton

Quand il aura fané la rose (Hoffman).


La pudeur doit défendre la beauté comme l'épine défend la rose (V. J. Rosati).

Jeune Églé, veux-tu de la rose

Conserver longtemps la fraîcheur ?

Songe qu'à cette fleur si tendre

La nature sut attacher

Une feuille pour la cacher,

Une épine pour la défendre (Constant Dubos).


Le vieillard qui parle d'amour à une jeune fille est comme le vent d'automne qui flétrit la rose sans l'épanouir.

Jeune fille est le bouton frais

De la rose prête d'éclore ;

Ce bouton est si cher à Flore

Qu'une épine en défend l'accès.

L'aiguillon perce, il assassine

Le vieillard qui le vient cueillir ;

Qu'un jeune amant vienne s'offrir,

Le bouton s'ouvre et plus d'épine (Guillaumain).


Une jeune fille, loin de sa mère, est au milieu du monde comme une rose qui a perdu sa fraîcheur. [...]

Smindride, de la ville de Sybaris , se plaignit un jour que le pli d'une feuille de rose l'avait empêché de dormir. C'est pourquoi le philosophe Aristippe, respirant un jour le parfum d'une rose, s'écriait : Maudits soient les efféminés qui ont fait décrier de si douces sensations !

Objet d'amour et de philosophie, dit Bernardin de Saint-Pierre, voyez la rose, lorsque, sortant des fentes d’un rocher humide, elle brille sur sa propre verdure, que le zéphyr la balance sur sa tige hérissée d'épines, que l'Aurore la couverte de pleurs, et qu'elle appelle, par son éclat et ses parfums, la main des amants. Quelquefois une cantharide, nichée dans sa corolle, en relève le carmin par son vert d'émeraude ; c'est alors que cette fleur semble nous dire que, symbole du plaisir par son charme et sa rapidité, elle porte comme lui le danger autour d'elle, et le repentir dans son sein.


ROSE MUSQUEE - BEAUTÉ CAPRICIEUSE.

La Rose musquée manque de fraicheur ; ses fleurs moyennes seraient sans effet si elles ne croissaient en panicules de vingt jusqu'à cent et plus. Elles plaisent d'ailleurs par leur odeur fine et musquée. Du reste, toute la plante semble pleine de caprices ; elle languit tout à coup dans les expositions qui d'abord lui paraissaient les plus favorables. Une année elle se charge de bouquets innombrables ; l'année suivante elle ne fleurit pas.


ROSE-DES-QUATRE-SAISONS - BEAUTÉ TOUJOURS NOUVELLE.

Le Rosier des Quatre-Saisons est en fleurs toute l'année, son odeur est délicieuse.


BOUTON DE ROSE BLANCHE - COEUR QUI IGNORE L'AMOUR.

Avant que le souffle de l'amour eût animé le monde , toutes les roses étaient blanches et toutes les filles insensibles .


ROSE CAPUCINE - ÉCLAT.

Le rosier bicolore ou capucine est une variété de l'églantier jaune, obtenu au Jardin du Roi ; rien n'est plus éclatant que ses fleurs jaunes doublées de mordoré ; on dit que la variété à fleurs doubles est du plus grand effet, je ne l'ai jamais vue.


ROSE-POMPON - GENTILLESSE.

La gentillesse, qui est la grâce de la première enfance, fait tout le charme de la Rose pompon.

ROSE A CENT FEUILLES - GRÂCES.

Quand les Grâces accompagnent Vénus et les Amours, elles sont couronnées de myrte ; quand elles suivent les Muses, on les représente couronnées de Roses à cent feuilles.


ROSE JAUNE - INFIDÉLITÉ.

On sait que le jaune est la couleur des infidèles. La Rose jaune semble aussi être leur fleur. L'eau la fatigue, le soleil la brûle, la contrainte peut seule amener à bien cette rose sans parfum, qui ne sait profiter ni des soins, ni de la liberté. Quand on veut la voir dans son éclat, il faut pencher ses boulons vers la terre et les y retenir par la force, alors elle fleurit.


ROSE BLANCHE - SILENCE.

Le dieu du Silence était représenté sous la forme d'un jeune homme demi-nu tenant un doigt sur la bouche, et ayant une Rose blanche dans l'autre main ; on dit que l'Amour lui avait donné cette rose pour l'enga ger à lui être favorable. Les anciens sculptaient une Rose sur la porte de la salle des festins pour prévenir les convives qu'ils ne devaient rien répéter de tout ce qui s'y disait.


ROSE SIMPLE - SIMPLICITÉ.

La simplicité embellit la beauté même et sert de voile à la laideur. Clémence Isaure, qui institua les jeux floraux, voulut que le prix de l'éloquence fût une Rose simple.

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Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :


Rose - Beauté.

Cette fleur semble réunir tout ce qu’on admire dans les autres fleurs : noblesse du port, beauté du feuillage, éclat des couleurs, suavité des odeurs, etc.


Rose a cent feuilles - Grâce.

C’est une des plus belles espèces ; c’est celle dont les peintres couronnent les Grâces.


Rose blanche - Silence.

La statue du Silence, chez les Anciens, portait une rose blanche à l’une de ses mains.


Rose royale ou cuisse de nymphe - Pudeur.

A cause de sa couleur d’un rose si tendre.


Rose unique blanche - Virginité.

A cause de son éclatante blancheur, que rien ne souille.


Rose unique panachée - Candeur.

Elle est blanche et rose comme une candide jeune fille.


Rose de koi - Tenez vos promesses.

Elle fleurit depuis février jusqu’en octobre.


Rose du Bengale - Complaisance et Reconnaissance.

La rose du Bengale a la complaisance de fleurir toute l’année : aucune rose n’est plus généreuse en fleurs.


Rose des quatre saisons - Beauté toujours nouvelle.

Elle fleurit toute l’année et sert à faire l’essence de roses.


Rose capucine - Éclat.

A cause de l’éclat éblouissant de sa fleur mordorée.


Rose jaune - Infidélité.

C’est une convention, ou bien peut-être est-ce parce qu’une infidélité donne toujours un remords, qui se traduit par un air soucieux et la pâleur du teint.


Rose de l’ile Bourbon - Beauté bienfaisante.

Cette belle espèce, connue à Paris depuis 1824 seulement, compte déjà plus de cent variétés. Elle fleurit toute l’année.


Rose-noisette - Beauté féconde.

Cette charmante petite rose vient par bouquets de cinquante ou soixante fleurs.


Rose-thé - Beauté bienveillante.

C’est une des roses les plus estimées et les plus recherchées, et c’est à juste titre : rien n’est comparable à la suavité de son odeur.


Rose Lawrence - Beauté en miniature.

Ses boutons si mignons ne sont pas plus gros qu’un grain d’orge.


Rose de Provins panachée - Feux du cœur.

Sa fleur blanche et rose dit bien : amour et ardeur.


Rose musquée - Caprice.

Cette espèce répond fort capricieusement aux soins de la culture ; tantôt elle fleurit abondamment, tantôt elle ne fleurit pas du tout.


Rose mousseuse - Amour voluptueux.

Rien ne symbolise mieux le plaisir et la volupté que cette rose, où les épines sont remplacées par de la mousse ! Tout en elle respire le mol abandon.


Rose simple - Simplicité.

La simplicité embellit la beauté et sert de voile à la laideur.


Rose pompon - Gentillesse.

La rose pompon, appelée aussi rose de mai, est dédiée à Marie. Rien de mignon, de gracieux et de joli comme cette charmante petite rose qui fait également bien en vases, en bouquets et en couronnes.

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Dans son Traité du langage symbolique, emblématique et religieux des Fleurs (Paris, 1855), l'abbé Casimir Magnat propose une version catholique des équivalences symboliques entre plantes et sentiments :


BOUTON DE ROSE - JEUNE FILLE.

Avez-vous des filles : conservez la pureté de leurs corps et ne leur montrez pas un visage trop riant. Mariez votre fille, c'est une grande affaire et donnez-la à un homme sage.

Ecclésiaste VII, 26-27.

C'est de tout temps que l'on a comparé une jeune fille à un bouton de rose et c'est avec beaucoup de raison car quels frappants rapports ne pourrait-on pas établir entre eux ! Dans quelque situation qu'on se trouve, dans la bonne comme dans la mauvaise fortune, dans les jours de plaisir ou de deuil, une rose à peine entr'ouverte est toujours agréable. Il est impossible d'apercevoir un pareil objet sans éprouver aussitôt une sensation douce. Sa vue rafraichit l'imagination, écarte les idées tristes et fait diversion à la douleur. Il en est de même d'une jeune fille, surtout lorsqu'elle réunit à un extérieur agréable le mérite de la modestie et de l'innocence. Partout où elle se trouve, elle excite l'admiration et le respect ; tout le monde la regarde comme un ange descendu du ciel.


RÉFLEXIONS.

La mauvaise éducation des femmes fait plus de mal que celle des hommes, puisque les désordres des hommes viennent souvent de la mauvaise éducation de leurs mères et des passions que d'autres femmes leur ont inspirées dans un âge plus avancé.

(FÉNELON, De l'éducation des filles.)

Peu de femmes ont assez de raison pour sentir le besoin qu'elles ont d'être gouvernées ; el ce qu'il y a de plus fâcheux, c'est que ce sont celles qui le sentent qui pourraient le plus s'en passer.

Les enfants ne savent pas qu'ils ont besoin de lisières lors même qu'ils sont tombés.

(Le duc de Lévis.)


ROSE - BEAUTÉ.

La beauté corrompt la sagesse , elle égare la raison.

Ecclésiastes : XIX, 2, 7

Parmi les fleurs qui décorent nos parterres, on en distingue un très grand nombre qui rendraient notre choix irrésolu, si nous devions décider entre elles ; mais quel que soit notre admiration pour la plupart de ces espèces, un penchant irrésistible nous fait toujours donner la préférence à la rose. Et quelle autre fleur, en effet, est digne de lui être comparée ? Il en est il est vrai un grand nombre qui brillent par la vivacité et la variété de leurs couleurs, mais qui sont inodores ; telle est la renoncule, telle est la tulipe. Beaucoup de fleurs, comme l'héliotrope et le réséda, embaument l'air de leur parfum , mais ils n'ont rien qui flatte l'œil. Le lilas, la fleur de l'oranger, le superbe lis, réunissent il est vrai le charme de la couleur à celui de l'odeur ; mais combien ces fleurs mêmes, placées à coté de la rose, lui sout inférieures en beauté ! Que de choses manquent à leur perfection ! La rose est parfaite, elle seule possède tout ce qu'on peut désirer dans une fleur : éclat, fraicheur, forme agréable, couleur vive et douce, odeur suave et délicieuse.

Anacréon nous dit que la rose naquit lorsque Vénus sortit du sein des flots. Celui qui vint la déposer sur le gazon du rivage, aurait laissé avec son écume, le germe du rosier qui s'éleva aussitôt pour embellir ce lieu mémorable et parfumer l'air que la déesse respirait pour la première fois. — Les Musulmans prétendent qu'elle a été formée, ainsi que le riz, de la sueur de leur prophète Mahomet.


DE LA ROSE.

Qui ne connait, qui n'a point admiré cette reine des fleurs que tous les poètes ont chantée, qu'Anacréon appelle le doux parfum des dieux, la joie des mortels, le plus bel ornement des grâces ?

Il semble que la nature, ayant fait de la rose le type de la grâce, ait pris plaisir à en répandre les espèces dans les diverses contrées, et qu'elle n'ait mis entre ces espèces que de légères différences, pour ne point en altérer les traits essentiels. Aussi dès les temps les plus re culés, les roses ont été un objet de culture ; dans l'un des livres attri bués à Salomon, la sagesse éternelle est comparée aux plantations de rosiers qu'on voyait près de Jéricho. En remontant aux époques les plus reculées de l'histoire on voit que les roses sont les fleurs qui ont le plus fixé l'attention . Partout on en fait le symbole de la pudeur, de l'innocence et de la grâce. Dans l'antiquité on se couronnait de roses dans les festins, dans les fêtes, dans les triomphes. Les jeunes époux étaient conduits à l'autel de l'hymen le front couronné de roses : on en répandait même sur les tombeaux , pour mêler à l'idée triste de la mort celle du souvenir tendre que laissait un objet chéri, et l'image consolante de sa bonne réputation. En Grèce et dans tout l'Orient, les roses étaient cultivées pour les parfums. L'ile de Rhodes doit son nom à cette culture, c'était l'ile des roses. Dans les temps de chevalerie, les preux prirent souvent des roses pour emblèmes ; placées sur leurs armes, elles annonçaient que la douceur doit accompagner le courage.

La rose renaît chaque printemps, et chaque printemps elle nous apparaît nouvelle. Quoique la moins rare des fleurs, elle est toujours la plus recherchée ; au milieu de cent autres qui étalent leurs beautés dans un parterre, c'est toujours elle que nous allons cueillir de préférence, et les épines qui la défendent ne servent qu'à rendre plus vif notre désir de la posséder. Faut-il s'en étonner ? Cette aimable fleur appelle et charme à la fois tous les sens. La douceur et le velouté de ses pétales plaît au toucher, sa couleur enchante les regards, et l'arome pur qui s'exhale de son sein flatte délicieusement l'odorat. Enfin la rose a dans son port, dans son aspect, dans tout ce qui la compose, je ne sais quels attraits qui manquent à toute autre fleur et qui nous séduisent. Elle a des charmes qui, même au déclin de sa beauté, lui attirent nos hommages et la font triompher de toutes ses rivales.

On compare les plus belles choses à la rose. Le teint des vierges, la fraîcheur du matin, la beauté de la jeunesse, l'éclat de l'aurore et du printemps ; tout ce qu'il y a de riant dans la nature se mêle à son image et son nom seul embellit tout ce qu'il accompagne. Veut-on peindre les jeux du premier âge, les songes enchanteurs de la nuit, les flatteuses illusions de l'espérance, on emprunte à la rose ses couleurs.

La rose plaît à tous les âges, et se marie pour ainsi dire, à toutes ses récréations. Dans tous les moments de sa courte existence, soit lorsqu'elle épanouit, soit lorsqu'elle brille dans tout son éclat, .soit lorsqu'elle est prête à se flétrir, elle semble avoir toujours quelque rapport à nous. Penchée le soir sur sa tige épineuse, elle parait languissante à l'homme mélancolique et il trouve, dans le tableau qu'elle lui offre, un sujet pour ses rêveries. Celui à qui tout sourit dans la vie contemple avec extase, au milieu du jour, la pureté de ses formes et de ses couleurs, qui lui représente le bonheur inaltérable dont il jouit. La jeune fille aime à la voir dans toute sa fraicheur, et à la cueillir le matin couverte de rosée et entourée de boutons. Dans l'âge du retour, cette aimable fleur nous rappelle la jouissance de la jeunesse. Et dans l'hiver de nos ans, lorsque son parfum, exalté par la chaleur du soleil, vient réveiller nos sens assoupis, nous la nommons encore la plus belle des fleurs.

En voyant avec quelle rapidité ses grâces se ternissent et son éclat s'efface n'oublions pas que la rose est aussi l'image de la félicité de ce monde, où tout n'est que vanité. « Qui , tous les mortels ne sont que de l'herbe, et toute leur beauté ressemble à la fleur des champs ; le Seigneur a répandu son souffle , l'herbe est séchée et la fleur est tombée . »

RÉFLEXION.

Il n'y a rien de si beau que Dieu , et après Dieu, ce qu'il y a de plus beau c'est l'âme ; et après l'âme, c'est la pensée, et après la pensée la parole ; or donc, plus une âme est semblable à Dieu, plus une pensée est semblable à une âme et plus une parole est semblable à une pensée, plus tout cela est beau.

(JOUBERT, Pensées.)


ROSE BLANCHE - SILENCE.

L'homme intelligent modère ses paroles, et l'homme prudent est grand. Le fou même, s'il se tait, passe pour sage, et pour prudent s'il ferme la bouche.

Proverbes : XVII, 27, 28. -

Le rosier blanc est un arbrisseau très rameux haut de un à deux mètres et armé d'aiguillons. Ses feuilles sont composées de sept folioles ovales, presque arrondies, terminées par une pointe courte. Ses fleurs naissent en bouquet au sommet des rameaux. Cet arbuste croit dans les lieux incultes et un peu couverts de l'Europe australe. ou le cultive dans les jardins où il produit un effet admirable par ses bouquets de fleurs dont l'incarnat pâlit et s'efface à mesure qu'elles s'entrouvent. Lorsque les anciens peuples du nord voulaient ensevelir dans le plus profond secret ce qu'ils se disaient entre eux pendant la joie des festins, ils suspendaient au plafond, au-dessus du haut-bout de la table, une rose blanche fraîchement cueillie. C'eût été non seulement un déshonneur, mais un crime sans exemple, que de révéler ce qui avait été dit ou entendu sous la Rose. On voit souvent Harpocrate, dieu du silence, représenté avec une rose à la main.

RÉFLEXIONS.

Quand on songe qu'il faudra rendre compte à Dieu des paroles inutiles, on ne doit pas haïr le silence.

(SAINT-BERNARD, Lettres.)

Le silence est pour parler à Dieu. C'est dans le silence que Dieu nous communique les grâces.

(SAINT VINCENT DE PAUL, Maximes et conseils.)


ROSE CAPUCINE — ÉCLAT.

Ne vous glorifiez jamais de vos vêtements et ne vous élevez point au jour de vos honneurs, car les œuvres du Très-Haut seul sont admirables et glorieuses, et ses œuvres sont secrètes et in visibles.

Ecclésiastes : XI, 4.


ROSE MUSQUÉE - AFFECTATION.

Malheur à vous Scribes et Pharisiens qui purifiez le dehors de la coupe et du vase pendant qu'au dedans vous êtes pleins de rapines et de souillure... Vous paraissez au dehors justes aux yeux des hommes, mais au dedans vous êtes plein d'hypocrisie et d'iniquité.

Mathieu : XXIll, 25-28. -

Le rosier musqué a des fleurs blanches, d'une odeur douce, disposées en panicule au sommet des rameaux. Cette espèce est surtout intéressante par son huile essentielle qui fournit aux Orientaux ce parfum délicieux connu sous le nom d'essence de rose. Il ne vient bien que dans les provinces méridionales. On le cultive en grand dans plusieurs contrées du Levant, en Perse, aux environs de Tunis. Cette espèce est très chère, vu la petite quantité que ces fleurs en fournissent ; on dit que cent livres en produisent à peine un demi gros ; elle prend une consistance grasse, épaisse et se conserve très longtemps. L'arôme qu'elle répand est si fort que la pointe d'une épingle enfoncée dans un flacon suffit pour embaumer un appartement et parfumer plusieurs personnes pendant toute une journée.

RÉFLEXION.

On n'est jamais si ridicule par les qualités que l'on a que par celles que l'on affecte d'avoir.

(LA ROCHEFOUCAULT.)


ROSE POMPON - GRÂCE ENFANTINE.

Jésus dit à ses disciples : Si vous ne vous convertissez et ne devenez comme des petits enfants, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux. Quiconque s'humilie comme un petit enfant, celui-là sera le plus grand dans le royaume des cieux. Et celui qui recevra un petit enfant en mon nom me recevra.

Mathieu : XVIII, 3-5.

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Selon Pierre Zaccone, auteur de Nouveau langage des fleurs avec la nomenclature des sentiments dont chaque fleur est le symbole et leur emploi pour l'expression des pensées (Éditeur L. Hachette, 1856) :


ROSE - BEAUTÉ - AMOUR. Lorsque Vénus, sortant du sein des mers,

Sourit aux dieux, charmés de sa présence,

Un nouveau jour éclaira l'univers :

Dans ce moment la rose prit naissance.


On compte aujourd'hui une innombrable quantité d'espèces de roses, dont les principales sont les roses mousseuse, blanche, de Provins, capucine, musquée, du Bengale, pompon, trémière, etc. La rose a été chantée à toutes les époques, et dans tous les pays ; on l'a consacrée généralement à Vénus, et elle est devenue l'emblème de l'amour et de la beauté.


Mais qui peut refuser un hommage à la rose ?

La rose dont Vénus compose ses bosquets,

Le printemps sa guirlande, et l'amour ses bouquets ;

Qu'Anacréon chanta ; qui formait avec grâce,

Dans les jours de festin, la couronne d'Horace. DELILLE.


Quand l'haleine des doux zéphirs,

Et la verdure renaissante

Annoncent la saison charmante

Et de l'amour et des plaisirs,

Vainement mille fleurs écloses

Appellent la main des amants :

On ne croit revoir le printemps

Qu'en voyant renaitre les roses.


Parmi les filles du matin,

C'est la rose qu'amour préfère ;

Vénus, aux fêtes de Cythère

En pare sa tête et son sein.

Sur sa corolle demi-close

Zéphir se plaît à voltiger :

Le papillon le plus léger

Se fixe en voyant une rose. ROGER.


De Cythère elle est la fleur chérie,

Et de Paphos elle orne les bosquets.

Sa douce odeur aux célestes banquets

Fait oublier celle de l'ambroisie :

Son vermillon doit parer la beauté

C'est le seul fard que met la volupté.

A cette bouche, où le sourire joue,

Son coloris prête un charme divin ;

Elle se mêle au lis d'un joli sein ;

De la pudeur elle couvre la joue

Et de l'Aurore elle embellit la main. PARNY.


Les factions d’York et de Lancastre, en Angleterre, sont connues sous les noms de Rose blanche et Rose rouge.


ROSE MOUSSEUSE - VOLUPTÉ.

Tout le monde connaît cette charmante variété que l'on cultive en Provence, depuis près d'un siècle. On en a fait le symbole de la volupté, parce qu'elle est sans épine et que ses aiguillons ne sont pas piquants. C'est madame de Genlis qui, la première, l'apporta d'Angleterre en France .


ROSE BLANCHE - CANDEUR.

Arbrisseau de six ou sept pieds, donnant des fleurs blanches, simples ou doubles, selon la variété.


Dans les champs où fut Sparte, entre les murs d'Athène,

Aux poétiques bords d'Argos el de Mycène,

Une rose odorante étale sa blancheur

Et sur leurs grands débris laisse courir sa fleur. CASTEL.

ROSE DE PROVINS - AMOUR DE LA PATRIE.

Belle plante d'un rouge vif, pourpré, ponceau, bordée, panachée, veloutée, etc., selon les variétés.


ROSE MUSQUÉE - AFFECTATION.

Plante originaire d'Orient. Sa fleur blanche répand une douce odeur de musc. C'est avec les feuilles de la rose musquée, que les orientaux composent leur essence de rose.


ROSE POMPON - GRÂCE ENFANTINE.

La rose pompon est une des plus jolies espèces, mais c'est d'elle surtout que l'on peut dire avec Malherbe :

Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses, L'espace d'un matin.

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Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Bouton de rose - Jeune fille.

Par sa fraîcheur, par sa beauté naissante, le bouton de rose est l'emblème de la jeune fille, qui, comme lui, va s'épanouir à l'amour et développer ses charmes à peine révélés. C'est ce qui a fait dire à Saint-Lambert :


Votre beauté vermeille est un bouton de rose

Où chaque feuille ombrage un amour qui repose.


Bouton de rose blanche — Cœur qui s'ignore.

Un jour le coeur de la fillette de quinze ans s'émeut, et tout étonnée, elle éprouve des sensations inconnues.

Tel ce bouton frais et vermeil,

Qui dans l'hiver n'osait éclore,

N'attendait, pour s'ouvrir, qu'un rayon du soleil,

Ou qu'une larme de l'aurore. DELILLE.


Roses. On ne peut mieux commencer le chapitre des roses que par ces délicieux vers.


J'ai voulu ce matin te rapporter des roses ;

Mais j'en avais tant pris dans mes ceintures closes,

Que les nœuds trop serrés n'ont pu les contenir.

Les nœuds ont éclaté ; les roses envolées,

Dans le vent, à la mer s'en sont toutes allées ;

Elles ont suivi l'eau pour ne plus revenir.

La vague en a paru rouge et comme enflammée ;

Ce soir , ma robe encore en est tout embaumée...

Respires-en sur moi l'odorant souvenir. DESBORDES-VALMORE.


La rose embellit tous les lieux qu'elle habite, elle est la reine des fleurs par la noblesse de son port, la beauté de son feuillage et la suavité de son odeur. Elle est aussi, par son existence éphémère, l'emblème de la fragilité, de la beauté et des plaisirs.

Pare le sein de mon amie

Rose chérie, aimable fleur,

Qu'elle te donne sur son cœur

La place que chacun envie.


Rose à cent feuilles - Grâces.

Quand les peintres représentent les Grâces, elles ont toujours sur la tête une couronne de roses à cent feuilles.

Roses, quand vous vous balancez

Gracieuses sur votre tige,

Près des bosquets où vous croissez

Votre odeur donne un doux vertige


Rose de Bengale - Complaisance.

La rose de Bengale fleurit toute l'année et donne de nombreuses fleurs.


Pourquoi, Seigneur, fais-tu fleurir ces pâles roses,

Quand déjà tout frissonne ou meurt dans nos climats ?

Hélas ! six mois plus tôt que n'étiez-vous écloses !

Pauvres fleurs, fermez-vous ! voilà les blancs frimas. DE LAMARTINE.


Rose pompon - Gentillesse.

Cette variété est aussi appelée rose de mai parce qu'elle est dédiée à la vierge Marie à laquelle le mois de mai est consacré. Rien de mignon, de gracieux et de joli comme cette charmante petite rose ; les jeunes filles aiment à s'en parer, car elles retrouvent dans la rose pompon une ressemblance avec elles.


Vous dont la gloire est d'être belle,

D'un sexe aimable jeune fleur,

Prenez la rose pour modèle ;

Son éclat naît de sa pudeur.


Rose blanche - Silence - Discrétion.

La statue du Silence a une rose blanche dans la main. Chez les anciens on peignait une rose semblable à la porte de la salle des festins pour avertir les convives qu'ils de vaient oublier les paroles qu'ils avaient entendues.


Rose jaune - Infidélité.

Si jamais vous cessiez de n'aimer, mon amie,

Moi, qui jusqu'à la mort compte sur votre cœur

Laissez-moi mon erreur

Pour me laisser la vie.


Rose moussue - Amour - Volupté.

Son calice est entouré d'une mousse d'un joli vert.


L'ange dont le plaisir est de soigner les fleurs

Et qui, pendant la nuit, les trempe de rosée,

Un jour de gai printemps, seul avec sa pensée,

Sur un rosier goûta du sommeil les douceurs

A son réveil , il dit : « Que je te remercie,

Toi le plus cher de mes enfants !

Pour moi ton doux parfum du ciel est l'ambroisie,

Ton ombrage enivre mes sens ! ...

Demande donc, dis, veux-tu quelque chose ?

Oui, répondit la rose : Un nouvel ornement

Qui soit l'orgueil de la nature. »

En ce moment

La mousse lui servit de modeste parure.


Rose sans épines - Plaisir facile.

Aussi belle que ses sœurs, répandant un parfum aussi suave, cette rose est privée des aiguillons que la nature a donnés aux autres roses. On peut la cueillir facilement et l'audace et l'adresse sont inutiles pour cela mais aussi tout le monde peut s'en emparer sans danger.


Rose flétrie - Beauté flétrie.

Elle était de ce monde où les plus belles choses

Ont le pire destin ;

Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses,

L'espace d'un matin. MALHERBE.


Rose blanche et Rose rouge - Feu du cœur.


L'insecte regarde la rose,

Les oiseaux regardent les cieux ;

Ange et reine : mais moi je n'ose

Contempler l'azur de vos yeux,

Ah ! c'est qu'auprès de vous la rose

Est sans éclat et sans couleur ;

Et la porte du ciel m'est close

Si vous me fermez votre coeur. XAVIER DE MONTÉPIN.


Rose épanouie - Beauté passagère. Cf le poème de Ronsard, "Mignonne, allons voir si la rose...."

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Dans son Nouveau Langage des fruits et des fleurs (Benardin-Béchet, Libraire-Éditeur, 1872) Mademoiselle Clémentine Vatteau poursuit la tradition du Sélam :


COURONNES DE ROSES : Récompense de la vertu.

Saint Médard, évêque de Noyon, institua à Salency la rosière, ou couronnes de roses, prix réservé à la plus soumise, la plus modeste et la plus sage des jeunes filles du village, au jugement de ses propres compagnes. D'une commune voix, la sœur même de saint Médard fut nommée première rosière de Salency, et elle reçut sa couronne des mains du saint fondateur.

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Dans Physionomies végétales, Portraits d'arbres et de fleurs, d'herbes et de mousses (In : La Science sociale, 1er avril-19 août 1870 ; Éditions Héros-Limite, 2012) Jacques Lefrêne (pseudonyme d'Elie Reclus) relie, comme nombre d'entre nous, la Rose à la Beauté :


La Rose ou le Secret de la Beauté - Fragment

J'ai voulu me révolter contre elle. Quand je protestais contre le chant, la parole simplement parlée étant bien plus expéditive, alors je protestais contre la rose. Quand je protestais contre la danse, manière affectée de marcher et de piétiner sur place, alors je protestais aussi contre la rose. C'était au moment où certains jeunes garçons peuvent être si bêtes et si désagréables, de onze à treize ans, dans la période que les Allemands ont appelée celle des Flegeljahre.

Sans doute je trouvais alors que la rose était réellement jolie (c'était peut-être une inconséquence - que voulez-vous ? - il n'est pas donné à l'homme d'être absurde ou logique jusqu'au bout), mais je lui reprochais ceci ou cela et il me déplaisait que chacun la déclarât la plus belle, comme il déplaisait aux rustauds d'Athènes qu'Aristide fût toujours appelé « le Juste ».

J'étais révolutionnaire alors, et révolutionnaire je suis resté ; mais comme un petit niais, je débutais par m'insurger contre la Reine des Fleurs. Je lui voulais des égales, de nombreuses rivales.

Le Fuchsia, pensais-je, a des couleurs plus éclatantes, une forme plus originale et en même temps plus gracieuse ; la Violette, l'Héliotrope ont des parfums plus suaves... Que n'inventais-je pas !

Et cependant, après des années, révolutionnaire toujours, révolutionnaire par conviction et par raisonnement, je fais plus aujourd'hui qu'admirer la rose, je l'aime. Je ne sais vraiment si elle est, comme on dit, la Reine, mais je sais que, parmi les fleurs, elle est dans mes préférées, comme elle est dans les préférées de tous, et je ne lui en préfère aucune.


Elle plaît par la modération des couleurs, parce qu'elle est rose et non pas rouge. Entre parenthèses, ceux qui cherchent la Rose Bleue sont des insensés et ceux qui améliorent la Rose, qui lui créent les mille variétés pourpres, rutilantes, sanglantes, font de belles choses, parce que la Rose ne peut être que belle - ils font des types exceptionnels qui plaisent extrêmement à certains individus, qui leur plaisent exceptionnellement - mais qui plaisent beaucoup moins à la collectivité des spectateurs, tant amateurs que non amateurs, qui préfèreront toujours la plus grande collectivité de qualités à une qualité exceptionnelle. La Rose préférée de tous, sera toujours une Rose relativement simple, ce ne sera pas la plus belle dans une variété spéciale.


Pourquoi est-elle la fleur préférée de tous ?

C'est qu'elle a toutes les qualités, de manière à rallier la majorité des suffrages et faire plaisir à tous.

C'est qu'elle n'a aucune de ses qualités à un degré extrême - par conséquent ne déplaît à personne et enthousiasme même ceux qui ont la passion de choses moyennes et qui sont rangés de modération, comme ça se voit fréquemment.

C'est enfin qu'elle a des épines.

Croyez-vous, vraiment, comme le vulgaire, que l'on aimerait davantage la Rose si la Rose n'avait point d'épines ?

Détrompez-vous. Nous n'aimons que ce qui nous résiste.

Ignorants et avides, nous appétons tout ce qui est autour de nous, et la mesure de notre désir pour une chose est le prix que nous voyons les autres mettre à la garder. Nous appétons les choses défendues.

L'enfant ne désire si fort la lune que parce qu'on ne peut la lui donner.

Nous voulons ce qu'on nous défend d'avoir. La Rose nous semble mille fois préférable à cause de ses épines qui en défendent l'approche.

Noli me tangere est le grand secret de la Beauté.

Le vulgaire adore ce qui n'est pas pour le vulgaire. Cela suffit pour que tout le vulgaire profane se pâme d'admiration pour la Rose, et l'homme chic n'a pas une toilette complète, malgré sa canne et son épingle diamantée, sans une rose à sa boutonnière. Il lui faut se parer d'une rose. Pourquoi ? Parce que la Rose le méprise du fond de son âme !

Nous voulons la résistance - surtout la résistance que nous pouvons vaincre. La Rose nous plaît parce qu'elle est belle, parce qu'elle nous défend de l'approcher, et parce que nonobstant, nous mettons la main sur elle, et grâce à son impuissante résistance, nous jouissons d'un triomphe facile.

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