Étymologie :
Selon Pierre-Yves Lambert, auteur d'un article intitulé "Gaulois Solitumaros." (In : Etudes Celtiques, vol. 36, 2008. pp. 89-101) :
Nantosuelta n’a pas une étymologie certaine et satisfaisante, car on attendait un thème en -u-, nantu-, comme premier élément. Une solution serait de supposer un juxtaposé, avec premier élément fléchi au génitif, *nantous > nantos ; ensuite viendrait le nom de l’herbe ou du foin, *wel-tā, cf. *wolto- > v. irl. folt, gall. gwallt « chevelure », et gall. gwellt « foin », bret. geot « herbe » (cf. v. bret. gueldenes). Dans cette hypothèse, Nantos+ueltā désignerait la vraie richesse d’une vallée : ses pâturages. Si l’on doit reconnaître qu’il reste la possibilité d’un juxtaposé comportant comme deuxième élément le *sweltā de l’analyse traditionnelle (c’est-à-dire *nanto(u)s + *sweltā), j’estime que, dans ce cas, le sémantisme de « tournant de vallée » est bien décevant, et devrait céder la place au « bénéfice, rapport de la rivière ».
=> Note personnelle : Sur le site de Sainte Reine, dans les Bauges, près de la Chapelle de Notre-Dame de Bellevaux, (dont je fais l'hypothèse qu'elle pourrait être un souvenir très lointain de Nantosuelta) on peut lire : Les Baujus nous nomment les Rompagnis, mot patois que l’on peut traduire par “ceux qui grimpent par les montagnes pour faire les foins”.
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Selon Pierre-Yves Lambert, auteur d'un article intitulé "Le statut du théonyme gaulois." (In : Andreas HOFENEDER & Patrizia DE BERNARDO STEMPEL (Hgg.), Théonymie celtique, cultes, interpretatio / Keltische Theonymie, Kulte, interpretatio. Akten des X. Workshop F.E.R.C.AN., Paris 24.–26. Mai 2010) :
NANTOSVELTA habituellement compris comme ‘le tournant de la vallée ou de la rivière’, ne me paraît pas exactement interprété. il y a deux difficultés : le nom de la vallée, ou du torrent, apparaît généralement sous la forme d’un thème en -u- ; et l’on fait peu de cas de la valeur de nom d’action attendue du suffixe en -ta. J’ai proposé de lire le nom comme un juxtaposé, nantos (= *nantous, génitif de thème en -u-) (1), + un deuxième élément *weltā, nom de l’herbe (gall. gwellt, bret. geot), ou mieux *sweltā, nom du bénéfice, du revenu. (2) Dans les deux cas, Nantosuelta représente la richesse de la vallée. (3)
Notes : 1) On ne peut comparer la dégradation de Smertu- en Smerto-, qui ne se présente que dans des conditions spéciales (documents galates ; ou documents tardifs).
2) Il n’est pas exclu que ce théonyme ait été conçu de façon qu’il permette une double analyse nantos uelta et nantos suelta.
3) Pour la polysémie ‘herbe, pâture’/ ‘produit, rapport, revenu’, cf. lat. foenus > fr. foin, et le sémantisme de fr. regain ‘herbe nouvelle’ ou fruitière 'lieu d'affinage des produits laitiers.
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Symbolisme :
Dans L'Oracle de la sagesse gauloise (Éditions Le Courrier du Livre, 2021) écrit par Caroline Duban et illustré par Lawrence Rasson, une carte est à Sucellos et à sa parèdre Nantosuelta :
Sucellos & Nantosuelta, Le « Bon Frappeur » et la « Vallée ensoleillée »
Les parèdres divins, Sucellos et Nantosuelta, forment une alliance complémentaire et énigmatique. Ils sont ici présentés ensemble, mais ils étaient aussi vénérés individuellement. La carte ici tirée est inspirée d'un bas-relief retrouvé à Sarrebourg.
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Nantosuelta est formé par -nanto, « val », « vallée » (ou « ruisseau » selon le contexte) d'une part, et de -suelta, (issu de *swel) « soleil », d'autre part. La déesse au sceptre partage le chien et les amphores avec Sucellos, mais elle dispose de ses propres attributs. Son grand bâton est orné d'une ruche miniature (un autre bas-relief la remplace par une hutte au toit de chaume). Elle tient une patère dans la main droite et déverse une libation sur un autel. Un corbeau surmonte la dédicace aux dieux. Déesse de l'abondance, Nantosuelta détient les attributs de la fertilité des Matrones. La signification de son nom, lumineux et promesse de cultures abondantes, résume les qualités qu'incarne la déesse à la ruche, parfait opposé intimement lié au cycle de la vie et de la mort, car l'un et l'autre sont indissociables.
Interprétation : Sucellos et Nantosuelta s'approchent de vous pour vous enseigner l'équilibre. C'est une carte qui vous interpelle sur les comportements que l'on a envers vous, et ceux que vous avez envers autrui. Donner et recevoir sont des attitudes louables à condition qu'elles soient distribuées équitablement. Trop offrir peut attirer à soi des êtres intéressés par vos offrandes plus que par votre personne. On pourrait rapidement ne plus vous respecter ou considérer vos cadeaux, quelles que soient leurs formes, comme acquis. Si, pour une raison ou une autre, vous décidiez de ralentir ou de supprimer ces actions, on vous en ferait le reproche et des pensées négatives se formeraient autour de vous. On se baserait sur l'idée que l'on se fait de vous, de l'image sui émane de vos paroles et vos gestes bienheureux, plutôt que sur votre bonté sincère. On ne se préoccuperait pas de la raison qui aurait fait diminuer votre générosité, ni ne se soucierait de votre santé, de votre moral, de vos ennuis... On pourrait aller jusqu'à retourner la situation contre vous.
Si vous vous trouvez dans la situation inverse, vos besoins soudains pourraient surprendre votre entourage. Un long silence suivi d'une ou plusieurs requêtes pourraient offusquer vos interlocuteurs. On aurait vite fait de vous accuser d'être un profiteur qui ne donnerait pas de ses nouvelles que lorsqu'il est dans le besoin. On ne verrait pas les causes de votre mutisme ni de votre réclusion. On se dirait plus volontiers que vous ne cherchez le contact qu'avec ceux et celles qui vous seraient favorables. Bien entendu, on ne comprendrait pas votre état véritable. Dans l'un ou l'autre des cas, il va falloir user de paroles, de dialogues pour mettre les choses au clair. C'est tout à votre honneur de vouloir rester discret, secret, en retrait, mais pour ne pas ajouter de l'huile sur le feu, ne pas augmenter votre charge émotionnelle avec des disputes ou des éloignements involontaires, il est préférable d'exprimer votre vécu, vos ressentis, de vous confier si vous le pouvez ou de faire comprendre certaines choses à demi-mot. Il n'y a aucune honte à cela, et sans doute votre auditoire se rendrait compte de ses mauvaises pensées et de ses mauvais agissements envers vous. On réfléchirait à deux fois avant de vous accuser de profit ou de distanciation. Si vous ne voulez pas que les circonstances actuelles viennent pourrir vos relations, il est cent fois préférable de « crever l'abcès ».
Le couple associé à la vie et à la mort, à l'abondance et à la fin de toute chose prévient ici des excès. Les dieux savent quand donner et quand recevoir, quand vient le temps d'exaucer les prières des pèlerins, et quand profiter de leurs offrandes. C'est une règle qui permet de maintenir une entente cordiale entre les dévots et les divinités protectrices, mais aussi entre les fidèles. Sucellos et Nantosuelta connaissent les moments propices pour partager leurs bienfaits ou ceux de la nature, mais ils ont conscience des limites à ne pas franchir. Ils ont en garde le mouvement perpétuel de la roue de la vie. Pour que cette manœuvre soit possible, il est impératif que les dons reçus et offerts soient équilibrés. De cette façon, les échanges équitables forment un mouvement de balancier invisible, qui permet à chaque participant d'avancer et d'évoluer sur sa propre voie. Ne perdez jamais de vue cet équilibre essentiel à votre bien-être et à votre bonheur. Ainsi, on vous ouvrira les bras lorsque vous en aurez besoin, on vous fera profiter de petites joies pour le simple plaisir de vous savoir heureux, de vous voir ou vous imaginer sourire. Ces dons offerts ou reçus ne sont pas nécessairement matériels, mais ils comprennent également les paroles, l'écoute et le soutien réconfortants, les conseils, les compliments et les encouragements motivants.
Sucellos et Nantosuelta peuvent représenter une personne qui incarne les qualités et attributs des dieux. Dans ce cas, soyez attentif à l'exemple que cette personne donne, car il est bon à suivre.
Enfin, donner et recevoir est un équilibre que vous êtes en droit - sinon en devoir - de vous accorder. Il n'est pas une vie heureuse qui ne soit faite que de labeur, de privations ou d'abnégation. Pour reprendre des forces et les entretenir, il faut bien s'autoriser de la compassion, de la confiance, du respect, de l'amour.
Selon votre état, votre caractère, vous pouvez vous trouver dans la situation inverse. Vivre égoïstement ne mène qu'à la solitude. Elle n'est pas forcément traduite par une absence d'entourage, mais plutôt une présence hypocrite dans les liens. Parfois, avec le temps, ces mêmes intéressés peuvent finir par se lasser et vous oublier. Ouvrez votre cœur à la générosité, ne l'enserrez pas comme s'il allait vous échapper.
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