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Photo du rédacteurAnne

Le Sphinx (papillon)

Dernière mise à jour : 25 mars




Étymologie :


  • SPHINX, subst. masc.

Étymol. et Hist. A. 1. 1546 sphinge (J. Martin, trad. F. Colonna, Discours du songe de Poliphile, f°44 vods Quem. DDL t. 12 : y avoit un monstre Égyptien, faict d'or en forme de Sphinge, gisant dessus ses quatre pieds) ; 1553 sphinx (P. Belon, Observations, II, 46, [1588], p. 260 ds R. Philol. fr. t. 43, p. 203) ; 1794 deviner l'énigme du sphinx (Beaumarchais, Mère coupable, II, 18 ds Littré) ; 2. 1817 fig. (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, p. 55). B. 1. 1736 zool. « chenille du papillon » (Réaumur, Mém. pour servir à l'hist. des insectes, t. 2, p. 253) ; 2. 1762 id. « papillon » (E.-L. Geoffroy, Hist. abr. des insectes des environs de Paris, t. 2, pp. 76-77). Mot lat. sphinx (empr. au gr. Σ φ ι ́ γ ξ) désignant un monstre ayant un corps de lion et une tête d'homme (sphinx d'Égypte), ou un monstre ayant un corps de lion et une tête de femme et des ailes (sphinx de Thèbes). Avec B., cf. Cuvier, Règne animal, 1817, III, 556 : Des Sphinx de Linnaeus : L'attitude de plusieurs de leurs chenilles, semblable à celle du sphinx de la Fable, leur a valu la première dénomination.


Lire également la définition du nom sphinx (sens 2) afin d'amorcer la réflexion symbolique.

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SPHINGIDAE

Le nom de Sphinx, créé par Linné, est tiré, selon Engramelle (Papillons d'Europe, tome 3, p. 1, 1782), "de l'attitude que prennent leurs chenilles lorsqu'elles sont dans l'inaction. Elles élèvent en l'air la partie antérieure de leur corps, tandis que la partie postérieure reste appliquée sur une branche, ce qui leur donne quelque ressemblance avec l'animal fabuleux des Égyptiens, connu sous le nom de Sphinx".

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Zoologie :


Dans son Atlas de zoologie poétique (Éditions Arthaud-Flammarion, 2018) Emmanuelle Pouydebat expose les caractéristiques du Papillon sphinx (Hemeroplanes ornatus) :


La larve de ce papillon sphinx est pourvue d'une aptitude phénoménale. En cas de danger, à l'approche d'un prédateur elle gonfle sa tête et son thorax. Cette modification lui permet de se transformer en... vipère arboricole ! Car elle imité précisément les écailles et la tête triangulaire d'un serpent. Et pas un serpent inoffensif, mais un serpent venimeux. Elle dilate également les derniers segments de son thorax pour augmenter l'effet protecteur des taches oculaires et ainsi faire apparaître deux faux yeux ! Ainsi, le serpent accroché à cette branche n'est pas un serpent mais une chenille ! Évidemment, quand on ressemble à un serpent, on est beaucoup moins attractif.

Le mimétisme ne s'arrête pas à la ressemblance anatomique. La chenille de ce lépidoptère va encore plus loin. En effet, elle simule parfaitement le mouvement d'attaque d'un serpent, précisément le moment qui précède l'attaque et la morsure : elle soulève et balance la partie antérieure de son corps. Or ce sont en particulier les taches oculaires associées à la posture défensive de la chenille qui lui confèrent une protection maximale contre les oiseaux prédateurs, même à des latitudes où il y a relativement peu de serpents arboricoles. Fait remarquable, certaines espèces proches d'Hemeroplanes sont moins ressemblantes peut-être mais elles sont dotées d'un véritable venin ou possèdent un petit appendice qui entre et sort d'un orifice comme une langue de serpent ! Quoi qu'il en soit, le complexe subterfuge de cette chenille est dissuasif, lui permet d'inspirer la crainte et de conduire le prédateur à se tourner vers d'autres proies potentielles peut-être moins armées.... Ironie de l'histoire, le duvet de certains oisillons (Laniocera hypopyrra) imite parfaitement les poils urticants d'une grosse chenille ! Pour pousser plus loin l'illusion et duper les prédateurs potentiels, ils ondulent... Tout le monde peut servir de modèle, y compris les maîtres du mimétisme.


« Pour les personnes normales, cette chenille peut paraître étrange et effrayante, mais pour moi, c'est juste une balade dans un parc. Toutes les chenilles sont différentes au Costa Rica. » (Daniel Janzen)

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Timothée Bay-Nouailhat et Jean Haxaire nous proposent une Clé de détermination illustrée des Sphinx de France Adultes et chenilles (1ère Version 2020) très détaillée :





Symbolisme :


Comme son nom l'indique, une analogie est établie avec le Sphinx, qui peut peut-être donner des pistes....




Littérature :


Les Papillons

[...]

Mais le soir brunit nos plaines ; [...]

Et les « sphinx » aux couleurs sombres,

Dans les ombres

Voltigent en tournoyant.

[...]

Voici le « sphinx » à la tête

De squelette,

Peinte en blanc sur un fond noir,

Que le villageois redoute,

Sur sa route,

De voir voltiger le soir.


Gérard de Nerval, "Les Papillons" in Odelettes, 1853.

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Edgar Allan Poe dans ses Contes inédits (traduction française, 1862) en propose un, intitulé "Le Sphinx", qui comprend une description précise du papillon, (mais qui ne révèle rien du fantastique de ce récit) :


— Sans les renseignements détaillés que vous m’avez fournis sur le monstre, je n’aurais peut-être jamais pu vous démontrer ce que c’était. Laissez-moi, tout d’abord, vous lire une description à l’usage des collèges du genre Sphinx, famille des crépusculaires, ordre des lépidoptères, classe des insecta ou insectes :

« Quatre ailes membraneuses superposées, recouvertes de petites écailles colorées d’un aspect métallique : bouche en forme de trompe roulée, provenant d’une élongation des mâchoires, de chaque côté de laquelle se trouvent des rudiments de mandibules et des palpes hérissées de poils ; les ailes inférieures rattachées à celles de dessus par une soie roide ; antennes formant une massue prismatique allongée ; abdomen en pointe. Le Sphinx à la tête de mort a occasionné beaucoup de terreur parmi les ignorants par l’espèce de cri lugubre qu’il pousse, et les insignes de la mort tracés sur son corselet. »


Pour lire la nouvelle entière :



 

Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque ainsi un Sphinx bien particulier :

10 octobre

(Col d'Èze)


Flou d'ailes jaunâtres et abdomen-échiquier noir et blanc : le sphinx à longue langue joue les hélicoptères sur la germandrée buissonnante.

Miracle du surplace devant chaque fleur. Métaphysique de l'arrêt dans l'atmosphère, de l'équilibre dans le rien. L'immobilité naît du surcroît de mouvement. C'est un des paradoxes de la vie : la mort ne stationne pas.

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Voir aussi les fiches sur le Papillon et la Chenille.


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