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L'Ophrys




Étymologie :


  • OPHRYS, subst. masc.

Étymol. et Hist. 1549 ophris (Commentaires tres excellens de l'hystoire des plantes, trad. d'un ouvrage lat. de L. Fuchs d'apr. FEW t. 7, p. 371b) ; 1701 ophrys fém. (Fur.) ; 1752 masc. (Trév.). Empr. au lat. ophrys « espèce d'orchidée », qui est peut-être à rapprocher du gr. ο φ ρ υ ́ ς « sourcil » (André Bot.).


Lire également la définition du nom ophrys afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms :




Botanique :


Selon Stefano Mancuso et Alessandra Viola, auteurs de L'Intelligence des plantes (édition originale 2013 ; traduction française Albin Michel, 2018),

"Tandis que le lupin fait preuve d'une honnêteté exemplaire envers ses partenaires animaux, d'autres végétaux recourent avec le même succès aux stratagèmes les plus variés. Le cas le plus célèbre est celui des orchidées : selon certaines estimations, environ un tiers des espèces existantes appliquent, pour obtenir une pollinisation efficace, des stratégies que l'on qualifierait de déloyales si on les transposait dans les sociétés humaines. Car elles mystifient les insectes et les obligent à transporter leur pollen sans qu'ils reçoivent en échange la moindre contrepartie. Bien qu'il soit assez peu légitime d'appliquer à la nature les notions d'honnêteté et de malhonnêteté, il demeure intéressant d'observer la manière dont les orchidées dupent leurs partenaires. Elles comptent en effet parmi les organismes vivants dotés des plus fortes capacités de mimétisme. Ce terme fait aussitôt penser au caméléon ou à l'insecte-brindille, mais leurs facultés pourtant remarquables semblent bien peu de chose, si on les compare par exemple à celles de l'Ophrys apifera. Ses fleurs sont ainsi en mesure d'imiter à la perfection la femelle de certains hyménoptères non sociaux, à savoir ceux qui, tout en ressemblant aux guêpes ou aux abeilles, ne vivent pas en société. Outre la forme de leurs femelles, cette orchidée peut même contrefaire la consistance de leurs tissus, de leur peau, du léger duvet présent à sa surface et jusqu'à leur odeur, puisqu'elle exhale des phéromones identiques à celles qui leur servent à exprimer leur disponibilité à l'accouplement. Au total elle met donc en œuvre un triple mimétisme : celui de la forme et des couleurs du corps, qui trompe la vue ; celui de l’épiderme velu, qui trompe le toucher ; celui des phéromones, qui trompe l'odorat. La ressemblance est si parfaite et le mimétisme si soigné que l'insecte mâle est immanquablement induit en erreur, conquis par cette fleur séduisante et poussé à copuler avec elle.


Parfois même, la fiction du piège finit par dépasser la réalité : à la période de floraison des orchidées, certains hyménoptères préfèrent s'unir avec leurs fleurs alors même que des femelles de leur propre espèce les attendent. Puis, tandis que l'insecte est occupé à copuler avec ce qu'il prend pour une partenaire animale, un mécanisme se déclenche et lui colle sur la tête des sortes de petites poches remplies de pollen ont il ne parviendra pas à se débarrasser pendant un certain temps et qu'il se verra ensuite contraint de déposer sur une autre fleur. Dans ne telle relation, il est aisé de savoir qui, de la plante ou de l'insecte, occupe une position dominante par rapport à l'autre."













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Usages traditionnels :


Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


Parmi les autres [plantes à tubercules], il en est qui ont joui autrefois d'une grande vogue et qui sont complètement délaissées aujourd'hui. Ce sont les orchis ou pentecôtes dnt les espèces à tubercules entiers sont connus dans nos montagnes sous le nom d'erba a dou coyons : Orchis mascula, morio, coriophora, globosa, simia, galeata, fusca, ustulata, pyramidalis, etc. Platanthera bifolia, etc. Au siècle dernier, on extrayait le Salep de plusieurs d'entre elles ; Villars et Allioni en indiquent avec détail le mode de préparation. Il me souvient d'en avoir ouï parler dans ma jeunesse, et d'avoir entendu de vieilles gens déplorer de ne pouvoir s'en procurer pour des convalescents, les produits nouveaux et similaires débités par les marchands de denrées coloniales étant d'après elles très inférieurs au salep dont bien peu de personnes aujourd'hui ont conservé la mémoire. Dans les campagnes, aux époques de disette, les tubercules d'orchis et ceux d'ophrys étaient mangés cuits à l'eau et avaient laissé dans l'esprit des vieux paysans un excellent souvenir bien différent de celui des ails bâtards, des tulipes, etc.

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Symbolisme :


Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme d'une orchidée européenne :


OPHRYSE-ARAIGNÉE - ADRESSE.

On sait qu'Arachné fut une très habile brodeuse, qui osa défier Minerve dans l'exercice de cet art. La déesse, offensée, métamorphosa cette imprudente en araignée. L'Ophryse-Araignée ressemble à l'insecte qui, sous une forme hideuse, n'a rien perdu de son adresse.


OPHRYSE-MOUCHE - ERREUR.

La fleur de l'Ophryse ressemble si parfaitement à une mouche à miel que souvent on y est trompé.

 

Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :


Ophrise-araignée - Adresse.

A cause de la ressemblance de sa fleur avec l’insecte dont elle porte le nom.


Ophrise-mouche - Erreur.

Cette plante ressemble tellement à un frelon, qu’il y aurait presque à s’y tromper.

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Selon Pierre Zaccone, auteur de Nouveau langage des fleurs avec la nomenclature des sentiments dont chaque fleur est le symbole et leur emploi pour l'expression des pensées (Éditeur L. Hachette, 1856) :


OPHRISE-ARAIGNÉE (OPHRYS) - HABILETÉ.

Genre de plantes, dont plusieurs espèces sont admises dans les jardins d'agrément, à cause de la singularité de leurs fleurs, qui figurent, à s'y tromper, différentes sortes d'insectes.

L'ophrys-araignée se trouve dans les bois.

« Arachné, fille d'Idmon, de la ville de Colophon, était tellement habile dans l'art de la broderie, qu'elle osa un jour défier Minerve de la surpasser en adressé. La déesse, irritée de cette témérité, brisa ses fuseaux, son métier, et la changea en araignée, dont l'ophrys nous offre l'image ; depuis ce temps elle a tissé sa toile avec autant d'adresse qu'avant sa métamorphose. »

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Dans son Traité du langage symbolique, emblématique et religieux des Fleurs (Paris, 1855), l'abbé Casimir Magnat propose une version catholique des équivalences symboliques entre plantes et sentiments :


OPHRISE ARAIGNÉE - ADRESSE.

Dieu dans sa sagesse a dispersé ses ouvrages dès le commencement : il en a dirigé toutes les parties dès leur origine et il les a fondés pour les siècles des siècles. Il les a ornés pour jamais, et aucun n'a langui, ni défailli, ni manqué à sa destination. Aucun n'arrêtera la marche d'un astre pour toujours.

Ecclésiastes : XVI , 26, 28.

Les ophrises offrent les plus grandes ressemblances avec les orchis, mais les premiers présentent de plus dans l'ensemble de leurs pétales des figures qui ne se trouvent que très rarement dans les orchis. C'est ainsi que l'œil abusé quelquefois par les formes, croit voir dans quelques unes de ces fleurs la forme d'une abeille, d'un gros bourdon, d'une araignée, et quelquefois aussi celle d'un jeune enfant, ou d'un petit singe dont les quatre membres sont étalés. L'ophrise araignée offre une racine composée de deux ou trois bulbes, sa tige est droite, haute de 25 à 30 centimètres. Ses feuilles sont lisses et placées sous la base de la tige. Cet ophrise dont la fleur épanouie a quelque ressemblance avec une araignée, croit en France dans les bois et les pâturages montagneux. On la trouve dans les environs de Paris, à Saint Maur, au bois de Boulogne, etc.

Arachné, fille d'Idmon de la ville de Colophon, prétendit un jour surpasser Minerve dans le talent de broder sur toile et sur tapisserie. La déesse vint la voir sous la figure d'une vieille et la trouva occupée à filer et à ourdir la trame d'une étoffe très fine. Elle se fit alors con naitre et accepta un défi qu'Arachné eut la témérité de lui proposer. Minerve commença à représenter plusieurs histoires différentes sur la toile avec un art admirable. Arachné prit la navette et travailla avec plus de délicatesse encore. Minerve outrée de dépit de se voir vaincue par une mortelle, brisa le métier et les fuseaux de sa rivale. Arachné se pendit de désespoir, mais Minerve la changea en araignée dont l'ophrise nous offre l'image. Depuis ce temps elle a tissé sa toile avec autant d'adresse qu'avant sa métamorphose.


RÉFLEXIONS.

C'est une louable adresse de faire recevoir doucement un refus par des paroles civiles qui réparent le défaut du bien qu'on ne peut accorder. (Mme DE LA SABLIÈRE.)


La souveraine habileté consiste à bien connaître le prix des choses et l'esprit de son siècle.

(LA ROCHEFOUCAULT.)


OPIIRISE MOUCHE - ERREUR.

Mes chers frères, si quelqu'un d'entre vous s'éloigne de la vérité et que quelqu'un l'y fasse rentrer, qu'il sache que celui qui ramènera un pécheur des voies de l'égarement sauvera son âme de la mort et couvrira la multitude de ses péchés. — Jacques : V, 19, 20.

La racine de l'ophrise mouche est ordinairement composée de deux bulbes, d'où s'élève une tige haute de 15 à 20 centimètres, feuillée à sa base et presque nue à sa partie supérieure. Son nom spécifique est Myodes, mot qui exprime la ressemblance de sa fleur avec une mouche. Cette plante a en effet tellement la forme de ces insectes, ou plutôt d'une abeille à ailes étendues, avec les couleurs qui lui sont propres, qu'on prendrait cette plante pour une tige nue sur laquelle reposent ces insectes. La couleur des fleurs est un mélange de pourpre ou de rouge, de jaune, de vert et de blanc.

Cette plante fort curieuse fleurit dans la belle saison et croît sur les collines boisées, à Meudon, à Buc, à Chevreuse, à Fontainebleau.

RÉFLEXIONS.

Les erreurs ont quelquefois un aussi long cours dans le monde que les opinions les plus véritables, parce qu'en prenant ces erreurs pour des vérités, on embrasse aveuglément tout ce qui les entretient et l'on rejette ou on néglige tout ce qui pourrait les détruire. (LA ROCHEFOUCAULT.)


Les erreurs se suivent ; elles naissent les unes des autres. (SAINT CHRYSOSTOME, Homélies.)


Toute erreur est fondée sur quelque vérité dont on abuse. (BOSSUET, Préface sur l'Apocalypse.)

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Jean-Baptiste Saint-Lager, dans ses Recherches historiques sur les mots plantes males et plantes femelles. (J.-B. Baillière, 1884) s'étonne des conclusions d'un se ses confrères :


Gaspard Bauhin a rangé parmi les Serapias ces singuliers Ophrys, appelés autrefois lusus naturæ, dont les fleurs ressemblent, l'une à un bourdon (Ophrys fucifera), l'autre à une abeille (0phrys apifera), une troisième à un taon (0phrys tabanifera), une quatrième à une araignée (0phrys aranifera), une cinquième à une mouche (0phrys myodea), puis les Orchis à fleurs simulant un papillon (Orchis papilionacea et psychodea ou bifolia). Suivant Gaspard Bauhin, ces représentations naturelles d'insectes lascifs et volages, dont la vie se passe à caresser les fleurs, rappellent les sectateurs du dieu Sérapis se livrant sans aucune retenue et dans la plus complète promiscuité à leurs lubriques ébats. Une telle comparaison, de la part d'un naturaliste aussi sérieux que l'illustre auteur du Pinax theatri botanici, ne laisse pas que de surprendre, et nous croyons que les amours des insectes et des papillons avec les fleurs sont un thème fantaisiste qu'il faut laisser aux poètes. En outre, on chercherait vainement, dans les écrits des botanistes grecs, un mot se rapportant aux Orchidées à fleur insectiforme.

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Voir aussi : Orchidée ;

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