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Le Topinambour

Dernière mise à jour : 18 août




Étymologie :


Étymol. et Hist. 1618 plur. toupinambaux (M. Lescarbot, Hist. de la Nouv. France, p. 933 ds Gdf. Compl.) ; 1658 topinambour (G. Patin, Lettre du 29 oct. ds l'Union médicale, 12 sept. 1876 ds Littré Suppl.). De topinambou* (aussi topinambour) parce que l'on croyait que cette plante était originaire du Brésil (alors qu'elle vient de l'est de l'Amérique du Nord). Voir Fried.


Lire également la définition du nom topinambour afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Helianthus tuberosus - Artichaut de Jérusalem - Artichaut du Canada - Cartofle - Crompire - Hélianthe tubéreux - Patate de Virginie - Poire de terre - Tartouffe -

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Botanique :


Selon Jean-Marie Pelt, auteur d'un ouvrage intitulé Des Légumesditions Fayard, 1993) :


[...] En avril 1613, six Indiens Tupinambus originaires eux aussi du Brésil furent présentés à la reine à l'initiative du sieur de Razilly. « En passant par Rouen, il les fit habiller à la française car, selon la coutume du pays, ils vont tout nus, hormis quelque haillon noir qu'ils mettent devant leurs parties honteuses. Les femmes ne portent du tout rien. Ils ont dansé une espèce de branle sans se tenir par les mains et sans bouger d'une place. Leur violon était une courge, comme celle dont les pèlerins se servent pour boire, et dedans il y avait comme des clous et des épingles... » Le climat parisien ne convint guère à ces naturels, dont trois moururent deux mois après leur arrivée. Aussi s'empressa-t-on de baptiser les survivants, le roi acceptant d'être leur parrain. Ce qu'ils devinrent par la suite, nul ne le sait.

Or, dix ans plus tôt, en 1603, Champlain, gouverneur du Canada, avait découvert le premier un légume dont les tubercules étaient fort appréciés des Indiens Hurons et Algonquins. L'épisode des Tupinambus valut à ces tubercules le nom de topinambours, parce qu'ils étaient, croyait-on, la nourriture commune des Indiens.

Le topinambour eut l'air de plaire aux Français et connut d'emblée une vogue rapide, sans avoir à traverser une période de purgatoire, comme ce fut le cas de la plupart des légumes d'origine américaine. Naturellement, le topinambour a malgré tout ses détracteurs, et De Combles, par exemple, dans son Ecole du Potager, déclare tout net que le topinambour est « le plus mauvais légume dans l'opinion générale » - opinion qui, en vérité, était d'abord celle de l'auteur, car le topinambour, prolifique et fécond, ne se portait pas si mal que ça dans l'idée des Français, lesquels appréciaient sa chair au goût si curieusement semblable à celui du fond d'artichaut. D'où son nom vulgaire d'« artichaut du Canada », ou, en anglais, de Jerusalem artichoke (Jérusalem étant ici une corruption de l'italien girasole, nom commun du tournesol).

C'est que le topinambour, comme le tournesol, appartient au genre Helianthus, étymologiquement « fleur de soleil ». En effet, ces plantes orientent leurs gros capitules floraux jaunes vers le soleil - avec une précision, il est vrai, qui n'a rien de militaire. Cette capacité s'est même partiellement perdue pour un bon nombre de variétés cultivées dont les critères de sélection portèrent davantage sur la taille du capitule pour les tournesols - ou sur la qualité des tubercules pour le topinambour - que sur l'exactitude de leur rotation diurne. Il n'en reste pas moins que ces plantes orientent toutes leurs capitules dans la même direction, celle qui correspond sans doute pour elles à un ensoleillement maximal. Toujours est-il que le topinambour était déjà un légume fort prisé quand la pomme de terre ne servait encore qu'à nourrir les cochons ou les prisonniers de guerre en Allemagne.

Dans sa croisade en faveur des légumes destinés à triompher des sécheresses, Parmentier ne dissocie pas le topinambour de la pomme de terre, consacrant à l'un et à l'autre un égal effort de promotion. Il insiste sur son goût de « cul d'artichaut », qui le fait rechercher par les amateurs de ce légume, et il indique les moyens de le manger à la sauce blanche, de le fricasser au beurre avec des oignons, d'en relever la fadeur avec de la moutarde, montrant qu'on peut aussi utiliser sa racine et ses feuilles pour la nourriture du bétail. Comme chez ses cousins de la famille des astéracées (ex-composées), le tubercule ne contient pas d'amidon - autre caractéristique par laquelle il se rapproche de la chimie de l'artichaut. Sa teneur élevée en inuline, sucre condensé à base de fructose, l'indique dans le régime des diabétiques, dont il respecte la glycosurie. Il convient également aux uricémiques en raison de sa faible teneur en protéines.

Le triomphe de la pomme de terre, qui a fini par s'imposer sans concurrence à partir du XIXe siècle, a porté ombrage au topinambour. Mais celui-ci est bien un aliment pour périodes de disette, comme l'avait suggéré Parmentier et comme on le vit lors de la Deuxième Guerre mondiale, où topinambours et rutabagas revinrent en force sur les marchés et dans les cuisines, provisoirement destinés à faire office des deux mamelles de la France occupée. Si la disette est due à la sécheresse, sachons que le topinambour prospère allègrement sur des sols de mauvaise qualité, impropres à la culture de la plupart des autres végétaux alimentaires. Se plaisant dans des sols légers et secs, il représente un excellent légume pour périodes de vaches maigres !

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Philippe Marchenay, Jacques Barrau et Laurence Bérard, auteurs de "Polenta, cassoulet et piperade, l'introduction des plantes du Nouveau Monde dans les cuisines régionales". (In : Journal d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, 42ᵉ année, 2000. Un terrien des îles. A propos de Jacques Barrau. pp. 65-80) font le lien entre aliment et classe sociale :


Le cas du topinambour Helianthus tuberosus L., est remarquable. Observé par Champlain en 1603 aux confins de l'actuel Canada, celui-ci note que, consommé par les Indiens, ce tubercule a la saveur du fond d'artichaut. Quelques années plus tard, Lescarbot contribuera au développement de sa culture en France et en Europe. Le topinambour va connaître rapidement - et au moins pour un temps - le succès, car il devient en quelque sorte « l'artichaut du pauvre ». L'artichaut vrai, Cynara cardunculus L., nous était venu via l'Italie et son histoire fait dire aux différents auteurs que Catherine de Médicis en était très friande. Il fut donc d'abord un légume de luxe (Bois, 1927 : 280), en regard duquel le topinambour a au départ toutes les chances de s'imposer :

  • d'un point de vue agronomique, de par son origine non méridionale, sa culture est possible jusque très au Nord ;

  • de par sa saveur - il contient de l'inuline - le topinambour se rapproche beaucoup de l'artichaut, dont il va occuper la niche gustative et culinaire ;

  • il donne au peuple l'accès à un mets jusque-là réservé aux nantis, l'artichaut étant vendu à prix d'or.

Malheureusement pour lui, le topinambour possède plusieurs défauts qui lui nuirent beaucoup : comme l'artichaut, une fois cuit, il s'altère vite et provoque des intoxications alimentaires spectaculaires. Par ailleurs, il est très carminatif - en d'autres termes c'est un légume « venteux ». Sur le plan de sa culture, il envahit facilement le jardin en peu de temps, car sa végétation souterraine est vigoureuse. Cela signifie sans doute que ce n'est pas une plante cultivée de longue date, puisqu'elle se comporte comme une mauvaise herbe en envahissant pour plusieurs années le sol où elle a été cultivée (Haudricourt, 1987 : 185). Enfin, la Deuxième Guerre Mondiale l'achève car, pendant cette période, on en consomme trop, avec les risques digestifs que cela comporte. Légume de guerre, il est préférable de ne pas en parler devant ceux qui durent le consommer par nécessité de trop nombreuses fois... On l'envoie donc aux oubliettes de la gastronomie d'où il va ressortir muni d'une nouvelle aura de prestige avec sa réapparition dans les menus de la « nouvelle cuisine » et des grands chefs.

L'exemple du topinambour pose bien le problème de l'opposition entre cuisine des riches et cuisine des pauvres. Ces derniers aspirent toujours à atteindre à une cuisine plus opulente, symbole de l'acquisition d'un prestige social.

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Bienfaits :


Sur son site www.lanutrition.fr, le Dr Mounir Belkouch, Ph. D récapitule les qualités phytothérapeutiques du topinambour :


Riche en fibres et minéraux, ce précieux tubercule fait pourtant partie des légumes longtemps oubliés mais dont on redécouvre aujourd'hui toutes les vertus santé. Originaire d’Amérique du Nord, le topinambour, connu également sous le nom d’artichaut de Jérusalem, est une plante vivace très rustique appartenant à la famille des Asteraceae. 

Il renferme des glucides qui favorisent le bon fonctionnement du transit, contribuant ainsi à une bonne santé intestinale. Ces sucres pourraient également jouer un rôle dans la prévention de certains cancers et la lutte contre le diabète. Le topinambour possède plusieurs propriétés potentiellement bénéfiques pour notre santé.


Allié minceur : Avec une faible densité calorique par rapport à la pomme de terre (76 kcal/100g), un index glycémique modéré et un pouvoir satiétogène élevé, le topinambour est un aliment très utile pour un régime minceur.


Santé intestinale : Le topinambour contient beaucoup d'inuline, une fibre alimentaire soluble, qui appartient à une famille appelée fructanes. Celles-ci sont composées de molécules glucidiques complexes, non digestibles par l'organisme, qui favorisent le bon fonctionnement du transit intestinal en stimulant la motilité de l’intestin. Grâce à leur contenu en inuline, les fructanes du topinambour favoriseraient le développement de bactéries bénéfiques à l’intestin, comme les bifidobactéries (Lactobacillus/Enterococcus). A ce titre, les fructanes sont considérés comme un prébiotique participant à l'équilibre de la flore intestinale. Ces fructanes peuvent réduire ainsi la constipation.


Prévention du diabète : Le topinambour, qui s’apparente à la pomme de terre, ne contient pas d’amidon comme substance de réserve mais bien de l’inuline, un glucide spécifique non assimilable. Ces fructanes sont potentiellement utiles chez les diabétiques car ce type de glucides n’influence pas la glycémie. L'inuline pourrait également avoir des effets positifs sur le diabète en réduisant les lipides sanguins. De fait, il a été démontré que la consommation d'inuline permet de diminuer sensiblement les triglycérides sanguins chez des sujets légèrement hypertriglycéridémiques. Aussi, chez des sujets diabétiques, l'ingestion de fructanes permet la réduction du cholestérol total et du mauvais cholestérol.


Prévention du cancer : Source de fructanes et d'inuline, le topinambour assurerait un rôle protecteur contre le cancer colo-rectal selon plusieurs études scientifiques. De fait, certains fructanes, dont l’inuline et l’oligofructose, ont montré des résultats prometteurs dans la prévention du cancer du côlon et du cancer du sein. Ces composés provoqueraient un changement bénéfique dans la composition de la flore intestinale qui amènerait une protection efficace contre certains pathogènes.


Riche en minéraux et vitamines : Le topinambour constitue une excellente source de vitamines du groupe B, minéraux (potassium, phosphore, magnésium) et oligo-éléments (fer, cuivre, zinc...).


Protection du système nerveux : La vitamine B1 présente dans le topinambour aide à maintenir notre système nerveux en bonne santé ; elle joue notamment un rôle très important dans la transmission de l'influx nerveux.


Biodisponibilité des minéraux : Des études scientifiques ont démontré que l'inuline et l'oligofructose du topinambour pouvaient augmenter de façon significative l'absorption du calcium et du magnésium au niveau de l'intestin. Ils agissent donc sur le plan de la minéralisation et de la densité osseuse pour une meilleure santé des os. Ce légume est donc précieux pour prévenir l'ostéoporose et le rachitisme.

Le topinambour est un légume racine qui aide notamment à la digestion, l’absorption, et également la perte de poids. Son rôle potentiel dans la lutte contre certains cancers et la gestion du diabète justifie que l’on gagnerait à mieux le connaître.


Références : Meyer D, Stasse-Wolthuis M. The bifidogenic effect of inulin and oligofructose and its consequences for gut health. Eur J Clin Nutr 2009 ; 63 : 1277-89

Kaur N, Gupta AK. Applications of inulin and oligofructose in health and nutrition. J Biosci 2002 December ; 27(7) : 703-14.

Roberfroid MB. Introducing inulin-type fructans. Br J Nutr 2005 April ; 93 Suppl 1 : S13-S25.

Bosscher D, Breynaert A, et al. Food-based strategies to modulate the composition of the intestinal microbiota and their associated health effects. J Physiol Pharmacol 2009 ; 60 Suppl 6 : 5-11.

Kelly G. Inulin-type prebiotics: a review. (Part 2). Altern Med Rev 2009 ; 14 : 36-55.

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Symbolisme :


Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


La caractéristique du topinambour de se déplacer d'une année à l'autre et de réapparaître parfois très loin de son ancien emplacement a fait naître la légende suivante : Un jour, lors d'une période de grande sécheresse, saint Roch tomba malade et ne put arroser ses topinambours. Une fois rétabli, quelle ne fut pas sa surprise de les retrouver près d'une rivière, où ils ne risquaient plus de manquer d'eau. On parla alors d'un miracle, miracle qui se reproduit depuis sans cesse.

 


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