top of page

Blog

Le Cœlacanthe

  • Photo du rédacteur: Anne
    Anne
  • il y a 5 jours
  • 13 min de lecture



Étymologie :


Étymol. et Hist. 1842-48 (Agassiz Pisces). Adaptation du lat. sc. coelacanthus (Agassiz, loc. cit.) composé du gr. κ ο ι ̃ λ ο ς « creux » et α ́ κ α ν θ α « épine  ».


Lire également la définition du nom cœlacanthe afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Latimeria chalumnae - Cœlacanthe africain - Cœlacanthe de l'Ouest de l'océan Indien -

Latimeria menadoensis - Cœlacanthe de Manado -




Zoologie :


Bertrand Ville, auteur d'une thèse intitulée Aperçu de l'anatomie viscérale des Polypteridae : le cas de la respiration aérienne (Université de Nantes, 2013) présente les particularités du Cœlacanthe :


Le cas particulier des cœlacanthes actuels : Le genre Latimeria compte actuellement deux espèces. La première espèce, Latimeria chalumnae (Smith, 1939), a été longtemps confinée à l’archipel des Comores dans l’Océan indien, entre le Mozambique et l’île de Madagascar. Depuis sa découverte à la fin de l’année 1938, alors que l’espèce était considérée éteinte depuis 65 millions d’années, il semblait que cette espèce soit unique en son genre. La population des cœlacanthes comoriens est estimée à quelques centaines d’individus seulement, et le grand nombre de captures liées aux activités de pêche semble déjà constituer une menace sérieuse quant à sa pérennité. Bien que classée depuis 1989 en annexe I de la CITES (Convention on International Trade of Endangered Species of wild fauna and flora), et interdite à la pêche depuis 1994 aux Comores, l’espèce fait toujours partie des captures accessoires de pêche dans cette zone. Plus de deux cent spécimens auraient ainsi été remontés depuis une cinquantaine d’années dans l’archipel, depuis des profondeurs comprises entre 100 et 800 mètres sous la surface. Jusqu’en 1999, seuls cinq spécimens avaient été capturés en dehors de l’archipel, entre 1000 et 2000 km des Comores près des côtes sud-africaines et malgaches du canal de Mozambique.

La capture en juillet 1998 d’un spécimen dans l’archipel de Sulawesi, en Indonésie, à plus de 10 000 km de la population comorienne, a été une réelle surprise pour le monde scientifique. L’analyse de caractères morphologiques et génomiques a conduit à la création d’une nouvelle espèce, Latimeria menadoensis, et à considérer rapidement la population indonésienne comme étant une population autochtone totalement isolée de celle des Comores. Pour les auteurs ayant décrit la nouvelle espèce, la séparation des deux populations date d’au moins 1 à 1,5 million d’années [41]. Les habitats occupés par les deux populations sont étroitement similaires, et sont formés par des coulées de lave récentes au sein desquelles les cœlacanthes cherchent des anfractuosités pour s’y réfugier durant le jour. Ces derniers semblent semi-sédentaires et ne s’aventurent pas en pleine eau ou dans les grandes profondeurs. Les cinq spécimens capturés au large des Comores seraient des exceptions plutôt rares : ces animaux étant plutôt des nageurs lents, il est même possible que le fort courant du Mozambique les aient simplement entraînés. Les cœlacanthes ont probablement formé une métapopulation dans le passé, mais il est probable que ce ne soit actuellement plus le cas. La fragmentation extrême de leurs habitats et leur écologie originale permettent encore d’espérer la découverte de nouvelles populations voire de nouvelles espèces.

Le genre Latimeria présente de nombreux caractères morphologiques distincts et spécifiques des Coelacanthimorpha, dont notamment des nageoires pectorales et pelviennes charnues reliées au corps par une articulation monobasale, un crâne en deux portions reliées par un joint intracrânien et dont la partie antérieure renferme un organe rostral électrorécepteur original, une nageoire caudale diphycerque divisée en trois lobes, le lobe central étant un prolongement de la notochorde, cette dernière s’étirant sur l’ensemble du corps avec un diamètre important et constant… Les cœlacanthes ont formé un vaste ensemble d’espèces dont les premiers fossiles remontent au milieu du Dévonien. Leur diversité était maximale au début du Trias, avec seize espèces décrites vivant en eaux de mer mais aussi en eau douce. Loin de conforter la fausse image du « fossile vivant », des études récentes prouvent que ces animaux, tout en conservant une certaine linéarité au niveau génomique et moléculaire, ont bel et bien changé au cours du temps. L’appareil pulmonaire présent chez les cœlacanthes s’est ainsi modifié au fil des grandes ères géologiques. Descendants d’animaux tétrapodomorphes elpistostégaliens, au même titre que le reste des sarcoptérygiens, les cœlacanthes ont hérité d’une poche gazeuse interne qui s’est secondairement rempli de graisse chez les espèces actuelles du genre Latimeria. Le poumon de ces deux espèces n’est cependant plus fonctionnel, les représentants du genre vivant par ailleurs entre 100 m et 250 m de profondeur, et il semble plutôt assurer une fonction hydrostatique de flottaison. Sa structure reste toutefois identifiable, ainsi que la circulation sanguine de type pulmonaire qui lui est associée.

*

ree

*



Symbolisme :


Christine Henon, Gilbert David, Raphael Plante, auteurs d'un article intitulé « Symbolique et communication scientifique autour d’une espèce menacée, vers la cognition du développement durable. » (X° Colloque bilatéral franco-roumain, CIFSIC Université de Bucarest, 28 juin – 3 juillet 2003, Oct 2003. sic_00000630) explorent le symbolisme du Cœlacanthe, en lien avec son statut d'ancêtre de l'homme ayant franchi le pas de la mer à la terre :


Nawal Msaidié, auteur d'un article intitulé « Le cœlacanthe, symbole de la patrie, renommée mondiale » (Masiwa, 5 juillet 2021) met en avant le cœlacanthe comme symbole des Comores :


Le cœlacanthe ou gombesa en comorien est le symbole des Comores. C’est un symbole patriotique mais aussi un symbole culturel et scientifique car il fait partie de notre patrimoine marin. En tant que symbole des Comores, le nom est utilisé pour désigner le « made in Comoros ». Depuis quelques années, c’est le nom que porte les joueurs de l’équipe de football des Comores : les Cœlacanthes.


Pourquoi ce poisson préhistorique que l’on retrouve aussi en Afrique du sud et en Indonésie est le symbole des Comores ?

Le cœlacanthe est un animal fossile, il n’aurait pas évolué depuis 350 millions d’années. Il a été pêché pour la première fois en 1938 au large des côtes sud-africaines, mais c’est celui qui a été péché au large de Domoni (Anjouan) le 20 décembre 1952 qui a le plus marqué l’histoire pour deux raisons. La première, c’est que le spécimen pêché aux Comores était en meilleur état que celui pêcher en Afrique du Sud. La deuxième est que les eaux des Comores sont celles qui regroupent le plus grand nombre de spécimen, environ 300.

Le plus vieux poisson du monde est exposé au Muséum d’histoire naturelle à Paris et un autre modèle se trouve à Océanopolis à Brest. Un beau modèle est également conservé au Centre National de Documentation et de Recherche Scientifique (CNDRS) à Moroni.

Néanmoins, des actions de valorisation et de sensibilisation à l’histoire du cœlacanthe sont faites sur notre archipel. On peut citer la salle consacrée aux cœlacanthes  au CNDRS, la maison du Coelacanthe à Itsoundzou ya Badjini, ou une exposition en 2019 au Musée de Mayotte consacrée au patrimoine marin et dont la pièce maîtresse était l’animal fossile.

Dans la littérature orale et écrite, l’animal est la source de nombreux contes et légendes comme par exemple l’histoire qui lui est consacrée dans Trois contes des Comores d’Ahmed Mohamed Ahmed Bacar Rezida, aux éditions Cœlacanthe (!), en 2017.

Au niveau culturel, des actions sont menées et doivent sûrement être développées pour valoriser non seulement l’animal mais aussi toutes les actions culturelles qui en découlent : la créativité littéraire, la créativité picturale, la créativité autour des activités des pirogues ou des boutres par exemple…

La fête de l’indépendance et la décision du gouvernement de mettre en avant l’équipe de football des Cœlacanthes est l’occasion de mettre la lumière sur les éléments qui constituent l’identité des Comores : l’hymne national, le drapeau et tous les symboles nationaux qui permettent de mettre en avant le pays. Des images et des symboles qui doivent être l’objet d’une valorisation plus accentuée.

*

ree

*

Mahdawi Ben Ali, auteur d'un article intitulé « Décoration au stade Maluzini. Une œuvre qui fait débat » (Al-watwan, Le premier journal des Comores, 27/03/2023) rend compte d'une polémique comorienne liée à la représentation d'un cœlacanthe :


Un Coelacanthe « pas vraiment réussi » érigé sur la façade d’entrée, un slogan en lettres capitales calqué sur celui du club de la capitale française, le Paris-Saint-Germain. Des créations qui semblent loin de faire l’unanimité. Pour sa part, l’auteur de la sculpture du célèbre poisson estime qu’il s’agissait, plutôt, de pondre une « idée originale », plus qu’autre chose.


Après le slogan « Ici c’est Malouzini ! », calqué sur celui du Parc des Princes, à Paris, qui continue de faire couler encre et salive, les dirigeants du plus grand stade des Comores viennent d’enfoncer le clou avec l’exposition d’un cœlacanthe sur la façade d’entrée. Cette création réalisée par l’artiste Napalo est loin de faire l’unanimité au sein des habitués des lieux qui ne cachent pas leur colère contre cette œuvre qualifiée, souvent, d’«indigne du poisson légendaire comorien et symbole de toute une Nation».

Dans les taxis, au marché et même dans l’administration, la «création mal réalisée» de Napalo est devenue un sujet de discussion majeur. Certains suggèrent même que le slogan qui serait «bêtement» calqué sur celui du Parc des Princes, à Paris, tout comme le coelacanthes de Napalo soient retirés de ce stade qui reçoit les plus grandes manifestations sportives, et d’autres encore, du pays.

« Il y a effectivement, matière à s’indigner. Ce qui a été fait, c’est purement de l’amateurisme. Il ne s’agit pas de remettre en cause, de manière générale, les capacités de l’artiste. On a vu des œuvres de l’artiste de très grande qualité. Mais il faut bien reconnaitre qu’en voulant produire un cœlacanthe, cette fois-ci il a pondu un je-ne-sais-quoi », estime l’ancien chroniqueur culturel du quotidien La Gazette des Comores, Yazid. En dehors de tout appel à candidature qui aurait pu impliquer un maximum d’artistes pouvant faire honneur aux vaillants guerriers de l’équipe nationale, le ministère des Sports a, encore une fois, opté pour un raccourci et, malheureusement, le résultat est loin des attentes. De toute évidence, l’œuvre réalisée est un «simple» poisson très loin du légendaire cœlacanthe, symbole de la Nation comorienne. Dans les rues de Moroni et ou encore à Mvuni, entre autres, on peut voir des peintures et des sculptures de cœlacanthe bien plus ressemblant.

Selon un artiste de la place qui a requis l’anonymat, la description que l’auteur fait de son œuvre serait «très loin de la réalité» : « un cœlacanthe qui laisse entrevoir la peur dans le regard, sans écailles ni nageoires, est-ce vraiment un cœlacanthe ? », se demande-t-il Pour sa part, le ministère des Sports semble n’avoir rien à en redire et est prêt à défendre Napalo, comme ce fut le cas avec le slogan « Ici c’est Malouzini » copié sur celui du Parc des Princes.

« Pour moi, c’est un honneur de présenter le cœlacanthe sur la façade du stade. Je me devais de trouver une idée originale qui m’honore moi-même et le ministre de la Culture qui m’a confié ce travail. Je me devais une création qui sort de l’ordinaire. Il faut savoir qu’il n’était pas question de créer un cœlacanthe inerte. Je me devais de donner une image forte à l’image de l’équipe. Un coelacanthe bien vivant et prêt à aller au défi », s’est défendu, pour sa part, Napalo.

*

ree

*




Symbolisme astrologique :


Gabriel, le créateur du Site Zooastro.com propose de trouver son animal astral en fonction de la position du Soleil et de la Lune dans notre thème :


Le Cœlacanthe ou l’Épreuve du Temps : Il y a chez le Poisson une volonté subtile, méfiante, constituée de pulsions instinctives visant à la transformation et au dépassement des situations difficiles. Prompt à douter de tout, il ne peut s’empêcher de se mettre à l’épreuve afin de chercher la vérité par ses propres moyens. Il s’affirme par la recherche d’une certaine connaissance. Il n’hésite pas à frôler le danger pour dépasser les blocages. Tous les moyens sont bons pour avancer, et le Poisson expérimente sans tabou toutes les possibilités.

Le Poisson s’infiltre dans toutes les failles. Pour lui, le sentiment d’exister provient de la provocation, non par méchanceté, mais pour savoir à qui il a affaire. Louvoyant entre attitude corrosive et sournoise inquisition, il reste secret et pudique sur ses sentiments profonds. Il ne montre jamais clairement son attachement pourtant dévoué, préférant garder toujours une part de mystère.

Ce Poisson-là a une sensibilité d’autant plus introvertie et froidement flegmatique, qu’il est attiré par une forme de vie austère et dure. Il bâtit au plus profond de lui-même des échafaudages ambitieux, des désirs de constructions durables qui permettraient d’abriter une famille, ou un groupe auquel il tient beaucoup. Lent mais réfléchi, solide et équilibré, sec et rigide, il a un grand besoin de structure sociale et ne peut se passer du lien qu’il a avec sa civilisation, sa ville, ou sa maison. Cette passion pour la vie commune est certainement le point sensible de cette personnalité.


Les particularités du Cœlacanthe : La sensibilité ambitieuse du Cœlacanthe structure sa volonté en la rendant plus consistante, mais aussi plus solide et plus stable ! Son besoin de construire une œuvre durable et collective lui donne très jeune un aspect sérieux et froid. Responsabilisé par la hauteur de la tâche qu’il s’est fixée, il place son action dans le temps long. Il œuvre d’abord dans l’ombre, secrètement, à poser les fondations de son architecture. Le Cœlacanthe évite les coups d’éclats et les grands gestes ostensibles. Il agit comme l’eau qui, goutte à goutte, creuse la roche. C’est un prince des ténèbres qui développe un goût certain pour le mystère et l’inaccessible. Il sait se faire oublier, parfois pendant longtemps, pour resurgir tout à coup là où on ne l’attend pas, comme un vieux sous-marin.

Comme l’éternité est son terrain de jeu, il peut reprendre une œuvre construite avant lui, qu’il s’attache à passer aux générations suivantes. Il est le gardien du temps, le représentant de traditions à régénérer. Le Cœlacanthe apparait quand les institutions de notre culture, que l’on croyait perdues, se revivifient. Le Cœlacanthe ne laisse pas indifférent, qu’on le voit comme le conservateur d’un patrimoine culturel précieux, ou le porte-étendard de l’obscurantisme.

La construction mentale du Cœlacanthe se fait assez vite dans sa vie, et change peu par la suite. C’est un esprit critique et lucide. A voir les gens par en dessous, du point de vue qui les flatte le moins, le Cœlacanthe perçoit leur côté obscur. Il développe une vision assez pessimiste de l’autre, voire misanthrope. C’est paradoxal puisqu’il est entièrement tourné vers autrui. Au fil de ses rencontres, il « en voit tellement » qu’il apprend à se blinder sous une carapace insubmersible. Il y a chez lui un fond de tristesse, de scepticisme. Il compense çà par un besoin d’authenticité et de sobriété dans sa relation au monde. Le Cœlacanthe ne perd jamais le contrôle de ses émotions et peut pécher par un excès de rationalisme ou une absence de lâcher-prise.


Les pouvoirs du Cœlacanthe : Le Cœlacanthe a le pouvoir de transmettre un héritage restauré aux générations qui lui succèdent. Sa loyauté et son sens de la stratégie, aidés par une patience à toute épreuve, lui permettent d’accomplir de grandes choses avec sobriété. Il reste invariablement maître de lui-même et élimine impitoyablement – par un savant cocktail de provocation et d’indifférence – tout le superflu.

Le natif du Cœlacanthe aura intérêt à choisir une activité qui exalte sa recherche de relations et de vérités profondes, où il pourra assouvir cette soif de structure sociale. Repéré pour sa capacité à tenir l’épreuve du temps, il pourra devenir conservateur de patrimoine, ingénieur en génie civil, ou toute activité où il s’agit d’inscrire une expérimentation humaine dans la durée ou dans la pierre. Quel que soit le domaine qu’il choisira, il y recherchera une vérité constructive.


 Exemples : Indira Gandhi - Sophie Marceau - Ryan Gosling [Soleil Scorpion / Lune Capricorne]

*

ree

*



Philatélie :



Littérature :


Dans son roman policier Sous les Vents de Neptune (Editions Viviane Hamy, 2004), Fred Vargas, privilège du romancier, fusionne les caractéristiques de deux animaux qui vient dans le lac Pink au Canada : celles d'un organisme anaérobie préhistorique : une bactérie photosynthétique rose qui utilise le soufre au lieu de l’oxygène pour transformer la lumière du soleil en énergie et celles de l’épinoche à trois épines, petit poisson d’eau salée qui s’est adapté à la désalinisation graduelle du lac :


"Le lac Pink atteignait une profondeur de vingt mètres et son fond était recouvert de trois mètres de boue. Jusqu'ici, tout allait bien. Mais en raison même de cette profondeur, les eaux de sa surface ne se mêlaient pas aux eaux du fond. A partir de quinze mètres, celles-ci ne bougeaient plus, jamais remuées, jamais oxygénées, non plus que les vases qui renfermaient ses dix mille six cents ans d'histoire. Un lac d'apparence normale tout compte fait, se résuma Adamsberg et même carrément rose et bleu, mais recouvrant un second lac perpétuellement stagnant, sans air, mort, fossile de l'histoire. Le pire étant qu'un poisson marin y vivait encore, issu du temps où la mer était encore là. Adamsberg examina le dessin du poisson, qui évoquait un hybride entre carpe et truite, portant des barbelures. Il eut beau relire le panneau, le poisson inconnu ne portait pas de nom.

Un lac vivant posé sur un lac mort. Abritant une créature innommée dont on possédait un croquis, une image. Adamsberg se pencha par-dessus la barrière de bois pour tenter d'apercevoir sous l'eau rose ces inerties cachées. Pourquoi fallait-il que toutes ses pensées le ramènent au Trident ? Comme ces griffures des ours sur les troncs ? Comme ce lac décédé qui vivait sans un bruit, tapi sous une surface de vie, boueux, grisâtre, où se mouvait un hôte hérité d'un âge mort ?

Adamsberg hésita, puis sortit son carnet de son anorak. Réchauffant ses mains, il recopia précisément le dessin de ce foutu poisson qui nageait entre ciel et enfer.

[...]

- Dites, Voisenet, ajouta Adamsberg en sortant ce carnet, cela vous dit quelque chose, ce poisson ?

Voisenet se pencha avec intérêt sur le croquis qu'Adamsberg avait fait de la bestiole qui furetait au fond du lac Pink.

- Jamais vu, dit Voisenet, intrigué. Vous êtes certain de la justesse du dessin ?

- Il n'y manque pas une nageoire.

- Jamais vu, répéta le lieutenant en secouant la tête. Et pourtant, j'en connais un bout en ichtyofaune.

- En quoi ?

- En poissons.

- Alors dites "poissons", je vous en prie. J'ai déjà du mal à comprendre nos collègues, ne me compliquez pas la tâche.

- D'où cela provient-il ?

- D'un foutu lac, lieutenant. De deux lacs posés l'un sur l'autre. Un lac vivant sur un lac mort.

- Pardon ?

- Vingt mètres de profondeur, trois mètres de boues vieilles de dix mille ans. Au fond, plus rien de bouge. Et dedans flotte cette antique poiscaille héritée des temps marins. Une sorte de fossile vivant qui n'a rien à foutre là, si vous voulez. A se demander même pourquoi il a survécu, et comment. En tout cas il a résisté, et il se débat dans ce lac comme un diable dans de l'eau bénite.

- Merde, souffla Voisenet, passionné, ne pouvant détacher ses yeux du dessin. Vous êtes certain qu'il ne s'agit pas d'une affabulation, d'une légende ?

- Le panneau était tout ce qu'il y a de sérieux. Vous pensez à quoi ? Au monstre du Loch Ness ?

- Nessie n'est pas un poisson, c'est un reptile. Où est-ce commissaire ? Ce lac ?

Adamsberg, le regard vague, ne répondit pas.

- Où est-ce ? répéta Voisenet.

Adamsberg releva les yeux vers son collègue. Il était en train de se demander ce qu'il adviendrait si Nessie s'était engouffrée tout entière dans le porche de la cathédrale de Strasbourg. Ca se serait su. Encore que c'eût été un fait divers inusité mais pas très fulminant, dès l'instant où le monstre du Loch ne crachait pas de feu par les naseaux et était donc inapte à faire exploser le joyau de l'art gothique.

- Pardon, Voisenet, je réfléchissais. Il s'agit du lac Pink, pas très loin d'ici. Rose et bleu, magnifique en surface. Donc, attention aux apparences. Et si vous apercevez ce poisson, pognez-le-moi par les gosses.

- Eh, protesta Voisenet. Je ne fais pas de mal aux poissons, je les aime.

- Eh bien, moi, je n'aime pas celui-ci. Venez, je vais vous montrer le lac sur la carte.

*

ree

*




bottom of page