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La Pariétaire




Étymologie :

Étymol. et Hist. Fin xiiie s. subst. fém. paritaire (Simples medecines, éd. P. Dorveaux, p. 159, § 918) ; 1544 pariétaire (Duchesne d'apr. Roll. Flore t. 10, p. 54). Empr. au lat. parietaria «id.» substantification au fém. de l'adj. parietarius «de mur», dér. de paries, -etis «paroi» v. aussi André Bot.


Lire également la définition du nom pariétaire afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Parietaria officinalis L. ; Camberousette ; Casse-Pierre ; Epinard de muraille ; Escargoule ; Gamberoussette ; Herbe à bouteille ; Herbe au mur ; Perce-muraille.

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Botanique :


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Usages traditionnels :


Selon Suzanne Amiguès, autrice d'un article intitulé "Quelques légumes de disette chez Aristophane et Plutarque." (In : Journal des savants, 1988, n° pp. 157-17) la pariétaire fur un recours en temps de disette :


La disette des temps de guerre et la condition misérable des petites gens ont amené les anciens Grecs à consommer des plantes que nous avons peine à croire comestibles. Les noms de ces « légumes » insolites ne sont pas toujours correctement rendus, même dans les traductions les plus autorisées. [...]

La population des villes assiégées subissait une disette encore plus sévère [que celle que subissaient les soldats]. Nous en avons une preuve dans Plutarque, Sylla, 13, 3 : [...]. R. Flacelière et E. Chambry (C.U.F. 1971) comprennent « tandis que les habitants se nourrissaient de la matricaire qui pousse sur l'acropole et faisaient cuire pour les manger des semelles et des fioles de cuir, Aristion ne cessait de boire en plein jour, de faire la fête ». Une note ajoute les précisions suivantes : « Cette plante, le [....], espèce de camomille, était considérée comme médicinale. D'après Pline, N.H. 22, 17, 20, Athéna l'aurait indiquée en songe à Périclès pour guérir un ouvrier tombé du haut des Propylées (cf. Pér. 13, 13) ». Lorsqu'on se reporte aux textes cités en référence, il apparaît que les auteurs de cette note ont confondu deux plantes homonymes : la matricaire ou camomille vraie, camomille commune (Chamomilla recutita (L.) Rauschert = Matricaria recutita L., M. camomilla L. pro parte) et la pariétaire (Parietaria officinalis L. et autres espèces du genre, difficiles à distinguer pour le non-spécialiste et, bien entendu, réunies par les Anciens sous une dénomination collective).

Dans Périclès, 13, 13, Plutarque raconte la chute de l'ouvrier et sa guérison par un « remède » qu'Athéna avait indiqué en songe à Périclès, sans spécifier l'origine végétale de la drogue. Pline, XXII, 43-44 [= 22, 17, 20 ci-dessus] est heureusement plus explicite. Il rapporte la même anecdote pour illustrer les vertus médicinales de la plante qu'il désigne par les vocables d'origine grecque perdicium, parthenium, sideritis. Or [ces trois termes en grec] se retrouvent chez Dioscoride (IV, 85) parmi les synonymes d'..., litt. « celle qui tire », dénomination expressive de la pariétaire qui adhère aux vêtements. La description de Dioscoride ne laisse aucun doute sur l'identité de la plante : « Elle pousse sur le faîte et les parois des murs. Ses petites tiges sont grêles, rougeâtres, ses feuilles, semblables à celles de la mercuriale et poilues ; autour des tiges se trouvent des sortes de petites graines rudes qui s'attachent aux vêtements ». Ses propriétés vulnéraires sont très vantées par les auteurs anciens : Dioscoride (ibid.) recommande l'emploi de ses feuilles, rafraîchissantes et astringentes, « pour toute sorte d'inflammation et pour les enflures » ; Pline (XXII, 43) reconnaît à son suc « des vertus toutes spéciales pour les déchirures, les ruptures, les chutes de hauteur d'homme ou d'un lieu élevé, par exemple quand une voiture verse » (trad. J. André). Quoique de nos jours les pharmacologues s'intéressent surtout à ses propriétés diurétiques, son emploi en cas de contusions est néanmoins signalé dans un ouvrage de base (J. Valnet, Phytothérapie, Paris, 1979, p. 605). En Grèce même, la pariétaire « est encore aujourd'hui utilisée par les paysans en compresses sur les contusions et les enflures », écrivait récemment H. Baumann (Le Bouquet d'Athéna, Paris, 1984, p. 118). Si donc, comme l'indique la note de l'édition Flacelière-Chambry, la plante vulnéraire appelée [...] par reconnaissance envers Athéna Parthénos (1) est celle dont se nourrirent les Athéniens affamés, il s'agit de la pariétaire.

Mais est-il vrai que celle-ci, plutôt que la matricaire ou quelque autre espèce de camomille, se trouve sur l'Acropole en assez grande quantité pour avoir pu servir d'aliment et qu'elle est à la rigueur comestible ? La réponse à notre première question ne nous éclairera pas, les deux plantes étant communes sur ce site. E. de Halâcsy, Conspectus florae graecae, Lipsiae, t. Ill (1904), p. 120, note en effet la présence de Parietaria eretica L. dans la ville même d'Athènes : « in Acropoli, ad templum Jovis, in colle Lycabetto ». (2) On lit d'autre part dans L'Encyclopédie du monde végétal, Paris (Quillet éd.), 1964, p. 410, à propos de l'odeur acre et aromatique de la camomille (Chamomilla recutita (L.) Rauschert = Matricaria recutita L.) : « C'est ce parfum qui reste présent à la mémoire du touriste qui se rend en Grèce au printemps pour visiter l'Acropole, aux alentours de laquelle abonde la camomille ». Reste la question de la comestibilité. Rien, à notre connaissance, n'atteste pour les camomilles un usage autre que médical. En revanche, la pariétaire officinale (Parietaria officinalis L.) porte en français, entre autres noms vulgaires, celui d' « épinard de muraille » et selon M. Stuart, Encyclopédie des herbes, p. 234, « les jeunes feuilles sont utilisées en omelettes et potages : elles sont bouillies et ensuite frites dans l'huile ». Il est bien évident que les Athéniens assiégés par Sylla n'ont pas pu recourir à de telles préparations pour faire de la pariétaire un mets acceptable. On retiendra seulement que cette plante devient comestible par l'ébullition. C'est exactement ce que dit le passage de Théophraste (H. P. VII, 7, 2) cité plus haut (p. 159). Nous pouvons maintenant remplacer dans sa traduction les noms grecs translitérés par leurs équivalents français : « La cuisson est nécessaire pour certaines plantes comme... la pariétaire ... ainsi que pour beaucoup d'autres encore, dont le mouron ... ». Quoique Théophraste ne le précise pas, mouron et pariétaire n'étaient tout de même que des légumes de disette.


Notes : 1) La déesse Parthénos à qui fut consacré le [...] est évidemment Athéna {cf. Pline, XXII, 44), et non Artémis comme le dit J. André, Les noms de plantes dans la Rome antique, Paris, 1985, -s.v. parthenium. On peut se demander si le [...] de Diosc. III, 138 (= parthenium dans Pline, XXI, 176), qui est une camomille, tire son nom de ses emplois en gynécologie {cf. Diosc. et Pline, ibid.) ou des propriétés anti-ecchymotiques que possède notamment la grande camomille ou matricaire, Chrysanthemum parthenium (L.) Bernh. {cf. M. Stuart, Encyclopédie des herbes, p. 173). Dans cette dernière hypothèse, des vertus analogues à celles de la pariétaire ont pu déterminer l'extension de son nom à une espèce (ou à un groupe d'espèces) qui n'était pas primitivement associée au souvenir de l'intervention d'Athéna.

2) Comme la pariétaire affectionne les vieux murs et les dégrade en enfonçant ses racines entre les pierres, elle est actuellement moins abondante sur l'Acropole qu'à des époques où l'on se souciait moins de la conservation des monuments.

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Phytothérapie :

Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


Le raisin d'ours, Arctostaphylos uva uri, et la pariétaire sont d'un usage journalier pour provoquer la sécrétion urinaire ; malheureusement, on confond souvent avec la seconde une mauvaise herbe qui infeste nos jardins potagers, l'Amaranthus blitum, dont l'action est nulle.

 

Dans l'article intitulé "Plantes de femme. Corps et sang féminin" paru dans Ecologie humaine en 1993, Anne-laure Rigouzzi mentionne la pariétaire :


Le domaine thérapeutique visé oriente le choix des plantes. Ainsi, les plantes "amères", définies par leur saveur caractéristique, assurent-elles l'entretien général et interne de l'organisme, sous forme de soins préventifs ou curatifs. Parallèlement se profile l'ensemble de plantes "nettoyantes" à usage mixte, interne et externe. En tisane, elles "purgent l'intérieur et les glaires" (la Pariétaire, Parietaria officinalis). En lavage et compresse, elles lavent la peau des "petits", les "croûtes de lait des bébés", "les humeurs de peau des nourrissons", ou encore "l'eczéma" (la Saponaire, Saponaria officinalis). […]

La Pariétaire (Parietaria officinalis), autrefois "panacée du jeune âge", est toujours associée aujourd'hui à l'idée de "l'intérieur des bébés", pour "les dégager après la naissance... ils sont engorgés..., ça les débarrasse...". […]


Notons que bien d'autres plantes possèdent cette marque rouge de bon nombre de remèdes dépuratifs, comme la pariétaire ou "Gamberoussette". qui signifie "jambe rouge". Cette espèce, aux tiges rouges, est en effet "dépurative", "diurétique" et "bonne pour le sang". L'analogie entre le mal et les caractéristiques de la plante, sa couleur, sa forme, sa saveur et son parfum sont autant de fils qui permettent de retrouver la trame de la perception populaire des remèdes végétaux.

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Pierre Lieutaghi, dans L’herbe qui renouvelle : Un aspect de la médecine traditionnelle en Haute-Provence. (Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2014) revient sur l'utilisation de la pariétaire :


Crasses du corps et plante nettoyante : la pariétaire : Hypersécrétion de la muqueuse intestinale, les glaires dont il est question ici se manifestent, entre autres, dans l'entérite enfantine, affection fréquente autrefois (erreurs alimentaires, hygiène défectueuse) et cause de beaucoup de décès par déshydratation. Nul doute qu'ils aient été perçus comme des « humeurs viciées » appelant l'intervention des plantes dépuratives Dans notre aire géographique et, semble-t-il, dans une grande partie de la région méditerranéenne française, c'est à la Pariétaire qu'on a eu le plus souvent recours quand ce symptôme se manifestait. [...]


Urticacée très courante que les vieux murs, dans les villages méridionaux, la Pariétaire est surtout connue de nos jours comme diurétique-adoucissante. Son emploi dans les diarrhées des nourrissons était si courant, autrefois et naguère, qu'on pourrait presque la qualifier de « panacée du jeune âge ».Panacée suspecte selon certains :

Trop souvent dans la première enfance, écrit Réguis, un régime mal compris, une alimentation précoce, l'influence des chaleurs estivales (...) troublent les fonctions digestives et donnent la diarrhée verte, affection redoutable, car elle met en quelques jours la vie de l'enfant en péril. Les bonnes femmes (sic) ne s'émeuvent guère de tout cela et comme les déjections sont vertes, l'enfant a l'aigo de goutet. Alors on lui fait consciencieusement boire de la tisane de Pariétaire, plante qui, ayant la couleur des excréments du petit malade, doit nécessairement guérir l'affection. Dire le nombre d'enfants qui, chaque année dans notre Midi, meurent, victime de ce préjugé, est impossible.

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Croyances populaires :


Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :


On relève d'autres traces de la transmission du mal, à des plantes détachées du sol. [...] A Marseille, pour faire passer les aphtes, ou y [sous le manteau de la cheminée] met un petit paquet de pariétaire.

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Symbolisme :


Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :


Pariétaire - Misanthropie. Parce qu’elle croît isolée le long des murs.

 

Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Pariétaire – Laissez-moi dans ma médiocrité, sinon prenez garde.

La pariétaire est une petite plante à fleurs herbacées, qui croit sur les murs, dans les lieux solitaires. Ses étamines sont très irritables ; si l'on effleure légèrement avec une aiguille les filets qui sont roulés en dedans, on les voit se dérouler, se raidir subitement, et l'anthère se redresse du fond de la fleur pour lancer un petit nuage de pollen. On dirait un coup de pistolet en miniature.

 

Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :


Selon Pline, la déesse Minerve montra en rêve cette plante à Périclès, homme d'État athénien, dont un des esclaves, tombé d'un temple en construction, luttait contre la mort. La pariétaire le sauva.

Plus tard, elle fut appelée « herbe aux Nonnes » en vertu de ses qualités supposées d'anti-aphrodisiaque. En réalité, comme la pariétaire pousse sur le vieux murs, on la trouvait sur ceux des couvents, d'où cette association.

A Marseille, un petit paquet de la plante herbacée, attaché sous la cheminée, fait passer les aphtes.

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Selon Françoise GAIDE auteure d'un article intitulé "Les noms des ‘plantes des femmes’ dans les textes médicaux latins, lexicologie et ethnologie" paru dans l'ouvrage M. Fruyt et Cl. Moussy (éd.), Structures lexicales du latin, Paris, 1996, p. 85-95 :

Je pense que dans le cas de la pariétaire helxine fait de toute évidence allusion à ce qu'elle accroche les vêtements, comme le propose d'ailleurs Pline (22, 41 : ... semina un capitibus lappaceis adhaerescentia uestibbus, unde et helxinem dictam uolunt). Cette plante n'a pas d'usage en obstétrique. Par contre c'est bel et bien avant tout « l'herbe qui accroche », comme l'a montré l'ethnobotaniste Pierre Leutaghi dans un très beau livre relatif à la médecine traditionnelle en Haute-Provence, en signalant son emploi à Mane, comme goupillon, pour laver les bouteilles, ou à Banon, comme tampon, pour récurer les casseroles, ou encore son nom latin d'urceolaris, très bien attesté, par exemple chez Scribonius Largus et Pline, qu'il faut interpréter comme « herbe aux cruchons », et son nom médiéval de vitréole.

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Pierre Lieutaghi, dans L’herbe qui renouvelle: Un aspect de la médecine traditionnelle en Haute-Provence. (Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2014) revient sur l'utilisation de la pariétaire :


[…] La Pariétaire n'est évidemment pas la seule plante verte - et la « médecine des signatures » pour simpliste qu'elle être parfois, ne tombe jamais dans la stupidité. Nos enquêtes nous montreraient plutôt la Pariétaire associée à l'image du rouge, couleur de sa tige. Cette particularité lui vaut, dans le Var en particulier, le koli nomde Camberousette (ou Gamberoussette = « jambe rousse »).

[…]

Reste encore l'enseignement des animaux. J'ai déjà brièvement évoqué ailleurs le comportement des chiens qui broutent littéralement la Pariétaire sur les murs (observations personnelles dans le Haut Var et les Cévennes du Gard) et les déductions qu'on pu en tirer les médecins du passé ou les simples « empiriques ». Rolland, de son côté cite les auteurs du XVIe siècle (dont Ambroise paré) selon lesquels les oiseaux « se purgent et se guérissent des maladies au moyen de cette plante », en particulier les coqs qui ont tué des vipères. A La Brillane, Monsieur M. « purgeait ses chiens de chasse » à la Pariétaire, qu'il faisait infuser dans leur soupe.

Il n'est pas exclu que la fonction « purgative » de la Pariétaire, en médecine humaine, ait été « apprise » par observation de l'« auto-médication animale » et que l'interprétation des « signes » propres à la plante soit venue étayer, affiner ce savoir brut.

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Mythes et légendes :


D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),


PARIETAIRE (Parietaria officinalis, L.). A Mesagne, dans la Terre d’Otrante, on pense que la pariétaire est un remède infaillible contre les maux d’yeux. On applique la feuille hérissée contre les paupières, et on les frotte jusqu’à ce que, dit-on, le sang coule sur les bottes, en invoquant sainte Lucie, qui se trouve toujours présente, on le prétend du moins, à cette cérémonie.

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