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La Vache



Étymologie :


  • VACHE, subst. fém. et adj.

  • VACHER (SE), verbe,

Étymol. et Hist. I. A. 1. Ca 1130 « femelle reproductrice de l'espèce bovine » (Lois de Guillaume le Conquérant, éd. J. E. Matzke, p. 6,5) ; ca 1290 vake laitiere, v. laitier ; 1606 au fig. vaches a laict (Du Villars, Mém., II, an 1551 ds Gdf. Compl.) ; d'où a) loc. α) xve s. pleurer comme une vache (Le Grant garde derriere, X, 3 ds IGLF) ; 1610 manger de la vache enragée (Béroalde de Verville, Le Moyen de parvenir, éd. H. Moreau et A. Tournon, p. 186) ; 1640 parler François comme une Vache Espagnolle (Oudin, Curiositez) ; id. sorcier comme une vache, v. sorcier [cf. 1736, Marivaux, Le Télémaque travesti, p. 344 : il n'y a point d'autres sorciers au monde que les vaches espagnoles] ; 1690 quand chacun se mesle de son mestier, les vaches sont bien gardees (Fur.) ; 1833 aller comme un tablier à une vache (Vidal, Delmart, Caserne, p. 250) ; 1876 il pleut comme vache qui pisse, v. pisser ; id. une vache n'y retrouverait pas son veau (Lar. 19e) ; β) 1690 allusion biblique (Fur. : le songe de Joseph fut la vision de sept vaches grasses, et de sept vaches maigres) ; 1897 connaître les sept vaches maigres et les sept vaches grasses (France, Mannequin, p. 236) ; b) 1534 poil de vache « couleur rousse » (Rabelais, Gargantua, XI, éd. R. Calder, p. 83) ; 1694 roux comme une vache, roux de vache (Ac.) ; c) 1548 plancher des vaches, v. plancher ; 1902 montagne à vache (Écho des Alpes, n°1, p. 38 ds Quem. DDL t. 27) ; d'où 1928 à vache « ridiculement facile (en parlant d'une course en montagne) » (La Montagne, n°212, mai, p. 166, ibid.) ; d) α) bot. 1557 blé de vache (L'Escluse d'apr. Roll. Flore t. 8, p. 161) ; 1732 herbe aux vaches (Nouv. maison rustique t. 1, p. 309) ; 1801 chou-vache (Annales de l'agriculture fr., IX, p. 96 ds Quem. DDL t. 21) ; 1840 arbre-vache (A. Joanne et Old Nick, trad.: Cooley, Hist. gén. des voy., p. 225, ibid., t. 15) ; β ) zool. 1558 vache de mer (L. Joubert, trad. de G. Rondelet, Histoire entière des poissons d'apr. FEW t. 14, p. 102a) ; 1615 vache marine (A. de Montchrestien, Traicté Œconomie politique, p. 325) ; 2. a) 1285 « cuir fait avec la peau de la vache » (Rutebeuf, Les Plaies du monde ds Œuvres, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, p. 380, 72 : vint paire de sollers devache) ; b) 1781 « panier revêtu de cuir, qu'on plaçait sur les voitures de voyage » (Carmontelle, L'Uniforme de campagne, in Recueil gén. des proverbes dramatiques, VI, p. 250 ds Quem. DDL t. 25) ; 3. empl. techn. a) 1491 vacque « sorte de grue » (Compte des fortifications, 16e Somme de mises, Arch. Tournai ds Gdf.) ; 1590 « nom d'une pièce du canon » (Brantôme, Cap. fr., 144 [éd. 1666] ds La Curne) ; 1690 terme d'imprimeur « cordes qui arrêtent le train de la presse » (Fur.) ; 1751 terme de chasse vache artificielle « machine de la forme d'une vache qui sert à la chasse aux perdrix » (Dict. universel d'agriculture et de jardinage d'apr. FEW t. 14, p. 102b) ; 1872 terme de métall. « branloire d'un soufflet » (Littré); d'où 1878 tirer la vache (Rigaud, Dict. jargon paris., p. 340) ; 1933 « déchet provenant d'un morceau de bois » (Lar. 20e) ; b) 1859 terme de mar. joues ou demi-joues de vache « demi-caisses de poulies » (Bonn.-Paris) ; id. nœuds de vache « nœud plat que l'on utilise pour réunir deux filins qui doivent être facilement dénoués » (ibid.) ; 1867 côtes de vache « travaux que l'on place sous les entretoises pour faciliter le hourdis du plancher » (Ch. Garnier, Monit. univ., 10 août, p. 1093, 2e col. ds Littré) ; 1881 corne de vache « voussure employée pour évaser l'ouverture d'un tunnel ou d'une arche de pont » (Chabat) ; 4. a) 1589 terme de danse ru de vache (Tabourot, Orchesographie, fo46c ds Gdf., s.v. ru) ; b) 1694 terme de manège ruer en vache (Ac.) ; 5. 1605 vache à colas « protestant » (L'Estoile, Journal, éd. A. Martin, sept., p. 172). B. 1. a) 1619 « femme grasse et laide » (Claude d'Esternod, L'Espadon satyrique, p. 73) ; b) 1866 « femme ou fille de mauvaises mœurs » (Delvau, p. 391) ; 2. a) 1690 « personne lâche, fainéante, poltronne » (Fur.) ; b) 1866 « homme sans courage, avachi » (Delvau, p. 391) ; 1877 faire la vache « paresser » (Zola, L'Assommoir, p. 489) ; 3. 1844 « agent de police » mort aux vaches (Documents litt., II, 203 d'apr. Sain. Sources Arg. t. 2, p. 464) ; 4. 1891 exclam. la vache (Méténier, Lutte pour amour, p. 187 ; 5. 1900 « personne méchante » (Mirbeau, Journal femme ch., p. 90) ; 1901 agir en vache (Bruant, p. 312). II. Empl. adj. 1. 1866 « mou, sans consistance » (Flaub., Corresp., p. 231) ; d'où 1887 faire vache « faire chaud » (Hogier-Grison, Monde où l'on vole, p. 296) ; 2. 1880 « méchant, sévère » (d'apr. Esn. 1966) ; 1881 (Méténier, op. cit., p. 92); 3. 1925 « admirable » (Arts d'apr. Esn. 1966). Du lat. vacca « vache ». Pour l'orig. de I A 5 c vache à colas, on se réfère habituellement à l'anecdote rapportée par L'Estoile dans son Journal, loc. cit., selon laquelle les Huguenots avaient tué et mangé une vache d'un nommé Colas Panier, égarée dans un temple protestant; ce qui donna naissance à la Chanson de Colas, et au sobriquet vache à Colas que catholiques et protestants s'appliquèrent mutuellement, mais qui, en définitive qualifia ces derniers (v. Littré, s.v. vache; FEW t. 7, p. 111, s.v. Nicolaus). La loc. parler comme une vache espagnole est peut-être favorisée par le bétacisme gasc. et esp. (b et v sont prononcés v entre voy. et b à l'init. après cons.) d'où corruption de basque* (du lat. vasco) : le fait que les Basques se partagent entre l'Espagne et la France et la présence à Paris au xviies. de valets basques aurait entraîné la loc. parler français comme un ou une Basque espagnol(e) (v. Littré, s.v. vache ; FEW t. 14, p. 105, note 4 ; K. Baldinger, Influence de la langue sur la pensée ds R. Ling. rom. t. 37, p. 251).


Voir aussi la définition détaillée qui propose quelques éléments de symbolisme.

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Expressions populaires :


Claude Duneton, dans son best-seller La Puce à l'oreille (Éditions Balland, 2001) nous éclaire sur le sens d'expressions populaires bien connues :


Un coup de pied en vache : Le cheval rue. C'est-à-dire qu'il est capable de vous lancer noblement les deux pieds à la fois en pleine figure, à condition que vous soyez placé juste derrière lui. La vache non, ou très exceptionnellement. Elle est trop lourde.

Elle ne sait guère lancer qu'un seul pied à la fois. En revanche, elle peut vous l'envoyer à l'improviste, aussi bien vers l'avant, que par côté, un peu à la façon d'un karatéka… Chacun sa technique. La sienne est si connue qu'on en a fait un temps un pas de danse. « En termes de danse, signale Furetière, on appelle "rut de vache", un pas où l'on jette le pied à côté. »

Or il arrive que certains chevaux particulièrement vicieux, négligeant la belle ruade spectaculaire de leur espèce, puissent eux aussi vous allonger un coup de pied en travers, d'une seule jambe, lorsque vous passez à côté d'eux. C'est cela que les cavaliers appellent le coup de pied « en vache », précisément parce que cette technique n'appartient pas en principe à leur catégorie. Mais il est fréquemment employé dans le commerce, l'industrie, et généralement dans une foule d'activités humaines !

L'expression, qui apparut vers le milieu du XIXe siècle, était promise à une belle carrière. « Aucun d'eux n'a le culot de dire carrément son opinion, et de telles séances ne paraissent avoir d'autre objet que le plaisir que prennent deux hommes à s'adresser publiquement, tout en s'offrant leurs sourires vinaigrés, à s'adresser, dis-je, dans les côtes et dans les tibias des renfoncements meurtriers et des coups de pied en vache. » (Jehan Rictus, Le cas Edmond Rostand, 1905).


Chacun son métier, les vaches seront bien gardées : Ceci est un proverbe qui fustige l'amateurisme. Que celui qui ne sait pas ne se méfie pas d'une tâche ou d'une affaire à laquelle il n'entend rien. Cela se dit pour rabrouer quelqu'un qui veut donner des conseils dans un domaine qu'il ne maîtrise pas, en le renvoyant implicitement « garder les vaches »...

Furetière le relève en 1690 « Quand chacun fait son mestier, les vaches sont bien gardées ». L'image était bien plus ancienne puisqu'on l'utilisait déjà au XVIe siècle pour railler celui qui veut s'improviser dans une tâche et fait tout de travers; Cotgrave cite : « Qui se mêle d'autruy mestier il trait la vache en un panier. »

Le dicton a fait les beaux jours de la sagesse populaire et des amateurs d'ordre. Mme de Genlis écrivait dans un ouvrage moralisant : « Vous savez le proverbe ; il est vieux, et n'en est que meilleur : Chacun son métier, et nos vaches seront mieux gardées ; et j'y ajoute que nos terres seront mieux cultivées. » (Mme de Genlis, Les Veillées de la Chaumière, 1823).

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Zoologie :

Selon Matt Pagett, auteur de Le petit livre de merde (titre original What shat that ?, Quick Publishing, 2007 ; édition française Chiflet & Cie, 2008) :


"Il y a presque autant de façons d'utiliser la bouse de vache qu'il en existe pour rentabiliser l'animal lui-même, qui nous donne viande, lait, et cuir. Grâce à elle on isole, on se chauffe, on fertilise les sols. On jour même au ballon. Pas mal pour une substance dont le seul nom inspire le dégoût.

Description : Il y a bouse et bouse : tout dépend de ce que la vache a mangé. L'herbe grasse produira une masse semi-liquide brune ou verdâtre, qui va sécher comme une galette. Une nourriture plus sèche donnera des bouses plus petites et plus fermes. Une vache produit en moyenne une dizaine de bouses par jour, qu'elle laisse à l'étable ou dans les pâturages.

Elles ruminent dans leur coin : Avec leur estomac à quatre poches, les vaches sont des ruminants : elles régurgitent l"herbe sous forme de bouillie, qu'elles remâchent pour l'avaler à nouveau. Ceci leur permet d'extraire le maximum de nutriments de leur nourriture qui n'est ni énergétique ni riche en protéines. La route est longue de la bouche à la bouse : le rituel de la digestion peut durer 100 heures, ce qui vaut à la vache le titre de ruminant lent.


C'est du gâteau : Certains pays en voie de développement comme le Népal sont de grands utilisateurs de bouses dont les gaz peuvent remplacer le charbon et le pétrole. Stockées dans des silos à l'abri de l'air, les bactéries s'y développent rapidement. L'addition d'eau entraîne une réaction chimique. Le gaz produit, composé surtout de méthane, est réservé à l'usage domestique. Les résidus sont utilisés comme compost. On peut donc dire que la bouse de vache crée des emplois, et qu'elle est source de richesses pour certains pays en difficulté. C'est ce que l'on appelle de la bonne merde.


Lancer de bouse : Le Championnat du Monde 2006 de lancer de bouse pour hommes, à Beaver, Oklahoma, a été remporté par James Pratt, avec un lancer de 61 mètres. Au Championnat pour femmes, le record a été battu par Dana Martin avec un lancer de 42 mètres."

N.B. Ce championnat existe aussi en France.

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Serge Schall, auteur de Histoires extraordinaires de plantes et d'hommes (Éditions La Source Vive, 2016) consacre un article à une forme de maltraitance malheureusement longtemps infligée à la vache :


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Hugues Demeude, dans Les Incroyables Pouvoirs de la Nature (Éditions Arthaud, 2020) nous fait découvrir les secrets de rumination de la vache :


A la regarder se mouvoir dans les prés, la vache donne l'impression de passer un temps infini à se nourrir et à ruminer. Et e n'est pas qu'une vue de l'esprit : cette belle des champs au regard de velours peut passer près de huit heures par jour à ruminer ! Mais au fait, en quoi consiste cette pratique qui nous semble si familière ?

La vache engloutit 50 à 80 kilos de nourritures végétales dans la journée, et absorbe 60 à 100 litres d'eau. Campée sur ses quatre pattes, elle occupe donc ensuite le plus clair de son temps à tenter de les digérer. Pour y parvenir, elle a recours à un estomac divisé en quatre compartiments : trois pré-estomacs que sont le rumen, le bonnet et le feuillet, auquel s'ajoute un véritable estomac, la caillette, qui sécrète du suc gastrique.

Après avoir mâché les herbes tout juste broutées, la vache les avale en les faisant passer vers la panse, appelée aussi rumen. Là ce sont de grandes quantités de bactérie qui prennent le relais et se mettent à l'ouvrage Elles ont notamment le pouvoir de décomposer la cellulose présente dans les fibres des végétaux, substance qui ne peut pas être digérée par les mammifères autrement qu'en ayant recours à une relation de mutualisme, ici avec des bactéries aidées par une forte production de salive. Cette capacité de pouvoir digérer l'herbe, la vache la partage avec l'ensemble des bovidés et des cervidés. Les gros morceaux d'herbes retournent dans la bouche pour y être davantage mastiqués, ruminés, tandis que la bouillie fermentée du rumen est envoyée dans le deuxième compartiment de l'estomac. Dans ce bonnet sont alors filtrées les plus grosses particules, voire des cailloux avalés avec l'herbe. Le jus végétal passe ensuite dans un troisième compartiment, le feuillet, qui ne retient, telle une essoreuse, que la matière à digérer. C'est alors que celle-ci est envoyée vers la cailette qui achève le processus en activant ses sucs gastriques.

Les éleveurs qui pratiquent la transhumance dans les alpages misent sur ce processus de rumination de bonnes herbes fraîches pour obtenir un lait de grande qualité, qui permet de fabriquer un fromage sans équivalent. Car le principe de cette culture de l'alpage est de maximiser la consommation d'herbe par les vaches en leur donnant un « carreau » à brouter le matin et le soir. Et pas n'importe quelle herbe ! Les prairies dans lesquelles ces ruminantes font bombance rassemblent au moins quarante espèces végétales bonnes à brouter. On est loin des tourteaux de colza et de soja transgénique. Le troupeau dispose de deux repas d'herbe fraîche donnés chaque jour, à consommer à volonté.

Une nourriture riche qui va permettre de produire un excellent lait avec l'obligation de traire deux fois par jour, sous peine de faire souffrir la vache à cause d'un pis trop gonflé.

Ce sont les vaches de races tarine ou abondance qui, très majoritairement, font la transhumance et partent l'été en alpage. Elles sont bien adaptées à leur milieu, tout comme d'une façon générale les quarante-trois races de vache répertoriées en France s'accordent toutes bien à leur terroir spécifique. Ainsi, la highland cattle, originaire d'Écosse, est une bonne brouteuse qui évolue facilement dans les paysages de marais grâce à son pied léger, là où une charolaise s'embourberait.

A noter enfin que, sur près de 20 millions de aches françaises, 85% appartiennent à seulement cinq races : prim'holstein, charolaise, normande, montbéliarde et limousine. Mais elles sont loin d'être les seules à peupler les campagnes : nombreuses sont celles qui représentent des races régionales, bien implantées depuis longtemps dans leur terroir. De vrais emblèmes du monde rural sauvés in extremis dans les années 1980 par des éleveurs passionnés et des techniciens soucieux de la biodiversité, qui ont su reconnaître la grande valeur patrimoniale de toues ces races de vache. Ils ont pu ainsi préserver une bonne dizaine de races, de l'armoricaines à la ferrandaise, de la béarnaise à la villard-de-lans.

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Carrons et clarines :


Selon Jean-Marie Jeudy, auteur de Les Mots pour dire la Savoie (2006),


« si vous vous êtes promené sur les alpages, vous avez entendu la clameur des troupeaux. Et ça carillonne de tous les côtés... ce sont les cloches qu'on accroche au cou des vaches. Chacune possède son timbre particulier, une note qui convient à la bête qui la porte. Les notes réunies accaparent l'espace et se répondent mille fois, se répercutent d'un versant à l'autre, et jusqu'aux rives du glacier, la musique se mêlant au bruit du vent descendu des cimes.

Chaque vache porte une cloche. Une cloche de bronze retenue par un large collier de cuir orné de motifs ou de clous de cuivre. Ce peut être une clarine au son clair. Ce peut être un carron au son plus grave. Souvent ces cloches portent le nom ou la marque de leur propriétaire. Elles peuvent être décorées de symboles religieux, d'un Christ, d'une Vierge à l'Enfant.

On dit encore des campanes. Ou des senailles - on trouve ce terme dans le pays du Mont-Blanc. A Sixt, on emploie le terme potet. En Valais et en Val d'Aoste, on dit les bondions.

Ces cloches ne sont pas simplement employées pour le décorum ou pour montrer la richesse de leur propriétaire. Elles ont leur utilité en matière de sécurité. On repère plus facilement une bête égarée et on peut la ramener en lieu sûr. On peut la chercher dans le brouillard ou dans la nuit. Ces cloches eurent parfois une signification religieuse. Elles concouraient à la protection des animaux contre les maladies et les accidents.

Le village de Peysey-Nancroix en Tarentaise s'était fait une spécialité de la production de ces cloches. On les reconnaît facilement, elles portent l'inscription : A Peisey.

Il existait des fondeurs itinérants qui parcouraient la Savoie en prenant des commandes lors des grandes foires et qui rapportaient les objets fondus l'année suivante.

Plus simples sont les cloches de fer, fabriquées d'une feuille de métal pliée. On les accorde par l'adjonction, sur leur paroi, d'un peu de bronze qui change leur sonorité. Il ne faut pas manquer de signaler les sonnettes Devouassoud. Réalisées dans la vallée de Chamonix, elles résonnent non seulement sur les alpages de Savoie, mais aussi sur ceux du Valais et du Val d'Aoste. En Italie, on ne dit pas une clarine ou une sonnette, on dit une devouassoud. Pas moins de cinquante et une opérations sont nécessaires pour obtenir une bonne sonnette. C'est une vieille affaire de famille puisque la maison fut créée en 1829.

A l'automne, pour le retour des troupeaux vers la vallée, on ornait les bêtes de bouquets de fleurs. On avait frotté le cuir des colliers et astiqué les cloches. Il fallait que le troupeau soit impeccable.

Le montagnard a toujours attaché beaucoup d'importance à ces campanes. Il faut l'observer quand il choisit l'une d'elles sur l'étal du marchand lors des foires. Il essaie toute la gamme, agite celle-là, en repose une autre, tente de deviner si elle conviendra au caractère vagabond de « la Roussette » ou au tempérament plus tranquille de « la Marquise ». c'est la symphonie du troupeau dans la sérénité de l'alpage. La musique contribue à la vie intense qui règne là-haut. »

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Croyances populaires :


Adolphe de Chesnel, auteur d'un Dictionnaire des superstitions, erreurs, préjugés, et traditions populaires... (J.-P. Migne Éditeur, 1856) propose la notice suivante :


VACHE. En Normandie, pour éviter que des sorts ne soient jetés sur les vaches, on suspend à l'une de leurs cornes, un petit sac rempli de sel ; et pour lever ceux qui ont été donnés, on mène la vache qu'on soupçonne attaquée de maléfice, soit à une foire, soit chez un sorcier. Afin que les vaches puissent concevoir, il est aussi de pra1ique de les frapper sur le flanc de trois coups d'une baguette de coudrier, ou de fendre en quatre le bout de leur queue, ou de leur appliquer sur les reins une poignée de boue, ou d'y jeter un seau d'eau fraîche, ou enfin de les frotter.

Dans les montagnes du département du Tarn, on croit que les sorcières demeurent sans puissance sur les vaches, si l'on attache du vif argent au cou de celles-ci, ou qu'on place un crapaud dans une cruche qu'on tient constamment renfermée dans l'étable.

On est persuadé aussi, dans le département de la Charente, que celui qui arrache un brin de chanvre mâle dans la chenevière de son voisin, pour l'apporter dans la sienne, verra naître dans son étable autant de veaux qu'il a de vaches, tandis que Je voisin n'aura que des génisses.

En Lorraine, dit M. Richard, pour que la vache dont on vient de faire l'acquisition ne soit pas en mal de la maison d'où elle sort, il faut lui mettre pour litière de la paille tirée du lit de son nouveau maître, et afin d'empêcher qu'elle ait des dartres, on doit avoir soin de mettre dans l'écurie où elle est renfermée, une branche de houx dont les feuilles soient sans piquants.


VACHES NOIRES. On prétend que leur lait a la propriété d'éteindre un incendie. produit par le tonnerre, et que ce lait convient peu à la nourriture des enfants, surtout s'il a été tiré ou qu'on le leur donne pendant un orage. Ces prescriptions hygiéniques ont pour but de leur éviter des coliques. (Traditions lorraines, RICHARD.)


VEAU. En Bretagne, lorsque l'on vend des veaux, on prescrit de les sortir à reculons de l'étable, afin que la mère éprouve moins de regrets.

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Selon Ignace Mariétan, auteur d'un article intitulé "Légendes et erreurs se rapportant aux animaux" paru dans le Bulletin de la Murithienne, 1940, n°58, pp. 27-62 :


Les Renards ne sont pas les seuls animaux auxquels on prête un raisonnement humain. Sur les alpages, dit-on, certaines vaches savent partir pendant la nuit, sans faire sonner leur clochette, pour aller chercher de l'herbe, ainsi elles n'éveillent pas l'attention des pâtres (Saint-Martin).

Quand une vache quitte les mayens pour revenir à la maison du village, c'est un signe de mort (Mase).

Si les vaches lèvent souvent la tête c'est un signe de mauvais temps (Anniviers). A Mas « on voit une relation entre la fièvre aphteuse et la maladie des Mélèzes. L'épidémie des Mélèzes de 1937 devait ramener la fièvre aphteuse, ce qui n'a pas été le cas. Lorsque deux vaches sont attachées dans le même lien (chaîne métallique) c'est le démon qui l'a fait. Pour les détacher il faut faire rougir une chaîne au feu et l'appliquer sur l'animal (Saint Martin). On attribue aux petites Vaches de la race d'Hérens, très combattives, des réactions sentimentales tout à fait humaines. Quand l'une d'elle ayant été reine auparavant, vient à être battue son chagrin est immense ; il faut alors lui parler, lui expliquer, la consoler, lui faire joli, sinon elle ne survivra pas. Les propriétaires de reines expliquent ainsi certains cas mortels dus sans doute à des lésions du cerveau produites pendant la lutte. L'ardeur des propriétaires de reines pour assurer la victoire de leur favorite se manifeste parfois d'une manière très originale : à Riddes l'un d'eux trouva le moyen de fixer une Hermine morte dans la clochette de sa reine, afin de dégoûter la concurrente par l'odeur repoussante que dégage l'Hermine.

Au moyen âge, et même jusque vers 1800 on croyait au Jumart : c'était un hybride pouvant revêtir trois formes, et provenant du croisement entre le taureau et la jument, ou entre le taureau et l'ânesse, ou encore entre l'âne et la vache.

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Selon Grażyna Mosio et Beata Skoczeń-Marchewka, auteurs de l'article "La symbolique des animaux dans la culture populaire polonaise, De l’étable à la forêt" (17 Mars 2009) :


"La vache était l’équivalent zoomorphique de la femme. On peut trouver la trace de cette conviction dans la formule exprimée par les marieurs dans maintes régions de la Pologne, qui venant à la maison de la jeune fille – candidate à être l’épouse, demandaient : “n’avez-vous pas quelquefois une petite génisse à vendre, parce que nous voulons en acheter une” (Maj 1987 : 17 ; Kolberg 1964b : 143). La vache était aussi liée au domaine de la fécondité, de la maternité. Elle était la nourricière. Afin de s’assurer l’abondance de lait gras, le fermier lui apportait la veille de Noël à l’étable une feuille de pain azyme (opłatek), pour que le lait soit blanc, et une noix, pour qu’il soit gras (Simonides, Kowalski 1991, 275). On croyait que la lactation de la vache pouvait être l’objet des pratiques magiques des sorcières, qui soutiraient ce lait pour leur vache. Il existait donc toute une série de moyens qui devaient la protéger des sortilèges. L’un d’eux était l’interdiction absolue de donner quoi que ce soit en dehors de la ferme après le coucher du soleil, et tout particulièrement du lait."

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Symbolisme :


Dans le Dictionnaire des symboles (1969 ; édition revue et corrigée, Robert Laffont : 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, on apprend que :


"D'une façon générale, la vache, productrice de lait, est le symbole de la Terre nourricière. Dans l'Égypte ancienne, la vache Abet est l'origine de la manifestation, la mère du soleil ; le corps du dieu, dans les mystères d'Osiris, était enfermé dans une vache de bois, et il renaissait par la gestation de celle-ci ; l'amulette AHAT, représentant la tête de la vache sacrée, portait du reste le disque solaire entre ses cornes et était utilisée pour émettre de la chaleur dans les corps momifiés. Cette coutume venait de la croyance selon laquelle, lorsque le soleil Rê s'était couché pour la première fois à l'horizon, la déesse-vache avait envoyé des êtres de feu les secourir jusqu'au matin, afin qu'il ne perde pas sa chaleur. Wallis-Budge signale d'autre part la coutume des femmes des tribus les plus primitives de la vallée du Nil, qui portaient une amulette représentant la déesse Hathor, sous forme d'une tête de vache ou de femme aux longues oreilles et plates, tombant comme celles d'une vache, pour s'assurer une large progéniture.

La figure d'Hathor, dans le panthéon égyptien, résume ces différents aspects du symbole de la vache. Elle est la fertilité, la richesse, le renouveau, la Mère, la mère céleste du soleil, jeune veau à la bouche pure, épouse aussi du soleil taureau de sa propre mère. Elle est aussi nourrice du souverain d'Égypte ; elle est l'essence même du renouveau et de l'espoir en une survie, puisque régente et corps du ciel, l'âme vivante des arbres (J. Yoyotte, in POSD, art. Hathor). Elle est aussi dans tous les lieux où les Grecs virent les cités d'Aphrodite ; elle est une jeune femme, aimable et souriante, déesse de la joie, de la danse et de la musique, et l'on comprend que, projetant dans l'au-delà les espérances réalisées à chaque printemps sur terre, elle soit devenue, sur la rive gauche du Nil, à Memphis comme à Thèbes, la patronne de la montagne des morts. La Grande Mère ou Grande Vache des Mésopotamiens était aussi, de toute évidence, une déesse de la fécondité.

La représentation du symbole, associant la vache à la lune, à la corne, à l'abondance, est plus précise encore à Sumer, où l'on orne la lune de deux cornes de vache, tandis que la vache est représentée comme un croissant de lune. La nuit étoilée est dominée par le Taureau prestigieux dont la Vache féconde est le Pleine lune, dont le troupeau est la Voie lactée. A certains endroits, il semblerait que les Sumériens aient conçu l'image curieuse d'un reflet de lune assimilé à un jet de lait de la Vache lunaire :


La blancheur de la Vache, un clair de lune qui monte ;

Le sourire du ciel a dénoué les longes

De vaches multipliées dans les étables multipliées ;

Sur la table il fait couler le lait de la Vache féconde...

(M. Lambert, dans SOUL, 79-81).

Chez les Germains, la vache Audumla est la première compagne d'Ymir, premier géant, née comme lui dans la glace fondue : elle est l'ancêtre de la vie, le symbole de la fécondité... Ymir comme Audumla sont antérieurs aux dieux. Ce même symbolisme s'étend sur l'ensemble des peuples indo-européens. Il a gardé toute sa puissance en Inde, d'où la vénération qu'on y porte à cet animal, qui n'a nulle part été célébré plus éloquemment que dans les Veda, où, archétype de la mère fertile elle joue un rôle cosmique et divin :


La vache est le ciel, la vache est la terre ;

la vache est Vishnu et Prajâpati :

le lait trait de la vache a breuvé

les Sâdhya et les Vasni.

... en elle réside l'ordre divin.

Elle est le nuage gonflé de pluie fertilisante qui tombe sur la terre lorsque les esprits du vent - qui sont les âmes des morts - tuent l'animal céleste et le dévorent pour le ressusciter ensuite dans sa peau, dont ils l'avaient préalablement dépouillé. Symbole du nuage des eaux célestes, la vache qui se défait au ciel se reforme sur la terre, grâce à la nourriture que la pluie rend abondante. Elle joue donc un rôle analogue à celui du bouc et du bélier célestes, dans de nombreuses autres mythologies, qui s'étendent des peuples scandinaves jusqu'aux riverains du Niger.

A cette fonction d'enveloppe - ou de réservoir - des eaux célestes s'ajoute souvent une fonction de psychopompe, attestée dans la tradition védique qui voulait qu'une vache fût amenée au chevet des moribonds. Avant d'expirer, le mourant saisissait la queue de l'animal et s'y cramponnait. Le mort était ensuite conduit au bûcher sur un chariot attelé de vaches, et suivi d'une vache noire. Cette dernière était sacrifiée, sa chair disposée sur le cadavre, et l'ensemble, étendu sur un bûcher crématoire, était enveloppé de la peau de l'animal... Le bûcher allumé, l'assistance chantait en demandant à la vache de monter avec le défunt au royaume des bienheureux qui passe par la voie lactée.

Selon certaines variantes, la vache psychopompe - parfois remplacée par une chèvre non tachetée - était attachée au pied gauche du cadavre.

La vache était sacrifiée au pied du bûcher funéraire et les parties nobles étaient disposées rituellement sur le cadavre ; ainsi ses reins étaient placées dans les mains du défunt, tandis que l'on récitait des stances.

Il faut souligner ici combien la robe de l'animal précise tel ou tel aspect du symbole. Car cette vache noire, qui est sans doute un avatar de la vache cachée du Veda, qui correspond l'aurore primordiale, se retrouve dan le Tao-Te-King (chapitre 6) pour désigner la femelle mystérieuse, le Principe féminin, origine du ciel et de la terre ; toujours dans le Veda, la vache laitière bigarrée est le symbole de l'androgyne initial ; tandis que la vache blanche - incarnation la plus totalisante du symbole est, tout comme la vache noire, mise en rapport avec le feu sacrificiel, l'agnihotra. Mais l'agnihotra est aussi le sacrifice de la parole et les vaches sont les formules sacrées des Veda. est-ce le souvenir de ce symbolisme upanishadique ? La vache est associée, étroitement, dans plusieurs textes du bouddhisme zen, au processus graduel conduisant à l'illumination. Toutefois, l'ascète n'est pas ici un vacher, un gopâla krishnaïte, et la vache n'est pas elle-même la lumière, comme elle l'est parfois dans l'Hindouisme. Elle représente la nature de l'homme et sa capacité d'illumination, que les Dix tableaux du domptage de la vache font passer progressivement du noir au blanc. Lorsque la vache blanche elle-même disparaît, l'homme a échappé aux limitations de l'existence individuelle.

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce vieux symbole n'a pas complètement disparu de notre mémoire, comme en témoigne l'œuvre du peintre écologiste Uriburu, qui a récemment exposé des tableaux représentant une vache verte, pour célébrer les vertus de la nature naturante, menacée par développement de la civilisation industrielle."

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Rudolf Steiner, dans L'homme, les animaux et les êtres élémentaires (trad. Triades 2010) nous apprend que la vache représente l'incarnation de l'astral dans la chair :


"Ce que l'oiseau, là-haut, possède grâce à son astral, ce qui travaille à former son plumage, la vache l'a fait pénétrer dans sa chair, dans ses muscles, dans ses os.

[...] Celui qui, par idéalisme bourgeois, considère la digestion comme la plus inférieure des besognes se voit démenti lorsque, d'un observatoire plus élevé, grâce au regard spirituel, il regarde la digestion de la vache. C'est beau, c'est grandiose, et doué d'une prodigieuse spiritualité."

 

Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


En vertu du lait (et de ses dérivés, beurre, crème, fromage) qu'elle produit, la vache est symbole d'abondance et de fécondité. D'où son caractère sacré, en Orient notamment, et son rôle fondamental dans les mythologies : En Égypte, la déesse Hathor, représentée sous la forme d'une vache ou d'une femme à tête de vache portant entre ses cornes le disque solaire, a enfanté le soleil (Horus). « L'amulette AHAT, représentant la tête de la vache sacrée, portait du reste le disque solaire entre ses cornes et était utilisée pour émettre de la chaleur dans les corps momifiés. Cette coutume venait de la croyance selon laquelle, lorsque le soleil Rê s'était couché pour la première fois à l'horizon, la déesse-vache avait envoyé des êtres de feu le secourir jusqu'au matin, afin qu'il ne perde pas sa chaleur. »

En Asie centrale, elle est, avec le taureau, la figure animale du ciel mythologique. En Inde, où une vache immense représente également le ciel, elle est considérée comme la mère d'Indra, dieu suprême. On croit d'ailleurs ans ce pays que toute femme qui veut devenir mère doit s'asseoir sur une peau de vache. En tuer une est un crime qui attire la colère divine, sus la forme, par exemple, d'épidémies de lèpre ou de choléra.

Les Hindous comme les Perses utilisaient l'urine de vache dan les cérémonies de purification, et ses excréments pour se protéger des mauvais esprits : « C'est pourquoi en plusieurs lieux de l'Inde méridionale, on badigeonne de fumier de vache la chambre de l'accouchement, tandis qu'on applique à la porte extérieure des bouses de vache recouvertes de feuilles de margosa et de graine de cotonnier ». En Inde orientale, la bouse de vache sacrée est répandue sur le sol autour d'une personne atteinte de la petite vérole, tandis que passer à travers une vache d'or équivalait à une renaissance de l'âme.

Dans le monde gréco-latin, les excréments de vache étaient également purificatoires, ainsi que les cendres de celle qui avait été offerte en sacrifice qui étaient conservées dans le temple de Vesta à Rome. Signalons également qu'une vache allaitant son veau représente la Vénus romaine et que le roi Prusias considérait « comme plus utile de consulter les entrailles d'une génisse que ses plus habiles généraux », ce qui provoquait les railleries d'Annibal.

Même dans la tradition germano-scandinave, la vache revêt un caractère sacré : dans l'Edda, œuvre fondamentale de l'Islandais Snorri Sturluson (fin XIIe, début XIIIe siècle), Audhumla, la vache d'abondance, est la mère d'Odin (ou Wotan), principal dieu du panthéon germanique, et nourrit de son lait le premier des géants, Ymir. En Germanie, les génisses blanches étaient consacrées à la déesse-terre Hertha. La croyance allemande selon laquelle tuer une vache entraîne la mort d'un membre de la famille peut être considérée comme un vestige de cet ancien culte. Une vache noire avec une étoile au front était nourrie par les Armoricains et les Gallois dans un bois sacré.

Selon un récit légendaire, « au commencement du monde, Dieu offrit un livre de prières aux diverses races qui peuplaient la terre. Certaines le conservèrent pieusement, mais chez certains peuples illettrés, comme personne ne savait lire, il se trouva une vache qui le trouva et l'avala. C'est depuis ce temps-là que certains adorent la vache ».

En France, comme d'ailleurs dan tout l'Occident où il n'existe pas de culte de la vache, celle-ci est néanmoins très précieuse et bénéfique, d'autant plus que, selon une légende de l'Albret, elle réchauffa de son haleine l'enfant Jésus et le couvrit de foin. En guise de remerciement, la Vierge lui dit : « Tu auras l'honneur de porter neuf mois comme les femmes ; soit l'été, soit l'hiver tu auras toujours le nez humide et l'haleine chaude en souvenir de ton bon cœur ». En Auxois, les vaches sont censées parler et se libérer toutes seules de leurs liens la nuit de Noël mais dans le Loiret, nettoyer l'étable un vendredi, jour de la mort du Christ, condamne à mort une des bêtes.

Rencontrer des vaches est de très bon augure et si elles sont toutes couchées du même côté, on croit qu'un des enfants de la maison va se marier (c'est aussi un présage de mauvais temps). Toutefois, les Anglais voient l'annonce de la mort d'un proche si une vache pénètre dans un jardin ou beugle trois fois vers une personne ; et pour les Américains de Caroline, son beuglement la nuit annonce un grand chagrin. Quant aux Wallons, ils craignent la vache qui « saute comme un taureau : c'est tout ce qu'il y a de plus mauvais ». Par ailleurs, en Allemagne, on dit d'une personne malheureuse que « la vache noire l'a écrasée » et, chez les Bohêmes et Magyars, « la vache noire lui a marché sur les talons ». La mauvaise réputation de la vache couleur des ténèbres n'est pas sans rappeler la vache noire du royaume de Yama, le dieu de la Mort hindou, mais dont le symbole de résurrection s'est perdu dans nos civilisations.

Une vache qui donne naissance à deux veaux

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Myriam Phillibert, dans Alma Mater, l'éternel féminin (2006) écrit :


"En chemin, ils [les Dieux] rencontrèrent une vache qui, les voyant, meugla : Hmm !

Alors les Dieux reconnurent que c'était là le son Hmm introduisant le Chant et si jusqu'alors ils avaient chanté sans prononcer le Hmm, ils connurent désormais le chant tel qu'il doit être.

Or, le son Hmm introduisant au chant se trouvait dans la vache et celle-ci le faisait vivre.

Satapatha Brâhamana

Ici la vache sacrée est l'initiatrice du Chant, ainsi que la mère du son premier. Nul ne peut dire qu'il s'agit d'une bête ordinaire. La suite de La Légende de la vache le prouve : Devant l'animal qui les a tous amenés à la vie, les dieux se congratulent à la pensée de la nourriture qu'elle représente et de la quintessence du sacrifice qu'elle manifeste. Agni veut la posséder et il y parvient. Sa semence devient le lait de la Vache. Ensuite, les autres dieux, puis les hommes offrent ce lait en oblation. Agni le reçoit et, se sacrifiant, il le rétrocède aux autres dieux. Ce geste institue le sacrifice."

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Madonna Gauding, auteure de Animaux de pouvoir, Guides, protecteurs et guérisseurs (Octopus Publishing Group : 2006, édition française Éditions Véga, 2006) nous propose un ​:


Guide d'interprétation


En tant que symbole onirique : Mère - Alimentation - Abondance - Sacrifice - Gentillesse - Modestie.


En tant que gardien ou protecteur : Protège les relations familiales - Garde contre la perte de la maison.


En tant que guérisseur : Soigne la digestion - Favorise la relaxation.


En tant qu'oracle ou augure : Vous avez besoin de nourriture - Apprenez à coopérer.


Mythes et contes

Nout, la déesse égyptienne du ciel nocturne, était souvent représentée sous la forme d'une vache. Dans beaucoup de cultures, la vache représente la Grande Mère, la terre, l'amour et l'abondance.


Si la vache est votre animal de pouvoir

Vous êtes chaleureux, attentif, sensuel et bougez lentement - sauf quand vous êtes en colère ! Le confort matériel est important pour vous. Votre maison est accueillante, la table toujours garnie. Vous êtes très concerné par les relations familiales, la paix mondiale et l'environnement. Un mariage réussi est important et vous vous efforcez d'être un bon conjoint. Individu très minutieux, vous ruminez, analysez et réfléchissez avant d'intégrer quelqu'un ou quelque chose dans votre vie. D'autres dépendent de votre amour maternel et de votre sagesse profonde.

Demandez à la vache de vous aider :

  • à imaginer l'avenir de votre nouveau-né ;

  • à bouger en équilibre avec la qualité féminine de la nature ;

  • à apprendre la modestie, la souplesse et la gentillesse.

Accéder au pouvoir de la vache en :

  • faisant une liste de ce que vous tenez pour "les bonnes choses de la vie" ;

  • prenant le temps d'une investigation minutieuse avant de prendre une décision ;

  • étant le conciliateur de votre famille.

Les vaches ont un estomac à quatre compartiments. Cela leur permet de faire revenir les aliments avalés dans leur bouche pour être ruminés et avalés de nouveau. Mastiquez-vous soigneusement vos aliments pour en tirer toutes les substances nutritives ?


Élément Terre."

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Diana Cooper, auteure du Guide des archanges dans le monde animal (édition originale 2007, traduction française, Éditions Contre-dires, 2018) nous délivre un :

Message des bovins :

Nous aimons la Terre et l'humanité, et

sommes très heureux de servir en offrant notre lait. Cependant,

nous espérons recevoir de la gratitude et de l'attention en

retour, car cela équilibre le karma entre nous.


Les vaches viennent de Lakumay, l'aspect ascensionné de Sirius. Elles ont été l'un des premiers animaux destinés à rendre service à venir sur Terre durant l'âge d'or de l'Atlantide pour offrir leur lait à l'humanité. A cette époque, leur lait était parfaitement adapté aux besoins des humains, parce que l'herbe et les fleurs sauvages qu'ils consommaient étaient à une fréquence beaucoup plus élevée qu'elles ne le sont à l'heure actuelle. L'eau était pure et bénéfique aussi. Les gens ne mangeaient pas de viande, de sorte que le lait leur était d'un grand bénéfice. En tant que créatures de la cinquième dimension venant de Lakumay, les vaches apportent l'amour inconditionnel et la lumière féminine divine du rayon doré du Christ, et le transmettent dans leur lait.

Les vaches peuvent se montrer réconfortantes, maternelles, protectrices et généreuses. Elles sont chaleureuses et fortes, gentilles et pragmatiques. Elles se sont incarnées, à l'origine, pour développer ces aspects stables et fiables de leur nature, et l'ont faite d'une très belle manière. C'est l'animal le plus féminin, le plus bienveillant et le plus affectueux. Et la grande mère spirituelle, l'ange universel Marie, les garde constamment dans sa lumière pleine d'amour. Les taureaux sont résistants et solides. Ils démontrent la protection et le pouvoir masculins. Ensemble, ils offrent un équilibre parfait de l’énergie masculine et féminine. Durant l'âge d'or de l'Atlantide, les vaches et les taureaux faisaient partie de la famille, ils étaient aimés et soignés. Les gens profitaient du lait que les vaches donnaient et les en remerciaient, et tous les animaux étaient appréciés à titre individuel. Ils donnaient et recevaient de l'amour dans la même mesure. A partir du moment où le monde entrait dans la troisième dimension, les vaches étaient traitées comme des produits de base et subissaient des souffrances intolérables. Elles étaient nourries avec des produits qui ne leur convenaient absolument pas et elles devaient produire leurs quotas de lait, sinon elles mouraient. Leurs veaux étaient tués et mangés. Cela provoquait beaucoup de stress chez les vaches et une grande colère chez les taureaux. Les personnes et les animaux stressés sont vulnérables à la maladie. Les troupeaux ont fini par souffrir de la maladie de la vache folle et des milliers d'animaux ont dû être abattus. Enfin, les humains ont commencé à se rendre compte qu'ils avaient plus besoin des bovins que ceux-ci n'avaient besoin d'eux. A cette époque, l'âme supérieure grandement évoluée des bovins domestiques discutait sérieusement avec le Conseil intergalactique pour savoir s'ils devaient se retirer de la Terre et continuer leur expérience sur une autre planète de leur choix. Cela aurait créé une brèche terrible dans le plan de la Terre et aussi beaucoup de karma pour l'humanité et pour cette planète que les vaches adorent de tout leur cœur. La reddition est une qualité féminine, et les vaches l'ont démontré quand elles ont accepté d'être sacrifiées et brûlées par centaines lors d'incidents terribles. Les flammes les ont aidées à transmuter et à purifie l'énergie de douleur due à la souffrance et au manque de respect qui leur avaient été infligés pendant des milliers d'années.

Malheureusement, l'humanité n'a tiré aucun enseignement de ces tragédies et elle continue à maltraiter ces magnifiques animaux.

De nombreuses prières ont été envoyées pour les vaches alors, et depuis, de grands portails de lumière ont été crées et les anges de l'archange Fhelyai sont venus sur la planète pour les aider. L'archange Zadkiel a remplir ces portails de sa flamme violette, d'or et d'argent pur transmuter et guérir. Les archanges Raphaël et Gabriel ont envoyé des milliers d'anges pour accompagner de l'autre côté chaque vache qui est morte de cette manière. Les âmes vaillantes de ces animaux ont été accueillies à leur retour à Lakumay par une cérémonie grandiose et des salutations universelles. Cependant, heureusement pour la Terre, l'âme supérieure des vaches a écouté les argument du Conseil intergalactique. Étant donné que nous entrons dans la période de transition de 20 ans vers la cinquième dimension et que la planète entière élève sa fréquence vibratoire, le royaume des bovins a décidé de nous honorer de leur présence pendant encore un certain temps. Entre 2012 et 2032, tous les animaux, les humains et la planète sont en route vers la cinquième dimension. Quand le monde vivra dans cet état de conscience avancé, les bovins seront de nouveau traités avec respect et reconnaissance. Ils seront alors vraiment en mesure de donner et recevoir avec amour. Ils apprécieront enfin d'être sur Terre pour poursuivre leur croissance spirituelle et leur apprentissage comme ils avaient prévu de le faire à l'origine.

Les vaches saintes : Le puissant dieu hindou ou grand maître Krishna est représenté comme un berger. Son nom Bâla Gopâla signifie « l'enfant qui protège les vaches ». Un autre de ses noms, Gövinda, signifie « celui qui apporte satisfaction aux vaches ». Dans la foi hindoue, la vache est considérée comme la mère généreuse parce que son lait nourrit les gens et chaque partie de son corps est utilisée de manière utile. Elle est vénérée et considérée comme sainte. Lorsque cette croyance est véritablement et honnêtement maintenue, l’énergie contribue à élever la fréquence vibratoire des vaches dans le monde entier. Cela les a soutenues.


VISUALISATION POUR RETOURNER DANS LE TEMPS ET SE CONNECTER AUX VACHES


  1. Aménagez un espace où vous pourrez vous détendre sans être dérangé.

  2. Allumez une bougie si c'est possible pour élever la fréquence.

  3. Fermez les yeux et laissez vos paupières devenir lourdes, très lourdes, et respirez plus profondément.

  4. Un pont doré étincelant apparaît devant vous.

  5. Vous savez qu('il s'agit d'une porte vers l'incroyable âge d'or de l'Atlantide.

  6. Traversez le pont en sachant que vous êtes guidé et veillé par les anges.

  7. En arrivant à l'extrémité du pont, vous pouvez pour l'Atlantide qui s'étend devant vous. Tout étincelle dans une aura dorée – les arbres, l'herbe, les maisons rondes qui sont regroupées, l'eau qui coule, les oiseaux, absolument tout.

  8. Avec un grand émerveillement et beaucoup de plaisir, vous posez les pieds sur la terre et vous vous sentez immédiatement bien apprécié et heureux.

  9. En approchant d'une des maisons rondes, vous entendez une musique magnifique, des rires remplis de joie et le clapotis de l'eau qui coule.

  10. Le jardin est une prairie colorée pleine de fleurs sauvages parfumées.

  11. Une famille joue sous le soleil. Le père et la mère, trois enfants et trois chiens s'ébrouent dans une piscine pure et claire. Ils sont observés par leur chat noir, un cheval, une vache, un mouton et une chèvre, qui se sont réunis sous un arbre pour se reposer.

  12. La famille vous invite à venir les rejoindre et vous nagez dans l'eau avec eux.

  13. Ensuite, la vache satisfaite lève la tête et vous regarde avec des yeux marron pleins d'amour.

  14. Vous la caressez et vous admirez son aura dorée étincelante.

  15. Elle vous dit télépathiquement qu'elle sert la famille avec amour, en leur offrant un lait riche pour le fromage et le beurre. En retour, ils lui donnent un abri, de beaux pâturages et une reconnaissance affectueuse.

  16. Tout le monde est heureux et ils aiment tous être sur Terre.

  17. La mère demande poliment à la vache si elle peut prendre du lait pour vous, et la vache accepte gracieusement.

  18. La mère tire le lait et vous l'offre dans une tasse. Ce lait est parfaitement étalonné pour une vibration de la cinquième dimension, et vous le recevez en la remerciant.

  19. Lorsque vous buvez l'élixir de la cinquième dimension, vous sentez que chaque cellule de votre corps s'éveille.

  20. Vous traversez le pont dans l'autre sens avec une connexion profonde au royaume des vaches. Cette lumière et cet amour sont maintenant dans votre aura.

  21. Lorsque vous verrez une vache à l'avenir, l'énergie de votre aura lui rappellera qui elle est vraiment. Vous aurez joué un rôle dans son existence. *

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Pour David Carson, auteur de Communiquer avec les animaux totems, puisez dans les qualités animales une aide et une inspiration au quotidien (Watkins Publishing, 2011 ; traduction française Éditions Véga, 2011), la vache appartient à la famille de la Beauté intérieure, au même titre que la colombe, l'abeille, la gazelle, le renard, la baleine, le cygne, le panda géant, le cerf, l'oiseau-tonnerre, la cigogne, le colibri, la panthère, la licorne et le dauphin.


"Beauté intérieure

Certains animaux ont un lien évident à l'élégance - c'est le cas de la colombe et de la gazelle par exemple, qui ouvrent ce chapitre. La ruche d'abeilles est une image harmonieuse de coopération humaine, et le miel symbolise la substance spirituelle. Le chant des baleines, le vol majestueux du cygne, la nature insaisissable de la panthère des neiges, l'éclat du colibri, l'esprit joueur du dauphin - tous ces animaux se rangent harmonieusement aux côtés de la colombe et de la gazelle. D'autres créatures compensent leur manque de grâce par leur caractère et leur symbolisme. Le renard vous est présenté pour son esprit vif et astucieux ; la vache, pour sa pureté ordinaire et sa douceur, tandis que la panda est une incarnation graphique du yin et du yang. en nous aidant à développer notre potentiel, tous les animaux, même le plus roublard, le plus nonchalant, ou le plus comique d'apparence, peuvent contribuer à notre beauté intérieure. [...]

On peut mesurer la grandeur d'une nation et son progrès moral à la façon dont elle traite ses animaux" a dit Mahatma Gandhi. En Inde, les vaches sont considérées comme sacrées et on leur témoigne le plus grand respect. Des festivals sont organisés autour de la vache, celle-ci représentant l'ensemble des animaux. Symbole d'abondance et de don charitable, la vache résiderait en permanence - en théorie du moins - en un paradis pastoral. en outre, elle est dotée d'une vision quasi panoramique et peut sentir les choses à des kilomètres de distance.

La vache est un symbole lunaire et astral, ses cornes en forme de croissants représentant la lune, et son lait abondant, les innombrables étoiles de la Voie lactée. Nout, déesse égyptienne du ciel, illustre parfois ce symbolisme, apparaissant sous forme d'une vache au ventre constellé d'étoiles, et dont les jambes figurent les quatre coins de la Terre.

La vache est un animal yin, incarnation du principe féminin. Elle est associée à la lune, miroir de réceptivité, d'équilibre et d'intuition. C'est l'animal toujours charitable, la mère nourricière accommodante. Elle enseigne le lait de la tendresse humaine et les mystères profonds des vies soucieuses des autres - une pureté transcendantale universelle.

Dans la mythologie scandinave, on trouve l'histoire de la vache nourricière, émergée de la glace. Celle-ci lécha un glaçon et lui donna la forme d'un homme, puis souffla dessus et engendra le premier être humain. Pare cette action, elle donna naissance à l'aventure que nous appelons la vie.

Lorsque vous entendez les cloches d'une vache, votre cœur se serre-t-il de nostalgie ? Vous avez peut être trouvé votre animal spirituel. Si c'est le cas, considérez-vous comme privilégié. La vache transmet la générosité féminine et le potentiel d'une abondance nouvelle et remarquable. En tant qu'animal spirituel, elle vous apprend à vous aimer, à vous nourrir vous-même, et à découvrir votre foyer idéal. Elle représente la puissante mère en vous - forte, généreuse et calme. La mère-vache est symbole de fertilité, de croissance et de pouvoir ancré.


Mot-clé : Paradis pastoral.

Affirmation de la vache sacrée

Au petit matin, essayez de formuler ces affirmations positives (ou leurs équivalents) :

  1. J'appelle l'esprit de la vache à venir et à rester près de moi. Je bois ton lait spirituel nutritif et rajeunissant.

  2. Mon âme marche au milieu de pâturages verdoyants - un océan de verdure tendre. Je sens le parfum des fleurs sauvages, belles et colorées. Le soleil réchauffe ma peau et je respire facilement et tranquillement.

  3. Je transmets ma paix intérieure à tout être vivant. Amour et douceur m'entourent.

  4. Je suis joyeux et la joie est ma vraie nature. Des pensées paisibles et aimantes éclairent ma vie.

  5. Je suis heureux dans le silence, l'immobilité. J'ouvre mon être pour recevoir amour et conseils divins. Je m'ouvre à la béatitude.

  6. Je suis un être radieux, empli d'une énergie aimante positive. Je rayonne d'un amour inconditionnel et sans jugement, et l'univers me le renvoie. J'irradie d'amour et d'énergie positive.

  7. Peu importe le bruit ou la confusion qui m'environne, je suis toujours en paix. J'avance dans la vérité, la beauté, l'équilibre et l'harmonie. Amour et paix modèlent ma vie et mon environnement.

Sérénité dans la foi

Des versets du Rig-Veda comparent la vache à la déesse associée à la mère des dieux. Abattre une vache revenait jadis à tuer délibérément un être sacré. Cet animal est l'âme du calme intérieur et confère la sérénité, même en plein chaos. Si vous passez simplement du temps avec ou près d'une vache, sa pureté peut élever le niveau de votre énergie basique à une plus haute vibration. En Inde, on voit les vaches errer dans les rues et manger les détritus, qui deviennent pureté et feu sacré lorsque le fumier est brûlé. Labeur constant, patience et grande force sont les dons immédiats de la vache. Son totem apporte la paix intérieure."

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Karsten Massei nous explique dans son essai intitulé Les Offrandes des Abeilles (Édition originale, 2015 ; traduction française : Éditions de l’Émeraude, 2017) que les animaux et les hommes sont unis par des liens spirituels étroits :

La vache est tellement penchée vers la terre qu’elle l’absorbe complètement en elle et qu’elle est totalement absorbée par elle. Elle se fond dans le coin de terre sur lequel elle vit pour en faire partie. Ce faisant, elle transforme les substances contenues dans le carré terrestre qu’elle accueille en elle. Elle se laisse traverser par tous ces éléments, qu’elle absorbe aussi bien par sa nourriture que par sa respiration et ses sens, et elle les transforme. Elle les ennoblit en les assimilant. La terre se renouvelle grâce à la digestion de la vache. Et ce phénomène est irremplaçable. Un véritable travail de métamorphose est tangible au niveau substantiel. Oui, la terre se renouvelle à travers la vache. Mais elle ne peut le faire que parce que la vache est porteuse de la terre qu’on appelle spirituelle, de la terre métamorphosée. La vache est un animal terrestre, en ce sens qu’elle révèle en elle la terre sacrée, métamorphosée, en métamorphose. Cette terre se révèle dans la vache à travers sa digestion, mais s’exprime aussi dans son être tout entier. Dans les rêves qui l’entourent, on peut percevoir une lumière qui émane de la terre spirituelle, celle qui porte le physique et le visible. Cette terre est présente dans la personnalité extraordinaire de cet animal. L’entité spirituelle qui se révèle dans la vache fait donc partie des entités animales supérieures.

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Pour Melissa Alvarez, auteure de A la Rencontre de votre Animal énergétique (LLewellyn Publications, 2017 ; traduction française Éditions Véga, 2017), la Vache est définie par les caractéristiques suivantes :


Traits : La Vache symbolise la douceur, la patience et la tranquillité. La Vache est lente et méthodique. Elle reste calme et ne va pas s'énerver si ce n'est pas nécessaire. Elle symbolise aussi une forte unité familiale ainsi que la façon dont on vit chez soi. La Vache est un animal sociable. Au sein du troupeau, elle va se lier à d'autres vaches mais en détester ou en éviter certaines. Elle est daltonienne et ne voit pas le rouge et le vert, mais elle peut nettement entendre les fréquences hautes et basses. Elle ne mord pas l'herbe : elle l'entoure de sa langue et la casse ainsi. Elle vient dire que vous avez un fort sens du devoir envers la famille et les amis. Vous êtes quelqu'un de bonne disposition et vous faites partie de ceux qui restent calmes au milieu de situations dramatiques. Vous avez vos façons à vous de faire les choses, que les autres peuvent ne pas comprendre.


Talents : Abondance - Vivacité - Calme - Compassionnel - Lien aux vies antérieures - Destinée - Fertilité - Généreux - Doux - Ancré - Force intérieure - Perspicacité - Vision aiguë - Gentillesse - Aimant - Maternel - Nouveaux commencements - Nourrit et prend soin - Patient - Possibilités - Potentiel - Protection - Sacrifice - Sérénité - Fermeté.


Défis : Dévoiement possible - Complaisant - Isolement - Paresseux - Hyper protecteur - Fait trop passer les autres avant soi.


Élément : Terre.


Couleurs primaires : Noir - Brun - Rouge - Blanc - Multiplicité de motifs.


Apparitions : Lorsque la Vache apparaît, cela veut dire que vous devez prendre les choses tranquillement et aisément, et apprécier la vie. Vous avez tendance à faire souvent trop de choses en même temps, et à faire passer les besoins des autres avant vous. Comme la vache, vous pouvez fonctionner sans beaucoup dormir et vous sentir quand même reposé (les vaches ne dorment pas plus de quatre heures par jour). La vache a une excellente vision panoramique et peut presque voir à 360 degrés. Ses perceptions sont très vives. Cela signifie que vous devez bien regarder tout ce qui vous entoure, faire attention aux détails et évaluer ce qui se passe avant d'agir. La Vache indique que vous pouvez être inébranlable et vous tenir ancré dans le sol même si l'orage se déchaîne autour de vous. Elle a un sixième sens qui lui signale le danger et elle connaît les endroits les meilleurs pour paître. Elle peut vous amener à comprendre vos capacités intuitives innées et vous sortir des situations dangereuses pour vous amener dans un meilleur endroit.


Aide : Vous avez besoin d'être sûr que vous prenez soin de vos besoins élémentaires pour pouvoir aider les autres. La Vache mange jusqu'à 18 kilos de nourriture par jour et boit presque 200 litres d'eau. Si vous sautez des repas ou ne buvez pas suffisamment d'eau, la vache peut vous aider à prendre davantage conscience de vos besoins nutritifs quotidiens et de la quantité d'eau à boire pour que vous ne vous déshydratiez pas et ne soyez pas à plat. Elle peut vous apprendre à avoir de la stabilité dans votre vie, sans pour autant être inflexible. Elle peut vous montrer comment aller de l'avant sans perdre votre énergie, tout en apprenant aux autres l'importance de la patience et de la ténacité. La Vache fait honneur aux autres et vous incite à faire pareil. Elle a un lien avec les vies passées et peut vous aider à vous connecter à vos précédentes incarnations.


Fréquence : L'énergie de la vache bouge lentement, sur un rythme régulier : "blump, blump, blump". Elle est chaude et pénétrante et donne une sensation qui ressemble au soleil sur votre peau après le passage de nuages d'orage.

Imaginez...

L'un de vos endroits préférés de la foire agricole que vous visitez est celui où le bétail est exposé. Chaque année vous attendez patiemment de voir si vous aurez la chance d'assister à la naissance d'un petit veau, mais vous n'avez jamais pu voir ce miracle se dérouler sous vos yeux. Cette année, vous allez au hasard en cajolant les veaux : vous touchez leur museau humide et les laissez sécher vos poignets. Leur nature douce vous apaise, elle vous fait vous sentir ancré et calme. Dans vos déambulations, vous arrivez à une étable où, de toute évidence, une vache est en train d'accoucher. Soudain, elle se met à pousser très fort. Est-ce que cette année vous allez enfin voir naître un petit ? Vous attendez avec une calme vigilance. Et alors, vous voyez deux pattes émerger et, quelques instants après, le bébé veau est expulsé. Bientôt, la mère se met debout et commence à lécher son petit. Vous êtes rempli d'émerveillement et de joie devant ce miracle de la vie auquel vous venez d'assister.

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Jean Rouaud, auteur de La Splendeur escamotée de frère Cheval ou Le Secret des grottes ornées (Éditions Grasset et Fasquelle, 2018), s'interroge sur la notion de sacrifice en citant Montaigne :


"Les Égyptiens, si dévotieux, estimaient bien satisfaire à la justice divine en lui sacrifiant des pourceaux représentés : invention hardie de vouloir payer Dieu en peinture", dit Montaigne sur la foi d'Hérodote. Même si aux grandes occasions ils leur coupaient la tête, ainsi qu'aux taureaux et aux veaux. Mais pas aux génisses. La génisse, on la ménage pour ce futur qu'on lui réserve. C'est elle qui, devenue vache noire de la nuit sur une paroi de Lascaux, incarne la mère patrie de l'aube dans son ventre de lait."

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Dans Le Bestiaire du Chaman, 36 cartes divinatoires A la rencontre de votre animal totem (Édition originale, 2019 ; Éditions Larousse, 2020), Maïa Toll propose les correspondances symboliques suivantes associées à la Vache et au Taureau (Bos taurus) :


Mot clef : Prenez le temps d'assimiler


La plupart des aliments que mangent la vache et le taureau ne sont pas comestibles pour les autres animaux. Dans les prés, ils broutent même les herbes les plus coriaces. Une fois leur panse bien remplie, ils se couchent et ruminent calmement, mâchant et remâchant les mêmes aliments pour les rendre assimilables. La vache et le taureau, comme les bons analystes, savent comment opérer. Ils adorent régurgiter et assimiler lentement, prenant ce qui est immangeable pour en faire leur repas. Aux yeux des Anciens, cette faculté faisait d'eux des divinités, garantes de fécondité même dans les temps les plus durs. Aux humains d'aujourd'hui, la vache et le taureau conseillent de se détendre et de prendre en compte ce processus de lente rumination qui rend digérables les problèmes les plus coriaces. Ils nous rappellent que beaucoup de choses sont supportables si l'on s'en donne le temps.


Rituel : Exercice de gratitude

Nout, la déesse égyptienne du ciel, fut parfois représentée comme une vache avec des étoiles sur le ventre. Durant cette même période dynamique, trois cultes différents étaient rendus à des taureaux sacrés (sous la forme d'Apis, Mnévis et Boukhis). Dans les temps anciens, la ache et le taureau étaient indispensables à la vie, que ce soit en Europe, en Inde ou au Moyen-Orient. Le taureau symbolisait la fertilité agressive, la vache le principe de la fécondité féminine ; et les bœufs (des taureaux castrés) représentaient le travail acharné sur lequel se sont bâties ces antiques civilisations.

La vache et le taureau comptent parmi les premiers animaux domestiqués ; ils accompagnent les humains depuis plus de 10 000 ans. Des empires se sont construits sur leur dos. Pourtant, à moins de vivre en Inde, ces animaux sont souvent loin d'être considérés à l'égal des chiens ou des chats.

Il en va de même pour les personnes qui exercent une activité fondamentale dont l'importance n'est pas toujours reconnue. Réservez donc cette semaine à la gratitude : faites attention aux gens dont le travail soutient votre vie quotidienne, estimez-les et remerciez-les. Ne vous contentez pas de dire « merci », allez plus loin. Dites-le en regardant la personne dans les yeux, en y mettant la conviction nécessaire.


Réflexion : Est-il possible que tout aille bien ?

On prétend que le mot allemand gemütlich décrit le sentiment qu'une vache éprouve en broutant dans une prairie pleine de fleurs sauvages par un bel après-midi d'été. La vache et le taureau expriment ce contentement du corps et de l'âme, ils sont en accord avec eux-mêmes et le monde qui les entoure. C'est un vrai don. Pouvez-vous vous l'offrir ? Êtes-vous capable de vous contenter du moment présent, juste comme il est ?

Voilà une requête bien extravagante ! Car si notre cerveau est organisé pour détecter les problèmes, ce qui est parfait pour survivre dans un monde complexe, c'est aussi cela qui rend le bonheur si difficile à trouver.

Qu'est-ce qui s'oppose à votre contentement ?

Pouvez-vous déposer ces fardeaux pour quelques instants de paix intérieure ?


« A certains moments, il faut lâcher prise, s'asseoir en silence et laisser le contentement vous envahir. »

Elizabeth Gilbert, Mange, prie, aime.

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Symbolisme celte :


Selon Robert Ambelain dans Les Traditions celtiques (1ère édition 1945, Dangles 2011) :


"Comme le char d'Apollon, le char de HU KADARN est éternellement entouré de rayons de lumière, d'où son aspect solaire. L'arc-en-ciel lui sert de ceinture. Il est le "patron" des Druides, et le chef des Bardes. C'est là le double aspect d'Apollon, philosophe et musicien. C'est Hu qui modère et règle les EAUX. Les bénédictions de toute nature l'accompagnent et celles de la Vache céleste qui, sans cesse, l'accompagne. Cette Vache sacrée, c'est la personnification de la Nature naturante, l'Isis couronnée de cornes de l'ancienne Égypte, la même qu'on rencontre dans les temples de l'Inde. Près du Dieu Soleil elle est l'image de la Lune (le croissant des cornes), et si on a choisi un animal c'est pour montrer son rôle inférieur auprès de son parèdre".

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Pour Philip et Stephanie Carr-Gomm dans L'Oracle des Druides, Comment utiliser les animaux sacrés de la tradition druidique (édition originale 1994 ; traduction française Guy Trédaniel 2006),


La vache est associée à trois mots-clefs :

la Nourriture - la Mère - la Déesse.

La carte représente une vache de Haute Écosse, placide, près des eaux calmes d'un lac écossais. Au premier plan, poussent des airelles et du coucou, qu'on appelle respectivement en anglais "baies à la vache" et "lèvres de vache", et à droite, se trouve "l'herbe au lait" (gentiane des champs).

La vache nous révèle la présence de la déesse. Sa générosité, force nourricière et régénératrice, nous entoure. On la retrouve partout : chez nos amis, nos enfants, dans nos repas, nos rêves et dans la nature où nous avons tant de chance de pouvoir vivre. Elles vous protégeront contre tous les dangers et veilleront pour vous permettre de bénéficier d'un sommeil profond. Avec la vache, manifestation de la déesse et de ses qualités sacrées, vous serez toujours nourri par l'énergie divine destinée à répondre aux besoins de chacun d'entre nous. Attendez paisiblement ; elle viendra à vous.


Renversée, la carte vous incite à examiner la générosité dont vous faites preuve face au monde qui vous entoure. Si vous pensez que vos ressources sont limitées, vous ne pourrez pas donner de bon cœur. Par contre, si vous êtes conscient de ne faire qu'un avec l'ensemble de la création, il vous sera facile de donner. Souvenez-vous qu'on ne donne vraiment que lorsqu'on a appris à recevoir : acceptez-vous facilement l'amour et l'intérêt des autres ?


La Vache dans la tradition

Les abeilles fragiles transportent sous leurs pattes

la moisson des fleurs ;

Les sabots du bétail arpentant la montagne apportent l'abondance

Poème irlandais du IXe siècle

L'importance du bétail est telle dans la vie des sociétés qu'on le considérait autrefois comme un don des dieux. Les légendes concernant des troupeaux blancs sacrés abondent. On racontait que le bétail était arrivé en Irlande avec trois vaches sacrées, émergées de la mer à Baile Cronin ; l'une blanche, l'autre rousse et la troisième noire. Ainsi réunies, elles représentaient les trois aspects de la déesse, nous montrant que la vache est la déesse elle-même, vierge, mère et vieille femme (blanche, rousse et noire). Les dieux possédaient des vaches - Manannan avait du bétail marin et le dieu-père, Dagda, une génisse nommée "Océan", mais les vaches étaient surtout associées aux déesses, comme Boann (la Vache Blanche) qui donna son nom à la rivière Boyne.

Brighid, déesse de la tribu des Brigantes dans le nord de l'Angleterre, était l'une des divinités les plus importantes de la tradition druidique. En Irlande, elle faisait partie des déesses les plus couramment vénérées et évolua en Sainte Bridget à l'époque chrétienne. Élevée au lait d'une vache de l'Autre Monde, elle prit cet animal pour totem et devint la patronne du bétail.

Sacrée en Inde et révérée dans les pays celtiques, la vache est l'un des éléments renforçant la théorie d'une origine indo-européenne commune aux deux civilisations. Donnant son lait, son cuir, ses cornes et sa viande, on l'associait généralement à la nourriture et à la production. Sur le plan médical, l'haleine douce de la vache était recommandée dans les cas de phtisie et sa bouse comme cataplasmes pour soigner les brûlures et les inflammations. Il fallait dormir au milieu des vaches pour guérir et se réchauffer, et si on avait besoin de se protéger du diable, il suffisait de trouver un coin de champ où une vache avait dormi, d'en tracer trois fois le tour dans le sens des aiguilles d'une montre et de s'y coucher en sécurité.

Trois des quatre fêtes druidiques du feu étaient liées aux vaches. Le 1er novembre, Samhuinn marquait le retour des bêtes dans les vallées pour l'hiver et l'abattage du bétail en vue des provisions de viande. le 1er mai, Beltane, annonçait le début de l'été et de la transhumance, avant laquelle on conduisait les bêtes entre les deux feux de Beltane pour les purifier et les revigorer. Enfin, Imbolc, le 1er février, marquait la saison des naissances de veaux et d'agneaux.

Le sentier des Vaches astral

La bonté de la déesse s'inscrit dans le ciel nocturne sous la forme de la Voie Lactée, qu'on appelle dans le Friesland et le Lancashire le "Sentier des Vaches". On peut, aujourd'hui encore, observer comment les principales routes entre les centres d'habitation suivaient les chemins empruntés par le bétail.

Les Celtes jugeaient la richesse d'une personne d'après le nombre de têtes de bétail qu'elle possédait, permettant de régler les loyers, les dots, les enterrements et même les honoraires des bardes. en Irlande, la rançon demandée pour un fils de comte pouvait atteindre cent quarante têtes et bétail et un millier pour un roi. Les vols de bétail étaient considérés en Ecosse comme une "honorable occupation de gentilhomme. " Le mot irlandais tain indique les diverses significations associées au bétail dans la pensée celte : il signifie à la fois le troupeau, le butin mais aussi les talents intellectuels. Le vol des vaches de Cooley, écrite sur une peau de vache, était chanté par les laitières lors de la traite car le chant les aidait à travailler tout en augmentant la production de lait.

La vache, animal sacré de la déesse, entretenait un lien étroit avec l'Autre Monde. Les légendes écossaises parlent de vaches féeriques (Crodh Shith) qui vivaient sous la mer en se nourrissant d'algues et apparaissaient sur la terre ferme à différents endroits - on compte, par exemple, dix lieues de prédilection à Skye. On racontait aussi qu'un taureau d'eau avait engendré des vaches magiques. L'offrande de lait était une coutume bien enracinée : en Irlande, on faisait gicler les premières gouttes de lait de la traite sur le sol pour les donner aux fées, alors qu'en Ecosse on remplissait de lait certains creux des rochers pour la même raison. En août, les Écossais versaient du lait sur le sommet des collines à l'intention des dieux. Et le Bretons en aspergeaient régulièrement les menhirs. On pensait qu'une fée, la gruagach, prenait soin du bétail si on lui réservait sa part de lait.


La protection de la Vache

En raison de la valeur nutritive de son lait et son association avec le lait de la mère, la vache devait être protégée des esprits malins. On pensait qu'une vache qui tombait malade avait été frappée par la flèche d'une fée ; pour la soigner, il fallait porter les cendres d'un feu de joie, en faisant trois fois le tour dans le sens des aiguilles d'une montre. On fabriquait de préférence la trique servant à la conduire avec du bois de sorbier des oiseleurs et du crin de cheval. Sa corde, connue sous le nom de "sceau", était toujours comprise dans son prix de vente pour que la protection magique du sceau ne soit pas interrompue lors de la transaction. Si le beurre ne prenait pas ou que le lait contenait du sang, on disait que la vache avait "l’œil" - que des forces malveillantes la possédaient ; on prenait alors immédiatement des mesures de protection. De la jacobée [Le séneçon de Jacob ou séneçon jacobée (Jacobaea vulgaris)] conservée sous un bol dans la laiterie, servait la plupart du temps à empêcher de telles attaques.

Le lait avait lui aussi des propriétés médicinales. Perdant beaucoup d'hommes sous les flèches empoisonnées des Anglais, les Irlandais suivirent le conseil du druide picte Trosdane : ils remplirent une fosse du lait de cent cinquante vaches au museau blanc et y baignèrent les blessés qui guérirent instantanément."

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Veaux à Clavans en Haut Oisans.

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Selon Sabine Heinz, auteure de Les Symboles des Celtes, (édition originale 1997, traduction française Guy Trédaniel Éditeur, 1998),


"Parmi les bêtes à cornes, la vache a une position particulière qu'elle doit surtout au fait que la société celtique resta, plus longtemps que d'autres en Europe, attache au matriarcat, tradition qu'elle transmet aujourd'hui encore dans ses légendes. La vache est une personnification de la déesse-mère. Elle est un animal de sacrifice symbolisant renaissance et force.

L'apparition de divinités sous forme de vaches ou de génisses, le lien avec la fécondité ainsi que les recherches linguistiques laissent supposer aujourd'hui encore une parenté originelle entre les mots femme et vache.

Les triades galloises connaissent pour la Bretagne trois principaux représentants de cette espèce : la vache pie de Maelgwn Gwynedd, la vache à la peau grise et Cornillo (Petite Corne).

Même après la christianisation, la vache garde son importance : une vache blanche aux oreilles rousses élève Sainte Brigid qui ne supporte d'autre aliment que le lait. Bien que les animaux aux oreilles rousses viennent de l'Autre Monde, il existe aujourd'hui encore en Bretagne des bœufs blancs aux oreilles rousses. L'histoire de Sainte Brigid nous montre également que les croyances païennes survécurent partiellement au début du christianisme.

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Dans Animaux totems celtes, Un voyage chamanique à la rencontre de votre animal allié (2002, traduction française : Éditions Vega, 2015), John Matthews nous propose la fiche suivante :


"Vache = irlandais : bo ; gallois : bu, buwch ; gaélique : bo ; langue de Cornouailles : bugh ; breton : ejen.

Pour les Celtes, la vache était symbole d'abondance, et la richesse se jugeait à l'importance du troupeau que l'on possédait. On trouve également des références à la croyance en les vertus curatives du lait de vache. En gaélique, il y a plus d'une centaine de mots ce qui constitue une indication de l'importance de cet animal dans le monde celte. Quantité d'histoires bien connues, comme Táin Bó Cúailnge, traient du vol de bétail célèbre, entraînant systématiquement une guerre. Les vaches comme les taureaux représentaient l'abondance pour les Celtes et il n'est pas surprenant de trouver des références à l'origine sacrée de ces bêtes. En Irlande, il est dit que trois vaches fabuleuses émergèrent de l'océan : une blanche, une rouge et une noire (Bo-fina, Boruadh et Bo-dhubh).

Tout un pan du savoir traditionnel tourne autour des Crodh Shith ou vaches enchantées. On raconte qu'elles vivaient sous la mer où elles se nourrissaient de meillich, une sorte d'algue. Comme les chevaux et chiens de l'Autre-Monde, elles étaient souvent blanche ou tachetée, avec les oreilles rousses et le plus souvent sans corne. La force et la détermination de la vache, comme du taureau en font des compagnons importants pour un voyage tumultueux - mais gardez à l'esprit que le taureau peut charger sans réfléchir, tandis que la vache sait être calme et ruminer (sa décision).


Préceptes du totem :

Éclaireur : Sois à l'affût d'indices te montrant le chemin.

Protecteur : Méfie-toi de la facilité.

Challenger : Comment cette action peut-elle t'aider à évoluer ?

Aide : Il y a toujours quelque chose d'intéressant à trouver."

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Dimitri Nikolai Boekhoorn, auteur d'une thèse intitulée Bestiaire mythique, légendaire et merveilleux dans la tradition celtique : de la littérature orale à la littérature écrite : étude comparée de l’évolution du rôle et de la fonction des animaux dans les traditions écrites et orales ayant trait à la mythologie en Irlande, Ecosse, Pays de Galles, Cornouailles et Bretagne à partir du Haut Moyen Âge, appuyée sur les sources écrites, iconographiques et toreutiques chez les Celtes anciens continentaux. (Littératures. Université Rennes 2 ; University Collège Cork, 2008) récolte les élements sur le symbolisme de la vache et des déesses qui lui sont associées :

Si nous sommes donc d’accord avec la réfutation probable d'un totémisme « pur » et de la zoolâtrie en tant que tels, le zoomorphisme des dieux est néanmoins une réalité dans le domaine celtique, tout comme dans d’autres civilisations indo-européennes et non-indo-européennes. Le zoomorphisme n’implique pas forcément la zoolâtrie, car on peut vénérer des espèces animales comme des attributs et symboles divins à un moment donné, et consommer la chair de ces mêmes animaux à une autre occasion. Il y avait chez les Celtes sûrement la croyance aux Dieux-animaux, mais les animaux sacrés en revanche n'avaient pas forcément le statut d'êtres divins ! Quand on parle en effet de la Déesse-Vache, ou de la Déesse équine, c'est au symbolisme animalier et à l'aspect principal de la divinité en question que l'on fait référence, et non au prétendu statut divin de l'animal lui-même. Car les animaux ne constituent que le support symbolique des dieux et des déesses, ils ne symbolisent que certains aspects des pouvoirs divins

[…]

Thirona (Dirona, Sirona) : peut-être la ‘Stellaire’. Elle porte fréquemment un chien sur les genoux et des œufs et un serpent en tant que symboles de fertilité. A Cologne, elle a le pied sur une tête de vache. Cette déeese est possiblement identique à Damona, la déesse-vache. […]


Vache : En tant que productrice de lait, la vache symbolise la Terre nourricière. Elle synthétise la fertilité, la richesse, le renouveau et la Mère. En raison de son aspect de fertilité, elle est bien sûr associée à la lune, à la corne et à l'abondance. Les cornes de la vache, comme celle du taureau, rappellent la forme du croissant lunaire. En Egypte, elle est la mère céleste du soleil ; chez les Germains, la vache nourricière Audumla est la première compagne d'Ymir. Le couple Audumla-Ymir est en outre antérieur aux dieux. La vache est donc l'ancêtre de la vie, le symbole de la fécondité. Elle détient ce rôle partout dans le monde indo-européen. Certaines recherches de linguistes font penser à une origine commune des mots indo-européens pour ‘vache’ et ‘femme’. Le bovidé femelle joue souvent un rôle cosmique et divin, mais parfois on lui attribue la fonction de psychopompe. Dans ce cas, on dépeint souvent une vache noire.

Cette espèce bovine détient une place à part dans les mythes celtiques ; il a été suggéré que cela s’explique probablement par le phénomène du matriarcat, qui aurait connu une plus longue histoire chez les Celtes que chez d’autres peuples indo-européens. ‘Das Denken im Rind’, le fait de « penser en bœuf », est un phénomène primordial dans la mythologie celte. L’une des représentations de la déesse-mère est en effet la vache, qui incarne à la fois l’idée de la renaissance, de la fécondité et de la force. Chez les Celtes gaulois, il existait une déesse bovine, Damona.

Le nom de la déesse irlandaise Búanann ‘la continuelle, l’éternelle’ pourrait être issu de Bú Anann, la Vache d’Anu et il est évident que, les déesses mises à part, la vache était une métaphore pour l’Irlande : l’île elle-même fut parfois considérée comme une vache.La plupart des hydronymes celtes sont féminins, et plusieurs sont associés à une déesse-vache. Le nom de la rivière irlandaise Boyne vient de *Bô-uindâ, ‘vache blanche’ et il est peut-être à comparer au nom ancien d’une rivière à côté d’Utrecht aux Pays-Bas : Borvoboendoa. Le nom de la déesse-vache Damona survit dans l’hydronyme Dane qui arrose le Cheshire.

En Irlande, sainte Brigit est nourrie par une vache aux oreilles rouges ; on a là un signe d’un animal provenant de l’Autre Monde selon les légendes pré-chrétiennes, même si l’on trouve en Grande-Bretagne des bovins réels aux oreilles rouges.

Le mythème du vol des « vaches cosmiques » a entre autres été étudié par Claude Sterckx. Ce mythème semble lié au dieu (indo-européen) des troupeaux. Hormis les différents Maîtres et Maîtresses des Animaux que nous avons mentionnés, les traditions insulaires gardent des traces d’un gardien de troupeaux dans le mythe de Tristan par exemple, personnage d’origine mythologique que l’on retrouve dans les Triades galloises sous la forme de Drystan le porcher.

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Symbolisme onirique :


Selon Georges Romey, auteur du Dictionnaire de la Symbolique, le vocabulaire fondamental des rêves, Tome 1 : couleurs, minéraux, métaux, végétaux, animaux (Albin Michel, 1995) :


Un animal qui apparaît dans plus de 5% des scénarios de rêve éveillé, que les inspirateurs des rites sacrés de l’Égypte et de l'Inde antiques proposèrent à la vénération des prêtres et du peuple ne peut pas être un symbole négligeable. Pourtant, la discrétion, presque la fadeur, de l'image impressionne l'observateur qui vient d'explorer un nombre important de rêves dans lesquels il a rencontré la vache. Au cours de nos recherches, portant sur des centaines de symboles, nous avons pu constater que chaque image est appelée à jouer des rôles d'importance variable suivant les besoins des situations oniriques. Parfois, le symbole ne fait l'objet que d'une évocation, souvent il devient l'élément principal d'une séquence de rêve et, plus rarement, il tient le premier rôle dans l'ensemble du scénario. Nous produisons des exemples de ces projections emphatiques dans les articles consacrés au cercle, à l'araignée, à l'aigle, au mur et dans beaucoup d'autres. Quel que soit le symbole étudié, il se trouve toujours un rêveur pour le placer ainsi sous un éclairage intense. La vache échappe à cette règle. Tout se passe comme si l'image ne prenait sens qu'en fonction de son caractère discret, détaché, comme lointain. Elle ressemble à ces acteurs de cinéma auxquels on ne confie jamais que des rôles très secondaires, de simples silhouettes, mais avec une telle fréquence qu'ils deviennent aussi familiers pour le public que les plus grandes stars. Bien souvent même, dans les rêves, avant d'être une actrice, la vache est un élément du décor. D'un décor familier, champêtre. Les corrélations sont exceptionnellement révélatrices : plus de la moitié des associations se répartissent entre trois familles de symboles : les parties du corps humain, les personnages familiaux et les animaux domestiques.

La vache imaginée est un complément du paysage. La prairie, le ruisseau, la montagne aux pentes douces et vertes, composent le tableau dans lequel elle s'insère. Le personnage de la mère, personne ne s'en étonnera, est très souvent évoqué dans les scénarios où vient paître la vache. Hathor, que les Égyptiens représentaient munie d'oreilles et de cornes de vache, est la mère-nature, la mère cosmique, origine de tout ce qui est. Même le soleil est né du principe féminin maternel.

Dans les articles consacrés au temps et au rythme, nous démontrons l'étroite association entre la notion de rythme et la mère. C'est dans le ventre maternel que l'enfant enregistre les impressions qui engendrent ultérieurement les concepts d'éternité et de temps séquentiel, de temps rythmé, de temps mesuré. Les rythmes respiratoires et cardiaques de la mère induisent les premières divisions du temps absolu.

La vache est l'animal dont le rythme respiratoire est le plus lent. Elle est l'image de la vie paisible. Elle suggère un rythme si profondément, si naturellement lent, qu'il devient l'antithèse de la cadence. La mamelle généreuse de la vache, le sein maternel gonflé du lait de vie et la montagne arrondie offrant ses verts pâturages, sont unis par la forme, par le don et par un rythme aux cycles tellement naturels, tellement amples, qu'ils se confondent avec l'éternité.

La vache onirique renvoie le rêveur à ses impressions les plus lointaines. Elle se place dans un paysage d'orée de la vie, dans le lieu de l'expérience première, fusionnelle, où le Toi et le Moi n'étaient pas encore séparés. Nombreux sont les rêves dans lesquels le patient ou la patiente évoquent l'image de la vache, comme pour s'armer de la conviction d'avoir connu un temps réellement paisible, avant d'affronter des zones de turbulence de leur problématique. A l'époque de son onzième rêve, la relation entre Armelle et sa mère s'organisait autour d'une hostilité réciproque et ouvertement manifestée. Dès les premiers mots du scénario, la vache est placée dans son ambiance onirique type :

« Je vois un troupeau de vaches, avec des clochettes qui tintent. C'est un paysage de montagne, avec un ruisseau, de l'eau qui coule... l'air est frais... j'aperçois un paysan qui garde le troupeau. Il a un bâton et, près de lui, un chien. Il a la démarche lente et régulière. C'est paisible parce que c'est la campagne... c'est rythmé... les vaches aussi broutent l'herbe d'une façon lente et régulière... et puis... c'est pareil... quand il les trait, c'est aussi d'une façon régulière, rythmée et avec souplesse... et, en même temps, je vois un homme avec un fouet qui harcèle des animaux... des animaux qu'il fait courir en rond, comme au cirque... »

Ainsi, la vue d'un troupeau de vaches suffit à communiquer aux images une rythmique rassurante, paisible, régulière.

Une problématique du rythme, chez une femme, renvoie généralement aux engrammes douloureux du temps de la gestation ou de celui de la naissance. Elle rappelle une dysharmonie entre les rythmes du corps de l'enfant et de celui de sa mère. Dans presque tous les cas, l'appréhension d'une rupture rythmique engendre un refus du partenaire sexuel dont l'approche prend une tonalité d'agression.

C'est la peur du rythme étranger, du rythme imposé de l'extérieur, du rythme dérangeant, qui provoque la double image d'un vacher à la démarche lente et régulière et d'un homme qui harcèle les animaux avec un fouet. Un autre rêve d'Armelle va montrer la pertinence de cette traduction. Ici l'association entre la vache et la mère est transparente ! Les images témoignent crûment de ce qu'il faut bien appeler un souvenir de la chair ! Le scénario commence par ces mots :

« J'ai une image affreuse : une vision de diarrhée !... L'idée de quelque chose qui s'évacue... j'associe ça à ma mère... une porte qu'on enfonce, qu'on franchit... et après... il y a le vide, comme après une diarrhée il y a le vide aussi... le vide dans le ventre ! Une poche d'eau qui crève... ça me fait penser à la naissance... puis je vois un ventre, le ventre d'une femme enceinte, gonflé... dans son corps, y a pas beaucoup de place... ça me fait penser à un enfermement... et je vois un anus... c'est un anus de vache... alors je suis coincée dans cette situation... je ne sais pas comment en sortir... c'est comme si j'étais dans un ventre et que me mère ne poussait pas... et que j'arrive pas à sortir seule... là, j'ai l'image d'une poule qui pond un œuf... et un sein gonflé de lait... c'est pareil, il faut que le lait sorte... »

Une corrélation étroite existe entre la montagne et la vache. Il s'agit toujours de la montagne douce, arrondie, couverte de prairies. Cette montagne-là est comme un sein de la terre qui allaiterait la vache. Une chaîne symbolique s'esquisse ainsi, dans laquelle le mammifère devient un prolongement naturel de la terre-mère. Hathor, déesse-mère, est la vache céleste qui couvre la terre de son ventre étoilé. Ces rappels permettront d'apprécier une séquence du sixième scénario de Véronique :

« … J'ai l'impression d'être un personnage de dessins animés, dans un paysage de dessins animés, avec des fées... un beau paysage quoi ! Comme quand il n'y avait pas encore de sorcière ni reine comme cela... j'aperçois la lune maintenant... là, je suis transformée en papillon... c'est la nuit... y a plein d'étoiles... sous moi, y a un paysage de montagne... enfin de montagnes à vaches plutôt !... Avec un chalet... les montagnes en pente douce, avec de l'herbe... des vaches... enfin.... j'ai l'impression que ce n'est pas la montagne de la terre... c'est la montagne du ciel, puisque je suis dans les étoiles... c'est très agréable cela... c'est la calme d 'une nuit de Noël... » Armelle associe clairement la vache à sa mère terrestre, Véronique donne à l’image sa dimension cosmique, sublimante. L'une et l'autre pourtant expriment l'inconfortable relation à leur mère. Les modes réactionnels varient, le symbole est stable. Le rythme est le diviseur du temps. Le rythme sépare de l'éternité. Il ancre l'âme au temps de la terre et lui confisque le temps du ciel. Une image de vache est une horloge qui restitue l’heure éternelle. Une psychologie qui a perdu ses repères chronologiques est plus profondément affectée que celle qui a perdu ses références spatiales.

Nous souhaitons montrer, à travers le troisième scénario de Noëlle, que les abstractions philosophiques les plus audacieuses trouvent une résonance spontanée dans les produits de l'imaginaire. Noëlle manifeste dans son existence quotidienne une agitation mentale qui accapare l'essentiel de ses énergies. Son état d'esprit pourrait être résumé par l'expression de désarroi temporel :

« Je suis dans le noir... ça me rappelle un souvenir d'enfance... ma mère dormait... je me suis levée... je suis allée dans la forêt.. là, je suis dans des pâturages un peu jaunis, c'est l'été... une herbe tendre et jaune à la fois... j'ai envie d'avancer dans ces collines... je ne sais pas où je vais... je me sens toujours pas adulte... à quarante ans, je suis une enfant-grande ! Comme j'aimerais que tout soit simple ! Comme la lumière qui éclaire l'herbe et lui donne la vie... j'aimerais que ma vie soit au rythme de la nature... Ah ! Être dans le temps, dans le temps juste ! Saisir en même temps le commencement et la fin... c'est dur, de ne pas être dans le temps, quand on est pas juste. Là, je vois une mare... c'est pas une eau très vivifiante hein ? Un coin où les vaches viennent boire. C'est pas très propre... comment font le vaches pour boire ça ? Bon ! Je ne veux plus rester là... adieu les vaches, elles n'ont qu'à rester dans leur état de vache... boire de l'eau sale si elles veulent, moi je ne suis pas une vache ! Les vaches ne m'intéressent plus !.. Je vois des corbeaux maintenant... et ça me fait penser à un gros oiseau de proie que j'ai vu en allant chez ma mère... je ne me laisserai pas manger ! Y a une montagne maintenant... ça sent bon l'herbe et les sapins, mais il peut y avoir des vipères... ma mère poussait des cris d'horreur quand elle voyait une vipère ou une araignée... […] Va falloir que je cesse de me raconter des histoires ! Je ne sais pas du tout ce que c'est d'être une grande personne, quelqu'un qui contrôle un peu les phénomènes extérieurs et intérieurs... il faut être dans le temps juste ! Quarante-deux ans ! J'ai tellement pas quarante-deux ans ! Où allons-nous ? Il est temps que je regagne ma planète chronologique... chez moi tout est désaccordé !... »

S'il fallait illustrer la chaîne symbolique formée par la vache, la montagne, la mère et le temps, cet exemple nous paraît particulièrement convaincant. « Tout est désaccordé ! » Cette dysharmonie transmet ses vibrations négatives à chacun des maillons de la chaîne. Un seul bonheur fait défaut : celui qu'engendrerait une relation sereine à l'image maternelle. Aussitôt, le mal s'étend. A la montagne, qui abrite rapaces et vipères, au temps, qui n'est plus le temps juste, à la vache, vouée à boire de l'eau sale et « qui ne m'intéresse plus ».

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Les séquences reproduites dans cet article sont extraites des rêves dans lesquels le symbole affiche une certaine présence. Le plus souvent, la vache imaginée ne fait l'objet que d'une évocation, parmi les autres éléments composant un paysage de pâturages montagnards.

Il y aurait incompétence à prendre pour banalité cette discrétion qui tient à la nature de l'image. Celle-là renvoie un temps éternel, aux rythmes originels, au ventre maternel.

La présence de la vache dans un scénario, si modeste soit-elle en apparence, sera toujours entendue par le praticien avisé comme un appel pathétique du rêveur ou de la rêveuse. Ces patients sont à la recherche d'un temps perdu, d'une harmonie oubliée. En observant les images qui entourent la vache imaginée, on relèvera le plus souvent les signes d'une relation conflictuelle vis-à-vis de la mère. A sa manière, à son rythme, la vache prépare, sur ce plan, l'apaisement.

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Mythologie :


Le Glossaire théosophique (1ère édition G.R.S. MEAD, Londres, 1892) d'Helena Petrovna Blavatsky propose plusieurs entrées relatives à la vache :


AUDUMBLA (scandin.). Le symbole de la nature dans la mythologie nordique ; la vache qui lèche le bloc de sel, d'où naît le divin Buri avant la création de l'homme. La Vache de la Création, la "Nourrisseuse" de qui coulaient quatre courants de lait qui nourrissaient le géant Ymir ou Orgelmir (matière en ébullition) et ses fils, les Hrimthurses (Géants de la Glace) avant l'apparition des dieux ou des hommes. N'ayant rien à paître, elle léchait le sel des rochers de glace et produisit ainsi Buri, le "Producteur", qui, à son tour, eut un fils, Bdr (le né) qui épousa une fille des Géants de la Glace et en eut trois fils, Odin (l'Esprit), Wili (la Volonté) et We (la Sainteté). La signification de cette allégorie est évidente. C'est l'union pré-cosmique des éléments, de l'Esprit ou Force Créatrice, de la Matière, rafraîchie et encore bouillante, qu'il forme en accord avec la Volonté universelle. Puis les Ases, "les piliers et soutiens du Monde" (Gouverneurs du Monde), entrent en scène et créent, comme le Père-de-Tout veut qu'ils le fassent.


CULTE DE LA VACHE. L'idée d'un tel "culte" est aussi fausse qu'injuste. Aucun Egyptien n'a adoré la vache, et aucun hindou n'adore maintenant cet animal, quoiqu'il soit vrai que la vache et le taureau étaient sacrés alors, comme ils le sont aujourd'hui, mais seulement comme le symbole naturel physique d'un idéal métaphysique, tout comme une église faite de briques et de mortier est sacrée pour les chrétiens civilisés à cause de ce à quoi elle est associée et non en raison de ses murs. La vache était consacrée à Isis, la Mère universelle, la Nature, et à Hathor, principe féminin de la Nature, les deux déesses étant alliées à la fois au Soleil et à la Lune, comme le prouvent le disque et les cornes (croissant) de vache. (Voir "Hathor" et "Isis"). Dans les Védas, l'Aube de la Création est représentée par une vache. Cette aube est Hathor, et le jour suivant, c'est-à-dire lorsque la Nature est déjà formée, est Isis, car toutes les deux sont une, sauf en ce qui concerne le temps. L'aînée, Hathor, est la "maîtresse des sept vaches mystiques" et Isis, la Mère Divine, est la déesse aux "cornes de vache", la vache de l'abondance (ou la Nature, la Terre), et, comme mère d'Horus (le monde physique) – la "mère de tout ce qui vit". Le outa était l'œil symbolique d'Horus, le droit étant le Soleil et le gauche la Lune. L' "œil" droit d'Horus était appelé "la vache de Hathor" et servait comme puissante amulette, comme la colombe dans un nid de rayons, ou gloire, avec ou sans la croix, est un talisman pour les Chrétiens, latins ou grecs. Le Taureau et le Lion qu'on trouve souvent en compagnie de Luc et de Marc sur le frontispice de leurs évangiles respectifs dans les textes latins et grecs, sont expliqués comme des symboles, ce qui est juste. Pourquoi ne pas admettre la même chose dans le cas des Taureaux, Vaches, Béliers et Oiseaux sacrés égyptiens ?


SURABHI (sans.). La "vache d'abondance" ; une création fabuleuse, une des quatorze choses précieuses produites par l'océan de lait lorsqu'il est baratté par les dieux. Une "vache" qui rapporte à son possesseur tout ce qu'il désire.

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Pour Myriam Phillibert, dans L'Alphabet des Arbres (2006),


"La vieille lune s'éteint, laissant la place à la nouvelle. Et l'on se doit d'évoquer Boan... Voici l'épouse du Dagda. Son nom signifie "Vache blanche". Le dieu suprême d'Irlande arrête le temps pour avoir le loisir de s'unir à cette simple mortelle. Elle met au monde, sur une pierre, un fils divin prénommé Œngus ou Mac Oc.


 

François-Joseph Onda, auteur d'une thèse intitulée Le féminin dans les paysages pré-chrétiens irlandais. (Archéologie et Préhistoire. Université Rennes 2, 2012. Français.) nous renseigne précisément sur le rapport des Celtes à cet animal sacré et notamment, son lien à la Voie lactée :


La vache comme Axis Mundi : Le lien entre le monde des hommes et le reste du cosmos est exprimé symboliquement à travers certains mythes celtes que nous allons étudier à présent, notamment ceux mettant en scène des vaches, animal qui avait une place privilégiée chez les Celtes. On les évoquera ici pour préciser une autre dimension symbolique significative de l’élément liquide, en l’occurrence l’aspect nourricier, essentiel pour des communautés dont la survie dépendait exclusivement de la nature, et plus précisément de l’agriculture.

Revenons tout d’abord sur l’un des principaux fleuves d’Irlande, la Boyne, dont le nom trouve son origine dans celui de Bόann, qui fut élevée, suite aux éléments mentionnés supra, au statut de déesse. L’étymologie de son nom souligne l’ancienne croyance selon laquelle les eaux du fleuve étaient considérées comme le lait nourricier de la vache, animal qui représentait la déesse. En effet, Patricia Monaghan précise que le nom « Bόann » est composé d’une première syllabe « bό » qui signifie « vache » en gaélique, tandis que la seconde signifie à la fois « blanche », « illuminée », « brillante », « sacré » et « sage ». Les différentes acceptions de ce dernier terme mettent l’accent sur des aspects différents du fleuve et de la déesse éponyme, ainsi que sur la façon dont les Celtes considéraient la Boyne. Cette vision met en relief l’aspect nourricier du fleuve, qui est attesté par l’étymologie même du nom. En effet, le fait que le terme « vache » soit présent dans le nom de la déesse, et par conséquent dans celui du fleuve, appelé abhann bό Finn en gaélique, est tout particulièrement chargé de sens. La vache était considérée comme un puissant symbole de maternité, d’abondance, de fertilité et de prospérité. C’est également un animal indissociable de l’aspect nourricier, car le lait qu’elle produit était un élément central à la survie des hommes.

De nombreux mythes mettent en scène des vaches extraordinaires, comme par exemple celui de la vache blanche appelée « The Maol Flidais » relatée dans Táin Bó Flidais ou « The Cattle Raid of Flidais » (La razzia des vaches de Flidais), dont le nom signifie « The hummel/hornless cow of Flidais » (« La vache sans cornes de Flidais »), déesse de la fertilité et de l’abondance appartenant à la tribu des Tuatha Dé Danann. D’après le mythe, cette vache était capable de nourrir plus de trois cents hommes tous les soirs, rien qu’avec son propre lait : cette particularité illustre l’idée d’abondance attachée à la vache. La même idée est également illustrée dans le mythe de Glas Ghaibhleann – dont le nom signifie littéralement « La vache blanche de Goibhniu », qui était lui-même une divinité solaire souvent présenté dans les mythes comme le forgeron des Tuatha Dé Danann. Patricia Monaghan précise que l’animal était également tellement robuste qu’il pouvait parcourir trois des cinq provinces de l’Irlande en un seul jour et ce faisant, il donnait du lait à quiconque en avait besoin, remplissant tous les récipients que les hommes lui apportaient.

On peut établir un lien entre la course de la vache à travers le pays et les méandres du fleuve à travers l’Irlande. En souvenir de ce mythe, de nombreux lieux à travers l’île incluent le terme « Glas » qui rappellent la vache blanche de Goibhniu, comme par exemple Glaslough (« Le lac de la vache blanche ») dans le comté de Monaghan ; Tober na Glaise (« Le puits de la vache blanche ») sur l’île d’Inisbofin, dont le nom signifie lui-même « L’île de la vache blanche », située à l’ouest de l’Irlande ou encore Port na Glaise (« Le port de la vache blanche ») sur l’île de Tory, pour rappeler ses pérégrinations à travers l’île. Toujours selon Patricia Monaghan, la vache est une image ancienne associée à la terre d’Irlande même, qui est parfois appelée « The Faithful Brown White-Backed Cow » (« La fidèle vache brune au dos blanc »). Le fait que le surnom de l’Irlande inclue le terme « vache » vient renforcer l’image de la déesse-mère qui a, elle aussi, entre autres rôles, celui de veiller à la prospérité et au bien-être de ses enfants, en leur prodiguant de la nourriture en abondance. Le lait est un symbole particulièrement fort, dans la mesure où il constitue le premier breuvage de tout mammifère, y compris de l’homme. Cette première nourriture contient donc potentiellement toutes les autres. De plus, le lait de la vache divine est aussi symbole de connaissance suprême. En effet, s’abreuver du lait de la vache, qui est l’une des formes que revêt la déesse-mère, donne aux hommes l’accès à la connaissance de celle-ci, au même titre que l’eau des puits sacrés, qui sont à l’origine de certains fleuves ou lacs. Patricia Monaghan ajoute aussi que plusieurs manuscrits (sans toutefois préciser lesquels) rapportant cet épisode font apparaître un détail significatif : partout où la vache pose son sabot, l’herbe pousse plus verte, plus tendre et ainsi les fermiers s’enrichissent à son passage, ce qui souligne métaphoriquement les vertus de la déesse-mère.

Les Celtes projetaient leurs croyances sur l’environnement terrestre, mais ils les projetaient aussi sur leur environnement cosmique. Ceci se retrouve dans le nom gaélique qu’ils avaient donné à la Voie Lactée (bóthar/bealach na Bó Finne). Il contient le nom même de la vache magique Bó Finn que l’on retrouve dans le mythe cosmogonique qui sera étudié ultérieurement et fait référence à la fois à la Boyne et à la déesse éponyme, Bóann. Ceci montre que les Celtes voyaient le monde cosmique comme un prolongement de leur monde terrestre, et inversement. Ainsi la Voie Lactée, qui est nommée « The Way of the Illuminated Cow » (« La voie de la vache illuminée »), suggère une assimilation entre le céleste et le terrestre. Elle apparaît comme le pendant de la Boyne qui elle, retrace la course de la fuite de Bóann devant les eaux déchaînées du puits de Ségais, comme vu supra. Les Celtes pensaient vraisemblablement que la Boyne coulait du ciel vers la terre. Peut-être avaient-ils conçu cette croyance de façon empirique, basée sur la contemplation de la réflexion de la Voie Lactée sur les eaux du fleuve. Le mythe rapporté par Anthony Murphy et Richard Moore dans Island of the Setting Sun, In Search of Ireland’s Ancient Astronomers, présente la Voie Lactée comme une giclée de lait laissée par la vache magique/lunaire Bó Finn. Ce récit met clairement en évidence le lien que les premiers hommes établissaient entre l’univers céleste et l’univers terrestre. Il constitue un exemple éloquent de ce que Mircea Eliade appelle un Axis Mundi, c’est-à-dire, rappelons-le, un lieu où communiquent les trois niveaux cosmiques, à savoir le monde céleste, la terre des hommes et le monde inférieur (ou « The Underworld ») qui constituent un tout indissociable.

[...]

Citons un autre récit fondateur de la mythologie pré-chrétienne irlandaise qui met en scène les vaches Bό Finn (« La vache blanche »), Bό Ruadh (« La vache rouge »), et Bό Dubh (« La vache noire ») afin d’illustrer le symbolisme fondamental de l’océan comme source de vie. En effet, toutes trois ont émergé de l’Océan Atlantique, comme mises au monde par lui. Selon ce mythe, ces trois vaches étaient pourvues d’imposantes cornes, et une fois sorties de l’eau, chacune d’entre elles se dirigea vers une partie différente de l’Irlande, laissant sur son passage une terre riche et féconde aux habitants : la rouge vers le nord, la noire vers le sud et la blanche vers le centre, où cette dernière donna naissance aux deux veaux dont tout le bétail d’Irlande est issu, assurant ainsi une source inépuisable de subsistance (qu’il s’agisse de lait, de viande ou encore d’engrais pour fertiliser les terres).

Ce mythe est particulièrement riche d’enseignements symboliques. Tout d’abord, le fait que les trois vaches surgissent de l’eau, suggère d’emblée leur appartenance à « The Underworld » (ou « The Otherworld », l’Autre Monde), terme dont la première partie, under, met l’accent sur le fait qu’elles ont émergé de l’océan (1). D’autre part, nous pouvons assimiler l’eau de la mer à l’eau de la mère, à savoir le liquide amniotique. Vu sous cet angle, toutes trois apparaissent donc comme des embryons émergeant d’eaux abyssales, qui recèlent un capital de vie. Ici encore, l’eau de la mer ou de l’océan est à la fois l’origine et le véhicule de toute vie.

Examinons à présent un autre élément de la symbolique de ce mythe, à savoir la couleur des vaches. Elle est très significative : le blanc, le rouge et le noir de leurs robes attirent l’attention sur la dimension magique de ces créatures, étant donné que dans la culture celte, ces couleurs sont généralement associées à l’Autre Monde et à la déesse-mère. En effet, le noir de la robe de Bό Dubh renvoie à la symbolique traditionnelle de la substance universelle et au chaos originel des eaux inférieures d’où naît la vie. Dans ce mythe, l’émergence de la vache noire de l’océan représente le mystère vital caché dans les profondeurs sombres des océans. Il rappelle aussi la noirceur des eaux abyssales desquelles les trois vaches émergent, en un mouvement qui évoque une naissance, autrement dit, la fin de l’obscurité qui correspond au temps de gestation. Le rouge de la robe de Bό Ruadh évoque quant à lui le sang (le sang menstruel et celui de la naissance) qui symbolise la force vitale, le jaillissement de la vie et son mystère. Enfin, le blanc de la robe de Bό Finn fait référence aux changements qu’elle va opérer sur la terre d’Irlande. La couleur blanche, celle de l’aube, correspond à un moment d’absence de toute couleur qui peut être rapproché du moment liminaire d’avant l’arrivée de la vie : le mythe explique que la lignée des veaux issue de Bό Finn assurera désormais la survie des hommes et la prospérité du pays.

L’analyse symbolique des couleurs des trois vaches permet une interprétation cohérente du mythe mais si l’on envisage les autres traductions possibles du terme finn, on peut voir dans Bó Finn l’image de la déesse-mère. En effet, finn peut également être traduit par des termes tels que « brillant » et « rayonnant » car dans la plupart des cas, comme le précise Patricia Monaghan, le terme en question fait davantage référence à la qualité de la lumière qu’à une absence de couleur. L’association des qualificatifs utilisés dans les Dindshenchas pour décrire la déesse Bóann (« White bright Boand ») nous conforte dans cette précision de terminologie, en insistant sur l’une des caractéristiques associées à la couleur blanche. Ce terme se rencontre le plus souvent dans le nom des divinités celtiques faisant donc davantage référence à leur caractéristique et à leur influence qu’à leur apparence. Envisagée de cette façon, Bó Finn ne serait pas simplement « la vache blanche » mais plutôt « la vache blafarde », ce qui fait référence à la lune, astre céleste féminin par excellence. Le terme « blafarde » nous semble le plus approprié et ce, en dépit d’une connotation a priori négative, car il tient compte de la qualité particulière de la lumière de la lune, couramment qualifiée de blafarde.

L’association du nom de la déesse-vache, de l’hydronyme (la Boyne), et de l’astre lunaire semble justifiée par le fait qu’ils portent tous une forte empreinte féminine. En effet, le cycle féminin de la menstruation, intimement lié à la procréation, semble renvoyer à celui de la lune qui, lorsqu’elle est pleine, est le symbole de la femme féconde. Par voie de conséquence, ceci confère aux eaux terrestres une dimension féminine qui renvoie à l’image et au rôle de la déesse-mère. De plus, le mythe relaté par Patricia Monaghan qui met en scène Goibhniu (divinité solaire) et sa vache Glas Ghaibhleann (figure associée à la lune) démontre le lien intime qui existe entre les deux astres, c’est-à-dire entre les deux pôles féminin et masculin. Le symbolisme de chacun des astres ne prend tout son sens que lorsqu’il est en relation avec l’autre. En effet, la lune ne brille pas de sa propre umière mais reflète simplement celle du soleil : elle est littéralement « illuminée » par ce dernier comme le montre bien la traduction anglaise « illuminated ». Ceci justifie notre choix de traduction du terme Bó Finn par « la vache blafarde ». Bien que les irlandais pré-chrétiens n’aient pas eu la connaissance scientifique susceptible d’expliquer le mouvement des planètes, l’interaction entre les différents astres et le phénomène d’ombre, de lumière, de réflextion de lumière et de l’alternance du jour et de la nuit, il leur était cependant possible de percevoir de façon empirique l’essentiel de ces phénomènes.

La complémentarité féminin/masculin est indispensable quand il s’agit de fécondité et de procréation. Les différentes phases de la lune, ainsi que le mois sidéral d’une durée d’environ vingt-huit jours, rappellent également le cycle menstruel féminin (que l’on retrouve dans le rouge de Bó Ruadh) et de ce fait, la lune et la femme symbolisent toutes deux la périodicité et la régénérescence. L’aspect cyclique se retrouve également dans la ronde des saisons et le renouvellement de la nature. Du fait de ce fonctionnement cyclique, la lune, la nature et la femme changent perpétuellement d’aspect : la lune passe par différentes phases au cours du cycle, la nature se métamorphose de saison en saison de même que la femme au cours de la grossesse. La lune est ainsi le symbole des rythmes biologiques. De plus, elle apparaît comme passive et réceptive, car elle réfléchit la lumière émanant du soleil, tout comme la femme reçoit la semence de l’homme pour que la vie apparaisse. Le réseau d’images associées au féminin découle ainsi des similitudes que les Celtes remarquaient entre la femme, la lune et la nature.

L’analyse de Bó Finn que nous venons de proposer fait ressortir le « symbolisme [qui] relie entre eux la lune, les eaux, la pluie, la fécondité des femmes, celle des animaux, la végétation [et] le destin de l’homme » qui peut également s’appliquer à Bóann (et donc à la Boyne) du fait de son étymologie. Ceci confirme les différents aspects de la déesse : celui de déesse-mère, de déesse de la Boyne et de déesse-vache, mais aussi comme une déesse lunaire. La forme des cornes de la vache et celle du croissant de lune renforce encore les similitudes (voire l’identification) entre Bó Finn et Bóann. Gaël Hily conforte ce rapprochement par les propos suivants :


En histoire des religions, il existe une homologie fréquente entre la déesse et la vache, qui se fonde sur le fait que toutes deux dispensent la vie. En tant que donneuse de lait, la vache incarne ce principe maternel qui nourrit le monde. Chez les Celtes anciens, plusieurs déesses nourricières ont justement un nom construit sur celui de la “vache”, comme la divinité irlandaise Bóinn ou Böand qui s’explique par un *bow-winda “Vache Blanche”, que nous retrouvons chez Ptolémée avec βουουινδα.

[...]

L’introduction de bovidés dans des mythes visant à expliquer l’origine de la société constitue une démarche compréhensible pour un peuple insulaire venu d’ailleurs et désireux d’expliquer et de comprendre ses origines. En faisant jaillir de l’océan les premiers bovidés qui ont donné naissance au bétail de l’île, le mythe permet de répondre à la question de l’origine de sa première implantation en Irlande de façon à la fois imprécise et exacte car le bétail est venu, tout comme le peuple, d’au-delà des mers.

De plus, si l’on se penche à nouveau sur la signification du mythe qui figure les trois vaches magiques (aspect tripliqué zoomorphe de la déesse), et que l’on met en corrélation la symbolique des couleurs des robes des trois vaches magiques et la théorie de Georges Dumézil concernant l’organisation tripartite de la société, alors on peut considérer aussi l’émergence des trois vaches comme celle, symbolique, des trois classes constitutives de la société celte. En effet, la première classe, qui a une fonction sacerdotale et qui est en rapport avec le sacré, est représentée par Bό Finn (« La vache blanche »), la deuxième, qui a une fonction guerrière et qui est liée à la défense du peuple, est représentée par Bό Ruadh (« La vache rouge »), enfin la troisième, qui a une fonction nourricière et qui se rapporte à la fécondité, est représentée par Bό Dubh (« La vache noire »). On peut avancer que leur émergence simultanée des eaux abyssales représente l’harmonie indispensable entre les trois classes de la société dont l’unité était garante de la productivité de la terre et de la prospérité du groupe, conditions sine qua non pour assurer la naissance et le maintient de la vie.

[...]

La transformation de la graine en plante représente le processus de régénérescence et on peut émettre l’hypothèse que les Celtes ont représenté par la figure de Cailleach ce qui semble avoir été la croyance des bâtisseurs : les os ou les cendres des défunts portaient vraisemblablement en eux le germe d’une vie nouvelle, à laquelle ils pouvaient accéder en réunissant symboliquement les éléments indispensables à la germination. Nous pouvons ainsi rapprocher le processus symbolique qui se déroule au sein du monument au cycle naturel représenté par la déesse, puisque tous les éléments nécessaires au renouveau y sont présents : la terre (la tombe), l’eau (le quartz), les graines (les os et/ou les cendres) ainsi que le soleil (qui peut interagir avec les autres éléments en pénétrant par les couloirs).


Note : 1) Selon les propos de Françoise LE ROUX et Christian-Joseph GUYONVARC’H, « l’Irlande a situé ou localisé [l’Autre Monde] à trois niveaux : par delà la mer, à l’ouest ; sous la mer ou au fond des lacs ; dans des collines et sous des tertres » (La civilisation celtique, p.122

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Littérature :


Dans ses Histoires naturelles (1874), Jules Renard brosse des portraits étonnants des animaux que nous connaissons bien :

La Vache


Las de chercher, on a fini par ne pas lui donner de nom. Elle s'appelle simplement " la vache " et c'est le nom qui lui va le mieux. D'ailleurs, qu'importe, pourvu qu'elle mange ! Or, l'herbe fraîche, le foin sec, les légumes, le grain et même le pain et le sel, elle a tout à discrétion, et elle mange de tout, tout le temps, deux fois, puisqu'elle rumine. Dès qu'elle m'a vu, elle accourt d'un petit pas léger, en sabots fendus, la peau bien tirée sur ses pattes comme un bas blanc, elle arrive certaine que j'apporte quelque chose qui se mange. Et l'admirant chaque fois, je ne peux que lui dire : " Tiens, mange ! " Mais de ce qu'elle absorbe elle fait du lait et non de la graisse. A heure fixe, elle offre son pis plein et carré. Elle ne retient pas le lait, - il y a des vaches qui le retiennent, généreusement, par ses quatre trayons élastiques, à peine pressés, elle vide sa fontaine. Elle ne remue ni le pied, ni la queue, mais de sa langue énorme et souple, elle s'amuse à lécher le dos de la servante. Quoiqu'elle vive seule, l'appétit l'empêche de s'ennuyer. Il est rare qu'elle beugle de regret au souvenir vague de son dernier veau. Mais elle aime les visites, accueillante avec ses cornes relevées sur le front, et ses lèvres affriandées d'où pendent un fil d'eau et un brin d'herbe. Les hommes, qui ne craignent rien, flattent son ventre débordant ; les femmes, étonnées qu'une si grosse bête soit si douce, ne se défient plus que de ses caresses et font des rêves de bonheur. Elle aime que je la gratte entre les cornes. Je recule un peu, parce qu'elle s'approche de plaisir, et la bonne grosse bête se laisse faire, jusqu'à ce que j'aie mis le pied dans sa bouse.

*

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J.M.G. Le Clézio, propose une analogie intéressante dans L'Extase matérielle (1967) :


"les siècles et les siècles qui avancent, pareils à des vaches guidées, aux cornes et aux mufles semblables."

 

"Vache"


On ne mène pas la vache À la verdure rase et sèche, À la verdure sans caresses.

L’herbe qui la reçoit Doit être douce comme un fil de soie, Un fil de soie doux comme un fil de lait.

Mère ignorée, Pour les enfants, ce n’est pas le déjeuner, Mais le lait sur l’herbe

L’herbe devant la vache, L’enfant devant le lait.

Paul Eluard, Les Animaux et leurs hommes, Les hommes et leurs animaux, 1920

*

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Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) s'interroge sur les mystères de la vache :

17 juillet

(Fontaine-la-Verte)


La vache rumine. Race Holstein... J'essaie d'imaginer par mon ventre les sensations qu'elle éprouve. Comment perçoit-elle la remontée des aliments dans sa bouche ? Goûte-t-elle deux fois la verdeur acidulée de l'herbe, ou jouit-elle d'une seconde dégustation plus sucrée, plus capiteuse ? A-t-elle une conscience interne (proprioceptive) des poches de son estomac ? Lui arrive-t-il, en avalant de travers, de faire tomber dans la caillette ce qui était promis au bonnet ?

La vache est un sphinx qui parle en se tordant la bouche. Elle détient des secrets extrêmes, qu'elle explore du bout de la langue dans les trous de son nez. Son regard idiot est une ruse de la vie. Qui devient vache accède à la Connaissance.

*

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Dans La Citrouille a besoin de vous (Anatolia Editions, 1994 pour la traduction française) P. G. Wodehouse dépeint un Lord anglais dont la tête est constamment dans les nuages :


- Milord ?

- Je me suis fait rouler. Ce fichu engin ne marche pas.

- Monsieur le comte n'y voit pas bien ?

- Je n'y vois rien du tout, parbleu ! c'est le noir complet.

Le majordome était un homme observateur.

" Peut-être que si j'ôtais le capuchon qui couvre l'extrémité de la lunette, milord, il serait possible d'obtenir de meilleurs résultats.

- Hein ? Le capuchon ? Il y a un capuchon ? C'est ma foi vrai. Enlevez-moi ça, Beach.

- Fort bien, milord.

- Ah !"

La voix de lord Emsworth dénotait à présent une vive satisfaction. Il tournicota et ajusta différentes parties de l'appareil, et la satisfaction se fit plus intense.

"Oui. Voilà qui est beaucoup mieux. Voilà qui est parfait. Beach, je vois une vache.

- Vraiment, milord ?

- Là-bas, dans la prairie qui borde le lac. C'est remarquable. On dirait qu'elle est à deux pas. Très bien, Beach. Je n'ai plus besoin de vous. [...]

Assez vite, l'attrait qu'exerçait la vache commença à faiblir. Physiquement parlant, c'était un fort beau spécimen, mais comme tant de ses congénères, elle était incapable de soutenir l'intérêt dramatique. Au bout d'un moment, lassé de la regarder ruminer, ses deux yeux vitreux perdus dans le vague, lord Emsworth décida de faire pivoter son appareil dans l'espoir de tomber sur quelque chose d'un peu plus excitant.

*

*

Dans son roman policier Sous les Vents de Neptune (Éditions Viviane Hamy, 2004), Fred Vargas modernise le concept nourricier associé à la vache :


« Adamsberg croisa Violette Retancourt au distributeur à café. Il resta en recul, attendant que le plus solide de ses lieutenants ait tiré son verre des mamelles de la machine – car, dans l'esprit du commissaire, l'appareil à boissons évoquait une vache nourricière lovée dans les bureaux de la Criminelle, comme une mère silencieuse veillant sur eux, et c'est pour cela qu'il l'aimait. Mais Retancourt s'éclipsa dès qu'elle le vit. Décidément, songea Adamsberg en disposant un gobelet sous le pis du distributeur ce jour ne lui était pas favorable. »

 

Si les vaches partaient en vacances

elles iraient voir le Mont-Blanc

et visiteraient Paris la Tour Eiffel et le Moulin-Rouge

ou peut-être diraient :

Non, nous sommes si bien

à regarder les boutons d’or.

Les vacances c’est pour les hommes.

Nous ne voulons rien que le ciel

et un coin d’herbe

pour abriter nos yeux.


Dominique CAGNARD, Une vache dans ma chambre, Møtus, 2008.

*

*

Dans L'Armée furieuse (Éditions Viviane Hamy, 2011) de Fred Vargas, le commissaire Adamsberg entraîne à sa suite en Normandie son fils Zerk, récemment découvert et organise la cavale de Mo, un petit délinquant pris au piège :


- [...] Autour, les champs sont peints avec toutes les nuances de vert, et sur ce vert, on a posé des quantités de vaches immobiles. Je n'ai pas vu une seule vache y bouger. Je me demande pourquoi.

- C'est parce qu'il faut les regarder longtemps.

- Sûrement. [...]

- C'est joli, dit Mo, qui n'avait vu la campagne qu'une seule fois dans sa vie et très rapidement, et jamais la mer. Je peux voir des arbres, le ciel et les champs. Merde, dit-il subitement, ce sont des vaches ? Là ? ajouta-t-il en se collant à la vitre.

- Recule, Mo, éloigne-toi de la fenêtre. Oui, ce sont des vaches.

- Merde.

- Tu n'en avais jamais vu ?

- Jamais en vrai.

-Tu vas avoir tout le temps de les regarder, et même de les voir se déplacer. Mais reste à un mètre en arrière des fenêtres.

*

*


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