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Les Vertamocores

Photo du rédacteur: AnneAnne

Dernière mise à jour : 1 mars




Étymologie :


Selon le Dictionnaire de la langue gauloise : une approche linguistique du vieux-celtique continental (Éditions Errance, 2001) de Xavier Delamarre :


L'ethnonyme gaulois Uertamocomi est composé avec l'adjectif uertamos « supérieur, excellent » et le nom commun corios « armée, troupe » ; il se traduit par « excellentes troupes ». Le premier terme est un superlatif en -tamo fait sur la racine *uper- « sur, dessus » La racine indo-européenne *uper(o) a une valeur majorante ou augmentative. Elle est à l'origine du latin super, du grec hupér, du sanskrit upari, du gothique ufar, du vieux-haut-allemand ubir.

 

Pierre Gastal, auteur de Nos racines celtiques, Du gaulois au français (Éditions DésIris, 2013) donne un découpage un peu différent :


Verta : valeur, prix.

  • Vertamocorii, tribu du Vercors. Voir ver-


Ver- (préfixe d'intensité) : supérieur, suprême.


Corio : armée, troupe.

  • Petrocorii (« les quatre armées »), peuple du Périgord ; Tricorii (« les trois armées »), peuplade de la vallée du Drac et Trégor, pays breton, même étymologie.


Autres noms : Vertacomacori - Vertacomicorii - Vertamocori -

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Jean-Paul Savignac, quant à lui, propose une autre explication dans son Dictionnaire Français-Gaulois (Éditions La Différence, 2014) :


Sommet, nom masculin.

  1. benda, benna => pointe. Mot déduit du nom propre Bannus, Banna... comparable au v. irl. benn, gall., corn., bret., ban(n) « sommet, pointe, corne » continué par l'occitan banno (fem.), prov. banna « corne », fr. auvent (de *ande-banno- « sous pointe », soit « avancée d'un toit »). Pointe-d'acier Duro-bannon (devenu Durban, Aude).

  2. penno- => tête (extrémité), lu dans inscription (Clermont-Ferrand L-136) : ]ron. pennon. sindi... « la tête de celui-là » (?) et donné par des gloses, pennum, expliqué acutum « pointu », et pen(n)is, expliqué caput « tête », déduit de noms propres et de noms de localités, élément des composés are-pennis (arpent) et *talo-pennos (=>pignon), comparable au v. irl. cenn « tête, sommet, extrémité », gall., corn. pen « tête », v. bret. « tête, bout, extrémité ».

  3. uertamo-, lu dans inscription (Cajarc, L-49) : redresta in uertamon nantou(s)  « qu'il monte au sommet de la vallée », formé de la préposition -uer (de *uper) et du suffixe de superlatif -tamo-. Les Troupes-du-Sommet Uertamo-cori, devenu le Vercors.

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Toponymie :


Pascal Breitenbach, auteur de « Les errements du nom "Vercors", captation néotoponymique et marketing territorial », (Géoconfluences, janvier 2024) explique l'origine du nom du massif du Vercors :


Définitions toponymique et géographique du Vercors :

Il n'est pas facile de définir le territoire Vercors, ni d'affirmer la signification de son toponyme. Quelques mots de Pline l'Ancien dans son « Histoire naturelle », vers 77, nous apprennent l'existence du peuple des Vertamocorii (avec les variantes Vertamacoris et Vertacomacoris), signifiant « les clans des pays d'en haut », qui auraient laissé leur nom à une partie de la confédération des Voconcii, entre les vallées de la Drôme et de la Bourne (Barruol, 1975). Les Voconces étaient des Gaulois installés entre l'Isère au nord et la Durance au sud (Planchon, 2011).

Aujourd'hui, une part des habitants, largement néo-rurale, se revendique « vertaco » (Baticle et Hanus, 2018). Décliné en adjectif, vertaco concurrence alors vercorien, vercusien et vertacomicorien, peu usités : « Chacun sait qu'il n'y a pas d'adjectif pour qualifier l'identité des habitants du Vercors » (Duclos, 1990).

 



Histoire :


Selon André Mailhet, auteur d'une Histoire de Die (Imprimerie Buttner-Thierry, 1897) :


La région, qui depuis, a été le Dauphiné, comprenait cinq fédérations : les Allobroges renfermés entre le Rhône, l'Isère et les Alpes et qui avaient Vienne pour capitale, les Ségovellaunes établis sur les deux rives du Rhône, les Tricastins, vers Pierrelatte et Saint-Paul-Trois-Châteaux, les Tricoriens, dont le territoire occupait la même étendue que le diocèse de Gap, et enfin les Voconces qui tenaient tout le pays compris entre Vaison, Luc et Die.

Ces derniers, qui excitent au plus haut point notre curiosité, étaient de races Ligure, à ce qu'affirment Strabon et Pline. Leur petit État portait le nom de Cité des Vocontiens et se divisait en dix-neuf districts, ayant chacun à sa tête une bourgade de quelque importance : Mons Seleucus (Bâtie-Mont-Saléon), Epotium (Opaix), Geminæ (Mens), Darentiaca (Saillans), Augusta (Aouste), Aletanum (Taulignan), etc., comptaient parmi ces dernières. Formant une sorte de république, ils nommaient chaque année le magistrat suprême de la cité, dans une assemblée générale où intervenaient les druides, les nobles et le peuple. Leurs mœurs étaient bien propres à entretenir leur robuste organisation. Habitués à tout souffrir, se baignant en hiver dans l'eau froide de leurs rivières, s'endurcissant dans un continuel exercice de la chasse, ils étaient d'une intrépidité à toute épreuve et « ne craignaient qu'une chose... que le ciel ne tombât sur leurs têtes ! » Armés de gèses ou demi-piques, qu'ils portaient avec l'épée et protégés par leur bouclier, ils marchaient à l'ennemi avec une irrésistible impétuosité ; malheureusement, ils manquaient de tactique et de discipline. Unis à leurs frères les Allobroges, ils partirent pour la conquête de la ville éternelle, et c'est eux que Virgile, le grand poète romain, décrit, montant, favorisés par la nuit, à l'assaut du Capitole : « Blonde est leur chevelure, leur vêtement est couleur d'or ; on voit briller leurs sayes rayées : autour de leur cou est un collier d'or. D'une main, ils brandissent deux gèses des Alpes, de l'autre, ils protègent leur corps d'un long bouclier. »

Leur humeur belliqueuse les entraîna bientôt à la suite de Bellovèse (590 av. J.-C. ), allant fonder des colonies dans de lointaines contrées. Plus tard, les Vertacomacori, habitant le Vercors, franchirent les Alpes et bâtirent la ville de Novare dans la haute Italie. Lorsqu'Annibal, à la tête de 50,000 fantassins, 9,000 cavaliers et ses fameux éléphants, traversa nos contrées, en portant la guerre à Rome même, nos populations le reçurent avec beaucoup de défiance.

 

Paul Quentel, dans un article intitulé "Le nom celtique du canton en Gaule et en Grande-Bretagne." (In : Revue Internationale d'Onomastique, 25e année N°3, juillet 1973. pp. 197-223) confirme la fondation de Novare :


Par Pline (III, 24) nous savons que Novare, en Italie septentrionale, a été fondée par les Vertamocorii, c'est-à-dire les hommes du Vercors. Les fouilles des cimetières de la région ont confirmé cette origine, et, sur le plan toponymique, on peut relever divers noms celtiques comme Tornaco qui est le même nom que Tournai. Or, à Novare, en 1154, P. Aeibisoher relève une inscription « Octavia Pecia lacet in Cantonalo », où Cantonalo est manifestement un dérivé gaulois en -al de canton.

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Christian Peyre, auteur de "Documents sur l'organisation publique de l'espace dans la cité gauloise. Le site de Villeneuve-Saint-Germain et la bilingue de Verceil." (In : Rites et espaces en pays celte et méditerranéen étude comparée à partir du sanctuaire d'Acy-Romance (Ardennes, France), Rome : École Française de Rome, 2000. pp. 155-206. (Publications de l'École française de Rome, 276) nous renseigne sur le statut des Vertamocori après la conquête romaine :


Il s’agit de l’inscription gauloise découverte en 1859 à S. Bernardino di Briona (dite simplement inscription de Briona), un hameau situé à une dizaine de kilomètres au Nord-ouest de Novare.

[...]

[...]

Dans l’énumération des trois frères fils de Danotalos, l’attention se fixe tout particulièrement sur celui qui est nommé en premier, celui qui porte, sous une forme gallicisée, un prénom latin, Quintus, auquel s’ajoute le titre d’une fonction très honorifique dont il s’est acquitté, celle de Legatus, légat, c’est-à-dire ambassadeur à Rome de sa peuplade pour présenter au sénat une plainte ou une requête, ou bien pour négocier quelque accord de nature commerciale, fiscale, diplomatique, militaire etc. : le sénat recevait périodiquement de ces envoyés venus des quatre coins du monde italique ou des provinces, parfois aussi dépêchés comme parlementaires par des nations encore ennemies. C’étaient chez eux de grands personnages et, si leur mission réussissait, elle attachait à leur nom un prestige tout particulier, encore accru dans certains cas par le droit de cité latine ou romaine qui pouvait leur être individuellement conféré. Ces ambassadeurs devaient être déjà latinisés : il fallait parler latin, et avec une certaine éloquence, pour soutenir devant la Curie romaine la revendication qu’on souhaitait faire aboutir. Tel devait être le cas de Quintus le Légat dans sa peuplade, apparemment celle des Vertamocori (1), dont le chef-lieu était Novare et qui sans doute, comme les Insubres de Milan ou les Cénomans de Brescia, et d’autres peuplades gauloises, ligures ou vénètes de Transpadane, avaient un traité d’alliance avec Rome (2) : la mission de Quintus doit sans doute être replacée dans le cadre de ce traité, et l’abandon de l’onomastique gauloise pour un prénom latin pourrait indiquer que le personnage se soit vu attribuer la citoyenneté romaine (3). S’il en est bien ainsi, nous pourrions avoir là un indice intéressant pour dater l’inscription, qui demeure sans contexte archéologique. Mais la question est difficile à trancher.

Dans le Pro Balbo, en effet, Cicéron remarque qu’une clause spécifique du traité d’alliance passé avec les Cénomans et les Insubres interdisait de leur conférer, même individuellement, le droit de cité romaine, et ce encore à la date du discours (vraisemblablement 55 av. J.-C.). Qu’en était-il pour les Vertamocori ? étaient-ce des clients des Insubres et dans ce cas étaient-ils englobés dans la même clause d’exception? Bénéficiaient-ils d’un traité distinct, sans cette clause où persistait l’antique crainte romaine devant les Gaulois, ou du moins leurs peuples les plus puissants de la plaine du Pô? Il est impossible d’en décider, mais du moins, cette clause était-elle encore valable en 55, puisque le 9 décembre 89, la lex Pompeia avait accordé le droit de cité latine à tous les alliés de la Cisalpine restés fidèles à Rome pendant la Guerre Sociale ? Les peuplades ou les tribus anciennes reçurent le statut de colonie latine, aux termes duquel ceux qui y exerceraient une magistrature recevraient ipso facto le droit de cité romaine. Un tel statut fournit un cadre historique et juridique propre à expliquer le cas si particulier de Quintus Legatus. Il pourrait de même restituer un contexte à l’inscription verticale à gauche des cercles superposés.

Elle se lit aisément, malgré des maladresses de graphie : c’est takos toutas, la suite, comme on l’a dit, demeurant indéchiffrable. Toutas est un génitif et le mot touta n’est pas attesté seulement en gaulois : on le trouve en vénète (avec le vocalisme – e- : teuta) en ombrien (tuta), en osque (touto) et, dès le Ve siècle avant notre ère, il a même été emprunté par l’étrusque. Il signifie la tribu (le dieu gaulois Teutates est au propre « le tribal ») et plus génériquement la cité ou l’état, dans leur forme ethnique d’origine, peuplade ou tribu. Quant à takos, les rapprochements qu’il autorise avec le grec antique (où la racine *tag a donné naissance à une large série nominale et verbale de formations signifiant « commandement », ou « décider »), il est employé ici, sans doute possible, avec le sens de « décision » ou « ordre », toutas « de la tribu » ou « de la cité, de l’état ». L’édification du monument, funéraire si c’en est bien un, mais la discussion reste ouverte sur ce point, a été une décision publique et les cinq personnages énumérés ont été officiellement commis à son exécution. Rien en cela qui puisse choquer dans le cadre juridique d’une colonie de droit latin, qui est une sorte de petit état, avec sa curie locale, son assemblée du peuple, ses élections et ses magistrats. On doit être alors tout près de l’année 89, puisque, parmi les fils de Danotalos, seul Quintus le Légat est romanisé. Si inversement il se trouvait que l’inscription soit antérieure à 89 av. J.-C., il faudrait supposer que la fraction de tribu gauloise de S. Bernardino di Briona, ou la tribu des Vertamocori elle-même, avait pris une décision publique pour l’édification du monument. En ce qui concerne Quintus le Légat, qui semble avoir reçu la citoyenneté romaine, il serait à penser ou bien que son cas fournit la preuve que les Vertamocori n’étaient pas concernés par la clause restrictive frappant les Insubres et les Cénomans, ou bien qu’il constituait une exception dans l’application de celle-ci, ce qu’il est toujours possible d’envisager.

Quelle que soit la chronologie retenue, les quatre cercles superposés ont été incisés, entre la mention de la décision publique et l’énumération des magistrats ou des notables locaux chargés de l’appliquer, comme s’ils figuraient la continuité symbolique du lien qui unit l’ordre officiel et son exécution42. Dans cette perspective, on peut les considérer comme emblématiques de la touta, ainsi que l’hypothèse en a déjà été avancée. Et, si ce n’est la différence de taille entre eux et les rouelles de Villeneuve-Saint-Germain, qui résulte en fait des dimensions monumentales de l’inscription de Briona, la nature du symbole est la même : c’est celui de la peuplade ou de la tribu, celui d’une société formant état, telle qu’elle se manifeste soit par une opération de vote, soit dans la pérennisation monumentale d’une décision publique proclamée par une inscription lapidaire. On notera que le formulaire gaulois takos toutas, linguistiquement tout autre que celui des rouelles des Héliastes athéniens, lui est sémantiquement identique : ordre de la tribu ici, décision du peuple là. Identité aussi avec le formulaire légal qui devait accompagner les lois votées par les comices romains («le peuple a décidé»), que complétait toutefois une référence au juridisme traditionnel des institutions romaines : « conformément au droit ».


Note : 1) Les Vertamocori étaient un ancien pagus des Voconces : le territoire qu’ils avaient occupé a laissé son nom au Vercors (Heurgon 1974a, p. 242). On les croyait parfois ligures : Pline l’Ancien corrige Caton le Censeur à ce sujet (N.H., III, 124). Sur les territoires occupés par les Gaulois en Transpadane, voir Peyre 1979, p. 26-32, ainsi que Piana 1988.

2) Ce traité d’alliance résultait de la soumission de la Cisalpine, après la fin de la deuxième guerre punique.

3) Dans l’épigraphie latine impériale, ou dans les inscriptions républicaines officielles, l’octroi de la citoyenneté romaine à un indigène entraînait, dans son onomastique, l’adoption des tria nomina. Il semble que l’inscription de Briona, fortement marquée de ses traditions linguistiques tribales, soit restée comme à mi-chemin de cet usage en ne recourant qu’à la mention du prénom romain et à celle de la fonction qu’avait exercée le personnage.

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Dans "Les Celtes d’Italie" (M. SZABÓ (éd.) : Les Civilisés et les Barbares du Ve au IIe siècle avant J.-C. Collection Bibracte, 2006, vol. 12, no 3, pp. 77-96) Thierry Lejars nous en apprend un peu plus sur les habitants du Vercors :


L’importance de cet armement auprès des élites celtiques de Cisalpine trouve une ultime et tardive confirmation, à l’époque de la romanisation, au iie s. av. J.-C. En contestant l’ordre du préteur M.Furius Crassipedes qui, en 187, ordonna la confiscation de leurs armes, les Cénomans obtinrent gain de cause auprès du Sénat romain (Tite Live XXXIX, 3, 1-3, Diodore XXIX, 14). La restitution des armes, symboles de leurs privilèges aristocratiques et de leur statut d’hommes libres, souligne l’autonomie laissée à ces alliés de toujours et témoigne, à travers cette anecdote, de leur désir d’afficher leur “celticité” (Lejars à paraître b). De fait, les Cénomans comme les Insubres ou les Vertamocori se signalent à partir de ce moment par le dépôt systématique d’armes dans les tombes et nous donnent la preuve archéologique de leur attachement à l’armement celtique au temps même de la romanisation (Salzani 1996 ; Spagnolo Garzoli 1999). L’usage de l’alphabet lépontique et de noms celtiques indique qu’il s’agit bien de Celtes. Il est clair, qu’en ce domaine, ils n’en continuèrent pas moins à entretenir des liens forts avec leurs “parents” nord-alpins.

 

Stéphane Bourdin, auteur de "Problèmes d'identités ethniques en Cisapline : sociétés multi-ethniques ou identités multiples ?" (In : Les Celtes et le Nord de l'Italie (Premier et Second Âges du fer). Actes du XXXVIe colloque international de l'A.F.E.A.F. (Vérone, 17-20 mai 2012), pp. 63-74 (36e supplément à la R.A.E.) explique la complexité des frontières ethniques :


E.A. Arslan a par exemple bien rappelé que les sources littéraires ne nous donnent qu’un aperçu extrêmement réducteur du peuplement de la Cisalpine (Arslan, 2007). Il suffit en effet de regarder le foisonnement d’ethnonymes que l’on rencontre dans l’inscription du Trophée des Alpes de La Turbie, pour bien comprendre que nous ne trouvons dans nos sources qu’une infime partie des ethnonymes qui étaient présents dans l’espace padan. En outre, ces populations sont probablement liées entre elles par des relations de dépendance, et on a ainsi supposé que sous l’étiquette globale « Insubres », par exemple, il fallait aussi compter des populations « mineures », comme les Vertamocores, les Oromobiens, les Comenses, etc. et tout un ensemble de populations dont nous ne connaissons pas le nom (Spagnolo Garzoli, 2009).

Cette intrication, cet emmêlement, pour reprendre une expression mise en avant dans un récent article par P. Boissinot (Boissinot, 2005) et reprise à propos de la documentation linguistique par M. Bats (Bats, 2011), est donc évidente à la lecture des sources littéraires. Les autres ensembles documentaires nous permettent de constater encore une fois ces interactions très fortes, qui laissent supposer que sous les étiquettes (les ethnonymes) la situation culturelle des populations était infiniment plus variée qu’il n’y paraît.

[...]

Nous constatons globalement que la langue celtique est manifestée à l’écrit principalement sur le territoire des Insubres et des Cénomans et qu’elle ne se superpose pas parfaitement à la carte de distribution d’artefacts considérés comme « celtiques », comme les épées laténiennes (Dore, 1995). Dans ce territoire, c’est surtout aux IIIe -Ier s. que l’écriture gauloise se manifeste ; P. Solinas a proposé d’y voir une revendication identitaire, au moins au niveau linguistique, qui s’accentuerait en réaction à la présence romaine au sud du Pô, marquée par l’expulsion des Boïens et la déduction des colonies de Cremona, Parma, Bononia, etc. (Solinas, 2002). Le même type d’argument a été utilisé pour expliquer la naissance, à la même époque, et donc dans un contexte marqué par la conflictualité grandissante avec Rome et Marseille, de l’écriture gallo-grecque, en Gaule méridionale (Bats, 2011).

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