Étymologie :
SISYMBRE, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1555 (Guillaume du Choul, Discours sur la castrametation, fo 12 ro). Empr. au lat. sisymbrium « id. », du gr. σ ι σ υ ́ μ β ρ ι ο ν « id. », v. aussi André Bot. Cf. les formes sav. sisymbrion « id. » 1545 (Guill. Guéroult, Hist. des plantes, chap. 279 ds Delb. Notes mss) et sisymbrium « id. » 1549 (Du Moulin, Quinte Essence, p. 53 ds Hug.) − 1771 Trév.
VÉLAR, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1549 (E. Maignan, Commentaires très excellens de l'hystoire des plantes, de L. Fousch, chap. XCVI : Du Velar ou de la tortelle) ; 1550 (G. Guéroult, trad. de L. Fuchs, L'Hist. des plantes, chap. XCVI, p. 181 : Du Velar ou Tortelle). Du lat. vela « vélar, ensemble de plantes du genre Sisymbrium L. (André Bot., s.v. irio) », mentionné par Pline Hist. nat., 22, 158, comme mot gaul. : Irionem [...] Galli velam appellant (Forc.; v. également Dottin, p. 296 ; FEW t. 14, p. 216).
Autres noms : Sisymbrium alliaria, Scop. - Herbe aux aulx - Julienne - Sisymbre alliaire - Velar alliaire -
Sisymbrium officinale (AC, AR). - Barbarée - Erysimum Vélar - Herbe au chantre è Herbe aux chantres - Julienne jaune - Moutarde des haies - Sinapi - Sisymbre officinal - Vélar - Vélar officinal - Tortelle - Tortille - Expectorant.
Sisymbrium sophia. - Descurainie sagesse - Herbe de Sainte-Sophie - Sagesse - Sagesse des chirurgiens - Science des chirurgiens - Sisymbre des chirrugiens - Sisymbre Sagesse - Sophie - Thalictron des boutiques - Astringent.
Selon Jean-Louis Moret, auteur de l'article intitulé "Etymologie onomastique ou les noms de genres de la flore suisse dédiés à des personnes. Complément." (in : Bulletin du Cercle vaudois de botanique n°39 : pp. 103-108, 2010) :
D’autres noms de genres sont parfois réputés provenir de noms de personnes. Je ne les ai pas retenus comme tels : [...]
– Sisymbrium. Selon Varron, la plante serait dédiée à une nommée Sisymbre, ancienne actrice grecque (Gentil 1923). Selon Le Maout et Decaisne (1855) cependant, le nom vient du gr. σισύμβριον, nom grec d’une espèce de cresson.
*
*
Botanique :
*
Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques du Sisymbre alliaire :
Propriétés Physiques et Chimiques. -La racine de cette plante est longue, blanche, menue et pourvue de l'odeur d'ail qui se fait sentir dans toute la plante, plus fortement quand on la brise entre les doigts. L'odeur et la saveur d'ail se perdent par la dessication. Wertheim a retiré de l'alliaire une huile volatile identique avec celle de moutarde.
Usages Médicaux. Toute cette plante est diurétique et antiscorbutique. Quand on la mange elle communique son odeur à l'haleine. On dit l'herbe et les semences diaphorétiques et expectorantes ; on les a administrées dans l'asthme humoral, les catarrhes chroniques et autres affections où l'usage de l'ail a été préconisé. Les graines ont une saveur âcre analogue à celle de la moutarde ; Dubois les a réduites en poudre et leur a vu produire des effets rubéfiants. Le suc en usage externe est un bon modificateur des plaies ; il a été employé par plusieurs auteurs sur les ulcères sordides et gangréneux (Camérarius, Pauli , Boerhaave, Ray, Cazin).
Sisymbre des chirurgiens : Usages Médicaux. Cette plante était autrefois officinale. Elle a une odeur piquante surtout quand elle est contuse ; sa saveur est aussi âcre et piquante. L'herbe a été employée extérieurement sur les ulcères indolents et les semences à l'intérieur contre les vers et les maladies calculeuses.
Sisymbre officinal : Propriétés Physiques. Cette plante est inodore ; elle a une saveur herbacée, un peu âcre qui existe surtout dans les sommités ; cette saveur rappelle celle de la moutarde, mais à un degré plus faible. Les semences sont très piquantes.
Usages Médicaux. Cette plante a joui autrefois d'une grande réputation pour la guérison des affections de poitrine et aussi comme antiscorbutique ; elle est stimulante et expectorante ; son nom d'herbe aux chantres rappelle les vertus qu'on lui a reconnues contre l'enrouement ; elle a été prescrite avec avantage dans les toux chroniques, les ulcérations de la muqueuse buccale et pharyngienne. Les feuilles en infusion théiforme ont aussi donné de bons résultats dans le catarrhe pulmonaire ; pilées et appliquées sur la peau elles la rubéfient et produisent l'effet d'un vésicatoire (Haller). Les semences sont rubéfiantes comme celles de moutarde.
Formes et doses. - Infusion de l'herbe : 30 à à 60 grammes par kilogramme d'eau. Suc : 15 à 30 grammes - Sirop simple : 15 à 50 grammes. Sirop composé contre l'enrouement : 15 à 30 grammes. Poudre des semences : 1 à 4 grammes.
Pline dans son Histoire naturelle (Tome second, Livre XXVII, Traduction française : É. LITTRÉ, disponible sur le site de Philippe Remacle) consacre un paragraphe au sisymbre :
XCI. [1] Le sisymbrium sauvage (menta hirsuta, DC.), appelé par quelques-uns thymbrée, n'a pas plus d'un pied de haut. Celui qui vient dans les lieux humides (sisymbrion nasturtium, L.) est semblable au cresson. Ces deux espèces sont efficaces contre les animaux à aiguillon, tels que les frelons et les insectes semblables. Celui qui tient dans les lieux secs est odorant, et entre dans la composition des couronnes ; la feuille est plus étroite. Tous deux guérissent le mal de tête, et, d'après Philinus, l'épiphora des yeux. D'autres ajoutent du pain ; d'autres le font bouillir seul dans du vin. Il guérit les épinyctides ; il guérit les taches de la peau de la figure, chez les femmes, en quatre jours ; on l'applique pendant la nuit, et on l'ôte pendant la journée. II arrête les vomissements, les hoquets, les tranchées, les dissolutions de l'estomac, soit qu'on le prenne en aliment, soit qu'on en boive le suc. Les femmes grosses ne doivent pas en manger, à moins que le fœtus ne soit mort ; car l'application seule de cette plante suffit pour provoquer l'avortement. Pris avec du vin, il est diurétique ; le sisymbrium sauvage expulse même les calculs. En application sur la tête avec du vinaigre, il empêche de dormir ceux qui ont besoin de veiller.
*
*
François-Joseph Cazin, dans son Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes (3ème édition revue et corrigée, Paris, P. Asselin Libraire, 1868) partage son expérience des plantes :
PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.
A L'INTÉRIEUR. A L'EXTÉRIEUR.
— Infusion, de 30 à 60 gr. par kilogramme d'eau bouillante. — Décoction, suc, poudre, etc.
Suc, de 15 à 30 gr.
Sirop simple de vélar (1 sur 12 d'eau bouillante et 2 1/2 de sucre), de 30 à 100 gr., en potion ou seul.
Sirop d'érysimum du Codex (ou composé), mêmes doses.
Conserve (1 sur 2 de sucre), de 15 à 30 gr.
Poudre, de 2 à 4 gr., en électuaire, bols, pilules, etc.
Les feuilles de vélar sont stimulantes et expectorantes. Elles agissent sur nos organes à peu près comme celles de l'alliaire, sa congénère. On les a employées avec avantage dans le catarrhe pulmonaire chronique, et surtout dans l'enrouement et l'aphonie résultant d'un exercice forcé des organes respiratoires. Rondelet, qui, dit-on, les a employées le premier, s'en est bien trouvé chez plusieurs chantres qui avaient presque entièrement la voix éteinte. Lobel faisait le plus grand éloge du sirop d'érysimum contre l'enrouement. Vicat préconise aussi le sirop simple de cette plante. Il dit avoir guéri par son usage un enrouement qui était survenu chez un prédicateur, et contre lequel on avait inutilement employé une foule de remèdes.
Dans ses lettres à Boileau, Racine s'exprime ainsi sur cette plante : « Le sirop d'érysimum, dit-il, n'est point assurément une vision. M. Dodart, à qui j'en parlai il y a trois jours, me dit et m'assura en conscience que M. Morin, qui m'a parlé de ce remède, est sans doute le plus habile médecin qui soit dans Paris et le moins charlatan. Ce médecin m'a assuré que si les eaux de Bourbonne ne vous guérissent pas (de votre extinction de voix), il vous guérirait infailliblement. Il m'a cité l'exemple d'un chantre de Notre-Dame, à qui un rhume avait fait perdre entièrement la voix depuis six mois, et il était prêt à se retirer. Ce médecin l'entreprit, et avec une tisane d’une herbe qu'on appelle, je crois, erysimum, il le tira d'affaire en telle sorte, que non seulement il parle, mais il chante, et a la voix aussi forte qu'il l'ait jamais eue. J'ai conté la chose aux médecins de la cour ; ils avouent que cette plante d'érysimum est très bonne pour la poitrine. »
Le sirop d'érysimum, où il entre d'autres plantes, mais dont le principal ingrédient est le vélar, était encore très employé dans le siècle dernier. On l'a abandonné dans la médecine urbaine, comme tant d'autres préparations utiles, pour le remplacer par de moins efficaces et d'un prix beaucoup plus élevé. Ne vaudrait-il pas beaucoup mieux, en effet, lui rendre sa place dans nos officines que d'y perpétuer les dépôts coûteux des sirops de Lamouroux, de Flon, de nafé d'Arabie, des pâtes de Regnault, et de tant d'autres productions accréditées par les annonces de l'industrialisme, que la crédulité accueille toujours avec empressement, et dont on fait ensuite usage autant par habitude que par conviction ?
J'ai souvent employé, à la campagne, l'infusion miellée et surtout le suc de vélar dans les affections catarrhales pulmonaires chroniques, et je m'en suis toujours très bien trouvé. Je mêlais le suc comme celui de cresson, avec le lait ou le petit-lait.
La semence de vélar est rubéfiante à la manière de celle de la moutarde, mais avec moins d'activité que cette dernière. Elle est antiscorbutique. Décoctée dans l'eau et le vin, elle peut être employée en gargarisme dans les stomacaces, l'amygdalite chronique, etc.
Les anciens employaient un onguent d'érysimum contre les tumeurs squirrheuses et les cancers. Ils pilaient la plante dans un mortier de plomb avec du miel, en consistance de pommade. Un peu d'oxyde de plomb, se mêlant à l’onguent, lui donnait une couleur grise. Ce remède, que je n'ai jamais employé, peut être utile contre certains ulcères sordides, et, comme résolutif, dans les engorgements lymphatiques et scrofuleux. Pour l'usage externe, je préfère l'alliaire, dont j'ai retiré de grands avantages.
*
*
Usages traditionnels :
Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
Les botanistes et les alpinistes qui ne se font pas accompagnés de porteurs chargés de mets variés, et se contentent de pain et de viande froide, sont heureux de l'assaisonner sur la montagne avec des feuilles des crucifères ayant le goût du cresson. « Pour mon compte, à la montagne, m'écrit M. Christ, quand je dîne sur le pouce avec un morceau de rôti sec, je cherche toujours une salade au ruisseau voisin, et je vous assure que Hutchinsia alpina [Hutchinsie des Alpes ; Cresson de chamois] et Cardamine amara font une salade exquise à une altitude où le cresson ne se trouve plus. » Aux plantes citées par mon aimable correspondant, j'ajouterai pour en avoir souvent goûté dans mes ascensions, le Sisymbrium austriacum dans les régions subalpine et alpine, et les Cardamine resedifolia et alpina, Arabis coeruloea, Braya pinnatifida et même Brassica richerii dans la région alpine.
[...]
Les plaies anciennes ne tendant pas à cicatrisation sont lavées avec de la tisane d'absinthe et pansées avec la poudre de feuilles sèches de Sisymbrium sophia, Hugueninia tanacetifolia, Juniperus sabina.
*
*
Comments