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Le Salsifis




Étymologie :

Étymol. et Hist. Fin xvie s. salsefie (Instruction de J. Lirondes et Fr. Torquat d'apr. Dr Puech ds Mém. de l'Ac. de Nîmes, 7e série, t. 5, 1882, p. 337, note); 1600 Sercifi (O. de Serres, Théâtre d'agric., p. 531) ; 1611 Sassefy (Cotgr.) ; 1651 salsifix ([N. de Bonnefons], Le Jardinier François, p. 170 : salsifix communs; salsifix d'Espagne, que l'on nomme scorsonere). Empr. à l'ital. sassefrica « salsifis » (dep. le xive s. d'apr. DEI), aussi salsefrica (au xvie s. ; forme due à l'infl. de salsa « sauce », FEW, ou de salso « salé », DEI), du lat. tardif saxifrica, var. du lat. saxifraga « saxifrage » ; cependant le passage du sens « saxifrage » plante de rocaille, à celui de « salsifis » s'explique mal (cf. lat. médiév. saxifraga media « salsifis des prés » au xve s. dans un herbier de Würzburg ; erba salsifica au xives . dans un herbier de Pavie, prob. d'orig. tosc.). Le r de la forme supra 1600, également présent dans de nombreuses formes dial., fait difficulté. Voir FEW t. 21, p. 128.


Lire également la définition du nom salsifis pour amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Tragopogon ;

Trapoogon pratensis ; Barbe-de-bouc ; Barbe-de-bouc des prés ; Barbouzet ; Salsifis des prés ; Salsifis sauvage ;

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Botanique :


Jean-Marie Pelt, auteur de Des légumes (Librairie Arthème Fayard, 1993) nous en apprend davantage sur les ressemblances et différences entre la scorsonère et le salsifis :


Une cuisinière se disqualifia un jour pour avoir soutenu que, entre la scorsonère et le salsifis, c'était bonnet blanc et blanc bonnet. Sans doute avait-elle omis d'observer que les racines pivotantes de la scorsonère sont noires, tandis que celles du salsifis sont blanc crème, un peu de style vieil ivoire.

Mais notre cordon-bleu n'avait pu, sur les échantillons de racines offerts au marché, observer les feuilles ovales et légèrement ondulées et les fleurs jaunes de la scorsonère, si différentes des feuilles étroites, lisses et pointues, et des fleurs d'un beau violet pourpre du salsifis. l'erreur, vénielle, était somme toute excusable.

Le salsifis fut signalé pour la première fois en France par le célèbre agronome de la Renaissance Olivier de Serres, celui-là même qui laissa son nom à la culture du ver à soie. Il le qualifiait de sersifi, nom emprunté aux Italiens qui, par allusion à son habitat pierreux, l'appelaient sassefrica (qui frotte les pierres). Le salsifis était à cette époque de consommation courante en Italie, mais la scorsonère originaire d'Espagne ne tarda pas à l'éclipser. Scorsonère signifie « vipère noire », car sa racine était considérée comme l'antidote le plus efficace contre la morsure de l'escorsu, serpent commun en Catalogne, encore plus venimeux que la vipère. Il suffisait, disait-on, de l'asperger du suc de la plante pour le plonger dans une profonde torpeur, puis de lui en introduire dans la gueule pour le faire mourir. Aux dires de Mathiole, rapportés par Leclerc, les vertus de la scorsonère auraient été révélées aux Espagnols par un esclave venu d'Afrique, - « car, comme il voyoit plusieurs moissonneurs parmy les champs mordus des vipères en extrême danger de leur vie, se souvenant de l'herbe qu'il avoit veue en Afrique, ensemble du remède, l'ayant trouvée, il leur donnoit en breuvage le jus de la racine de cette herbe et les guérissoit tous, ne voulant enseigner cette recepte à personne de peur de perdre telle practique ».

Une telle pratique prend à défaut la « théorie des signatures » qui eût voulu que la racine de scorsonère revêtît la forme d'un serpent ondulant et onduleux ; or, il n'en est rien, et l'on verra ici une exception qui confirme la règle. De fait, cette racine avait la réputation d'une véritable panacée, ce qui n'empêcha pas son succès dans les cuisines. La Quintinie, jardinier de Louis XIV, la signale comme : « l'une de nos principales racines, admirable cuite, soit pour le plaisir du goût, soit pour la beauté du corps ».

Scorsonère et salsifis sont des légumes d'hiver qui, semées au printemps, se récoltent à partir d'octobre. Leur teneur en glucides est de 12% pour le salsifis, de 20% pour le scorsonère qui, pour cette raison, est généralement préféré.









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Usages traditionnels :


Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


Quelques racines pivotantes, certains rhizomes étaient extraits autrefois par eux [les anciens], la première ou la deuxième année de l'existence de la plante avant la fleuraison : le salsifis, Tragopogon pratensis et major. [...] Leur âcreté plus ou moins forte suivant les localités diminue ou disparaît par la cuisson.

[...]

Villars rapporte qu'en Dauphiné la racine du salsifis ou barbe-de-bouc, Tragopogon, [...] était desséchée et moulue pour être mélangée à la farine d'orge et servir à faire le pain. En Savoie, cette tradition s'est perdue.

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Symbolisme :


Emma Faucon, autrice d'un ouvrage intitulé Le langage des fleurs. (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) rapporte les équivalences de l'Horloge de Flore :


Il est des fleurs qui s'ouvrent invariablement à la même heure ; les horticulteurs profitent de cette horloge naturelle pour régler leur temps, et les amoureux emploient ce moyen pour indiquer le moment où ils passeront sous les fenêtres de celle à qui ils offrent leurs vœux.


Deux heures du matin = Le salsifis jaune.

 

Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :


Autrefois, les enfants qui mangeaient des racines crues de salsifis étaient prédisposés à avoir des poux.

Les salsifis ne doivent pas être semés par un homme barbu car 'ils deviendraient branchus", dit-on en Vendée.

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Symbolisme alimentaire :

Pour Christiane Beerlandt, auteure de La Symbolique des aliments, la corne d'abondance (Éditions Beerlandt Publications, 2005, 2014), nos choix alimentaires reflètent notre état psychique :


Les Salsifis sont doux, pacifiques et un rien rêveurs. Ils ne s'attachent à rien. Tolérants et bienfaisants, ils ont un cœur maternel compréhensif. Ils incitent l'être humain à avoir confiance et à ne rien vouloir forcer. Ils se tournent vers le Supérieur, vers ce qui est élevé. Ils ne veulent rien posséder ; pleins de patience, ils savent attendre.

Le Salsifis est l'exemple même de l'attitude qui consiste à "ne rien vouloir s'approprier, ne rien vouloir avoir, ne rien convoiter". Une pure ouverture où l'on ne se cramponne à rien. Il émane de la sphère psychique du Salsifis une sorte de sagesse. Il "sait" mais il ne parle qu'au moment opportun. Il sait se taire... ; il sait lâcher prise vis-à-vis de tout et de tous, permettre à chacun d'être soi-même. Il ne critique pas les autres mais comprend le cours général des choses dans le monde ; il sait que chacun a sa nature et doit parcourir le chemin de son évolution. Plein de compréhension, il suit son propre chemin en étant seulement content et reconnaissant qu'il lui soit permis d'être qui il est. On le dirait plutôt vierge et détaché des choses terrestres, pur de cœur, pur dans ses intentions, pur dans sa conduite.

"Oublie donc tout cela, ne ta bats pas, lâche prise..." dit le Salsifis à celui qui se mord les lèvres d'amertume ou de colère parce que l'autre lui a "fait du mal". Il cherche à adoucir un cœur irrité, indigné, acariâtre, amer. "toutes tes circonstances, tu te les es toi-même attirées ; n'en fais pas le reproche aux autres... Ne t'empoisonne pas avec ces émotions ténébreuses. Essaie de comprendre pourquoi tu t'es créé e telles situations, tire tes conclusions, ne t'empoisonne pas par la colère, la rancœur ou la haine : prends cela comme une leçon et laisse tomber tout le reste ! La PAIX, l'AMOUR et le COMPRÉHENSION ! Comprends pourquoi TU t'attires ce genre de choses..."

C'est dans cette compréhension... et en menant sa vie à partir d'une attitude pacifique... que l'être humain ferme la porte sur ce qui s'est passé et qu'il poursuivra son chemin... Il n'a même pas besoin de "pardonner", pourvu qu'il fasse ce que lui dit le Salsifis : "Comprends le "pourquoi" des choses, sache pourquoi tu les as attirées à toi..., sois reconnaissant des leçons que tu peux en tirer et lâche prise vis-à-vis des autres... Ne regarde plus en arrière. pars à la recherche de ce profond sentiment de paix intérieure et ton Cœur s'en trouvera bien. L'adoucissement et le lâcher-prise vis-à-vis des autres signifient un soulagement pour le Cœur, pour l'être humain entier, du reste. La colère et la rancœur rendent l'être humain malade."

Le Salsifis rappelle la Blanche Colombe de la Paix. Il aplanit les choses... et apaise les esprits excités. Il demande de l'intelligence et de la compréhension, une attitude aimante et pacifique envers la Vie. C'est seulement à partir de cette attitude que l'être humain PEUT vivre en paix... et qu'il n'aura pas à combattre sur son Chemin.

Le Salsifis a raison de dire que, si chacun vivait dans la gratitude et dans une paix totale avec lui-même, il ne connaîtrait plus de disputes, et qu'il n'y aurait plus de guerres. Celui qui a envie de Salsifis fera bien d'amplifier en lui ce Sentiment de Paix ; il devra examiner et résoudre tout instinct belliqueux, toute colère s'il ne veut pas empoisonner tout son être. La sphère du Salsifis l'incite à faire preuve d'Intelligence et de Sagesse, à démolir le petit ego superficiel au comportement avide ; sa voix désintoxique ; il dit en premier lieu à l'être humain de vivre en paix avec lui-même. pour ce faire, il est nécessaire que l'être humain s'aime lui-même, qu'il annihile toute haine intérieure, qu'il ne crache pas le fiel de sa colère, qu'il vive en être humain satisfait sans toujours convoiter des choses qu'il ne "possède" pas encore. dans la gratitude et la confiance, il apprendra à lâcher prise. Se croit-il victime d'un préjudice ? Cela ne peut venir que du fait qu'il se porte préjudice à lui-même... Se sentir en colère et mécontent ? La cause en est toujours dans l'être humain lui-même ! Le Salsifis l'exhorte à regarder tout ce qui existe EFFECTIVEMENT, tout ce qu'il possède, tout ce qu'il EST effectivement... pour en éprouver de la gratitude. Il l'incite à regarder la V-I-E même.

"Libère-toi de toutes tes attentes illusoires, de tes désirs sans fin, et vis dans le moment PRÉSENT, en PAIX avec toi-même ! Ne sois pas dur, irrité, âprement agressif.. N'attends rien des autres... détache-toi de tout ce que tu possèdes : tu n'as besoin que de TOI-MÊME pour être heureux. N'envie pas, ne te bats pas, ne sois pas en colère ou vindicatif (cela indiquerait seulement que tu as des difficultés à t'aimer et à t'approuver Toi-même) mais détends-toi dans la paisible douceur de ton Être. Sois réceptif à tout ce qui est beau et tu le rencontreras sur ton Chemin."

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Littérature :


Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque ainsi le salsifis :

26 juin

(Tincave)


Il neige sur les sommets. La Vanoise est glaciale. Le brouillard du matin triste absorbe la lumière. Les épicéas concentrent la grisaille de l'atmosphère.

Dans l'herbe, un salsifis prétend suppléer les carences du soleil. Son vaste capitule jaune vif restitue davantage de lumière qu'il n'en absorbe. Voilà (près de Creys-Malville) un surrégénérateur comme je les aime : avec des ligules d'or, un cœur de fleurons et des insectes gourmands attablés devant des robinets à nectar. Les émanations du réacteur enchantent le biotope. La plus dangereuse pollution est une larme de miel.

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