Étymologie :
LAMIER, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1785 (F. Rozier, Cours complet d'agric. théorique, pratique, écon. et de méd. rurale et vétér., t. 6, pp. 224-225). Francisation du lat. sc. lamium (Encyclop. 1765; Trév. 1771) [lat. class. lamium « ortie »].
Lire également la définition du nom Lamier afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Lamium - Fausse ortie - Ortie morte -
Lamium album, L. - Blanque ourteie (Wallonie) - Lamier blanc - Lamion - Molinait (Wallonoe) - Ortie blanche - Ortie morte -
Botanique :
Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Linaire :
Propriétés Physiques. ― Le lamier blanc, bien que très commun, est diversement apprécié par les auteurs ; les uns le disent inodore, d'autres possédant une odeur aromatique peu agréable (Moquin-Tandon) ; d'autres enfin une odeur forte et désagréable (Cazin). Sa saveur est un peu amère et astringente. Les fleurs contiennent une substance mucilagineuse associée à un principe aromatique très fugace.
Usages médicaux. — Cette plante est donnée pour tonique et astringente, de là son emploi dans les divers flux muqueux et sanguins, diarrhées, hémorrhagies passives, affections catarrhales, leucorrhée chronique. L'infusion des fleurs blanches mondées de leur calice a été principalement vantée à la dose de 8 à 16 grammes par 750 d'eau bouillante (Consbruch).
Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :
Les femmes traitent les fleurs blanches par la tisane d'ortie blanche, Lamium album, ou plutôt des Lamium maculatum et purpureum, car le premier est rare en Savoie.
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Symbolisme :
Sur le site Menu de Fleurs sauvages de l'Yonne et d'ailleurs on peut lire que :
Lamier vient du grec Λάμια, Lamia, personnage mythologique associé à un "monstre dévorant" gueule béante, la forme de la corolle des fleurs évoquant une bouche grande ouverte. Latinisé en Lamium, ce nom repris par Linné était déjà employé par Bauhin."
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Mythologie :
Pour Pausanias dit le Périégète, auteur de Description de la Grèce (Livre X : Phocide, chapitre 12) :
On voit près de là une roche qui s'élève au-dessus de la terre ; les Delphiens assurent qu'Hérophile surnommée la Sibylle, se tenait sur cette roche pour chanter ses oracles. La première qui ait porté ce nom de Sibylle et qui me paraît remonter à la plus haute antiquité, est celle que les Grecs disent fille de Jupiter et de Lamie, fille de Neptune ; elle est, suivant eux, la première femme qui ait prononcé des oracles, et ils ajoutent que ce fut des Libyens qu'elle reçut le nom de Sibylle.
Selon Diodore de Sicile, auteur d'une Bibliothèque historique (Livre XX, chapitre 41, 1er siècle av. J.-C., traduit par Ferdinand Hoefer), disponible sur le site Remacle.org :
XLI. Après avoir fait tous ses préparatifs de guerre, Ophellas ouvrit la campagne avec une armée de plus de dix mille hommes d'infanterie, de six cents cavaliers, de cent chars de guerre, montés par plus de trois cents hommes, tant conducteurs que combattants ; enfin plus de dix mille hommes non enrégimentés accompagnaient cette armée. Beaucoup d'entre eux amenaient leurs femmes et leurs enfants, de manière que l'armée ressemblait à une colonie. Après dix-huit jours de marche, comprenant un espace de trois mille stades, Ophellas vint camper près d'Automola. De là il continua sa route, et arriva au pied d'une montagne escarpée au milieu de laquelle se trouvait un ravin profond d'où s'élevait un rocher lisse taillé à pic. Au pied de ce rocher existait une caverne spacieuse, ombragée de lierre et de smilax. C'est là que la tradition place le séjour de la reine Lamia, célèbre par sa beauté, mais qui, en raison de sa cruauté, eut plus tard la figure changée en celle d'un animal féroce. On raconte en effet qu'après avoir perdu tous ses enfants, poussée par le chagrin et par la jalousie envers les autres femmes plus heureuses qu'elle, elle ordonna que l'on arrachât, les enfants des bras de leurs mères et qu'on les fit mourir sur-le-champ. Cette tradition s'est conservée jusqu'à nos jours où l'on fait peur aux enfants en prononçant le nom de la reine Lamia. On raconte encore que, lorsque cette reine était ivre, elle permettait à ses sujets de faire impunément tout ce qu'ils voulaient; et comme elle ne s'inquiétait alors de rien de ce qui se passait dans le pays, on s'imagina qu'elle était aveugle. C'est pourquoi l'on dit, métaphoriquement, de ceux auxquels le vin a fait commettre un acte de coupable négligence, qu'ils ont jeté leurs yeux dans un sac, comme pour indiquer que le vin ôte la vue. Euripide lui-même semble attester que Lamia était née en Libye, lorsqu'il dit : « Quel est le mortel qui ne connaît pas le nom odieux de cette Lamia, Libyenne de naissance ? »
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Et voici la version de Philostrate, dans sa Vie d' Apollonius de Tyane (Livre IV, chapitre 25, IIIe siècle ap. J.-C.) :
Apollonius attendit le moment du festin, et quand les convives furent arrivés, il entra dans la salle : « Où est, demanda-t-il, la belle que vous fêtez ? - La voici, dit Ménippe qui se leva en rougissant. - A qui de vous deux appartiennent l'or, l'argent et les autres objets précieux qui ornent cette salle ? - A ma femme, car voici tout ce que je possède », et Ménippe montrait son manteau. Apollonius se tournant vers les convives : « Connaissez-vous les jardins de Tantale, qui sont et ne sont pas ? - Oui, mais seulement par Homère car nous ne sommes pas descendus dans le Tartare. - Eh bien ! tout ce que vous voyez ici est la même chose : il n'y a ici nulle réalité, tout n'est qu'apparence. Voulez-vous que je me fasse mieux comprendre ? La charmante épousée est une de ces « empuses » , que le peuple appelle « Lamies » ou « Mormolyces » . Elles aiment beaucoup l'amour, mais encore plus la chair humaine : elles allèchent par la volupté ceux qu'elles veulent dévorer. - « Indigne calomnie! » s'écria la jeune femme, et elle parut indignée de tout ce qu'elle venait d'entendre, et s'emporta contre les philosophes, qu'elle taxa de cerveaux creux. Tout d'un coup, les coupes d'or et les vases qu'on avait crus d'argent s'évanouirent, tout disparut, on ne vit plus ni échansons, ni cuisiniers, ni aucun des autres serviteurs : les paroles d'Apollonius avaient dissipé le prestige; alors le fantôme se mit à pleurer et supplia Apollonius de ne pas le mettre à la torture pour lui faire avouer ce qu'il était. Mais, comme Apollonius le pressait et ne voulait pas le lâcher, le fantôme finit par reconnaître qu'il était une empuse, qu'il avait voulu gorger Ménippe de plaisirs pour le dévorer ensuite, et qu'il avait coutume de se nourrir ainsi de beaux jeunes gens parce qu'ils ont le sang très frais. C'est là un des faits les plus célèbres de la vie d'Apollonius : cependant j'ai cru nécessaire d'y insister. C'est que, s'il est plus connu que les autres, ayant eu lieu au milieu de la Grèce, en général on sait seulement qu'il a dévoilé une lamie à Corinthe. Mais dans quelle circonstance ce fait eut-il lieu? comment intéresse-t-il Ménippe ? Voila ce qu'on ne savait pas encore et ce qui n'est raconté que dans les Mémoires de Damis et dans l'extrait que je viens d'en donner » .
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Littérature :
Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque avec tendresse l'ortie blanche :
17 avril
(Fontaine-la-Verte)
L'ortie blanche se mêle aux orties vraies. Cette labiée toute douce veut faire croire qu'elle brûle. Elle a le port des flagellatrices. Elle copie la couleur, la denture, le gaufrage de leurs feuilles.
Elle ne se trahit qu'amoureuse - je veux dire : en fleurissant. Alors, elle redevient lamier. Elle offre aux regards des étages de casques aussi blancs que celui d'Achille devant Troie. Chaque corolle porte à la lèvre inférieure une moucheture jaune. Les étamines s'arc-boutent et s'achèvent par des anthères noires à sillons ocre, semblables à des tétrades de chromosomes.
La plus riche partie de la fleur consiste en son calice mâchuré de pourpre noir - de cette teinte indécise et superbe à laquelle les enfants parviennent toujours lorsqu'on les laisse mélanger librement les couleurs de la gouache.
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