Étymologie :
CHOU, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 bot. chous (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, vers 3617) ; 2. a) 1549 pâtiss. (Est.) ; b) 1694 « nœud de ruban » (J.-F. Regnard, Attendez-moi sous l'orme ds Brunot t. 6, 2, pp. 1103-1104) ; c) 1809 terme de tendresse (P. Leclair, Les Méditations d'un hussard, p. 14). Du lat. class. caulis « tige des plantes, chou ».
Lire également la définition du nom chou afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Brassica oleracea - Caoulet - Capus - Chou caput - Chou potager - Choul - Choupoté - Collet - Djotte - Jotte - Tête caput - Stieu.
Expressions populaires :
Claude Duneton, dans son best-seller La Puce à l'oreille (Éditions Balland, 2001) nous éclaire sur le sens d'expressions populaires bien connues :
Faire ses choux gras : Pendant tout le Moyen Âge, et même plus tard, les légumes ont constitué le plat du pauvre, de tous ceux qui ne pouvaient s'offrir de la viande, l'alimentation noble. On cultivait les pois, les fèves, les poireaux, les "panais" devenus carottes, les navets, les raves, et le plus commun de tous, le plus abondant, sur qui on peut toujours compter en cas de disette : le chou. Le chou pommé, vert, vivace, qui ne craint pas la gelée, au contraire qui se rit du mauvais temps, a donné lieu à nombre de locutions qui vont de "bête comme un chou" - forte tête mais peu pensante ! - à "aller planter ses choux", symbole du jardinage forcé, par déception.
Mais le problème avec les légumes c'est de les assaisonner. Du chou cuit à l'eau n'est pas ce qu'on pourrait appeler un régal. Aussi pauvre que l'on soit, il faut tout de même un bout de lard, un petit morceau de quelque chose ( ce que rappelle le proverbe : "Ce n'est pas tout que des choux, il faut encore de la graisse !" Il est donc naturel que faire ses choux gras soit devenu une proposition alléchante, le signal que tout va bien dans la marmite. Au XVe siècle l'expression avait le sens de se goberge :
Et aussi d'en faire ses choux gras,
Ses grans chieres, ses ralias
De gueulle... (Coquillart)
Au XVIIe siècle elle avait à peu près le sens actuel : "On dit qu'un homme fait ses choux gras de quelque chose, lorsqu'il fait bien ses affaires, qu'il fait de grands profits en quelque chose", dit Furetière. Simplement on a fini par s'apercevoir qu'il y avait toujours quelque abus dans les "bonnes affaires", et sous les grands "profits", des cuisines assez peu avouables ! Les fameux choux gras en ont pris un léger goût de scandale !
Les bonnes choses n'ont qu'un temps, comme le dit également le vieil adage ; "toujours n'aurez vous mie pèches moles, et raisins doux et noix nouvelles."
Faire chou blanc : L'expression est courante. Elle signifie qu'une affaire qui promettait d'être fructueuse, ou une rencontre avantageuse, a complètement raté... Je crois que ce mystère qui paraît entourer son sens littéral - que vient faire le "chou" là-dedans ? - son coté absurde à plaisir a déterminé son succès.
Bien que la locution "coup blanc" qui pourrait être à l'origine ne soit pas pour l'instant attestée officiellement, plusieurs éléments peuvent en faire supposer l'existence. On trouve dans les Journaux Camisards en 1730 : "Je les exhorte à prendre courage... Mais trop peu en nombre, nos coups de firent que blanchir" - qui évoque la fumée blanche produite par les coups de feu, sans autre effet. De son côté, Restif de la Bretonne évoque par un jeu de mots : "Laisse-moi jouer, je veux faire la blanche. - Oui, ton coup s'ra en blanc, mon fiston." (Le Paysan perverti, 1782.)
Littré, se référant au Glossaire du Centre de la France, publié par le Comte Jaubert en 1864, dit que : "Chou est ici pour coup, par suite de la prédominance du ch dans l'idiome du Berry", et faire chou blanc, étant une expression utilisée au jeu de quille pour "ne rien abattre". "Si l'on admet pas cette explication, ajoute Littré, la locution reste tout à fait obscure." C'est aussi mon avis... Reste que la métaphore des quilles pourrait bien venir du coup de fusil tiré en vain. Toujours est-il que la locution s'employait déjà au milieu du XVIIIe siècle. Pierre Enckell cite pour 1761, dans les DDL 38, le Journal historique de Collé avec ces vers de Saurin :
Mais que le Seigneur préserve
De tout mal et desarroy
Nombre de gens comme toy,
Pleins d'honneur, de sens, de verve,
Dont, à ce jeu, la Minerve,
Mon cher, à te parler franc,
Ne sçait faire que chou-blanc.
Ménager la chèvre et le chou : A vouloir plaire aux us on s'attire souvent la colère des autres, et il est parfois difficile de ménager la chèvre et le chou !... Dans cette curieuse locution il faut comprendre le verbe ménager, non pas dans le sens actuel d’épargner, mais dans celui qu'il avait autrefois de "conduire, diriger" - que l'anglais a conservé sous la forme quasi internationale de manager et management. Une "bonne ménagère" est étymologiquement celle qui dirige bien les affaires de sa maison. "Le fait d'un bon mesnager, dit La Boétie au XVIe siècle, c'est de bien gouverner sa maison." On comprend que l'ns oit passé de là au sens d'économie domestique !"
C'est donc "conduire la chèvre et le chou" qu'il faut entendre à l'origine de l'expression, ces deux antagonistes ancestraux, prototypes du dévoreur et du dévoré, du faible et du fort, du couple dominant-dominé qui a toujours besoin d'un arbitre, d'un gardien, d'un législateur ; le duo a donné aussi mi-chèvre, mi-chou, moitié agressif, moitié soumis, donc incertain, hésitant à pencher vers un bord ou un autre. En tout cas il faut être habile pour faire cohabiter ces deux ennemis, ou les emmener en voyage. Une histoire fort ancienne illustre la difficulté de leur conduite ; c'est le fameux problème du passage d'un loup, d'une chèvre et d'un chou.
[ajout personnel : histoire qui complexifie par ailleurs la dialectique du prédateur et de la proie puisque la chèvre occupe tour à tour les deux rôles]
Un homme doit faire traverser une rivière à ces trois "personnages", mais le pont est tellement étroit, ou la barque si frêle, qu'il ne peut en passer qu'un seul à la fois. Bien sûr, il ne saurait à aucun moment laisser ensemble sans surveillance ni le loup avec la chèvre, ni la chèvre avec le chou ! Il doit donc faire appel à une astuce particulière, sujet de la devinette, et vous pouvez mettre la sagacité de vos amis à l'épreuve de ce classique qui a fait la joie de nos aïeux. Solution : on passe d'abord la chèvre, le loup et le chou, restant seuls ne se feront aucun mal. On la laisse de l'autre côté et on revient à vide chercher le chou. Une fois celui-ci sur l'autre rive, c'est là l'astuce, on ramène la chèvre avec soi. On la laisse seule à nouveau, pendant que l'on fait traverser le loup que l'on réabandonne avec le chou, mais sur l'autre bord. On a alors tout le loisir, dans un aller-retour supplémentaire, d'aller rechercher la chèvre, afin que les trois protagonistes se retrouvent sans dommage sur la rive opposée, en compagnie de leur habile gardien.
Cette histoire était déjà célèbre au XIIIe siècle, où savoir "passer la chèvre et le chou" était déjà une expression figurée d'habileté dans la discussion, comme en témoigne de passage du Guillaume de Dole en 1228 :
Si lui fait lors un parlement
De paroles où il lui ment :
Pour passer les chèvres, les chous,
Sachez que il n'estoit mie fou.
Comme on voit, la locution ne date assurément pas des dernières neiges ; Mme de Sévigné écrivait le 25 mai 1680 : Et si, en tournant le feuillet, ils veulent dire le contraire pour ménager la chèvre et les choux, ils auront sur cela la destinée à mon égard de ces ménageurs politiques, et ils ne me feront pas changer."
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Botanique :
Selon Jean-Marie Pelt, auteur d'un ouvrage intitulé Des Légumes (Éditions Fayard, 1993) :
Le chou est un légume qui se décline en un nombre impressionnant de formes et de variétés. Qu'on en juge !
Voici d'abord les choux pommés ou cabus, dont la tige atrophiée permet aux feuilles de s'imbriquer étroitement pour former une pomme plus ou moins serrée. Puis les choux verts ou frisés, dont les amples feuilles ne se nouent jamais en une pomme. Viennent ensuite les choux de Milan, sorte de synthèse entre les deux précédents, puisqu'ils sont à la fois pommés et frisés. Sans oublier les choux rouges, qui ne diffèrent des choux pommés que par la rutilence de leur feuillage. A quoi s'ajoutent les choux-raves, dont la tige renflée au-dessus du sol forme un bulbe volumineux ; et les choux-navets ou rutabagas, où l'hypertrophie porte cette fois sur la racine. Les choux de Bruxelles résultent du développement de minuscules bourgeons latéraux situés à l'aisselle des feuilles. Quant aux choux-fleurs, c'est à la monstruosité de leur hampe florale, atrophiée et raccourcie, qu'ils doivent sur leur belle pomme blanche. N'oublions pas enfin les brocolis, dont on consomme les pousses violettes et charnues à la manière des asperges.
« Les choux m'ont toujours fait penser à ces familles nombreuses où l'on voit représentés les types les plus variés de l'humanité. », dit Henri Leclerc dans un fameux morceau d'anthologie qui mérite d'être cité... et lu le dictionnaire à la main ! - Il en est de géants et de nains, de ventrus comme des financiers et de grêles comme des poètes incompris ; certains s'adornent de frisures aux boucles robustes, d'autres ont la calvitie des vieux savants, apitoient par la teinte chlorotique de leurs tissus ou par les gibbosités qui, tels des engorgements strumeux, déforment leur anatomie ; si la plupart portent l'habit vert des académiciens, quelques-uns, les privilégiés de la famille Chou, arborent le violet épiscopal ou la pourpre cardinalice, comme celui dont il est question dans cette anecdote que j'aie lue je ne sais plus où.
Le cardinal de Richelieu étant allé visiter un couvent de capucins, un moine fut chargé de le haranguer au milieu des autres religieux réunis dans la salle du chapitre ; l'orateur, bien qu'il parût un peu gauche, s'acquitta le mieux du monde de sa mission. Richelieu le complimenta et lui demanda comment il se faisait qu'il n'eût pas été intimidé de parler devant un prince de l'Église : « C'est bien simple, Éminence, lui dit le bon moine ; je m'étais habitué à cet honneur redoutable en répétant chaque jour mon discours devant un carré de choux au milieu duquel se trouvait un gros chou rouge. »
Lorsque, en 305, l'empereur Dioclétien, grand pourfendeur de chrétiens, vieilli et usé par le pouvoir, abdiqua et se retira à Salone - la Split d'aujourd'hui -, sur la côte dalmate, sollicité par ses amis de reprendre la pourpre des Césars, il se déroba à cette invitation en disant : « Si vous pouviez voir les choux que j'ai plantés de mes mains dans mon jardin de Salone, vous ne me feriez pas ne telle proposition. » Car « aller planter ses choux », c'est reprendre sa liberté. Quant à la carrière du vieil empereur, elle était, au propre comme au figuré, « dans les choux ».
Une nomenclature des choux pourrait donc s'établir comme suit.
A la racine de l'arbre généalogique, Brassica oleracea el qu'on observe l'état sauvage sur les côtes de l'Océan et de la Méditerranée, en Europe occidentale et méridionale. Il est commun dans les rochers et sur les falaises maritimes, en Normandie, à Jersey, dans les Charentes inférieures. Cet ancêtre du (et des) chou(x) est une plante vivace, bisannuelle, parfois même trisannuelle de 60 cm à 1m de hauteur ; sa tige est simple ou ramifiée, à feuilles glauques, épaisses, amples, lobées, sinuées, ondulées. Les fleurs sont blanches ou jaune pâle : elles possèdent quatre pétales disposés en forme de croix, sine distinctif de la famille des crucifères (étymologiquement « porteur de croix »). Mais ce type primitif, modifié par plusieurs milliers d'années de culture et de sélection, a engendré des variétés et des races si distinctes au premier abord que l'on a quelque difficulté à voir en lui l'ancêtre de tous les choux. Les variations ont porté tantôt sur la tige, tantôt sur la feuille, tantôt sur la fleur.
Le chou cabus ou chou pommé, ainsi que le chou de Milan, avec ses feuilles frisées, pour ne pas dire crépues, descendent immédiatement du chou sauvage. Connu des Grecs et des Romains, ce dernier est sans doute d'origine italienne, bien que le véritable chou de Milan, sous la forme qu'il présente
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Vertus médicinales :
F.S. Cordier, auteur de Les Champignons, Histoire - Description - Culture - Usages des espèces comestibles, vénéneuses et suspectes... (J. Rotschild Éditeur, 1876) rend compte de pratiques en vogue dans l'Antiquité :
Apollodore, au rapport de Pline, parle de l'emploi du suc de choux pour remédier aux accidents causés par les champignons.
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques du Chou potager :
Propriétés physiques et chimiques : Le chou potager possède une odeur fade et communique à l'eau par la coction une odeur forte et repoussante. Sa saveur est herbacée, plus ou moins douceâtre ou âcre. L'analyse y a fait découvrir la présence d'une petite quantité de soufre, de la fécule verte, de l'albumine végétale, des matières extractives et des sels.
Usages médicaux : Le chou potager est plutôt une plante alimentaire qu'un médicament ; cependant son emploi en médecine date de la plus haute antiquité. Déchu aujourd'hui de son ancienne réputation, il n'est plus considéré que comme légèrement excitant, antiscorbutique et pectoral. Le chou rouge est surtout employé comme béchique ; le suc exprimé, une gelée et un sirop de ce dernier sont prescrits dans les rhumes, la bronchite aigue ou chronique et la phtisie. On prétend que le suc qui découle d'incisions longitudinales faites à la tige du chou guérit les verrues ; beaucoup d'autres plantes sont aussi censées produire ces résultats qui ne sont le plus souvent que l'effet d'une simple coïncidence. Suivant Hoffman, ce suc agit comme un doux laxatif. Les feuilles de chou, en application externe, ont été préconisées pour rappeler une sécrétion tarie, pour prévenir ou diminuer l'inflammation des reins et pour soulager les douleurs arthritiques (Récamier, Macé).
Dans Des hommes et des plantes (Éditions Opéra Mundi, 1970) Maurice Mésségué évoque le savoir ancestral de son père qu'il a su faire perdurer après la mort prématurée de celui-ci :
Mon père soignait les « douleurs » avec une macération dans laquelle entraient :
du chou : cette plante ronde, potelée, robuste comme une paysanne et dont Pline l'Ancien affirmait que les Romains lui devaient de s'être passés de médecins pendant six siècles ! Ses feuilles chauffées rapidement par un fer à repasser et appliquées directement sur la peau soulagent très efficacement les douleurs rhumatismales.
En Hollande on en faisait, il y a quelques années encore, un onguent mêlé à de l'argile qui était appliqué avec succès sur les points douloureux.
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Croyances populaires :
Paul Sébillot, auteur de Additions aux Coutumes, Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne (Éditeur Lafolye, janv. 1892) relève des croyances liées aux cycles de la vie et de la nature :
A la Saint-Pierre,
Mets tes choux en terre,
Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :
En Poitou, les oignons plantés en jeune lune cornent ; dans la Gironde, les choux piqués alors sont plus exposés à être mangés par les poules, dans le Moutonnais, ils perdent leurs feuilles inférieures.
[...] Plusieurs observances sont en rapport avec la date des cueillettes et des récoltes. Le jour Saint Etienne, on ne doit ai cueillir de choux ni en manger, parce que le peuple de Normandie croit que ce jour-là Je premier martyr fut lapidé dans un carré de choux. [...] Dans le Luxembourg belge on prétend que la Choucroute cuira difficilement si tes feuilles qui ont servi à la faire ont été découpées durant la pleine lune.
[...] Dans la même région, le maître de la maison où l'on brûle des trognons de chou est exposé à mourir.
[...] A peu près dans toute la France, on raconte aux enfants qu'on les a trouvés sons un chou, et quelquefois les parents, en leur parlant d'une époque antérieure à leur naissance, ajoutant que c'était du temps où ils étaient encore dans les choux. Au XVIIIe siècle, on disait d'un homme dont la naissance était inconnue, qu'il avait été trouvé sous un chou, et un poète du XVe siècle parle d'un personnage qui se targue de sa naissance :
Combien qu'il soit sailly d'un trou..
Voire, ou de la ligne d'un chou
Enfant à quelque jardinier.
Vous diriez que ce petit homme ait esté trouvé sous une feuille de chou comme Poussot, lit-on dans un ouvrage satirique de 1661. A Stavelot dans le pays wallon, les enfants se trouvent sous les choux du curé. On dit quelquefois que ce sont les garçons que l'on cueille sous les choux, tandis que les filles se ramassent sous les rosiers". Un grand nombre d'enseignes de sages-femmes, même à Paris, représentent une dame recueillant un enfant au milieu des choux.
[...] Certaines plantes constituent une sorte de talisman, à la condition d'avoir été mangées Madame de Vervins disait que quand elle avait fait bien bouillir des choux ses ennemis n'avaient plus de pouvoir sur elle.
[...] Les plantes jouent un rôle dans quelques opérations magiques dont se servent les chasseurs : ceux du Cher prétendent que si on plante des trognons de chou dans un carrefour où se rencontrent quatre chemins ayant des noms différents, et si on met des collets à ces trognons, le lendemain matin ou trouvera un lièvre pris à chaque collet.
[...] Au XVIIIe siècle, on disait en Anjou : un bouillon de choux fait perdre cinq sols au médecin.
[...] Au XVIIe siècle, comme aujourd'hui dans le Tarn, on se débarrassait de la fièvre, en y [sous le manteau de la cheminée] attachant un chou dérobé dans un jardin voisin.
[...] Dans le Finistère, on se délivre des verrues en ramassant sur son chemin la première feuille de chou qui se présente ; après s'en être frotté, on a soin de la remettre exactement à la place qu'elle occupait à terre, et l'on s'éloigne en tonte hâte en évitant de regarder en arrière.
[...] Les plantes semblent ne jouer qu'un rôle secondaire dans les songes. Dans le Moutonnais, quand on désire rêver, il faut manger le soir des choux montés.
[...] Les choux sont fréquemment associés aux coutumes matrimoniales. Dans le Castrais, les jeunes gens les dérobent pour en faire une soupe qui est servie aux mariés dans le courant de la soirée ; s'ils n'étaient pas volés, ce serait manquer à l'usage ; dans la Creuse, la poule qui a été promenée partout est assommée le soir avec un chou ; le chou et la poule cuits ensemble sont portés aux époux quand ils sont au lit. En Maine-et-Loire, dès le mutin, le lendemain du mariage, on attelait tous les bœufs de la métairie à la meilleure charrette et toute la compagnie se rendait dans un champ de choux, on choisissait le plus beau, puis on ouvrait une tranchée circulaire à une certaine distance et l'on s'en approchait avec un grand air de travail et de peine. Lorsque le chou était déchaussé, chaque homme de la noce essayait de l'arracher avec des efforts simulés, et, bien entendu, n'en pouvait venir à bout. Cet honneur était réservé au marié, qui après avoir feint une grande peine, parvenait à l'arracher on s'armait de leviers et de cordes, et on .parvenait à le placer sur la charrette et il était porté en triomphe au logis où les femmes s'en emparaient. En Berry, la plantation du chou, symbole de la fécondité, a lieu le second ou le troisième jour du mariage.
[...] Le chou a d'ordinaire une signification disgracieuse. Dans la Suisse romande, planter le chou à quelqu'un, c'est lui faire un mauvais compliment. Dans beaucoup de pays le chou est attaché, le 1er Mai, à la porte des jeunes filles dont la conduite a été légère. En Basse-Bretagne un tronc de chou placé sur la porte indiquait au bazvalan que la proposition de mariage était refusée.
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Rose-Claire Schüle, dans un article intitulé "De l'ermite à la cigogne... L'origine des enfants en Valais et Vallée d'Aoste." (In : Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie, n°1-4/ 1977. Religion populaire : Dauphiné - Savoie - Provence - Cévennes - Valais - Vallée d'Aoste - Piémont. pp. 363-372) revient sur la fonction dévolue au chou dans la naissance des enfants :
Examinons maintenant, toujours dans la couche des données d'autres réponses évasives obtenues en Valais et au Val d'Aoste.
On trouve les enfants sous un chou, parfois dans une courge. — C'est là apparemment l'indication la plus répandue en France et en Italie. Une des premières mentions que nous ayons rencontrée se trouve dans Sébillot (Le Folklore de France, 4 tomes) : « Dans l'est et principalement dans la région vosgienne, de gros rochers jouent le rôle dévolu aux choux dans l'explication de la naissance que l'on donne aux enfants ». Pour l'auteur et pour ses lecteurs de 1904, cette allusion aux choux était intelligible et n'avait, par conséquent, pas besoin d'explications Sébillot connaît également les filles qui naissent sous un rosier, faisant paire avec les garçons provenant des choux. Sur la carte 202 de l'A.F.S., nous constatons que la plus grande partie de la Suisse romande a adopté l'explication la courge. Cette aire englobe aussi quatre points limitrophes germanophones, tandis que le reste de la Suisse alémanique y est réfractaire. Le Valais ,' accepté la réponse du chou que dans sa partie occidentale, voisine de la France et du canton de Vaud. Les deux attestations positives de la région de Sierre (Mollens et ville de Sierre) témoignent probablement de l'influence de sages-femmes qui ont acquis leur formation à Genève. En Vallée d'Aoste, nous avons une dizaine d'attestations de choux, courges et rosiers, pour la plupart groupées autour d'Aoste, le centre de la vallée. Les localités voisines de la frontière française et du Piémont ne connaissent pas cette usage. [...]
Les choses ont passablement changé après la guerre. [...] Les mamans, elles, donnent à leurs enfants des réponses réalistes, mais elles se réfugient volontiers dans une explication moins crue, en disant que le nouveau-né a été « trouvé » à la maternité. Le chou et la cigogne sont bien connus : d'une part, c'est une réclame répandue de manière de plus en plus intense par les enseignes de magasins de 'prénatal' ou 'maternity' de Martigny, Sion, Sierre et Brigue, qui en impose l'image ; d'autre part, un nouvel usage vient de s'implanter en Valais, celui des faire-part de naissance et des cartes de vœux correspondantes. Mais fait étonnant, la plupart de nos informatrices n'établissent pas de relation entre le chou ou la cigogne et leur propre explication de la naissance d'un enfant : elles considèrent que le chou et la cigogne comme une manière amusante et « moderne » d'annoncer une naissance. Il semble donc bien que cette innovation, propagée par le commerce des imprimés ait été adoptée sans qu'on en connaisse la signification première. [...]
Les réponses évasives qu'on donnait aux enfants pour leur expliquer une naissance ont subi un très profond bouleversement au cours des quarante dernières années. Du fonds « traditionnel » il ne surnage que quelques rares bribes. Même le chou et la cigogne, qui pourtant appartiennent au folklore européen, tard venus en Valais et en Vallée d'Aoste, ne résistent pas mieux.
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Symbolisme :
Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme du chou :
CHOU - PROFIT.
Autrefois, à Rome, les campagnes étaient couvertes de choux, ceux qui se livraient à cette culture en retiraient des profits immenses ; c'est peut être de là que nous est venue cette façon proverbiale de nous exprimer quand nous disons qu'un homme fait ses choux gras, pour faire entendre qu'il gère bien ses affaires et que tout tourne à son profit.
Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :
Chou - Profit.
Les Romains cultivaient beaucoup ce légume. Les Allemands en font une très grande consommation. Il y a vraiment profit à cultiver une plante qui vient abondamment clans nos pays, où elle brave, dans les jardins, les rigueurs de l’hiver.
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Dans son Traité du langage symbolique, emblématique et religieux des Fleurs (Paris, 1855), l'abbé Casimir Magnat propose une version catholique des équivalences symboliques entre plantes et sentiments :
CHOU – IRRÉSOLUTION.
L'homme qui ne sait pas prendre un parti est comme une vague que le vent agite et pousse çà et là.·
Jacques 1-6. -
Le chou est cultivé depuis si longtemps comme plante alimentaire que les auteurs les plus anciens en ont fait mention ; on lui attribuait même beaucoup de propriétés médicales qui n'ont pu soutenir l'examen, et aujourd'hui il n'est plus ou presque plus employé dans les pharmacies. Il n'y a que sa propriété anti-scorbutique qui soit demeurée constatée, qualité qui d'ailleurs lui est commune avec d'autres crucifères.
Le chou a peu de saveur et n'a qu'une odeur fade, mais la cuisson en fait un aliment savoureux et agréable. Lorsqu'on le fait bouillir, l'eau qu'on en retire a une odeur fétide, le chou au contraire a un goût sucré ; cependant on ne peut le conserver, et si on le gardait il se putréfierait bientôt.
En Angleterre et en Allemagne on prépare avec les choux, qu'on fait fermenter dans le sel, l'aliment renommé qu'on appelle Choucroûte et dont on fait un usage général. Il serait à souhaiter qu'on en fit autant en France, car cet aliment est d'une grande utilité. Le chou dépouillé par la fermentation de son suc âcre est de facile digestion pour tous les estomacs, et devient un excellent anti-scorbutique. C'est à la précaution que prit l'illustre Cook de s'approvisionner de choucroûte, qu'il dut la santé, presque miraculeuse, que conserva son équipage pendant un long et pénible voyage de trois ans. Dans la guerre d'Amérique, les armées anglaises étaient tourmentées par le scorbut ; on fit cesser ce fléau en donnant aux soldats de la choucroûte pour nourriture La première fois qu'on goûte cet aliment, on le trouve mauvais, mais on s'y habitue aisément et on finit par le trouver fort appétissant.
RÉFLEXION.
Comment peut-on répondre de ce qu'on voudra à l'avenir puisque l'on ne sait pas précisément ce que l'on veut dans le temps présent.
(LA ROCHEFOUCAULT.)
Adolphe de Chesnel, auteur d'un Dictionnaire des superstitions, erreurs, préjugés, et traditions populaires... (J.-P. Migne Éditeur, 1856) propose la notice suivante :
CHOU. C'est une croyance assez répandue qu'on doit s'interdire de manger ce légume le jour de Saint-Etienne, parce que ce saint s'était caché dans un carré de choux pour échapper au martyre.
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Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :
Chou - Profit.
Les Romains aimaient beaucoup ce légume et, ainsi que les Allemands, en faisaient un grand commerce. Tout est profit à cultiver le chou qui brave les rigueurs de l'hiver et dont la graine se vend fort cher.
Marianne Mesnil dans son article d'introduction intitulé “PRESENTATION : Mais d’où Viennent Donc Les Enfants ?” (Civilisations, vol. 37, no. 2, Institut de Sociologie de l’Université de Bruxelles, 1987, pp. 13–33, http://www.jstor.org/stable/41229337) évoque le chou en lien avec le symbolisme de la naissance :
[...] Naître dans les choux... A côté de ce médiateur ouranien que constitue la cigogne, les traditions d'Europe connaissent encore une autre figure qui ménage une voie de passage entre deux mondes : elle est cette fois de type chtonien, c'est le chou.
[...] Quant au cycle du chou, une partie de l'Europe y superpose un autre cycle des naissances (Bonnet) : il commence... au retour des cigognes, lorsqu'il est bon de savoir planter des choux, et se clôt après une gestation dans les champs, par une récolte automnale que ponctue le geste des cueilleuses de choux, ces matrones qui tranchent le trognon ombilical d'un coup de serpe bien affûtée. Les naissances dans les choux seraient donc celles d'un autre temps pour naître, qui survient neuf mois après le temps pour se marier. En effet, en Occident, une période particulièrement recommandée pour conclure des alliances matrimoniales, se situent durant les jours qui précèdent le Grand Jeûne de Pâques, c'est-à-dire entre la fin du cycle des Douze Jours et le Mardi Gras, jour de Carnaval). Passé cette date, nous l'avons vu, la quarantaine du Grand Jeûne ouvre le temps des conceptions monstrueuses dont le fruit (défendu) verra le jour au solstice d'hiver, à l'ouverture du Cycle des Douze Jours qui préside aux retours sur terre des êtres infernaux.
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Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), le Chou (Brassica oleracea) a les caractéristiques suivantes :
Genre : Féminin
Planète : Lune
Élément : Eau
Pouvoirs : Divination ; Veuvage ; Avortement.
Utilisation rituelle : En Bretagne, autrefois, le Bavalan était un intermédiaire dans les mariages. Si on lui offrait des crêpes, cela signifiait que la demande était accordée. Un trognon de chou fixé sur la porte était le signe du refus.
En Poitou, les jeunes gens attachaient, le 1er mai, un chou à la porte de la jeune fille dont la conduite avait été jugée légère.
À Laroche, s'il pleuvait le jour des noces, on disait malignement des époux : L'on mougné l'djot’ o po. « Ils ont mangé le chou au pot », c’est-à-dire qu'ils n'ont pas attendu que le couvert fût mis régulièrement, qu'ils ont déjà eu des rapports sexuels avant le mariage.
Utilisation magique : Si vous voulez raccourcir la vie de votre mari, faites-lui manger des choux en mai et juin. Si l'on plante des trognons de choux dans un carrefour où se rencontrent quatre chemins ayant des noms différents, et si l'on met des collets à ces trognons, le lendemain matin on trouvera un diable pris à chaque collet.
La fleur de chou mise dans un pessaire et introduite dans le vagin gâte le sperme et produit l'avortement.
Durant l'Halloween (nuit qui précède la Toussaint), les jeunes Anglaises se prennent par la main et vont deux par deux, les yeux fermés, dans le potager, arracher le premier chou qu elles rencontrent.
Suivant qu'il est gros ou petit, tordu ou droit, ouvert ou bien pommé, le futur époux sera beau ou laid, fort ou maigrichon, sociable ou renfermé. Si beaucoup de terre grasse adhère à la racine, c'est le signe d'un prétendant riche; si la tige du chou est lisse et douce, il aura bon caractère; si elle est grumeleuse, pleine d'aspérités, il battra souvent.
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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :
Depuis l'Antiquité, le chou est réputé pour ses qualités médicinales : selon Caton l'Ancien, il serait bénéfique pour tous les organes du corps et triompherait de tous les maux. Les Grecs et les Égyptiens l'employaient pour remédier à l'ivresse du vin, dans la croyance qu'il nuisait à la vigne. Il est vrai qu'une légende hellénique rapporte que "le chou serait né des larmes de Lycurgue, prince de Thrace, que Dionysos avait lié à un cep pour le punir de la destruction des vignes dont ce prince s'était rendu par coupable". En plein milieu de notre siècle, on attribuait encore au chou le pouvoir de dessoûler.
Un auteur a cependant relevé la croyance suivante : "Si vous voulez raccourcir la vie de votre mari, faites-lui manger des choux en mai et en juin"; préserve des fièvres. Pour remédier à la surdité, il faut mettre dans chaque oreille matin et soir quelques gouttes d'une préparation composée d'une cuillerée de suc de chou et d'une cuillerée de jus de citron. Un cataplasme de ses feuilles crues avec de l'oignon appliqué sur les reins soulage une crise d'appendicite sans exclure toutefois le recours à la chirurgie. Dans le Finistère, on chasse les verrues en les frottant avec la première feuille de chou trouvée dans un chemin et en la replaçant très exactement à l'endroit où on l'a trouvée. Une feuille de chou dans un chapeau permet d'éviter les coups de soleil, et conservée un quart d'heure sur la tête guérit la migraine. Les Luxembourgeois recommandent aux personnes souffrant de la goutte d'entourer de feuilles de chou rouge la partie malade ; les Tziganes serbes prescrivent l' "eau de choucroute" en cas de jaunisse, cette eau devant "rester cachée pendant trois jours dans une église où le culte est célébré ; un cierge allumé, placé à côté du philtre, en augmente l'efficacité". Enfin, selon un ouvrage publié à Anvers à la fin du XVIIe siècle : "L'urine de ceux qui ont mangé beaucoup de choux, conservée et chauffée, est très bonne pour les nerfs, si elle y est appliquée".
Un auteur a cependant relevé la croyance suivante : "Si vous voulez raccourcir la vie de votre mari, faites-lui manger des choux en mai et en juin".
Parmi les autres propriétés du chou, signalons que les braconniers qui en plantent avec les collets à chaque chemin d'un carrefour doivent trouver le lendemain un lièvre ou un diable à chacun de ces pièges. En Lozère, on vole les choux des sorciers soupçonnés de faire tarir le lait du bétail et on les donne à manger à ses vaches. Les femmes siciliennes l'aspergeaient de l'eau qui venait de servir à baigner un enfant malade, puis le jetaient sur le toit ; le petit patient devait mourir si le chou jaunissait dans les trois jours. Un chou qui pousse avec deux têtes sur le même pied est un présage de chance.
Le chou qui, symboliquement, est un légume funéraire, car l'âme peut passer dans le végétal - en poussant, il l'élève jusqu'au soleil -, est surtout associé à la fécondité, d'où la légende que les enfants naissent des choux, et parfois même à la sexualité : dans certaines régions, s'il pleuvait le jour d'un mariage, on disait que les jeunes époux avaient "mangé le chou au pot", c'est-à-dire qu'ils n'ont pas attendu que le couvert fût mis régulièrement, qu'ils ont déjà eu des rapports sexuels avant le mariage". Ce qui n'empêche pas qu'une femme en mal d'enfant ne doit pas en avoir sur elle pendant la conception car il détruit l'embryon.
En Angleterre, la nuit d'Halloween (précédant la Toussaint), les jeunes filles vont dans le potager, les yeux fermés, et arrachent le premier chou rencontré : "suivant qu'il est gros ou petit, tordu ou droit, ouvert ou bien pommé, le futur époux sera beau ou laid, fort ou maigrichon, sociable ou renfermé. Si beaucoup de terre grasse adhère à la racine, c'est le signe d'un prétendant riche ; si la tige du chou est lisse et douce, il aura bon caractère ; si elle est grumeleuse, pleine d'aspérités, il battra souvent".
Faire brûler des rognons amène la mort du maître de maison. Pour se souvenir de ses rêves, il faut dîner de choux (croyance du Mentonnais) mais il ne faut ni les cueillir, ni les consommer le jour de la Saint-Etienne (décembre) car ce jour-là, le premier martyr fut lapidé das un carré de choux. En Russie, le sang coulera d'un chou coupé le jour de la Saint-Jean.
En manger le mardi gras préserve des moustiques et des mouches durant tout l'été (nord de la France et Belgique) tandis que consommer du chou vert le jour des Cendres met à l'abri des maux de ventre et manger du chou la veille de Noël porte bonheur pour l'année (Brandebourg).
Les Vosgiens se gardent de repiquer les choux le mercredi ou le vendredi car ils ne grandiraient pas. Dans la Montagne noire, les choux plantés en mai deviennent bossus et dans les Côtes-d'Armor, on évite la période où la lune est en croissant, dans la Gironde, la période de jeune lune, car les choux piqués pendant ce temps seraient mangés par les poules.
Pour avoir de beaux choux, il faut les semer durant la semaine sainte, le mardi gras, et le jour de la Saint-Joseph (19 mars) pour les choux cabus, ou encore, comme en Vendée, le 1er avril car "qu'il fasse beau, qu'il fasse laid, ils viennent mieux". La veille de la Trinité et le jour de la Saint-Jean sont recommandés pour les transplanter. Au XIXe siècle, les femmes du Saalfeld (Allemagne de l'Est) les plantaient en disant : "Que la tige soit comme mes jambes, la tête comme ma tête, les feuilles comme mon tablier." Les Polonais posaient près des plants un grand pot recouvert d'un chiffon blanc et d'une pierre pour que les choux poussent "gros comme le pot, durs comme la pierre et blancs comme le chiffon".
Préparée au déclin de la lune, une choucroute sera excellente, alors qu'à la nouvelle lune, elle perdra son goût.
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Symbolisme alimentaire :
Pour Christiane Beerlandt, auteure de La Symbolique des aliments, la corne d'abondance (Éditions Beerlandt Publications, 2005, 2014), nos choix alimentaires reflètent notre état psychique :
Le Chou Blanc (appelé au Canada : Chou Vert) :
Le Chou Blanc représente l'exubérance, la gaieté, la force et l'enthousiasme ! Son élan vital intérieur lui fait sauter les jointures ! Il est sur le point d'éclater hors de son état potentiel et de descendre dans la rue en grande fanfare. Au son des clairons et des tambours, chantant à gorge déployée et dansant, l'on traverse, dans la sphère du Chou Blanc, les rues décorées de drapeaux et de guirlande. Le Chou Blanc veut que tout le monde participe, il est parfois déchaîné, mais c'est qu'il ne peut contenir son bonheur ! La vie bouillonne d'enthousiasme dans ses veines ; il ne se retient pas et se montre fort expressif. Un Bonheur vécu on ne peut plus physiquement : celui de la Vie même !
"Venez donc me rejoindre !" crie-t-il à la cantonade comme s'il voulait entraîner tout le monde dans ses sauts de joie.Ses sentiments pétillent et coulent à flots ; il semble être un peu "shooté", ou du moins "ivre" de bonheur. Rien ne saurait l'arrêter, rien ne sautait le freiner ; son attitude positive fait qu'il ne s'attire que de belles choses. Son cœur est plein : plein de Joie. Il "ressent" très intensément. Il s'exprime librement, de façon sincère et spontanée, face au monde extérieur. Il ressent son propre $être avec ne joie chaleureuse jusqu'au bout des doigts et des orteils. D'un caractère sociable, le Chou Blanc voudrait tant partager sa joie et son bonheur. Il est heureux et désire que les autres le soient aussi.
Quelqu'un qui est très friand de Chou Blanc a besoin d'un solide "appétit de vivre". En fait, il aspire à s'élever vers le bonheur absolu de vivre. Il souffre quelquefois de dégagements de gaz (flatulence) parce qu'il refuse d'absorber la vie totalement en lui. Peut-être dégage-t-il un odeur de mort : par le fait même qu'il refuse de vivre. Aussi le Chou Blanc lui demande-t-il de ne pas tarder à dire non à toute forme de chagrin, de pensées soucieuses, d'angoisse et de détresse...
Celui qu'attire le Chou Blanc veut participer davantage à la vie ; il veut pour ainsi dire faire joyeusement de la musique en compagnie des autres. Il veut être de la partie. Il veut se jeter à corps perdu dans la vie. Il désire pouvoir s'exprimer spontanément, de toutes ses forces : en jouant, en chantant, en dansant... sans dresser de pesantes barricades avec sa raison ! Il veut se lancer dans la vie, essayer, expérimenter, découvrir où se situent ses possibilités, rechercher par quelles voies il pourrait mieux s'exprimer. Il recherche des canaux d'expression ; il veut donner corps à ses énergies intérieures qui se raniment en bouillonnant pour pouvoir participer à un mouvement dirigé vers l'extérieur. Il chercher à se décharger dans la joie.
Celui qui a très envie de Chou Blanc ne s'est pas encore purgé de sa tristesse. Quelquefois, des organes comme l'estomac et la vésicule biliaire se contractent d'angoisse et de chagrin. Cette personne cherche un moyen pour sortir de cet état de contraction qui caractérise son attitude interne dans la vie. Le Chou Blanc l'incite à s'en libérer. cette personne est à la recherche de sa véritable Essence de Joie intérieure. S'il est vrai que chaque être humain porte en lui ce Noyau Vital pur et joyeux, il reste que presque tous ont perdu le contact avec leur propre Moi profond intrinsèquement joyeux. L'être humain s'est empêtré dans la convoitise et dans l'angoisse, en se focalisant sur l' "Avoir" au lieu... d' "Être". Il s'est pour ainsi dire perdu lui-même.
Le Chou Blanc l'incite à se rallier fermement à ce noyau originel qui réside en lui et qui se nomme Vie, qui se nomme Joie ! Dès lors, comme dirigée par des forces nucléaires, la Vie se déverse dans son corps ; l'être humain se sent devenir, il se sent Être... il éclate de Joie comme une note de musique qui jaillit au dehors avec force dans la plus belle, la plus intenses des sonorités.
Il perçoit intensément la vraie Vie en lui, dans son corps ; il EST simplement pure Joie puisqu'il est branché sur la fréquence de la Vie, de son Moi Vivant. Ceci signifie : il n'exige pas, il ne demande pas, il ne veut pas avoir, il est content de lui-même et s'ouvre simplement, dans la gratitude, à tout ce qui reste à venir. Il ne fige rien, il est parfaitement heureux de par son seul Être. Rien ne saurait plus perturber cet équilibre joyeux. Il bat le tambour de plaisir ; il sonne la trompette en traversant la ville, escorté de lutins dansants.
Celui qui aime le Chou Blanc éprouve le besoin de se détendre, de reprendre haleine, de s'ouvrir d 'un coup... de sorte que tout son flot d'énergies puisse s'épandre vers l'extérieur. Il a besoin de s(abandonner à la Vie en lui. Il veut parvenir à une pure Confiance et se livrer sans la moindre résistance à ce flux puissant et vivant. Il vit pleinement la beauté et la force de son JE ; rien ni personne ne saurait le faire sortir de son champ heureux car il se sait branché sur cette seule Source de Joie à l'intérieur de lui.
"Ose être toi-même, ose te manifester ! Porte-toi vers l'extérieur avec enthousiasme et ne te soucie pas de l'accessoire", dit le Chou Blanc. "Pénètre dans ces sphères de Joie et entre avec moi dans le monde en dansant. laisse la Joie emplir ton Cœur sans réserve ! Permets-toi de jouir EN VERTU DE TOI-MÊME, de la Vie en toi. Laisse tes énergies vitales circuler librement et abandonne-toi au Bien qui réside en toi. Extériorise-toi et cesse de prêter attention au négatif."
Le Chou Blanc demande que l'on se purifie à fond de toutes pensées sombres et pressentiments funestes. Il veut que l'on en finisse avec tout cela. "Ouvre-toi uniquement au meilleur, au plus beau en toi. c'est toi qui détermines la vie, dès lors, fais-en le maximum ! Escompte tout ce qu'elle t'offrira de meilleur et ne prends aucune part à la sinistrose ambiante dans tout ce qu'elle a de lugubre, de ténébreux et d'angoissant. La vie deviendra de plus en plus belle, pourvu que tu sois réceptif à ce qu'il y a de plus beau et que tu ne nies pas les signaux que tu rencontres sur ton chemin. Ne dirige pas ton attention vers les ténèbres, vers ce qui n'est pas encore tout à fait correct pour l'instant, mais ouvre-toi au changement intérieur. Prends conscience de ton précieux Contenu. ne t'attarde pas au négatif, sinon les énergies risquent de s'agglomérer en barrage".
Le Chou Blanc demande à l'être humain d'avancer imperturbablement, en toute confiance, avec toutes ses forces et dan la pure Joie de son Être : renforce tout ce qui est bon et beau en toi, et cela se multipliera. Manie ces énergies, donne-leur libre cours... ne te refrène pas ! En effet, l'envie de Chou Blanc souligne que pour ton propre bonheur et ta santé, il ne faut surtout pas que tu t'arrêtes, ou que tu te bloques, te paralyses ou te retiennes de façon introvertie, en cogitant et en tergiversant. Avance donc, avec toute ta force, dans l'exubérance ! La pure concentration de Joie dans ton corps rayonne... et continue de s'exprimer dans tes actes, dans tes propos, dans ta façon de traverser la vie. Tu respires la santé ; tu as foi en la beauté et en la force de ton JE ; ta peau luit de plaisir, de force et d'amour de la Vie ! Cette rayonnante Force de Joie qui caractérise l'atmosphère du Chou Blanc réside aussi en toi !"
Le Chou de Bruxelles :
Le Chou de Bruxelles demande un retour direct et immédiat eu Point central de l'être. Il nous pousse très profondément en nous-même. "Tu ne devras RIEN chercher au-dehors, tu ne dois pas continuellement parler des autres ni tout le temps t'adresser à eux, tu ne dois pas constamment t'occuper des autres dans tes sentiments et tes pensées... Tu feras bien de revenir radicalement à ton point de départ, en ton centre profond, à l'endroit où, précisément, tu es seul avec toi-même. Reviens vers tes profondeurs. retourne à ton Origine, ton Moi le plus profond. Ne dirige pas sans cesse ton attention vers les autres ; au lieu de parler continuellement, tais-toi donc très "consciemment" et très intensément... Écoute la voix du Noyau profond de ton Être ! Prends conscience de ce que : "JE... SUIS" ! Ne reste pas à vivoter dans les couches superficielles de ton Être grandiose !"
A suivre
Le Chou de Chine :
Le Chou de Chine a une action abortive : il dit "non", de manière résolue et coupante, à tout ce qui n'a pas sa place en lui. Cette plante opère ; elle ampute tout le mal, le faux, tous les éléments morts ou mensongers Elle n'admet aucune contradiction et se montre sur ce point extrêmement sévère et délicate. Elle porte son attention sur les options radicales, sur les options à 100%. Ici, le juste milieu n'existe pas. Elle ne daigne même pas prendre les choses en considération? Elle sait très bien ce qu'elle veut ; elle peut paraître quelque peu arrogante, mais toute autre manière d'être ne l'intéresse même pas. Un parasite n'oserait même pas l'approcher. la sphère psychique du Chou de Chine est dure, incisive, inexorable et irréversible. Se servant d'un couteau tranchant il fixe ses limites et promulgue ses lois. Il a des principes ; il suit les lois de la vie qui existent dans son for intérieur, et il n'y a pas à y revenir. Il sévit contre les fadaises, les sornettes, les pitoyables mensonges superficiels, les fabulations, les subterfuges, les esquives, les raisons inventées pour se soustraire à ce qu'on devrait faire ; il ne tolère ni délai ni demi-décisions. Il demande d'agir immédiatement, de sang-froid et de façon conséquente, quand il le faut ; inutile d'essayer de lui en faire accroire. Ni manipulations, ni propos ambigus, ni crime... sinon ce ne sera plis la peine de frapper à sa porte ! Il demande la correction sans sursis ; il ne supporte pas les demi-vérités ; il te saisira par le menton quand tu n'oses ou ne peux le regarder droit dans les yeux parce que tu as quelque chose sur la conscience.
A suivre
Le Chou Rouge :
Le Chou Rouge représente une attitude vaillante, vigoureuse, enjouée et assurée de l'être humain qui porte son puissant contenu dans un corps d'une force à toute épreuve. Il aime le progrès et porte la vie avec légèreté sur ses épaules. Toujours joyeux, il a foi en ses forces titanesques, en la force de son apparence matérielle. La vie chante à travers son corps. Quelqu'un qui se trouve dans l'ambiance psychique du Chou Rouge aborde la vie avec confiance. Gai et plein d'entrain, toujours de bonne humeur, il se réjouit à l'avance des choses à venir. Son cœur bondit de pure joie. Il déborde d'Energie vitale et est prêt à "s'attaquer" à tout, à se lancer dans la vie de tout son cœur, avec un profond sentiment de contentement. Son corps est traversé d'émotions empreintes de Joie ; il est plein d'assurance et se sent parfaitement heureux d'Être. Il sent véritablement les forces vitales circuler dans ses veines, dans ses muscles, dans tout son corps ; il se sait porté par la vie en toute légèreté. Son pas est élastique, ses sentiments toujours fringants ; il pourrait terrasser le monde entier ; il a le sentiment d'être doué d'une force herculéenne et de tout pouvoir entreprendre ! La vie lui sourit... : toutes les portes s'ouvrent devant lui et il a bien l'intention d'en profiter ! Ses poumons s'ouvrent ; ses forces sont sollicitées et activées dans la sphère psychique du Chou Rouge. Sa solide Façon d'Être terrestre est indissociable de sa pure et rayonnante Joie de Vivre.
A suivre.
Le Chou Vert (appelé au Canada : Chou de Savoie) :
De caractère, le Chou Vert n'est pas trop gentil ; il ose se défendre âprement et ne se laisse pas marcher sur les pieds. Il sait tracer ses limites et exprimer son opinion vertement, de façon déterminée et incisive. On s'aperçoit sur-le-champ qu'on ne l'a pas respecté ou qu'on franchit ses limites à lui : il ne manquera pas de nous aboyer dessus, de nous rappeler à l'ordre. Le Chou Vert est conscient de sa personne, de son existence, de ses droits. Lorsque quelque chose ne se déroule pas correctement ou qu'il se rend compte que cela ne concorde pas avec sa propre opinion, il n'hésitera pas à nous le dire aussitôt. Il lui suffit d'un geste, d'un mot pour nous signifier sèchement que ce n'est pas la peine d'essayer de lui faire croire n'importe quoi, de le manipuler, de jouer avec ses pieds. Il a son opinion bien à lui et parle en toute sincérité à partir de qui il est ! Fidèle à son point de vue, il ne se laisse pas influencer par d'autres.
Il vit intensément à partir de son propre sentiment ; on ne peut le qualifier de fade, de mou, de faible, bien au contraire : il a du caractère. Son énorme force concentrée s'exerce résolument, quelquefois par l'expression d'une dure vérité, comme n gant de boxe projeté en avant, ce qui pourrait effrayer quelque peu.
A suivre
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Mythes et légendes :
D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),
CHOU. — Les anciens Ioniens, dans leurs serments, invoquaient le chou ; Nicandre appelle le chou une plante sacrée. Dans une représentation funéraire sur le couvercle d’une urne au Capitole, où est figuré le cours de la vie humaine, on voit un enfant qui tient à la main une tête de chou. Une légende hellénique raconte que le chou est né des larmes de Lycurgue, prince de la Thrace, que Dionysos avait lié à un cep pour le punir de la destruction des vignes dont ce prince s’était rendu coupable. Ce conte est né sans doute de la notion populaire que le chou, ainsi que le laurier, est nuisible à la vigne. C’est pourquoi aussi les anciens Grecs et les Égyptiens employaient les choux comme un remède tout-puissant, on le croyait du moins, contre l’ivresse causée par le vin.
Dans plusieurs contes populaires, le petit héros naît parfois en forme de petit chou qui devient grand, et, à l’aide de ce chou devenu à la fin colossal, il monte au ciel. Ici le chou semble avoir une signification phallique et funéraire, ainsi que dans le conte anglais de la veuve et de ses trois filles, publié par M. Brueyre. Les trois filles de la veuve sont envoyées au potager garder les choux contre le cheval gris qui vient les avaler. Elles touchent le cheval et restent accrochées à lui ; le cheval les traîne à la colline verdoyante, il ordonne à la colline de s’ouvrir : alors les filles de la veuve sont introduites dans un palais enchanté. En italien, les expressions andar tra cavoli (aller parmi les choux), andare a rincalzare i cavoli (aller renchausser les choux), signifie mourir. Une chanson populaire française, qui est en même temps un exercice de mémoire, commence par : « Biquette qui ne veut pas sortir des choux. » D’après les superstitions populaires de la campagne de Lecce, l’une des oreilles monstrueuses du nannercu (nonno orco, grand-père ogre), sort de la terre sous la forme de chou-fleur.
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Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :
Dans l'histoire de Fortunée, un chou qui parle est un garde auquel une fée qui voulait secourir une princesse a donné cette forme.
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Littérature :
François Rabelais, dans Le Quart Livre (1552) célèbre le bonheur des planteurs de choux :
Panurge, après avoir, du contenu de son estomac, bien rassasié les poissons mâche-merde, resta accroupi sur le tillac, tout affalé, tout effondré et à demi mort ; il invoqua tous les benoîts saints et saintes à son aide, jura de se confesser en temps et lieu, puis s'écria en grande agitation :
« Majordome, ho mon ami, mon père, mon oncle, apportez un peu de salé : nous ne boirons tantôt que trop à ce que je vois. Peu manger, mais bien boire sera désormais ma devise. Plût à Dieu et à la Vierge bénie, digne et sainte, que je fusse maintenant, je veux dire à cette heure même, en terre ferme, bien à mon aise.
« Oh, que trois et quatre fois heureux sont ceux qui plantent choux ! Ô Parques, pourquoi ne dévidâtes-vous pas pour moi le fil d'un planteur de choux ! Oh que petit est le nombre de ceux çà qui Jupiter a accordé cette insigne faveur de les destiner à planter choux ! Car toujours un pied en terre et l'autre n'en est pas loin. Disserte sur le bonheur et le souverain bien qui voudra ; mais quiconque plante choux est selon mon décret déclaré bienheureux, à bien plus juste raison que Pyrrhon, qui, se trouvant face au même danger que nous, et voyant près du rivage un pourceau qui mangeait de l'orge répandu à terre, le déclara bienheureux pour deux motifs : à savoir qu'il avait de l'orge à foison, et surtout qu'il se trouvait à terre. »
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LE CHOU
Un chou se prenant pour un chat
léchant son museau moustachu,
sa bedaine de pacha,
à ses feuilles s’arracha,
pour prouver que sous son poncho
couleur d’artichaut,
son pelage était doux et chaud,
sa queue de soie,
sa robe blanche.
En miaulant à belle voix,
le chou se percha sur un toit,
puis dansa le chachacha
de branche en branche.
Or, le chou n’était pas un chat
aux pattes de caoutchouc,
sur la ramure il trébucha
et c’est ainsi que le chou chût
fâcheusement et cacha
sa piteuse mésaventure
dans un gros tas d’épluchures.
Charles Dobzynski, "Le Chou" in Fablier des fruits et légumes, 1981.
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