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Le Glaïeul



Étymologie :

  • GLAÏEUL, subst. masc.

Étymol. et Hist. xiie s. glaviuz (Gloss. de Tours, 331 ds T.-L.) ; ca 1200 glagous (Escoufle, 8837, ibid.) ; xiiie s. glaiol (Didot Perceval, 72, ibid.). Du lat. gladiolus « épée courte » désignant aussi le glaïeul et diverses plantes à feuilles pointues (André Bot.) ; cf. l'a. fr. glai « glaïeul » (fin xie s. Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D.S. Blondheim, t. 1, 545 p. 76 : glaid et textes du xiie s. ds T.-L.), du lat. « épée » qui en b. lat. a prob. pris comme son dér. une accept. botanique.


Lire également la définition du nom "glaïeul" pour amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Gladiolus ;


Botanique :


Édouard Grimard, auteur de L'esprit des plantes, silhouettes végétales. (Éditions Mame, 1875) propose sa vision des Glaïeuls :


Plus admirable encore que les Iris est le Glaïeul, dont la corolle jette au soleil des lueurs empourprées. Le Glaïeul commun, qui, dans le Languedoc et en Provence, dresse tout le long des chemins, des haies et des ruisseaux ses merveilleuses grappes roses, est arrivé sans transition et sans perfectionnement à la dignité de fleur de parterre, où ses couleurs splendides ont fait pâlir toute rivalité.

Mais le héros parmi les Iridées, le phénomène de la famille, c'est à coup sûr le Glaïeul changeant du cap de Bonne-Espérance, qui doit cette épithète au singulier phénomène qu'offrent ses fleurs, en changeant insensiblement de coloration selon les heures de la journée, et qui, brunes le matin, deviennent d'un bleu clair vers le soir.

 









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Usages traditionnels :


Dalila Abdessemed, dans son Etude phytochimique de gladiolus segetum. (2014, Thèse de doctorat ; Université de Batna 1), rapporte des usages africains du glaïeul :


Gladiolus dalenii, utilisé en Afrique du sud (Venda), exploitation du bulbe pour le traitement des blessures sous forme de poudre, en macération pour instillation oculaire et auriculaire. En Afrique de l'est (Mozambique) pour le traitement de la diarrhée, de la dysenterie et du choléra. Au Madagasca sous forme de pommade pour le traitement des abcès. En Afrique du sud (zones Zulu, Xhosa et Sotho) pour le traitement des maux de tête et lumbago. En Afrique centrale (Burundi occidental) exploitation des tiges, en macération dans l’eau, voix orale, tiges en décoction pour lavement. En Afrique centrale (République Démocratique du Congo (ex. Zaïre) (Rusizi, Kivu) en médecine vétérinaire, pour traitement de la stérilité, tubercule épluché, mixture dans le vagin. Pour le traitement du rhume, tubercule pilé, jus, en instillation nasale.

Gladiolus psittacinus en Afrique centrale (Rwanda) pour le traitement de la toux, consommation du bulbe écrasé par voix orale.

Gladiolus segetum L. (bulbe) utilisé en Afrique du nord (sud est de l’Algérie) pour le traitement de l’ulcère gastrique et la stérilité.

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Symbolisme :


Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :


Glaïeul jaune des jardins - Mépris.

Cette fleur, à demi cachée dans son feuillage, passe inaperçue des promeneurs, qui la cueillent rarement.

 

Selon Pierre Zaccone, auteur de Nouveau langage des fleurs avec la nomenclature des sentiments dont chaque fleur est le symbole et leur emploi pour l'expression des pensées (Éditeur L. Hachette, 1856) :


GLAYEUL - INDIFFÉRENCE.

Plante de la famille des iridées, dont les feuilles sont longues, étroites et pointues comme un glaive. Le glayeul commun est le seul qui croisse naturellement en France.

 

Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Glaïeul - Défi - Provocation.

Magnifique plante aux feuilles minces, larges et aiguës, taillées en forme de glaive, d'où son nom latin gladiolus. Elle est cultivée par les amateurs et on en possède de riches variétés. L'espèce sauvage connue dans le Midi porte un épi de fleurs rouges, placées toutes sur un seul côté , comme tous les glaïeuls. Le port de cette plante est fier et élancé.

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Dans Le Livre des Fleurs (Librairie philosophique J. Vrin, 1989), Georges Ohsawa (Nyoiti Sakurazawa) tente d'initier les Occidentaux à cet art ancestral particulièrement subtil :


Ainsi, il nous apprend qu'on prête aux fleurs "non seulement une beauté personnelle, mais des qualités, des mouvements d'humeur, un caractère complet, une âme, minuscule reflet de la grande âme de la nature.

Ainsi le glaïeul est appelé quelquefois datedôgu, coquette. A d'autres moments on l’appellera oyodo, calme liquide. On lui dira encore hoosu, nouveau-né de hoô, oiseau sacré, ou bien saru-odori, le singe qui danse.

 

Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :


Les glaïeuls, qui "inclinent à l'amour les femmes auxquelles on en offre", passent dans certaines régions (Touraine) pour porter malheur. A la fin du siècle dernier toutefois, les feuilles de glaïeul figuraient parmi les amulettes permettant au conscrit de tirer un bon numéro.

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Selon Des Mots et des fleurs, Secrets du langage des fleurs de Zeineb Bauer (Éditions Flammarion, 2000) :


"Mots-clefs : Le Défi ; La Provocation.


Savez-vous ? : Autrefois, dans certaines provinces françaises, quand une femme recevait une gerbe de fleurs avec un glaïeul, elle savait que le nombre de fleurs indiquait l'heure de la rencontre avec l'élu de son cœur.


Usages : Le glaïeul est la fleur préférée des marins. Autrefois, les marins bretons ne montaient jamais dans un bateau sans avoir vérifié auparavant la présence d'un vase rempli de cette fleur. C'est sans doute en souvenir de cette tradition que les riches armateurs et les propriétaires e luxueux yachts en ornent toujours leurs bateaux.


Légendes : A l'époque baroque, une légende rapporte que les sept glaives qui devaient transpercer le cœur de Marie furent transformés en sept flamboyants glaïeuls rouges. Et c'est ainsi que cette fleur prit et a toujours une grande place dans les nefs des églises.


Message : Mon cœur vous défie."

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D'après Nicole Parrot, auteure de Le Langage des fleurs (Éditions Flammarion, 2000) :


"Cette fleur aux tons chatoyants, rose, rouge, jaune, orangé, exprime un amour vigoureux et autoritaire. Pressée d'arriver à ses fins, elle commence par fixer un rendez-vous. On raconte dans les palais d'Orient que les belles prisonnières du harem comptaient les fleurs accrochées à la tige du glaïeul placé au centre du bouquet offert. Leur nombre indiquait l'heure du rendez-vous secret. Le glaïeul aux feuilles en forme d'épée - son nom vient du latin gladiolus, glaive - affirme son goût de l'aventure joyeuse et victorieuse ainsi que le plaisir de la créativité. C'est la fleur de l'énergie en action et des hymnes la vie clamés haut et fort. Elle affiche une ambition téméraire et sans borne et ne craint pas la mort au service des libertés et de l'amour.

Le glaïeul semble avoir des affinités avec le dieu de la mer, Neptune. Il a , et depuis longtemps, l'habitude de voguer en haute mer. Tout au long de ses voyages, il décorait les tables des salles à manger du légendaire paquebot Normandie. Un brevet d'élégance qui fit école. Aristote Onassis, lorsqu'il recevait Winston Churchill, la Callas ou Jackie Kennedy en a relancé la mode. Et, désormais, trônant en faisceau dans des vases de cristal, il figure immanquablement sur les ponts des yachts de milliardaires. Riche de ses nombreuses fleurs en épis, notre glaïeul n'était, à son arrivée d'Afrique du Sud à la mi-XVIIIe siècle, qu'une fleurette triste et d'un blanc jaunâtre.

Grâce au talent de génération de botanistes, organisateurs de multiples croisements, il a acquis sa belle prestance et ses glorieuses couleurs. De quoi pavoiser à Monte-Carlo, Saint-Tropez ou Portofino."

Mot-clef : "Amour victorieux"

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Doreen Virtue et Robert Reeves proposent dans leur ouvrage intitulé Thérapie par les fleurs (Hay / House / Inc., 2013 ; Éditions Exergue, 2014) une approche résolument spirituelle du Glaïeul :

Nom botanique : Gladiolus spp.


Propriétés énergétiques : Elève votre énergie, amplifie le bonheur, soulage de la dépression et de la tristesse, guérit les peines de cœur.

Archanges correspondants : Jophiel, Michael et Raphaël.


Chakras correspondants : chakra du plexus solaire ; chakra du cœur.


Propriétés curatives : Le glaïeul est une fleur splendide avec ses longues tiges d'un vert profond et ses nombreuses inflorescences colorées. Cette plante bienfaitrice libère les émotions négatives. Elle ne résout pas tout, mais permet de faire un pas dans la bonne direction. en vous débarrassant de l'obscurité qui vous habitait, vous révélez votre lumière. Laissez briller votre être et votre âme. Il est temps de partager votre joie avec le monde et de répandre votre beauté sur les autres. Le glaïeul est parfait pour soulager les émotions et les énergies lourdes telles que la tristesse, ce qui en fait un cadeau merveilleux pour un ami qui en a besoin.


Message du Glaïeul : « J'améliorerai votre humeur en un clin d'œil. N'écoutez pas vos pensées selon lesquelles un énorme travail vous attend. Ces voix sont les vibrations les plus basses émises par votre ego. Je vous aiderai à vous débarrasser d'elles pour que vous ayez accès à la joie véritable qui vous habite. Vous ressentirez rapidement du bonheur et du bien-être. Il nous suffira de retirer les couches d'énergies négatives qui vous encerclent. Il s'agit d'un processus simple et facile, et vous ressentirez instantanément une transformation se produire dans votre corps et votre esprit. Profitez de la légèreté que je vous apporte. Vous oublierez bientôt vos émotions et expériences difficiles, pour ne vous rappeler, à partir de maintenant, que de votre état de bonheur profond. »

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Littérature :


Octave Mirbeau propose un conte humoristique, intitulé "Mon jardinier" autour des glaïeuls :


"... Comme le jardinier qui entend la chanson des germes sous la terre,

et la chanson des étoiles matinales dans le ciel." (Emerson).

Mon jardinier, le bon Clément, met des tuteurs aux glaïeuls. Cette année, les glaïeuls font triste mine ; le pied est tout jaune, les grandes feuilles, à forme de glaive, retombent, sans force, çà et là marbrées de rouille, et les hampes sortent, tortillées et veules, montrant les spathes roussies par les coups de soleil. Cela désole ce bon Clément de voir dépérir chaque jour des plantes qu'il a soignées comme on soigne un enfant malade et douze fois impur, dirait monsieur Maizeroy. Il murmure en mâchant des brins de raphia : - Oh !... Oh !... Oh !... Et je murmure avec lui, car je sens que je n'aurai pas la joie de voir fleurir ces fleurs que j'aime parmi toutes les fleurs, ces fleurs que créa ce suprême artiste, Victor Lemoine, et auxquelles il donna le visage des fées et les ailes des oiseaux magiques. Avec de délicates précautions, pour ne point froisser l'oignon, Clément enfonce lentement, dans la terre, le tuteur et il attache ensuite la hampe fragile. Chaque fois, il soupire comme un refrain de navrante romance : - Des beaux glaïeuls comme ça !... Si ce n'est pas une calamité !... Oh ! oh ! oh! (en faire une chanson ?) J'approuve chaleureusement, en les répétant, ces exclamations désolées, et je demande : - A quoi attribuez-vous cela, Clément ? - J'attribue... j'attribue..., fait Clément, en hochant la tête... Ma foi, Monsieur, je n'en sais rien... Et il faut que le diable s'en mêle... Puis ayant longuement considéré le sol, examiné les feuilles malades, gratté la terre au pied des tristes plantes, il dit : - Ça n'est pas de la verrue... Ça n'est pas, non plus, du ver blanc... Si c'était du puceron ou du mildew, ça se verrait !... De plus, la terre est parfaitement bonne, elle est douce, elle est meuble, elle a toujours été fraîche !... Il y a un bon paillis, partout, bien sain, bien joli... C'est à ne pas croire !... Oh ! Oh! Oh! - Cependant, Clément, il y a une cause. Clément se redresse, met dans la poche de son tablier sa serpette, pose ses mains à plat sur ses hanches, en écartant les coudes... et d'un ton grave, sévère, professoral : - Si Monsieur veut connaître mon opinion... Eh bien, je crois qu'il y eu un contact... Voilà ce que je crois. - Un contact, Clément ? - Oui, Monsieur, un fort contact... Ça ne peut s'expliquer autrement... - Clément, vous m'effrayez... Et quel est ce contact ? Clément ne répond pas à ma question. Je vois à sa figure, à la disposition de ses gestes, à la manière dont il cale ses pieds sur la terre, entre les rangées de glaïeuls, qu'il va me conter une longue histoire. En effet, il s'essuie la bouche et commence ainsi : - En 1854, Monsieur..., oui c'est bien en 1854... j'étais jardinier-chef chez monsieur Quesnay... Vous avez peut-être connu monsieur Quesnay ? - Non, Clément. - Il avait fait sa fortune dans les cuirs... Ah ! le bon homme !... Ah ! le bon monde que c'était ! Tous les matins, monsieur Quesnay venait me voir au jardin, comme fait Monsieur... Seulement il avait une robe de chambre à carreaux verts et une toque de velours. Et il me disait, avec son bon sourire... Ah ! le bon sourire qu'il avait !... «Eh bien, Clément, et la goutte ?...» Moi je répondais : «Ma foi, Monsieur Quesnay, c'est pas de refus !» Et monsieur Quesnay sortait de la poche de sa robe de chambre à carreaux verts une bouteille de vieux cognac, et un verre : «Faudra pas le dire à Germaine !», qu'il me recommandait... Et je buvais la goutte !... Ah ! le bon cognac !... Ah ! le bon homme !... C'est comme mademoiselle Germaine !... Ah ! la bonne demoiselle que c'était ! Et belle !... A quatorze ans, Monsieur, elle était aussi grande que moi... Et forte, et rouge, avec des mains larges comme ça... Mazette la belle fille !... Toutes les après-midi, mademoiselle Germaine venait me voir, tantôt au fleuriste, si j'étais au fleuriste, tantôt au potager, si j'étais au potager : «Eh bien ! Clément, qu'elle me disait, on boirait peut-être bien un verre de vin blanc ?» Et, en riant, elle sortait d'un petit panier d'osier, une bouteille et un verre... «Faudra pas le dire à papa, surtout !» qu'elle me recommandait... Ah ! le bon monde !... Il n'y a plus de bon monde comme ça, maintenant !... Cette pauvre demoiselle Germaine !... On l'a mariée à un muet !... Paraît qu'elle en était très amoureuse !... Un gentil garçon tout de même, et riche, riche !... Malheureusement, il ne parlait pas... Il ne pouvait dire que : «Jiâ... jiâ... jiâ !...» Ah ! le bon muet !... Tenez, le jour de son mariage...

Mais j'interromps son histoire qui, si je la laisse aller librement, va s'augmenter de mille autres histoires et ne finira jamais. - Tout cela, mon bon Clément, ne me dit pas quel est ce fameux contact. - C'est vrai ! s'excuse Clément... Quand je pense à monsieur Quesnay et à mademoiselle Germaine, ça me rappelle tant de choses !... tant de bonnes choses !... Ah ! le bon monde, Dieu de Dieu ! Et pour prouver, d'une façon irrécusable, l'excellence de ce bon monde des Quesnay, il lance, d'un mouvement enthousiaste, sa casquette dans l'allée, et s'arrache les cheveux. - Parlez-moi du contact, mon brave Clément. Clément ramasse sa casquette et, d'une voix plus calme, il raconte : - Eh bien, voici... En 1854, monsieur Quesnay fit venir de Belgique des boutures de pétunias... A cette époque, c'était une fleur très rare... Ah ! la belle fleur ! - Heu !... Heu ! fais-je, en manière de protestation. - Je sais que Monsieur n'aime pas les pétunias... Mais Monsieur peut me croire... En 1854, les pétunias étaient une très belle fleur. - Soit ! Clément, continuez. - Je plante les boutures - avec quel soin - en corbeille, devant la maison... Elles poussent, elles poussent !... Ah ! la belle corbeille ! Tout le monde était bien content... Du pays, on venait voir les pétunias pousser. Tout à coup, ils ne poussent plus... et non seulement ils ne poussent plus, mais ils jaunissent, mais ils pourrissent et, à la fin des fins, ils crèvent, excepté un, un seul !... Ah ! dame ! monsieur Quesnay n'était plus content, ni moi, fichtre !... Qu'est-ce qui pouvait être la cause de ça ? Je me creuse la tête !... Pas de vermine, une bonne exposition, de la terre parfait-bonne !... C'était à devenir fou, ma foi !... Et je n'étais pas loin de penser qu'il y eût, là-dessous, quelques diableries !... Quand, un soir, tard, qu'est-ce que je vois sur la corbeille des pétunias ? La cuisinière, Monsieur, la cuisinière accroupie et qui pissait, et qui pissait, et qui disait : «Tiens, en voilà du madère, pour tes fleurs !... Tiens, en voilà du chablis !...» Et cela faisait un petit bruit, semblable à celui que fait la pluie qui sort d'une gouttière... Le lendemain, le pied de pétunia était tout jaune ; le surlendemain, il crevait de la même manière que les autres !... Voilà, Monsieur, ce que nous autres, jardiniers, nous appelons un contact, en terme de métier... Eh bien, les glaïeuls de Monsieur ont eu aussi un contact... un fort contact même !... Ça, c'est sûr ! Quelques secondes d'un silence tragique se passent, les guêpes bourdonnent autour de nous ; les feuilles des espaliers craquent, sous l'ardent soleil. Avec une dignité superbe, Clément s'est remis à enfoncer les tuteurs dans la terre, un brin de raphia entre les dents. - Clément ! - Monsieur ! - Alors, vous croyez que Julie ?... - Je ne l'ai pas vue... je ne peux rien dire... Mais pour un contact... il y a eu un contact dans les glaïeuls, Ça, j'en réponds ! Et, d'une voix hargneuse, qu'accompagne un geste de colère, il ajoute : Je ne vais pourtant pas pisser dans son pot-au-feu, moi !

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Le Glaïeul


Père Glaïeul, où est ton fils ?

Il est au Cap, il est à Gand,

Il est à Nice et à Tunis, Et il est à Senlis.

Il est perroquet dans une oasis,

Glaïeul Cardinal, beau glaïeul de Gand.


Robert Desnos, "Le Glaïeul" in Chantefables et chantefleurs, 1952.

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Régine Detambel consacre un ouvrage à Colette. Comme une flore, comme un zoo (Éditions Stock, 1997) dans lequel elle s'intéresse aux métaphores botaniques et zoologiques :


Le gosier pourpre du Glaïeul

« Les fleurs : glaïeuls à petits gosiers enflammés, béants, au-dessus desquels les glycines versent de longues gouttes calmantes... » Belles Saisons


« A vous parler vendanges je viens de rencontrer sur un cep d'autrefois, dans un touffu juponnage de feuilles, un gros lézard vert, que j'empoignai à tâtons. Je criai de saisissement, une femme crie toujours. Mais je ne lâchai pas une prise qui était de belle taille, écailleuse finement, pourvue de longs doigts qui essayaient de desserrer les miens, d'une majestueuse queue verte, d'une tache bleue sur chaque tempe, d'un gosier pourpre de petit glaïeul... » Le glaïeul n'est qu'un gosier de saurien ou de reptile. Il n'est jamais présenté autrement qu'une gargouille obsédante. Pas de glaïeul sans peur d'être gobé.

« ... L'intendant marocain lui prit d'une main le menton, appuya son autre main sur le front, et ouvrit l'adolescent comme on ouvre un fruit pourpre à pépins blancs, pour nous montrer qu'il était beau jusqu'au fond, jusqu'aux molaires inattaquables, jusqu'au gosier rouge comme la gorge d'un glaïeul. Il vient de loin, ce geste de marchand d'éphèbes. Mais il n'a pas perdu sa sensualité maquignonne, son habileté à troubler le spectateur » remarque Colette. Ce geste de l'intendant marocain, je le vois moins comme un acte maquignon que comme le geste professionnel d'un expert en herpétologie, ouvrant la gueule du serpent, serrant la tête de part et d'autre pour obliger les mâchoires à s'ouvrir, dégager les crochets et recueillir le venin.

Si le glaïeul a un gosier, le gloxinia, à corolle en forme de tube, arbore une gueule : « ... Voyez ce gloxinia géant, qui bée comme un petit maelström à la corne d'un grand carré de soie ! Les bords de sa gueule sont teints aux couleurs du prisme, comme il arrive aux phénomènes cataclysmaux. Il est aussi beau qu'un arc-en-ciel et qu'un œil de pieuvre. »

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