Anne
La Mante religieuse
Étymologie :
MANTE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1734 (Réaumur, Mémoires pour servir à l'hist. des insectes, t. 1, p. 19). Empr. au lat. des naturalistes mantis (att. dès la 1re éd. du Systema naturae de Linné en 1735, v. Fr. mod. t. 18, p. 236) qui l'ont pris au gr. μ α ́ ν τ ι ς « prophétesse, devineresse ; mante [insecte] (chez Théocrite) », cet insecte ayant été ainsi nommé à cause de son attitude hiératique.
Lire aussi la définition du nom pour dénicher quelques pistes symboliques.
Autres noms : Mantis religiosa ; Agent du Diable ; Bigote ; Cheval du diable ; Prie-Dieu ; Tigre de l'herbe.
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Croyances populaires :
Selon Jean Baucomont, auteur d'un article intitulé "Les formulettes d'incantation enfantine", paru dans la revue Arts et traditions populaires, 13e Année, No. 3/4 (Juillet-Décembre 1965), pp. 243-255 :
La tradition orale se perpétue dans le folklore de la vie enfantine. […] Une des catégories les plus curieuses de ces formulettes est celle des formulettes d'incantation.
L'incantation, nous disent les dictionnaires, signifie étymologiquement : un enchantement produit par l'emploi de paroles magiques pour opérer un charme, un sortilège. Le recours à l'incantation postule une attitude mentale inspirée par l'antique croyance au pouvoir du verbe, proféré dans certaines circonstances.
[…]
« L'incantation, dit Bergson, participe à la fois du commandement et de la prière. »On constate effectivement, que la plupart des formulettes d'incantation comportent à la fois une invocation propitiatoire : promesse d'offrande en cas de succès et une menace de sacrifice expiatoire, d'immolation en cas d'échec. Ce qui est proprement le caractère de l'opération magique traditionnelle.
[…]
Prie-Dieu
Toi qui sais tout
Où est le loup ?
(Provence)
Traduction de Frédéric Mistral : Mémoires et récits. On dit que la mante religieuse peut prévenir d'un danger.
Dame de loup
Fais ta prière.
(Vivarais)
Guillaumette prie Dieu
Pour les morts et pour les vivants.
(Languedoc)
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Symbolisme :
Selon Ted Andrews, auteur de Le Langage secret des animaux, Pouvoirs magiques et spirituels des créatures des plus petites aux plus grandes (Édition originale, 1993 ; traduction française, Éditions Dervy, 2017), la mante religieuse est associée aux caractéristiques suivantes :
Points clés : Le pouvoir de la quiétude et de l'immobilité.
La mante apparaît dans la mythologie et le folklore. En Chine, un art martial est articulé autour de ses activités Le Kung Fu lui-même est fondé sur l'imitation des animaux et de certains aspects de la Nature. Et l'une de ses formes est précisément la mante religieuse.
Mais c'est dans la tradition africaine que l'on trouve les contes les plus importants évoquant cet insecte. Pour les Bochimans (bushmen) du Kalahari, en Afrique, Mante était un homme de leur peuple. De nombreux récits parlent de ce(tte) Mante et de ses aventures. Par bien des aspects, ces histories sont très semblables à celles mettant en scène le coyote chez les Indiens des Plaines ou le corbeau chez les Indiens du nord-ouest de l'Amérique du Nord. Quand mante se trouvait confronté à des difficultés, il battait en retraite et se cachait. Alors il allait dormir et rêver d'une solution à son problème.
Ce comportement illustre parfaitement le point clé de cet insecte, le « pouvoir de la quiétude ». En apprenant à calmer notre esprit extérieur et à nous intérioriser, nous pouvons remonter et manifester une plus grande puissance - physique, émotionnelle, mentale ou spirituelle. Cette quiétude peut se traduire par une simple contemplation, une méditation ou même un somme et des rêves. Les anciens mystiques parlaient de sept niveaux de silence que nous pouvions utiliser, le premier étant la simple contemplation et le dernier la mort. Entre ces deux extrêmes se trouvaient des dimensions capables de nous apporter un pouvoir formidable dans notre vie. Cela fait partie de l'enseignement de la mante religieuse. Elle nous apprend à apaiser l'extérieur pour que, lorsqu'il est temps d'agir (sous quelque forme que ce soit), cela puisse être accompli en toute sûreté, avec la plus grande précision et la plus grande puissance.
D'après le dictionnaire Random House de la langue anglaise (Random House Dictionary of the English Language), le mot « mante » vient d'un terme grec signifiant « prophète ». Si nous apprenons la quiétude, nous pouvons nous ouvrir à la prophétie. Le Qi Gong est parfois enseigné en conjonction avec le Kung Fu traditionnel. Cette médecine méditative aide l'individu à entrer en soi et à orienter la force vitale de son corps dans des directions spécifiques, en la renforçant et en la stimulant à mesure qu'elle traverse les différents organes du corps. Tout cela a bien évidemment des applications en matière de guérison et de renforcement de l'être. Nos pouvons apprendre à utiliser la quiétude et l'immobilité à différents degrés - que ce soit pour la créativité ou la guérison - et cela fait partie, encore une fois, de ce que transmet la mante religieuse.
C'est cette aptitude à l'immobilité qui fait de la mante une grande chasseuse et qui lui permet de survivre. Elle attend totalement immobile, fondue dans son environnement. Puis, au moment opportun, elle attrape brusquement sa proie avec ses longues pattes antérieures qui se referment sur sa victime comme un canif.
Pour ceux dont la mante est le totem, certains questionnements seront nécessaires. Laissez-vous des tiers connaître vos plans avant même qu'ils soient réellement tracés ? Faites-vous bien attention à ce que vous dîtes et à qui, ou non ? Êtes-vous impatient ? Avez-vous besoin d'aide pour méditer et apaiser votre esprit extérieur ? Laissez-vous échapper des opportunités de saisir des bienfaits de la vie parce que vous agissez ou parlez trop vite ? la mante religieuse pourra vous aider sur tous ces points.
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Selon Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani :
Cet insecte est appelé communément "mante religieuse" ou "prie-Dieu", car la façon dont il repose sur ses pattes arrière, les deux antérieures élevées et jointes, rappelle une personne agenouillée pour prier. Les Anciens, quant à eux, y voyaient l'attitude des sibylles, le nom grec de cet insecte étant d'ailleurs "prophétesses". On raconte d'autre part qu'une mante se posa sur la main de saint François-Xavier et que, sur ses ordres, elle entama un cantique.
L'homme doit se garder de faire du mal à cet insecte considéré comme quasi sacré et particulièrement vénéré par les Turcs. D'autant qu'il peut être utile aux voyageurs ou à ceux qui s'égarent car, en étendant ses pattes avant d'un côté ou de l'autre, la mante indique le chemin qu'il faut prendre. On dit même que par ces gestes elle fit comprendre à un paysan qu'il devait retourner chez lui. Au sud des États-Unis, toutefois, la mante, appelée "agent du diable", est accusée de cracher dans l’œil des hommes et de les rendre aveugles.
Dans la région de Menton, la mante appliquée sur l'endroit malade fait disparaître les dartres, et dans le Gard, sa coque trouvée dans la nature et mise dans une poche de son vêtement permet de na pas souffrir des dents."
Canalisation de Caroline Leroux qui communique avec les devas des animaux.
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Dans son article intitulé "La Mante, suppôt du diable ou ange du ciel ?", paru dans la revue Insectes n° 104 (1997), Eric Bois nous rapporte de nombreuses croyances relatives aux mantes religieuses :
Un diablotin au clair de lune, superbe affiche du film Microcosmos, ravive nos interrogations sur ces insectes qui nous fascinent depuis la nuit des temps. Diablesses ou déesses, les mantes sont des piliers de la mythologie et des croyances populaires.
La Mante religieuse, appelée aussi "prie-Dieu" ou "bigote", est sans conteste un des insectes les plus spectaculaires et aussi l'un des plus mystérieux. Avec son corps gracieux et élancé, ses pattes ravisseuses barbelées d'épines acérées et sa tête triangulaire montée sur pivot, elle a vraiment tout pour faire un parfait extra-terrestre, tel un "Alien" sorti tout droit d'un film fantastique ou d'un roman de science fiction !
Mais le plus impressionnant concerne sans nul doute ses yeux ! Des yeux qui semblent vous observer, vous surveiller. .. Comme le dit très justement Roger Caillois : "les autres ne peuvent que voir, celle-ci peut regarder" et pour J. H. Fabre, c'est le seul insecte qui dirige son regard.
On trouve des exemples significatifs du mystérieux regard de la mante. Aristarque rapporte que "c'est son regard même qui cause le malheur de celui qu'elle fixe". Dans la Rome antique, où elle avait de grands pouvoirs magiques, lorsqu'un homme tombait subitement malade, ne lui disait-on pas : "la mante t'a regardé" ?
L'homme n'a jamais cessé de la considérer avec crainte et respect. Pour les Turcs qui voient dans la position de ses pattes la direction de La Mecque, la mante est sacrée et vénérée : gare à l'homme imprudent ou malveillant qui voudrait lui faire du mal !
L'ange déchu
La mante représente souvent la malchance et le mauvais œil, étant même appelée "l'agent du diable" aux États-Unis. La superstition l'accuse de cracher sur l'œil de l'homme pour le rendre aveugle. Une autre facette de cet être diabolique, beaucoup plus effrayante, nous vient des Grecs anciens qui la nommaient "Mantis" la prophétesse, voyant dans son attitude une sibylle. Ils croyaient que son apparition annonçait la famine pour l'homme et le malheur pour tous les animaux qu'elle rencontrait.
Il semble par ailleurs que la mante à "robe brune", beaucoup plus courante dans les régions sèches de la Méditerranée, ait une réputation plus sinistre que sa variante verte.
Une légende raconte que la mante est la fille du diable, tellement méchante qu'il la transforma en religieuse. Mais Dieu ne pouvant l'accepter, il la changea à son tour en mante. Dans plusieurs contes, les mantes sont des religieuses qui ont trahi leur vœu de chasteté auprès des Barbares ou du Diable lui-même. Leur punition : être transformées en mantes et prier le restant de leur vie.
Le comportement particulier de la femelle qui dévore parfois le mâle juste après l'accouplement nous amène à évoquer les vampires. Ces créatures maudites, ces "non-morts" qui se repaissent du sang de leurs victimes, ont aussi un grand appétit sexuel. Aussi, rien d'étonnant à ce que la mante incarne le vampirisme: selon Jean Markale, "l'accouplement et la manducation de la mante sont les deux phases d'un même acte sacré par lequel s'accomplit le transfert d'énergies" (le sang de la vie et le sperme qui engendre la vie).
Le mot "mante" désignait autrefois un vêtement féminin ample et sans manche avant de prendre le sens, plus exclusif, de "voile noir du deuil". Du reste, la tradition populaire la surnomme la veuve. La mante religieuse occupe donc une place de choix dans l'univers fantasmatique de l'humanité. Elle incarne la femme dévastatrice et castratrice, assimilée à la "Giftmadchen" qui tuait ses amants après l'amour, dans une célèbre légende allemande.
Pour les psychanalystes, le sacrifice du mâle après l'accouplement symbolise "la petite mort".
Quant au peintre surréaliste A. Masson, qui a représenté de bien curieuses mantes, il est fasciné par le baiser : "cette morsure d'amour qui peut aller jusqu'à la dévoration" d'après R. Caillois.
Une mante bienveillante
Diabolique donc, la mante peut être également bénéfique, et dans certains cas, d'essence divine. Une tradition chrétienne veut, par exemple, que l'une d'elles se soit posée sur la main de St François-Xavier et sur son ordre, ait entamé un cantique !
Son côté bienfaisant et céleste est lié à sa posture religieuse, pattes antérieures relevées et jointes comme pour la prière.
Les mantes ont aussi un don d'extra-lucidité comme nous le rapporte cette superstition populaire : quand un voyageur s'égare, il lui suffit de suivre la direction que lui indique la mante de ses "mains jointes". Dans une autre variante, la mante montre aux enfants égarés le bon chemin, car elle sait d'instinct où se trouve le loup ! A la campagne, on raconte que l'une d'elles, par sa posture caractéristique, fit comprendre à un paysan qu'il devait vite rentrer chez lui !
Les Roumains, qui pourtant vivent sur la terre natale des vampires, ne voient dans la mante, qu'une pécheresse repentie, qui tente avec ses pattes de cacher sa tête.
La mante est aussi réputée pour ses vertus thérapeutiques, comme nous le rapporte, déjà au premier siècle, le médecin grec Dioscoride. Dans la pharmacopée populaire, si elle est appliquée sur les dartres, elle les faire disparaître. Dans le Gard, une oothèque de "Prego Diou" placée dans une poche suffit pour supprimer une douleur dentaire et en Provence, c'est un remède contre les engelures.

La mante divinisée
La mante tient une place de choix dans le panthéon d'Afrique équatoriale et d'Afrique du Sud. Dans la mythologie Bushman, une des nombreuses représentations du dieu créateur Xangwa est une mante. Sous cette forme, elle se nomme : Kaogga (ou parfois Pisoboro), c'est un dieu androgyne avec une tête mâle et le reste du corps femelle. Kaogga a créé l'homme et la fenune et peut à volonté les ressusciter, comme le racontent de nombreux contes Bushmens. Cette divinité bienfaitrice est à l'origine du soleil réchauffant les hommes. Elle leur a appris à trouver les racines, les fruits et les plantes comestibles et leur a montré comment utiliser les larves d'insectes comme poison pour leurs flèches (les larves des Scarabées Diamphidia et Polyclada qui se nourrissent des feuilles de Commiphora africana sont toxiques). Les Bushmens la surnomment aussi "le vieux qui fabrique le feu", car la mante symbolise la première fabrication du feu grâce à des bâtons à friction, ses pattes ravisseuses. Chaque fois qu'un Bushman croise Kaogga, il lui parle. Comme c'est aussi un grand oracle, il répondra à toutes les questions qu'on lui posera en dirigeant et en frottant ses pattes de telle manière que seul un Bushman averti pourra comprendre !
En Afrique du Sud, les Zoulous considèrent que Mante est le dieu des Hottentots : le mythe raconte que Oananua ayant rêvé d'une mante, celle-ci vint la chercher à son réveil et de leur union naquirent les premiers Hottentots. Dans un autre conte, Oananua fut tué par Kanya. Quand Mante eut vent de la mOlt de son aimée, il terrassa Kanya après un terrible combat. Pourtant on raconte dans la forêt que Mante trouva la mort lui aussi dans la bataille et que la race des Hottentots disparut avec lui. Les sages affirment que lorsque le dieu d'un peuple meurt, ce dernier est voué à disparaître tôt ou tard. La mante est tellement vénérée qu'il suffit que l'une d'elle se pose sur un homme pour qu'il soit à son tour, sacré et honoré.
Chez les Bantous, la mante est nommée "Nwambyebou", ce qui signifie: "qui coupe les cheveux". Un rite populaire veut qu'on lui offre quelques poils de son habit de peau quand on la rencontre dans la brousse. Ces quelques exemples, pris parmi tant d'autres, illustrent bien la grande vénération des peuples africains pour cet insecte.
Mi-ange, mi-démon, la Mante religieuse incarne tous les paradoxes : les interprétations maléfiques côtoient les dévotions les plus excessives. C'est l'ambivalence, le jeu des contraires, l'attraction-répulsion qui la rendent si fascinante dans la plupart des cultures à travers le monde. Une telle dualité ne laisse personne indifférent et lui confère une place de choix dans la trame magique de la Nature.
Pour en savoir plus :
Akoum A. et al., 1991 - Mythes et croyances du monde, Afrique, Amérique , Océanie Ed. Brepols.
Caillois R., 1938 - Le mythe et l'homme - 188 p. Ed. Gallimard.
Canavaggio P., 1993 Dictionnaire des superstitions et des croyances - 353 p. Ed. Dervy.
Markale J., 1991 - L'énigme des vampires - 307 p. Ed. Pygmalion.
Mozzani E., 1995 - Le livre des superstitions, mythes, croyances et légendes - 1822 p . Ed. R. Laffont.
Schmidt J., 1992 - Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine - 320 p. Ed. Larousse.
Villeneuve R., 1989 Dictionnaire du diable - 420 p. Ed. Bordas et fils.
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Pour Melissa Alvarez, auteure de A la Rencontre de votre Animal énergétique (LLewellyn Publications, 2017 ; traduction française Éditions Véga, 2017), la Mante religieuse est définie par les caractéristiques suivantes :
Traits : La Mante religieuse symbolise la spiritualité, la pleine conscience et la sagesse intérieure. Lorsque la mante religieuse attend sa proie, elle tient ses pattes avant en position haute, ce qui lui donne l'air d'être en prière, d'où son nom. Elle reste parfaitement calme dans son attente puis attaque soudain très rapidement, en s'emparant de l'insecte par surprise avec les piques de ses pattes avant. Cela veut dire qu'il est bon que vous vous connectiez à votre nature spirituelle pour trouver votre sagesse intérieure à travers le calme et la tranquillité de l'introspection. Lorsque vous recevez des informations qui font sens avec votre chemin, appropriez-les-vous rapidement.
Talents : Conscience ; Équilibre ; Calme ; Connexion au Divin ; Créativité ; Habilitation ; Rapidité ; Guérison ; Intuition ; Méditation ; Conscience ; Patience ; Pouvoir ; Précision ; But ; Réflexion ; Silence ; Spiritualité ; Tranquillité.
Défis : Isolement ; Solitude ; Réclusion.
Élément : Terre.
Couleurs primaires : Brun . Vert.
Apparitions : Lorsque la Mante religieuse apparaît, cela vous indique que vous devez accueillir pleinement votre créativité. S'il vous vient une idée nouvelle, la meilleure façon d'arriver à réussir est de trouver des moments calmes pour ne penser qu'à ce que vus voulez faire. Laissez le flux de l'énergie universelle vous apporter des concepts nouveaux. Lorsque le bon concept se présentera, vous sentirez que c'est juste, et vous pourrez lui donner pouvoir et positivité pour qu'il se développe en un projet productif. La Mante religieuse signifie aussi de prendre le temps d'être tout simplement. Communier avec la nature, se plonger dans un bain chaud, ou écouter de la musique apaisante. Lorsque vous vous écartez des bruits du monde et écoutez votre voix intérieure, c'est là que vous avez vos meilleures idées et faites les plus belles découvertes concernant votre spiritualité. La Mante religieuse vient vous dire que vous avez besoin d'un peu de paix et de tranquillité ; ainsi, lorsque vous retournerez à l'agitation du monde, vous aurez de bons réflexes et il vous sera plus facile de suivre vos instincts. La Mante religieuse a une excellente vue ; elle peut voir quelque chose qui bouge à une vingtaine de mètres d'elle et peut tourner la tête à 180 degrés. Cela signifie que vous ne devez pas seulement faire attention à ce qui se passe près de vous, mais aussi regarder un peu plus loin.
Aide : Vous devez laisser votre intuition vous guider. La Mante religieuse peut vous aider à vous concentrer sur votre spiritualité au lieu d'être matérialiste. Elle vous permet d'avoir moins de stress, d'améliorer votre concentration et d'avoir une connexion d'ensemble - mental, corps et esprit. La Mante religieuse vous incite à faire attention à vos visions, rêves et impressions intuitives. Elle peut vous aider à vous retirer de situations qui pompent votre énergie, à rester calme par rapport aux choses que vous ne voulez pas que les autres sachent, et à vous connecter à votre être supérieur pour renouveler votre but spirituel. Lorsqu'elle est en danger, la Mante religieuse se dresse sur ses pattes arrière, étend ses pattes avant et déploie ses ailes pour en montrer les couleurs. Si cela ne suffit pas à effrayer son prédateur, elle va mordre, piquer et attaquer avec ses pattes avant. Elle vous donne confiance pour faire face aux choses dans toute votre grandeur et vous battre pour ce que vous voulez.
Fréquence : L'énergie de la Mante religieuse a une sonorité qui ressemble à une épée qui tranche l'air et à un éclair d'électricité dans un carcan de silence. Elle bouge lentement, de façon calculée, avec un cliquètement rapide à peine audible. Elle donne une sensation fraîche et piquante par anticipation.
Imaginez...
Vous venez de terminer une courte méditation pour vous aider à avoir davantage de concentration dans votre journée. Lors de la méditation, vous ne cessez de voir une grosse mante religieuse qui vous dit de trouver la tranquillité dans l'instant présent. Vous n'êtes pas tout à fait sûr(e) de ce que cela veut dire, mais vous y pensez alors que vous prenez vos gants de travail et sortez. Vous prenez un sac de paillage et commencez à en répandre au pied d'un arbre, mais vous vous arrêtez en voyant là une mante religieuse de la taille de celle que vous avez vue dans votre méditation. Vous vous asseyez pour l'observer, et soudain vous comprenez ce que veut dire trouver la tranquillité dans l'instant présent. Vous ressentez le calme et la complétude dans la présence de cet insecte. Vous avez le sentiment que vous vous êtes branché sur la fréquence universelle. En remerciant pour ce message, vous tendez doucement votre main, et la mante religieuse s'avance sur votre paume. Vous la posez à l'écart et continuez le paillage. Lorsque vous regardez à nouveau de son côté, elle n'est plus là."
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Dans l'édition revue et augmentée de Les Animaux totems dans la tradition amérindienne (Éditions Le Dauphin blanc, 2019) Aigle bleu nous transmet la médecine de la Mante religieuse :
La mante religieuse est la gardienne du monde des insectes. Elle contrôle la population de certains d'entre eux et a donc un rôle organisateur et régulateur. Elle est parmi les insectes les plus grands et gracieux.
Elle est l'un des rares insectes pouvant être un animal totem. On compte, parmi ceux possédant cette caractéristique, la fourmi et l'abeille, du fait de leur organisation sociale et de leur importance pour la nature, l'araignée, différente des autres insectes, et la mante religieuse.
Les personnes qui ont la médecine de la mante religieuse sont presque toujours des femmes. Elles ont parfois des relations, peuvent même se marier, mais restent rarement stables dans leur couple. Elles préfèrent agir à leur guise, et entrent souvent en relation avec les autres pour s'en nourrir afin de faire progresser leur agenda et leur travail.
La mante religieuse est très puissante et dotée d'une patience immense. Les personnes qui ont cette médecine peuvent s'intégrer dans certains groupes à condition qu'on leur laisse une grande autonomie et un important pouvoir décisionnel. Elles sont alors très efficaces.
C'est une médecine très difficile à porter, mais qui peut s'avérer hautement bénéfique si les personnes la possédant savent cultiver le sens des responsabilités envers les autres. Elles peuvent alors contribuer à l'équilibre des groupes avec lesquels elles travaillent. L'aspect négatif de cette médecine est la tendance de ces femmes à bouffer les hommes de leur couples, c'est-à-dire à les utiliser jusqu'à la moelle pour ensuite les rejeter lorsqu'ils ne sont plus utiles pour elles. Alors souvent, elles se retrouvent seules et ne savent pas se réconcilier avec la solitude, qui devient alors assez pesante pour elles, puisque par définition elles ont un rôle social régulateur. Ainsi, il est très important pour la personne mante religieuse de cultiver le sens des responsabilités sociales et l'engagement sur le long terme avec ses compagnons afin d'annuler le côté négatif de sa médecine. Elle sera alors une alliée de grand pouvoir, très appréciée, avec des dons d'organisation et d'influence bénéfiques pour la personne et les organisations avec qui elle est en relation. Elle y trouvera joie, amour et la satisfaction d'être utile et efficace dans sa vie personnelle et professionnelle.
Voilà la médecine de la mante religieuse.
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Mythologie :
Dimitri KARADIMAS explore en profondeur un aspect de la mythologie miraña dans l'article suivant : "La métamorphose de Yurupari : flûtes, trompes et reproduction rituelle dans le Nord-Ouest amazonien" paru dans le Journal de la Société des Américanistes, 2008, vol. 94, n°94-1, pp. 127-169 :
Dans les textes II, III et IV qui sont desana (le premier étant d’origine tukano), il est dit : « This is what they were saying when thinking it over, and thus they institutionalized the mantis. // They institutionalized it ? // Yes ». Ce passage (ibid., p. 188, II, § 62 sq.) est relativement énigmatique puisqu’il propose « d’institutionnaliser la mante religieuse » afin de récupérer cet élément pour les hommes. Un des problèmes réside dans le terme bari~sero qui désigne, selon Reichel-Dolmatoff, la mante religieuse et est utilisé comme synonyme de ~poreró, terme qui fait référence à l’embout des trompes de Yurupari [I, § 153]. Pour Reichel-Dolmatoff, Yurupari et bari~sero sont synonymes. Attardons-nous sur les qualités retenues par les Tukano concernant l’insecte en question (1).
Reichel-Dolmatoff aborde le comportement particulier de la femelle de la mante lors de la fécondation : celle-ci dévore le mâle qui, bien qu’à moitié grignoté à partir de la tête, continue de produire des mouvements de l’abdomen afin de poursuivre la fécondation de la femelle. L’étymologie même du terme bari~sero évoquerait aussi cet aspect, mais d’une façon singulière : « bari~sero : “grappin dévoreur”/“fourche dévoreuse”, d’après /~sero/ : fourche ou grappin pour décrocher les racèmes ou les fruits des grands arbres » (ibid., p. 165 sq., notes et commentaires du texte II). De mon point de vue, l’étymologie serait fondée sur une analogie entre les membres antérieurs de la mante religieuse qui sont ravisseurs et bari « dévorer, manger de la viande » (Ramirez 1997). Le terme bari~sero serait ainsi à comprendre comme « grappin ravisseur », dans la mesure où la mante se sert de ses membres comme de grappins (Reichel-Dolmatoff 1996, p. 225, III). Ce grappin, instrument grâce auquel la mante est désignée chez les Tukano, existe aussi chez les Miraña et sert à décrocher les racèmes et autres fruits haut perchés dans les arbres ou les palmiers. Il est formé par une longue perche à l’extrémité de laquelle est fixé un bâton plus court grâce à une liane. L’ensemble forme un angle obtus similaire en tous points aux membres ravisseurs de la mante religieuse. Lorsque cet instrument est utilisé, le pédoncule – ou tout autre élément qui maintient le fruit ou le racème à l’arbre – est passé dans le grappin qui, plus qu’il ne le sectionne, l’arrache de son support ; ce qui est fait avec le pénis/racine dans le mythe.
[...]

Or la mante religieuse est censée se balancer d’avant en arrière au rythme du vent [I, § 13]. Une des espèces existant en Amazonie (Choeradodis rhombicolis), dite aussi « mante à capuche » (hooded mantis en anglais, voir figure), a une attitude mimétique et défensive qui consiste à imiter le feuillage. Cette mante produit spontanément un type de balancement caractéristique laissant penser que cette « feuille » bouge sous l’effet du vent. Cette attitude de balancement, une fois anthropomorphisée, peut être perçue comme une simulation d’un va-et-vient identifiable à des mouvements de types copulatoires.
De par la présence de cette « capuche », il semble bien que ce soit cette espèce de mante qui soit ici désignée : il n’y a que le bout de sa tête qui dépasse de sa capuche, le reste de la partie centrale du pronotum correspondant à la hampe du clitoris.
Il convient d’ajouter que, dans la mythologie des groupes tukano, l’équipollence entre clitoris et nouveau-né passe par un traitement similaire de leur présence au sein des flûtes. Il existe un être dans les deux cas. Dans le cas du nouveau-né, le sac amniotique sert de « coiffe » au fœtus lorsqu’il naît coiffé, c’est ce qui apparaît dans le modèle de la chrysalide chez les Miraña. Dans la mythologie tukano, cet être est représenté par le clitoris, lui aussi « coiffé » et personnifié par la mante à capuche.
Note :
1) : Pour Stephen Hugh-Jones (communication personnelle), seule l’identification à une grosse sauterelle amazonienne correspond à bari~sero. Selon lui, il n’existe pas, en dehors des informations fournies par Reichel-Dolmatoff, d’indications qui permettent d’identifier bari~sero à une mante religieuse.
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Littérature :
Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque ainsi la Mante religieuse :
19 octobre
(La Bastide)
Deux mantes religieuses se sont accouplées sur le haut mur qui regarde la mer. Leurs abdomens tordus en S se baisent par les cloaques. La femelle d'un vert laitue, pansue, énorme, porte sur son dos son compagnon longiligne et brunâtre. Elle dirige l'étreinte. Elle l'assume. Monsieur subit, déjà réduit pour ainsi dire à son seul sperme.
Et l'inévitable question : va-t-elle croquer son amant ? Je n'en saurai rien. Après deux heures de patience, l'obscurité dérobe à mes yeux le couple uni dans la position même qu'il avait au début.
Les insectes sont des instants qui s'éternisent. Ils n'ont ni passé ni futur. Se demander ce qu'ils vont faire n'a pas de sens. Voilà une première leçon de philosophie naturelle. J'en connais une autre : ces invertébrés sont l'image de la plénitude par le peu. En général, ils ne font rien. Quand ils font quelque chose (manger, s'accoupler, fuir un danger), leur unique activité les occupe absolument. Qui contemple ces animaux s'engage sur la Voie.
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