Le Polypore du noisetier
- Anne
- 4 mai
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Dernière mise à jour : 8 mai
Étymologie :
Étymol. et Hist. 1790 (J.-J. Paulet, Traité des champignons, I, 512 ds R. Ling. rom. t. 42, p. 452). Empr. au lat. sc. mod. polyporus « id. » 1729 (P. A. Micheli, Nova Plantarum Genera, 129 d'apr. NED Suppl.2), formé de l'élém. gr. π ο λ υ-, de π ο λ υ ́ ς « nombreux » et du gr. π ο ́ ρ ο ς « pore, passage ».
Étymol. et Hist. 1530 noisettier (Palsgr., p.220) ; 1546 noisetier (Est.). Dér. de noisette* ; suff. -ier*.
Autres noms : Polyporus corylinus - Cerioporus corylinus - Champignon des Papes - Polypore de Tunisie - Polypore des lieux brûlés -
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Mycologie :
Fiche proposée sur le site de l'Association des Mycologues Francophones de Belgique asbl :
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Usages traditionnels :
F.S. Cordier, auteur de Les Champignons, Histoire - Description - Culture - Usages des espèces comestibles, vénéneuses et suspectes... (J. Rotschild Éditeur, 1876) mentionne la culture de ce champignon en Italie :
Les Italiens cultivent encore une autre espèce de Polypore dont on pourrait aussi tenter la culture en France : c'est le Polypore du coudrier, Polyporus corylinus, Mauri, qui vient surtout dans la Campagne de Rome, et qui est tellement apprécié, que rarement il va jusqu'aux marchés de Rome, étant le plus souvent envoyé en présent, comme champignon de choix.
Ce champignon croît principalement sur les vieux troncs de noisetiers, qui accidentellement ont été brûlés. Les paysans, instruits par l'observation du résultat que produit cette combustion, font, sur les vieux troncs des noisetiers, un feu léger jusqu'à ce qu'il y ait un commencement de carbonisation. Après cette opération, les champignons, si les circonstances sont favorables, poussent en si grande quantité qu'ils couvrent toute la souche. Les paysans veulent-ils obtenir une troisième récolte, ils renouvellent la légère combustion sur le même tronc.
Le Polypore du coudrier continuant à se développer, bien que transporté à de grandes distances, il serait facile de faire venir d'Italie des souches de noisetiers déjà chargées de champignons, ou tout au moins de mycelium.
La culture de ces espèces étrangères procurerait aux gourmets de France une jouissance nouvelle.
Le Dr Lucien-Marie Gautier, auteur de Les Champignons considérés dans leurs rapports avec la médecine, l'hygiène publique et privée, l'agriculture et l'industrie (Librairie J. B. Baillière et fils, 1884) mentionne :
Le Dr Badham affirme encore avoir reproduit une excellente espèce, Polyporus avellanus, en flambant, au-dessus d'une poignée de paille, un morceau de noisetier, qui est ensuite arrosé et mis de côté au bout d'un mois environ, les Champignons se montrent tout blancs, ayant de deux à trois pouces de diamètre et excellents à manger ; leur profusion serait quelquefois telle qu'ils cachent le bois sur lequel ils poussent (1).
Note : 1) Badham, Esculent Fungus ; 1re éd., p. 43.
David Thoen dans un article intitulé "Usages et légendes liés aux Polypores." (In : Bulletin trimestriel Société Mycologique Française 98 (3) : pp. 289-318 Note d'ethnomycologie n°1), disponible en ligne, confirme l'identification du champignon précédent :
Dans la campagne romaine, Polyporus corylinus, un polypore comestible, pousse spontanément sur les troncs brûlés de Corylus avellana (noisetier). Sa croissance est favorisée artificiellement en chauffant les troncs et les branches de noisetier par un feu de paille et les bois traités de cette façon sont vendus sur les marchés. En les maintenant pendant un certain temps dans une cave "chaude" et en les arrosant, on obtient une bonne récolte de P. corylinus (ROLFE, 1925, p. 185). Cette pratique semble tombée en désuétude de nos jours.
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Renato Fortunati, auteur d'un article intitulé "Polyporus corylinus Mauri : Hommage à un champignon oublié " paru sur le site Nuovamicologia confirme la comestibilité de ce champignon :
Entre juin et août, il est possible, pour ceux qui ont la chance de fréquenter les restaurants des Castelli Romani, de déguster le "Sfocatello del nocchio", également connu sous le nom d'"Arsicciolo". [...]
C'est un champignon peu répandu dans la nature, qui, pour les raisons que nous verrons, ne pousse guère spontanément, mais est très apprécié, pour le goût et la consistance de la viande, presque exclusivement dans les environs de la capitale, où il se trouve " cultivé" avec une méthode très particulière et en partie secrète, selon une tradition transmise aux Castelli depuis l'Antiquité. D'après un livre de 1834 du mycologue Viviani, il semble avoir été très apprécié également par les "...riches seigneurs de la capitale à qui les agriculteurs envoyaient des souches de noisettes déjà préparées et peuplées de cette espèce naissante..."
Les « cultivateurs » opèrent dans des zones très limitées et, évidemment, secrètes ; ils sont également capables de reconnaître la souche appropriée de Corylus avellana (la noisette, ou nocchio, comme on l'appelle à Rome et ses environs) sur laquelle les sporophores peuvent porter leurs fruits, également guidés par le « son caractéristique produit par une simple percussion ». En effet, comme toutes les Polyporacées, le Sfocatello se développe sur le tronc d'espèces d'arbres, principalement le noisetier (d'où il tire son nom scientifique), mais aussi le châtaignier ou le chêne.
Mais voici maintenant le meilleur : pour permettre la fructification, la souche de noisetier doit subir un « flambage » instantané, que l'on produit en l'aspergeant de liquide inflammable à l'aide d'un pulvérisateur. La pratique, pour des raisons évidentes, est extrêmement dangereuse et ne peut être pratiquée que par ceux qui possèdent une grande expérience et ont mis en œuvre toutes les mesures appropriées pour éviter les risques tant pour la forêt que pour eux-mêmes. Ainsi traitée, la souche est enterrée et après quelques jours déterrée pour la récolte. Le cultivateur expert, qui connaît correctement le traitement à effectuer, peut facilement récolter plus de 10 kg de sfocatelli ; la souche, avant de s'épuiser, peut être utilisée pendant plusieurs années, en répétant la pratique décrite. Selon certains producteurs, si le climat est suffisamment chaud comme dans la période indiquée, la réaction qui détermine la fructification n'est pas due au « flambage », mais seulement à la pulvérisation du liquide inflammable : depuis quelques années donc, le traitement pour cette opération.
Les premiers à découvrir le secret de cette culture furent les "carbonari", qui, à proximité des zones de production de charbon ou dans les bois incendiés, remarquèrent la naissance des sporophores. Aujourd'hui, la technique de production du charbon de bois n'est plus la même, mais, grâce à la méthode décrite, le Sfocatello peut encore être apprécié en cuisine, en l'utilisant, par exemple, pour assaisonner les pâtes (avec une légère sauce à l'huile et aux tomates cerises) ou en le faisant frire dans la poêle avec les pâtes.
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Symbolisme :
Sur le forum de l'Association mycologique et botanique A Passeggio nel Boscologo, Nico ouvre un post inspiré du livre de Adolfo Banti, I funghi italiani, (Vallardi ed. 1963) le 17 novembre 2010, qui lui permet de faire du Polypore du noisetier un emblème culinaire des environs de Rome :
Polyporus corylinus Mauri. Un champignon particulier et peu connu, qui jouit d'une excellente réputation dans certaines localités de Rome. Il a été décrit pour la première fois par Ernesto Mauri au XVIIe siècle, dans la brochure « Deux champignons comestibles des environs de Rome ». C'est un curieux champignon « oublié » qui, peut-être plus que tout autre dans le contexte national, peut représenter un territoire et l'une des plus anciennes formes de culture des champignons. Exclusive à la province de Rome, et plus particulièrement aux Castelli Romani, elle a toujours été cultivée par les bûcherons, notamment dans la commune de Rocca di Papa, qui, probablement dans l'Antiquité, produisaient du charbon et avaient constaté la nécessité de la fructification. Cette culture particulière, transmise de génération en génération et gardée secrète, consiste à reconnaître, au son caractéristique produit par la percussion, une souche mycélienne de noisetier (Corylus avellana) (parfois déracinée pour la culture domestique), qui subit une rapide flambée après avoir été aspergée d'un liquide inflammable. Elle est alors recouverte et, au bout d'une semaine environ, commence à produire des fruits abondants, dont une partie est servie dans les restaurants typiques de la région (!!!), qui le servent principalement frit ou doré ! Le « sfogatello del nocchio » est donc considéré comme un bon champignon comestible, tendre et très parfumé s'il est fraîchement cueilli, rare en conditions naturelles ; la période de fructification « forcée » coïncide avec la période la plus chaude de l'année, en juillet et août.
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