Étymologie :
PAPAYER, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1654 (Du Tertre, Hist. gén. des Isles de Christophe, p. 249 ds König, p. 161). Dér. de papaye* ; suff. -ier*.
PAPAYE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1579 papaie (Urb. Chauveton, Hist. univ. du Nouv. Monde, p. 682, trad. de l'ital. Benzoni ds König, p. 160) ; 1664 papaye (Ant. Biet, Voyage de la France équinoxiale, p. 338, ibid.). Empr. par l'intermédiaire de l'esp. papaya « id. » (1535 ds Cor.-Pasc.) prob. à une lang. caraïbe.
Autres noms : Carica papaya -
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Botanique :
Symbolisme :
Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), le Papayer (Carica papaya ou Carica vulgaris) a les caractéristiques suivantes :
Genre : Féminin
Planète : Lune
Élément : Eau
Pouvoir : Amour ; Vœux.
Utilisation magique : Sur la côte est de l'Afrique, le rite du Papayer ne s'encombre guère de cérémonial : on attache un chiffon vert à l'une de ses branches en visualisant très fort son souhait ; puis on va se baigner tout de suite après et si, en plongeant, on voit des poissons appelés mopiis, le vœu se réalisera. Dans la plupart des régions tropicales, le fruit du Papayer est considéré comme aphrodisiaque.
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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :
Le papayer, dont le fruit est aphrodisiaque, sert sur la côte est de l'Afrique à la réalisation des vœux : « On attache un chiffon vert à l'une de ses branches en visualisant très fort son souhait ; puis on va se baigner tout de suite après et si, en plongeant, on voir des poissons appelés "mopiis", le vœu se réalisera ».
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Selon Romain Bertrand, auteur de « Le goût de la papaye jaune. Stratégies d'extraversion et pratiques hybrides en Indonésie coloniale », (Politique africaine, vol. 74, no. 2, 1999, pp. 130-151) :
Pour explorer les pratiques hybrides qui émergent en Indonésie coloniale, il se révèle particulièrement utile de faire le détour par l’interprétation des « cultures matérielles ». L’itinéraire social des objets est en effet riche d’enseignements sur la dynamique interne d’un système de statuts, car il permet de mieux discerner les effets d’émulation entre communautés de vie. D’autre part, les répertoires culinaire et vestimentaire de la situation coloniale constituent très souvent les arènes de ces « guerres de subjectivation » à l’issue desquelles s’affirme l’autonomie relative du sujet colonial. Les modes de réaction des élites lettrées indigènes à la menace coloniale incriminent ainsi les techniques artisanales autochtones, qui deviennent rempart de tradition autant que prémisses de modernité. Enfin, la subversion tactique de l’ordre impérial passe par ces « vagabondages efficaces » des consommateurs indigènes au sein de l’univers de la marchandise coloniale, qui sont la trace, sinon d’une résistance, du moins d’une appropriation critique. L’exemple de la substitution de la papaye jaune au chou-fleur par les cuisinières européennes des Indes, que nous détaillerons plus avant, fournit une très bonne illustration paradigmatique de la variété et de l’omniprésence de ces « arts de faire » coloniaux… Il n’est pas même exclu que la récollection de ces détails de pratique culinaire ne puisse acquérir valeur typologique. Si l’on songe au fait que l’odeur de la papaye verte vaut dans le film du même nom comme symbole du quotidien du petit peuple vietnamien, alors que le goût (de chou-fleur) de la papaye jaune caractérise bien plutôt l’expérience nostalgique des élites coloniales hollandaises en Insulinde, on peut à bon droit se demander si la restitution d’une réalité sociale ne transite pas, nécessairement, par une exploration du quotidien. Car c’est finalement par le geste et l’objet les plus anodins que se conjurent les traumatismes identitaires constitutifs de la rencontre coloniale, et que se pense l’altérité.
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Mythologie :
Viviana Pâques rend compte du travail de J. P. Lebeuf. "L'habitation des Fali Montagnards du Cameroum septentrional." (In : Journal de la Société des Africanistes, 1961, tome 31, fascicule 2. pp. 268-271) :
Ainsi est-il amené, pour rendre compte du sens statique et dynamique de l'habitation à se livrer à la tâche redoutable qui consiste à exprimer le mythe fali de création du monde selon un processus discursif logique. Certes le mythe fali se rapproche, dans ses grandes lignes, des autres cosmogonies africaines. La Terre est née de deux œufs d'inégale grandeur, un œuf de crapaud, considéré comme aquatique, et un œuf de tortue, considérée comme terrestre, tous deux tournoyant en sens contraire dans l'atmosphère. De leur heurt naquirent une terre mâle, une terre femelle, six animaux androgynes, la crête du coq et un arbre. C'est à partir de ces dix éléments que la tortue organise le monde, en créant une démarcation entre la terre sauvage et la terre des hommes. Alors descend du ciel un chasseur, qui sera le premier forgeron, apportant la première graine comestible. Ce geste est suivi par l'apparition de la première pluie qui, grâce à l'action du crapaud, transforme le monde binaire sec et sans vie, en un monde vivant divisé en quatre. Dieu fait alors descendre une arche qui recèle les éléments primordiaux (animaux, arbre, outils). L'arche se brise, et l'arbre-papayer, en accord avec la tortue et le crapaud, répartit ces éléments à la surface de la terre, créant ainsi la figure géographique du pays fali.
Le monde étant ainsi appelé à l'existence, la tortue enseigne au premier couple, né du papayer, l'architecture et, le crapaud, les autres techniques. La place nous manque pour suivre plus longuement l'analyse minutieuse de J.-P. Lebeuf qui montre comment le développement du mythe règle la répartition des groupes humains, les alliances et les interdictions matrimoniales, la constitution de la famille sur une base patrilocale, les relations entre gens de la Tortue et gens du Crapaud, etc.
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