Étymologie :
GAROU, subst. masc.
Étymol. et Hist. 1. a) 1587 fém. garoupe « daphne gnidium » (Molinaeus ds Roll. Flore t. 9, p. 206) ; b) 1803 masc. garoup « cneorum tricoccon » (Wailly) ; 2. 1694 masc. garou « daphne gnidium » (Tournefort Bot. t. 1, p. 467). Mot empr. du prov., cf. Nice garoupa bot. (FEW t. 14, p. 169), Nice garoup bot. (Risso ds Roll., loc. cit.), garou bot. (Mistral), et qui est entré dans le fr. général lors de la diffusion des noms de plantes du maquis. Garoupa est formé du préf. préindo-européen *war- et du suff. préroman -uppa (cf. ang. jaroupe bot., issu du m. lat. garropa, jaroppa, xie s. ds Orbis t. 4, p. 220). Pour garou, il faut sans doute supposer une forme préromane warúbo- ou warōbo-, ce qui fait difficulté, car il n'existe pas d'autres noms de plantes de formation analogue, v. FEW t. 14, p. 170a-171a.
SAINBOIS, subst. masc.
Étymol. et Hist. A. 1540 sainct boys « bois de gaiac » (Ferrier, De l'administration du sainct boys, trad. de lat. en fr. par Nicolas Michel, Poictiers). B. 1774 sainbois « garou » (v. garou 2) (A. Le Roy, Usage de l'écorce de garou, p. 10) ; 1779 Saint-Bois ou garou (Buisson, Classes et noms des plantes, p. 21). Comp. de saint* et de bois* avec attraction de sain 1* (FEW t. 11, p. 151a).
Autres noms : Daphne gnidium - Bois de garou - Bois d'oreille - Daphné garou - Sainbois - Saint-Bois - Thymèle -
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Botanique :
Monographie sur le daphné garou, proposée par Meryem El Fennouni dans sa thèse intitulée Les plantes réputées abortives dans les pratiques traditionnelles d’avortement au Maroc. (Université Mohammed V, faculté de médecine et de pharmacie - Rabat, 2012).
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Usages traditionnels :
D'après Valérie Bonet, autrice d'un article intitulé "Pline et Théophraste : à propos des plantes médicinales." (In : Actes du colloque" Métissage culturel dans l’Antiquité" de la CNARELLA. 2008) :
Au livre XXVVII, Pline rapporte les propriétés laxatives du garou ou Sainbois (Daphne gnidium L.). Il dit ceci de son fruit : « il a la couleur du coccus (kermès ; c’est-à-dire rouge) ; il est plus gros qu’un grain de poivre, et très échauffant ; c’est pourquoi on l’avale dans du pain pour qu’il ne brûle pas la gorge à son passage. C’est un antidote souverain contre la ciguë. Il relâche le ventre ». Théophraste disait, quant à lui : « le grain de Cnide (un des noms du fruit du garou) est rond, de couleur rouge, plus gros que celui du poivre et beaucoup plus échauffant ; aussi lorsqu’on le donne en pilule (on le donne pour libérer le ventre) on l’incorpore dans une boulette de pain ou de graisse ; car autrement il brûle le gosier ». Pline, cette fois-ci, a juste ajouté au texte de Théophraste, un renseignement supplémentaire (l’antidote pour la ciguë) glané dans une autre source probablement.
Sihem Lahmar, Malika Lahoula, Ghania Khellaf et al., autrices d'une Etude de la toxicité de deux plantes spontanées de la région de Jijel Arum italicum et Daphné gnidium. (2008. Thèse de doctorat. Université de Jijel) relèvent les usages suivants :
Utilisation thérapeutique : Le garou était utilisé à des fins médicinales. De tout temps (et surtout au moyen âge) l'écorce de Daphné était recommandée pour soigner les affections de la peau et divers troubles vénériens. Jusqu'en des temps récents, elle demeura un remède populaire en qualité de drogue vésicante (encore qu'elle provoque assez souvent l'apparition de cloques sur la peau). Enfin, on la tint pour purgative, sudorifique et même abortive. Pareillement, dès L'antiquité, les feuilles et les fruits furent utilisés comme purgatifs énergiques, et en cas de troubles biliaires, il favorise la cicatrisation des plaies. On a également relevé l'utilisation des feuilles de Daphné pour les soins d'hygiène capillaires (en gargarismes) et pour soigner les abcès et les piqûres d'insectes.
Cosmétique : Donne un onguent pour teinter les cheveux en noir.
lnsecticide : L'écorce toxique est utilisée pour tuer puces et fourmis (son nom espagnol est "tue puces").
Anecdotique : En corse, la racine toxique était utilisée pour capturer les fruits par braconnage.
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Croyances populaires :
Adolphe de Chesnel, auteur d'un Dictionnaire des superstitions, erreurs, préjugés, et traditions populaires... (J.-P. Migne Éditeur, 1856) propose la notice suivante :
SENIBELET. C'est le nom d'une coutume ou espèce de fête qui s'accomplit le jour de l'Ascension, dans le bourg de Gignac, département de l'Hérault. Les uns donnent à cette coutume, mais sans l'expliquer, un caraclère superstitieux ; les autres disent qu'elle a pour origine une invasion du pays par les Sarrasins, mais ils n'en font pas connaître non plus la date. Quoi qu'il en soit, les jeunes gens de la localité se réunissent sur la place qui porte le nom de Planeau ; deux ou trois d'entre eux se couvrent la tête de casques de fer, puis ils prennent la fuite, et leurs compagnons les poursuivent alors, en leur jetant à la tête des racines de lancéole ou garou, Daphne guidium.
Symbolisme :
Philippe François Nazaire Fabre d'Églantine relate dans son Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française, (p. 23.) l'équivalence entre le Garou et une date précise du calendrier républicain :
Le Thimèle est ainsi attribué au 22e jour du mois de pluviôse.
Selon Joan Tocabens, auteur d'un ouvrage intitulé Herbes magiques et petites formules : Sorcellerie en Roussillon et autres Pays Catalans, (Perpignan, Ultima Necat, 2012, 141 p.) :
En catalogne, le daphné garou était traditionnellement cloué par les bergers sur les portes des enclos pour éloigner à la fois les puces et les sorcières.
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