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Le Galago

  • Photo du rédacteur: Anne
    Anne
  • 24 mai
  • 8 min de lecture




Proverbes :


Dans La communauté traditionnelle Eviya à travers ses expressions proverbiales (Document évolutif (2025) élaboré à partir d'une version publiée aux éditions L'harmattan, 1995) Sébastien Bodinga-bwa-Bodinga et Lolke J. Van der Veen citent un proverbe qui concerne le Galago :


Le rôle important que jouent les proverbes dans les différentes sociétés africaines traditionnelles et même modernes, a été mis en évidence par bon nombre d’études et de travaux effectués dans le domaine de la tradition orale1. Les maximes et dictons sont omniprésents dans les échanges langagiers entre les membres de ces sociétés. MERAND (1980) dit à ce propos : « L’africain émaille sa conversation de proverbes. L’homme d’expérience en connaît une multitude adaptée à chacune des circonstances de la vie. » En ceci, les sociétés africaines se distinguent nettement de la société occidentale moderne, où l’on a, surtout en milieu urbain, pour diverses raisons sociologiques et autres sans doute, de moins en moins recours aux expressions proverbiales et imagées.

Les proverbes sont en effet utilisés pour illustrer ou commenter pratiquement tous les aspects de la vie individuelle et communautaire en milieu traditionnel. Ou pour le dire un peu plus techniquement avec ARNAUD (1991-2) : les proverbes dénomment la situation, ils rattachent la situation à laquelle ils font référence à une classe de situations reconnue. On s’en sert dans les conversations de la vie quotidienne, dans les contes (en règle générale pour clore ces derniers), dans l’éducation des enfants où les proverbes ont une fonction didactique manifeste (c’est-à-dire donner des conseils, illustrer son propos, commenter un événement ou encore corriger l’enfant récalcitrant)3, dans les rites d’initiation ou autres, lors des discussions organisées à l’occasion des retraits de deuil, dans les palabres, et ainsi de suite.

Le lien avec l’histoire du groupe est évident. Ces maximes généralement brèves et facilement mémorisables sont le fruit d’un long cheminement collectif et servent à transmettre le savoir-vivre des ancêtres et à assurer ainsi une continuité entre le passé et le présent. Avec d’autres types d’expressions verbales comme les devinettes et les contes, elles sont donc l’expression anonyme4 d’une sagesse réunissant les valeurs que la communauté s’est forgées, souvent au fil de très longues années. Ces valeurs traditionnelles constituaient, ou constituent encore, l’idéologie du groupe. Cette idéologie n’est pas un message, mais un ensemble de lois ou règles sémantiques permettant de produire des messages, comportementaux ou autres (cf. VERON (1973)). Elle constitue un langage doté d’une certaine indépendance, un système d’axes et de champs sémantiques (ou culturels) partiels tendant à se naturaliser6, qu’il convient de dégager et d’analyser si l’on veut mieux comprendre l’organisation et le fonctionnement d’une société donnée, ainsi que le comportement verbal et/ou non verbal des membres de cette société.

[...]

"Le galago à pelage gris, enfant des plantations, a enveloppé l’antilope-souris dans un cornet de feuilles, le buffle dans un petit paquet, mais il lui a manqué les (grandes) feuilles du Megaphrinium macrostachym (Milne-Readhead) pour enrouler l’éléphant dans un gros paquet."

// Quand on n’a pas assez de moyens, il vaut mieux renoncer.

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Symbolisme :


Michel Bruil, Jean-Paul Mayeur et Frantz Thille auteurs de Kenya-Tanzanie : Le guide du safari, faune et parc (Éditions Marcus, 1988) signalent que :


« Les galagos sont présents dans la mythologie africaine : les Pygmées nous ont affirmés que leurs cris étaient la manifestation des (zfo) les esprits de la forêt. Au Gabon le galago est appelé Ngok, Ngokoué, Ngôkoué. Onomatopée qui évoque le cri de l’animal. D’après les populations locales, le galago signale la présence du léopard ou de tout autre intrus potentiellement dangereux »

Selon Oswald Mbamba Mitamba, auteur d'une thèse intitulée Les usages contemporains des totems au Gabon (population nzèbi). (Université de Lorraine, 2018) :


[Le Galago] est le totem du clan Mwanda. Il se présente comme un petit primate aux grands yeux et aux oreilles tendues. Son cou est très flexible, si bien qu'il peut faire une rotation de 180°. Le galago est social et vit en groupe. C'est un animal nocturne qui chasse exclusivement la nuit pour sa nourriture. Son cri ressemble aux pleurs d'un bébé, ce qui lui a valu le surnom de « bush baby » par les Anglais, c'est-à-dire le bébé du buisson.

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Symbolisme astrologique :


Gabriel, le créateur du Site Zooastro.com propose de trouver son animal astral en fonction de la position du Soleil et de la Lune dans notre thème :


Le Galago ou un Rire dans la Jungle : Les Primates cherchent l’amitié et la fraternité dans leurs relations, car ils se perçoivent comme le maillon d’une chaîne, différent et original certes, mais qui n’est pas entier s’il est seul. Ils créent ce lien social et cette entraide qui leur est essentielle. Les Singes génèrent donc toutes sortes de réseaux sociaux, par le développement de projets et d’idéaux permettant d’animer une communauté de pensée. Ils sont doués pour les techniques et les technologies susceptibles d’améliorer la cohésion sociale.

Et ce primate-là est curieux ! Il ne peut s’empêcher de se poser toutes sortes de questions. Sa vivacité d’esprit est insatiable, passant d’un sujet à l’autre, résolvant des énigmes, accumulant des anecdotes et des connaissances. Le Galago a le goût des rencontres, et des idées nouvelles. Il accumule les moments intenses, ludiques, sans nécessaire lien entre eux… Il approfondit rarement ses relations car son souci premier reste de s’informer. Cette légèreté est sans doute son point sensible.


Les particularités du Galago : Le Galago place sa sensibilité curieuse et ouverte au service d’une volonté de participer à un débat social. C’est un as de la communication qui sait utiliser son opinion personnelle et sa parole pour animer le groupe auquel il appartient. Le Galago ne manque pas d’air et il le fait savoir. Peu avare de sa parole, il délivre son message à l’assemblée de ses contemporains, place son anecdote, sa petite phrase ou sa blague qui le rendent immédiatement sympathique. C’est une personnalité adaptable, vive et pétillante, dont la superficialité et le manque de sérieux sont compensés et corrigés par son engagement dans le groupe.

Il apporte beaucoup de fraîcheur à chacune de ses interventions. Sa curiosité et son excellente insertion lui permettent aussi d’apprendre beaucoup plus vite, d’élever ses préoccupations intellectuelles. Le Galago devient donc sage avec le temps, mais seulement après avoir eu, sans sa jeunesse, un comportement de girouette instable, ayant retourné sa veste au gré des circonstances du moment. Doué d’une grande adaptabilité intellectuelle, le Galago arbore un comportement cordial, souriant et amical, mais intransigeant dès lors qu’il s’agit de défendre le groupe.

Quel que soit son comportement, il ne perd jamais son groupe de vue. Toute son action est tournée vers le vivre ensemble, et le Galago ne s’intéresse pas tant que çà aux affaires étrangères ou abstraites qui le déconnecteraient de sa famille ou de sa société.


Les pouvoirs du Galago : Le Galago est capable d’une incroyable gymnastique intellectuelle qui le rend à l’aise sur des questions anecdotiques aussi bien que sur de grands sujets de société. Habile communiquant, il maitrise les lois de la jungle comme s’il s’agissait d’un jeu d’enfant.

Le natif du Galago aura tout intérêt à s’orienter vers une activité qui exalte son désir d’animation sociale, alimenté par son goût pour l’information et la parole. Il aura une prédisposition pour l’étude, l’écoute et la prise de parole. Sa capacité à parler en société, et à porter sa voix parmi les siens lui sera profitable dans des carrières politiques, sacerdotales, radiophoniques, musicales. Quel que soit le domaine qu’il choisira, il cherchera à délivrer et partager largement un message personnel.


Ex : Talleyrand, Claude François, Mike Brant, Daniel Balavoine

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Mythologie :


Paul Mviena, auteur de l'Univers culturel et religieux du peuple beti. (Imprimerie Saint.-Paul, 1970) explicite un rituel en lien avec le Galago :


Les brimades sont de véritables scènes qui commémorent et reproduisent fidèlement le geste des ancêtres. Chaque acte est la représentation formidable d'un mythe ; et chaque mythe se rattache évidemment à la grande expérience religieuse des Béti.

Parmi ces scènes mythiques, on distingue particulièrement :

[...]

Dans l'ebi odham, la capture du galago, des nids de galago sont préparés à l'avance, bourrés d'épines. On ordonne aux candidats d'attraper les galagos qui y dorment. Aussitôt chacun s'empresse pour saisir énergiquement un nid et s'emparer de sa proie. Comme on peut s'y attendre, ils se heurtent violemment aux épines qui leur percent les mains, les blessent de part en part et les font saigner.

Cette discipline sert à expier les souillures dues au toucher.

Wauthier de Mahieu, auteur de Qui a obstrué la cascade ? : analyse sémantique du rituel de la circoncision chez les Komo du Zaïre. (Syracuse University Press, 2009) révèle un autre aspect du symbolisme du Galago :


Le nom Atoà-ɔphɔ signifie « Celui-qui-transperce-les-feuilles » et évoque immédiatement le galago (ésià) dont on dit qu'il « transperce les feuilles » de son puissant pénis. L'animal renvoie donc à l'acte de défloration et est lui-même un symbole du maître de la circoncision, dispensateur de cette puissance. Il est d'ailleurs interdit à celui-ci d'en manger. Réduit en cendres, le pénis du galago est appliqué par les mɛnà-gandjà dans des incisions pratiquées au bas-ventre des hommes qui ont perdu leur puissance sexuelle. Atoà-ɔphɔ, dans le mythe, quitte le village pour aller chasser en forêt, l'activité sociale qui valorise le plus un homme. Les flèches au moyen desquelles il chasse sont également un symbole sexuel mâle, comme en témoigne, par exemple, le proverbe bànaɔgɔba nsɔà k'ongipho, « on n'épuise pas ses flèches sur les (à tuer des) fourmis ongipho », dont on se sert pour conseiller à un homme de se marier ou de prendre une deuxième femme, plutôt que de les courir toutes. les fourmis ongipho sont un symbole de voracité (on leur donne à dévorer le prépuce des circoncis) et d'inutilité. On peut donc dire que, se situant dans le prolongement du nom Atoà-ɔphɔ et de sa signification, la flèche représente celui qui la décoche et va, en son nom, chercher en hauteur le modèle de la circoncision. De fait, alors que la lance est l'instrument de la chasse horizontale, on ne tire jamais à l'arc que vers le haut pour chasser le singe et d'autres animaux vivant ou nichant dans les arbres.

[...]

De plus, les maîtres de la circoncision s'identifient manifestement à l'animal [le galago] durant la séquence. Cela ressort surtout du rapport entre leur geste et l'invocation qui introduit celui-ci. Le lecteur se souviendra que, dans le mythe qui fait de l'opération du singe osephe par l'écureuil bungù l'origine de la circoncision, l'homme qui assiste à la scène et deviendra ensuite le premier maître de la circoncision se nommait Atoà-ɔphɔ. Ce nom signifie « celui-qui-transperce-les-feuilles », et s'applique aussi de façon toute particulière au galago qui est un symbole de la défloration. Si l'on fait donc intervenir cet animal dans le collier de l'aboi, plutôt que l'osephe qui ne renvoie qu'à la circoncision, c'est vraisemblablement parce que sa signification implique une allusion plus directe aux femmes.

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Littérature :


Paolo D'Angelo traduit par Rémi Chaix, conclue son article intitulé "Écologie et paysage." (In : Nouvelle revue d’esthétique, 2018, vol. 22, no 2, pp. 25-35) sur l'ajout suivant :


CODA : Les lycéens italiens qui ont soutenu l’épreuve du baccalauréat (« maturità ») en juin 2017 se sont vus proposer un poème de Giorgio Caproni intitulé Versicules presque écologiques. Le poème s’ouvre avec un appel à respecter la nature, animée et non animée :


Ne tuez pas la mer, la libellule, le vent.

N’étouffez pas la plainte

(le chant !) du lamantin.

le galago, le pin


L’ensemble est tout à fait raisonnable et beau, et l’on peut en partager le contenu. Mais le poème se conclut avec cette pensée :


Comme la terre pourrait être de nouveau belle,

Une fois l’homme disparu


Le poème est de 1975, et ce n’est pas par hasard s’il est contemporain ou presque des visions de la deep ecology que nous avons rappelées auparavant. Or, Caproni est un magnifique poète, peut-être le plus grand poète italien de la deuxième moitié du XXe siècle. Mais ici le raisonnement (ou peut-être aussi le poème) bat la campagne. L’opinion conclusive est probablement un paralogisme (une fois l’homme disparu, la terre ne serait ni belle ni laide, elle existerait et c’est tout) ; comme nous espérons l’avoir démontré, ce n’est sûrement pas le meilleur viatique pour comprendre et apprécier le paysage.

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