top of page

Blog

  • Photo du rédacteurAnne

Le Chien (suite)


Suite de l'article commencé le 21 juin 2016.





Symbolisme celte :


Adolphe de Chesnel, auteur d'un Dictionnaire des superstitions, erreurs, préjugés, et traditions populaires... (J.-P. Migne Éditeur, 1856) propose la notice suivante :


GOURM. Divinité des Gaulois qui fut un objet de superstition populaire jusqu'au XVII siècle. C'était un chien dont l'histoire était analogue à celle du loup Fenris des Scandinaves. Or voici ce qu'était le loup Fenris. Sa taille était prodigieuse, et sa force était telle qu'il rompait les plus lourdes chaînes et les liens les plus étroits. Cependant, dans la lutte qui eut lieu entre les géants et les dieux, il se laissa prendre dans un lacet que fit un main pour s'emparer de lui, et demeura ainsi retenu depuis ce moment, par ce lacet, dont l'une des extrémités passait dans un rocher enfoncé profondément en terre. Dans cette situation, le fenris faisait entendre d'horribles hurlements qui retentissaient au loin, et l'écume qui s'échappait de sa gueule était en si grande abondance qu'elle formait un fleuve.

 

Pour Georges Dottin, auteur du livre intitulé Les Celtes (1977) :


"Les chiens celtes étaient très réputés, surtout ceux des Morins, des Bretons, des Belges. Les vertragi (veltres) étaient très rapides à la course. Pline assure que les Gaulois faisaient couvrir leurs chiennes par des loups et qu'ils donnaient pour guides à leurs meutes les métis ainsi obtenus. Les chiens bretons, comme ceux de leur pays, étaient utilisés pour la guerre par les Celtes du continent. Le roi arvernes Bituitos avait une garde composée de chiens, qui ne devaient faire qu'une bouchée de l'armée romaine. Ainsi, dans l'Irlande de l'épopée, le chien Ailbe suffisait à garder à lui seul le royaume de Laighen.

La chasse était, avec la guerre, la principale occupation des Celtes. Ils y étaient fort habiles. Ceux qui considéraient la chasse, non comme un moyen d'alimentation, mais comme une distraction, ne se servaient point de filets. Les Celtes riches envoyaient dès l'aurore explorer les lieux où ils soupçonnaient la présence d'un lièvre au repos. Quand on leur avait rendu compte, ils se rendaient au lieu indiqué et lançaient leurs chiens après avoir fait lever la bête. Ils y employaient deux espèces de chiens : les uns cherchaient la piste, les autres étaient tenus à l'endroit où il était vraisemblable que le lièvre dirigeât sa course, pour se lancer sur lui à son passage. A chaque animal qu'ils avaient pris, des Celtes mettaient de côté une petite somme d'argent : deux oboles pour un lièvre, une drachme pour un renard; quatre drachmes pour un chevreuil. Au bout d'un an, au jour de la naissance d'Artémis, on ouvre le trésor ainsi constitué, et on l'emploie à faire les frais d'un sacrifice à la déesse et d'un banquet où les chiens paraissent couronnés de fleurs."

*

*

Dans L'Oracle des Druides (1994 ; traduction française 2006) de Philip et Stephanie Carr-Gomm, les mots clefs associés au chien (Cù) sont :


Conseils - Protection - Loyauté.


La carte représente un lévrier d’Écosse. Il est semblable au chien gravé sur la plaque en bronze retrouvée à Lydney, dans le Gloucestershire, sur un monument au IIIè siècle consacré à Nodens, le dieu-médecin. Un autre site, découvert à Nettleton Shrub, dans le Wiltshire, était consacré à Apollo Cunomaglus - le "Seingeur-chien" celtique associant aussi la médecine au chien. Par une magnifique journée du mois de juillet ou d'août, Sirius, la constellation du "Grand Chien" monte à l'horizon en s'alignant sur le soleil. La violette des chiens, l'églantine, la grande marguerite et la pervenche sont en fleur, ces trois dernières étant appelées en anglais rose-chien, pâquerette-chien et pervenche-chien. L'eau et le chien ayant un lien symbolique très fort, un lac figure à l'arrière-plan.

Le chien est l'ami loyal qui nous guide et nous protège tout au long de cette vie et dans l'au-delà. La tradition druidique voit en lui le gardien des Mystères. Il peut se montrer féroce, mais si nous sommes bien intentionnés, il nous laissera traverser les eaux noires de l'inconscient pour nous conduire au scintillant royaume de la Déesse. Vous devrez peut-être demander à l'esprit du chien de vous aider à défendre vos valeurs et les choses qui vous sont sacrées. Fidélité, confiance et loyauté sont les éléments indispensables de toute vie affective harmonieuse ; le temps est peut-être venu pour vous de développer ces qualités en vous-même et de les apprécier chez les autres.


Renversée, la carte vous incite à analyser dans quelle mesure vous ou votre entourage manquez de fidélité ou de loyauté. demandez-vous quelle importance vous attribuez à ces qualités chez vos amis ou compagnons et si elles font partie de votre personnalité ou de la leur. Si l'amitié durable est pour vous difficile, le chien devrait vous aider à faire naître en vous le désintéressement et la confiance dont elle se nourrit. Souvenez-vous cependant que la loyauté et la fidélité n'ont pas toujours lieu d'être ; un chien se soumet parfois devant un maître cruel.

Le Chien dans la Tradition

Courez mes chiens vaillants, le poil hérissé,

plus vite que l'orage

Extrait du poème ossianique "Manos"


Le chien est un puissant gardien dont les ambassadeurs celtiques s'entouraient pour se protéger. En reconnaissance du rôle protecteur joué par l'animal et pour leur faire honneur, on qualifiait les chefs, les guerriers et les héros de "chiens". Ils portaient ce mot préfixé à leur nom : Cu-Uladh et Cu-chulainn en sont deux exemples, ainsi que Cunoglasus (Chien fauve) et Cunobelinn (Chien du dieu Beli), tous deux rois de Grande-Bretagne.

On raconte en Irlande que des tribus-chiens rassemblaient des "hommes à têtes de chiens", dont sont censés descendre les habitants du Connaught. Une tribu similaire, les Concheannaich ou Têtes de chiens, vivait à Moygonihy dans le Kerry.


Le Gardien des Mystères

Le chien ne défend pas seulement les vies humaines et le bétail. Il garde les seuils, les carrefours, les routes et les sentiers, d'où son rôle de gardien des Mystères et de l'au-delà. On ne compte plus les apparitions du Chien Noir dans les contes et légendes britanniques. Ce chien fantôme est le présager de la mort. Il hante les anciens sentiers, les routes et les lieux de passage. La mort représentant le passage d'une réalité à une autre, le chien a sa place de gardien et de protecteur sur son seuil. Protégeant son maître du danger dans ce monde, le chien est aussi celui qui guide et protège l'âme des morts dans l'Autre Monde. C'est pourquoi les Celtes se faisaient souvent enterrer avec des figurines de chiens ou leur animal familier lui-même. Plus tard, les chiens furent simplement représentés sur les pierres tombales. L'esprit du chien nous guide dans l'Autre-Monde, aussi sûrement qu'il permet à l'aveugle d'éviter les obstacles.

La loyauté et la fidélité du chien sont un modèle de dévouement et de service, exempts de la complexité et de l'ambiguïté qui marquent les relations humaines. Ce contraste entre l'innocence et la loyauté désintéressée du chien et le fardeau de culpabilité qui pèse sur notre intelligence et nos sentiments est évoqué dans la légende écossaise du Prince Llewelyn et de son chien Gelert. Avant de partir pour la bataille, Llywelyn confia un jour à Gelert la garde de son fils nouveau-né, endormi sous une tente. En revenant, il trouva la tente effondrée et Gelert assis à côté, couvert de sang. Rendu fou de désespoir, Llywelyn transperça le chien de son épée. Mais aussitôt après, il entendit crier son fils qui reposait, vivant et bien portant, près de la carcasse d'un immense loup tué par le fidèle Gelert.


Chiens et Héros

Beaucoup de héros avaient leur chien : celui du roi Arthur s'appelait Caball. Lughd, le dieu-héros irlandais, avait un chien magique imbattable au combat, qui pouvait aussi changer l'eau de source en vin. Exilé dans la forêt et séparé de sa bien-aimée Iseult, Tristan se nourrit du gibier que lui ramenant son fidèle chien Houdain.

La vie de Cu-Chulainn, grand héros d'Ulster, est profondément liée à son animal totem, le chien. tout jeune, il arriva en retard à une fête donnée par Chulainn le Forgeron et se retrouva devant des portes fermées que gardait un chien féroce. L'animal s'élança sur lui, mais le garçon le saisit à la gorge et l'assomma contre un pilier. Devant l'affliction de Chulainn, il promit d'élever lui-même un chiot pour remplacer le chien qu'il avait tué, et de remplir le rôle de chien de garde en attendant que le chiot grandisse. Il devint ensuite un redoutable guerrier que le druide Cathbad nomma "Chien de Culhainn". Il s’appelait aussi "Chien des magnifiques actions", "Chien de la douce discipline" et "Chien d'Ulster". trois vieilles sorcières lui firent un jour manger de la viande de chien cuite sur des broches en bois de sorbier. Ayant rompu son serment de ne jamais manger la viande de son animal-totem, il vit sa force décliner, et fut peu après vaincu par Lugaid, le fils de Cu Roi MacDaire.

Un autre grand héros, Fionn Mac Cumhaill, vivait entouré d'humains qui avaient été transformés en chiens : sa tante Turen, transformée par une fée et se deux neveux Bran et Sceolang. Les exploits légendaires de Bran, racontés dans le cycle irlandais de Fionn et les contes écossais de Fingal, firent de lui un chien-héros.

Il existe un lien très ancien entre le chien et l'eau. La tradition voulait que les lacs, les étangs et la mer soient des voies de passage vers l'Autre Monde. Les chiens, compagnons de beaucoup de déesses celtiques et druidiques et gardiens de l'au-delà, étaient donc souvent représentés entrant dans la mer. L'eau était leur voie d'accès à la magie de l'Autre Monde, à l'inconscient, aux rêves, à la vie après la mort, où toutes choses se renouvellent, s'apaisent et deviennent immortelles."

*

*

Pour Sabine Heinz, auteure de Les Symboles des Celtes, (édition originale 1997, traduction française Guy Trédaniel Éditeur, 1998),


"Chez les Celtes, les chiens ne sont utilisé comme motif qu'à partir des Ve-IIIe siècles avant notre ère ; au début, ils sont rares. Ils apparaissent comme compagnons de divinités féminines et masculines ; la mythologie celtique n'est pas la seule à en donner de multiples interprétations symboliques. Cela tient probablement aux facultés du chien, que l'homme considère comme exceptionnelles dans le domaine de l'ouïe, de l'odorat et de l'orientation. La femelle symbolise fécondité et guérison (elle lèche les plaies), amour des enfants / animal domestique / compagnon. Le mâle symbolise la chasse, le combat et la mort ou son annonce. Selon les lois du Pays de Galles, désaccoupler les chiens est un privilège. Les chiens sont aussi des animaux protecteurs / des gardiens., aussi bien de l'ici-bas que de l'au-delà. En tant qu'animal de chasse, le chien a une double fonction : celle de l'attaquant agressif et celle du protecteur de son maître et de ses richesses.

C'est ce que prouvent les vestiges trouvés dans des tombes d'enfants ainsi que l'histoire galloise du chien Gelert :

Gelert était le chien de Llywrlyn, un prince gallois. C’était le chien le plus courageux la chasse, le plus fidèle et le plus doux à la maison. Un jour, Gelert ne vint pas pour la chasse. Llywelyn, attristé, partit sans lui. Content de rentrer chez lui, il fut terrifié en voyant Gelert trottiner à sa rencontre couvert de sang. Llywrlyn courut dans sa chambre d'enfant. Il avait souvent laissé Gelert veiller sur son fils. Il ne trouva plus son enfant, mais vit du sang partout. Il crut que Gelert avait tué son fils et le transperça de son épée. Peu après, Llywelyn entendit son fils crier. Il le retrouva sain et sauf, caché dans un coin. A côté de lui, il vit un loup qui, même mort, semblait encore redoutable. Gelert avait défendu l'enfant contre le loup. Llywelyn fut profondément affligé de la mort stupide de son chien et lui fit ériger une tombe somptueuse - Beddgelert (en français "la tombe de Gelert", nom d'un village au nord d'Aberystwyth).

Il existe un lien très étroit entre le chien et le principal héros des légendes irlandaises, Cùchulainn. Ce dernier se nomme lui-même chien des on père adoptif, le forgeron Caulanns, car son premier (et son dernier ?) exploit est de tuer le chien de Caulanns. Des tabous en relation avec les chiens lui sont imposés. L'un d'eux lui interdit de manger de la viande de chien. Le seul fait de mettre une épaule de petit chien rôti sous ses cuisses lui fait perdre ses forces.

On s'aperçoit que différents noms comportant une ou plusieurs parties du mot "chien", comme par exemple Cuno, cù, con, coin, cona, conaib, apparaissent fréquemment dans les légendes irlandaises : CùRoi livre combat aux têtes de chien, Conchobar, en français "Chien du secours", est roi d'Ulster, Conall Cernach est décapité par les trois Ruadchoin, en français les Chiens Rouges. L'aspect belliqueux que l'on trouve dans le culte du chien apparaît nettement chez les chevaux de Connall Cernach qui combat sur un char. Sa jument, la Triste Rouge, a une tête de chien avec laquelle elle arrache les entrailles de ses ennemis. Les Celtes avaient également des chiens de combat croisés avec des loups.

Dans la société celtique, les chiens ont gardé leur importance. Le chien a été et est encore un cadeau, un animal protecteur, un animal de chasse, qui aide l'homme à garde ses troupeaux ; aujourd'hui encore, on les élève pour les vendre à l'étranger et ils fournissaient un motif apprécié dans les différents domaines de l'art. Leur importance se traduit également par le fait que, dans les noms irlandais et gallois, certains éléments rappellent le mot chien, par exemple, O'Conors en irlandais ou Cynon en gallois. L'héraldique représente souvent le chien."

*

*

D'après Jean Markale, auteur du Nouveau Dictionnaire de Mythologie celtique (Éditions Pygmalion - Gérard Watelet, 1999),


Le chien est un "animal qui jour un grand rôle dans la mythologie celtique. Il est le gardien du troupeau. De nombreux héros épiques portent des noms où l'on reconnaît le mot "chien", tels Conchobar ou Cûroi. Le nom de Cûchulainn signifie "Chien de Culann" : il lui avait été donné parce qu'il avait tué le chien du forgeron Culann et, en réparation du tort causé, il avait promis de le remplacer et d'être le gardien (le chien) du forgeron. Mais on observe à ce sujet une vague réminiscence totémique : en effet, l'un des interdits de Cûchulainn est de ne jamais manger de viande de chien."

 

Selon Divi Kervella dans Emblèmes et symboles des Bretons et des Celtes (2001),


"Dans le domaine celtique le chien n'a pas cette connotation péjorative qu'il a dans nombre de civilisations. Pour les Celtes il est associé au monde des guerriers. On sait que les rois de Petite Bretagne étaient entourés de grandes compagnies de chiens de guerre. C'était un terme très élogieux pour les guerriers, ce qui démontrait qu'ils avaient l'ardeur des chiens de combat. On retrouve le mot ki (chien) - en composition sous la forme lénifiée -gi - dans des noms propres bretons connus comme Tangi (composé de tan "feu" et ki) ou Maengi (avec l'élément maen "puissant"). A ces noms il faut ajouter les noms en Kon- très nombreux (Konan, Konogan, Tegoneg...) qui est un cas spécial du mot ki (ce terme kon a parfois été confondu avec un autre mot, kun, qui a le sens de "élevé, suprême"). Au Moyen Âge le nom archétype du guerrier breton était Konan et Konan Meriadeg est le fondateur historico-légendaire de la Bretagne continentale. En 1932 l'auteur américain Robert E. Howard créa le fameux personnage de Conan the Cimmerian dont le parcours rappelle plus que fortement l'épopée de Konan Meriadeg, la barbarie en plus. Voici comment l'auteur le présente : "Mais le plus fier royaume du monde était l'Aquilonia, perle de l'Occident fabuleux. Dans ces contrées vient Conan le Cimmérien..." Aquilonia était le nom attribué à Quimper par les Romains, et le terme "Cimmérien" a souvent été utilisé à la fin du XIVè et au début du XVè par plusieurs auteurs, comme Ernest Renan, pour désigner les Gallois (à partir du nom local de Cymru).

Le nom de CùChulainn (les francisants essaieront de prononcer quelque chose comme "cou rhouligne"), le grand héros guerrier de la mythologie celtique, veut dire "chien de Culann". Il prit ce nom quand il tua le chien de combat du forgeron Culann et qu'il put le remplacer par sa propre personne. Tuer un chien ou en manger de la viande devint tabou pour lui. Il fut contraint néanmoins de tuer un "chien d'eau" (une loutre), ce qui marqua son arrêt de mort.

Le dogue est emblématique de la ville de Saint-Malo. La nuit venue on en lâchait de particulièrement féroces hors de la ville close pour garder les abords et les chantiers navals. Le dogue figurait autrefois sur le premier écu connu de la ville. C'est en 1590, lors de la proclamation de la République de Saint-Malo, que la ville prît comme emblème la herse, symbole de ville libre. Aujourd'hui deux dogues lui servent encore de supports. Cave canem (en latin "Gare au chien"), l'ancienne devise de la ville a également disparu, remplacé par un beaucoup plus insipide Semper fidelis (toujours fidèle)."

*

*

Selon le site http://www.venusvoyance.com/ :


Le Chien compagnon des dieux celtiques

"Les Celtes ont littéralement adoré les chiens, et tous les écrits de l’Antiquité soulignent d’ailleurs leur incontestable supériorité en matière d’élevage canin. La chasse était pour les Celtes un acte sacré comparable à la guerre, qui nécessitait une initiation et ne pouvait se pratiquer qu’assortie d’un rituel destiné à obtenir une protection divine. Les chiens étaient alors de précieux auxiliaires des hommes, qui participaient aux diverses cérémonies, mais aussi, lors des sacrifices de remerciements offerts aux dieux, qui recevaient leur part d’hommage.


Le chien dans la tradition

Il faut remonter aux origines des Celtes, dans la Tradition universelle née dans les Himalayas, pour retrouver dans la langue Sanscrit le chien, baptisé le « Grand Aimant » (Maha Kamuka). On y entend deux choses :

  1. Le chien, au caractère affectueux et dévoué, est un animal aimant, fidèle à son maître.

  2. Il devient aussi le symbole du magnétisme, de l’attraction.

C’est pourquoi l’étoile Sirius (le brillant) était, avant de recevoir son nom, le « Grand chien du ciel », ou plus exactement, la « Grande chienne blanche céleste ». Plutarque, en Grèce, fit remarquer dans son traité Isis et Osiris, qu’en Grec le mot chien (cyon ou cynos) était proche de la forme verbale de « cyo » (je suis grosse ou je suis lourde), dont la traduction en égyptien donne « Sothis », qui serait, selon Plutarque, l’origine possible du nom de Chien attribué par les Grecs à l’astre d’Isis.

Une découverte récente (1925) d’une étoile gravitant autour de Sirius en 50 ans, étoile qui est en fait une naine blanche à la densité phénoménale (10t/cm3), explique peut être cette cosmogonie sanscrite, puis des Grecs, qui disaient avoir tout appris des Celtes. Cette naine blanche qui gravite autour de Sirius est donc un grand aimant (Maha Kamuka), un chien. Les Traditions se recoupent alors :

  • Dans le ciel de l’Inde, la chienne Sârama garde le troupeau doré des étoiles et des rayons solaires. Ses deux petits, les Sârameya, surveillent les morts dans le royaume souterrain de Yama, le père des hommes.

  • En Chine, l’étoile Sirius, le « Loup céleste », garde le Palais du Seigneur d’En-Haut, c’est-à-dire la « constellation de la Grande Ourse », considérée comme l’Autre Monde. Pour obéir aux ordres de son Seigneur, le Loup céleste prend les hommes dans sa gueule et les jette dans un abîme.​

Quand la mythologie rejoint la science

Le symbolisme du chien, conservé incompris dans les mythologies ayant appartenu jadis à tous les peuples de la Terre, n’est en fait que le résultat de connaissances scientifiques et astronomiques étonnantes pour l’époque. Chez les Celtes, un chien escorte les dieux du sous-sol : dieux forgerons ou dieux des Métaux, dieux des Morts et de la Fertilité. Mais les chiens accompagnent aussi Diane, et leur sens ésotérique concerne surtout le magnétisme de la Lune, plus que les qualités de chasseresse de la divinité.

La mythologie irlandaise a personnifié l’électromagnétisme par le héros Cûchulainn (le Chien de Culann), dont les aventures sont un véritable catalogue d’informations scientifiques concernant les phénomènes électromagnétiques, la foudre en boule, et même les aurores boréales. Les aventures de Cûchulainn fourmillent d’enseignements sur les phénomènes célestes, les propriétés des mégalithes et le cosmo-tellurisme, les expériences chimiques, voire alchimiques, en particulier, le procédé de la trempe pour le durcissement des métaux et des alliages. La mythologie devient alors le dépôt de la science humaine la plus ancienne.


En conclusion

Il serait difficile dans cet article, d’énumérer tous les détails se rapportant à la science et aux connaissances universelles de l’homme, contenus dans les récits mythologiques celtes, mais l’archéologie et la science moderne nous en dit chaque jour un peu plus."

*

*

Dans Animaux totems celtes, Un voyage chamanique à la rencontre de votre animal allié (2002, traduction française : Éditions Vega, 2015), John Matthews nous propose la fiche suivante :


"Chien = irlandais : cu ; gallois : cu ; gaélique : - ; langue de Cornouailles : ky ; breton : ki.


Il y a un grand nombre de chiens célèbres dans la tradition celte, comme cela est prévisible s'agissant d'un peuple si attaché à la chasse. Cafall, le fameux chien de chasse d'Arthur, laissa l'empreinte de sa patte dans une pierre, qui aujourd'hui encore porte son nom, Carn Cafall, et dont il est dit que si elle est déplacée le soir, elle a retrouvé sa place initiale le jour suivant. La tradition folklorique nous parle de trois chines verts (probablement des animaux féeriques) appelés Fios, Luaths et Tron - connaissance, rapidité et consistance. Il est également remarquable qu'un nombre surprenant de noms, qui'ils soient irlandais ou gallois, proviennent du mot celte cu. C'est le cas de Cuchulainn (chin de Culainn), Cu-neglassus (chien-gris), Con-can-cness (chien-sans-peau), Kentigern (chien-roi) et de bien d'autres. Il est intéressant de constater que le mot Cu soit parfois également annoté comme signifiant "héros", ce qui souligne l'importance que les Celtes attachaient au chien.

On trouve également des références fréquentes au Cwn Annwn (chien d'Annwn), une meute de chiens aux oreilles rousses et au corps blanc, qui chassaient sur la terre des mortels, ainsi que dans l'Autre-Monde. On dit que ce serait eux, que l'on connaît également sous le nom d’Équipage de Chasse Sauvage, et qui apparaissent souvent dans les mythologies celte et germanique ; il s'agit d'une meute dirigée par le Seigneur de l'Autre-Monde, Gwyn ap Nudd (ou parfois par Arawn lui-même) à la poursuite des âmes et personnes malveillantes ou non-méritantes.

Le chien était également associé avec la guérison, sa salive étant considérer comme ayant des propriétés curatives. A Nettleton Shrub, dans le Wiltshire, il y a un lieu de pèlerinage dédié à la divinité romano-britannique appelée Apollo-Cunomaglus (Seigneur-Chien), ce qui indique qu dans cette région, et donc probablement dans d'autres, s'était établie une association entre la chasse et la guérison, ce qui fait du chien un bon compagnon pou ceux qui souhaitent être guéris.


Préceptes du totem :

Éclaireur : Flaire le meilleur endroit.

Protecteur : Je te garderai sur la voie.

Challenger : Qui est-ce qui profite vraiment de cela ?

Aide : Suis toujours ton instinct."

*

*


*

*


*





Symbolisme onirique :


Selon Georges Romey, auteur du Dictionnaire de la Symbolique, le vocabulaire fondamental des rêves, Tome 1 : couleurs, minéraux, métaux, végétaux, animaux (Albin Michel, 1995),


Le chien, dans le vocabulaire d'images, est un mot fade ! L'étude des rêves dans lesquels apparaît le symbole a été entreprise à la suite des 226 autres recherches concernant des images réparties dans les quinze familles du répertoire. Jamais, jusqu'alors, l'exploration des scénarios n'avait abouti à des observations aussi peu signifiantes, au moins en première approche. Présent dans 15% des séances, le chien semble se fondre dans le décor des rêves.

Les associations avec l’image canine sont si dispersées, si pauvres, que, s'il devait la situer sur une échelle progressive de la valeur onirique, graduée de zéro à dix, le chercheur la placerait, au mieux, au niveau deux ! Pourquoi l'animal le plus proche de l'homme, le compagnon le plus fidèle de son environnement domestique, se trouve-t-il ainsi exclu de la liste des grands acteurs de l'imaginaire ? Peut-être, tout simplement, parce qu'il appartient à l’univers familier, pour ne pas écrire familial ? Lorsque la mère, le père ou tout autre proche parent du rêveur interviennent explicitement dans un scénario, ils ne sont pas porteurs d'un sens caché. Ils participent à la recomposition d'une souvenir ou se prêtent au jeu de représentations fantasmatiques. la scène jouée peut être symbolique mais l'acteur reste lui-même. Peut-être en est-il ainsi du chien ?

Les évocations du canidé sont presque toujours brèves, presque furtives. dans près de 40% des situations, elle sont liés à un souvenir. Elles réactualisent parfois une frayeur, par le rappel d'une morsure ou, beaucoup plus souvent, elles témoignent d'un épisode attendrissant. L'analyse des corrélations fournit quelques indices qui laissent soupçonner que, toute discrète qu'elle paraisse, l'image onirique du chien se prête aux mêmes traductions que celles qui ressortent de l'étude des mythes.

Les associations, plutôt incertaines, concernent surtout le loup, le serpent, le chat, l'araignée et le vide. les expressions chien-loup qui désigne le chien de berger allemand et entre chien et loup qui évoque le passage indécis du jour à la nuit témoignent assez clairement de l'ambiguïté qui environne l’image du chien. Les grands mythes, mais aussi de nombreuses coutumes régionales font du chien le gardien du seuil de l'autre monde. Mais, pour ne considérer que les deux figurations mythiques les plus célèbres, on reconnaîtra que celles-là sont également bien ambiguës : Cerbère, le gardien des portes de l'enfer, est un monstre possédant trois têtes et une queue de serpent. Anubis divise encre les égyptologues sur la question de savoir si ce passeur entre les mondes est doté d'une tête de chien ou de chacal, voire de loup. Ce qui est certain, c'est que lorsqu'il se réfère au dieu psychopompe égyptien dans les rêves, l'imaginaire souligne immanquablement l'incertitude de l’image.

Dans l'article consacré au loup, nous reproduisons une longue séquence du quarante-troisième scénario de Florent, an laquelle la confusion entre les deux canidés est totale. En voici le prologue : « ... Le mot qui me vient, c'est Anubis... il pleut toujours... j'allume un feu pour me réchauffer... puis, soudain, il y a un chien noir, un peu loup... je l'ai déjà vu tout à l'heure mais c'était difficile de le dire avant... il est là, sous la pluie, immobile... je fais un cercle de foyers pour me protéger du chien... il me regarde... il doit être sauvage... le chien s'est transformé en homme à tête de chien-loup... le personnage égyptien... [...] il s'est approché et me remet un petit cercueil... un sarcophage miniature, grand comme la main... [..] J'ouvre le petit sarcophage... il y a dedans une petite effigie de moi-même, avec les vêtements que je porte maintenant... je suis trempé et... mort ! Très blanc... »

Pendant toute la durée de ce rêve, très long, le personnage sera qualifié alternativement d'homme-chien, d'homme-loup. . Hani rappelle que l'écriture hiéroglyphique se sert d'un même animal, le chacal, pour désigner deux dieux distincts : Anoupou (Anubis) et Oupouaout. Le premier, couché, est un chien, le second, dressé, est un loup. Le rêve de Florent constitue un document exceptionnel. Il montre que lorsque le chien s'attarde dans le rêve, il a perdu sa pure nature de chien ! Son association avec le serpent confirme sa vocation de gardien du seuil, mais il est rare que ce rôle apparaisse clairement dans les situations oniriques.

Bien des légendes attribuent au chien la faculté de voir au-delà de ce qui est accessible au regard humain. Le chien verrait le monde de la mort et des fantômes. C'est peut-être dans cette direction que s'offre une chance de pénétrer la symbolique de l'image.

L'araignée et plus particulièrement la toile d'araignée sont en corrélation avec ce qu'il est convenu d'appeler l'angoisse métaphysique, c'est-à-dire, en clair, la peur du néant, de la nullité du sens de la vie. Pour une psychologie soucieuse de conserver se repères, ses ancrages à la réalité apparente, l'araignée suspendue dans le vide, à l'extrémité de son fil, est ne image intolérable. Elle brandit l'évidence du rien. Elle menace le système de défense anti-angoisse patiemment établi par le Moi.

Une séquence du douzième scénario de Christian illustrera l'association entre l'araignée et le chien : « ... Là... défilent des personnages de dessins animés, Blanche-neige, le prince charmant sur son cheval, les nains... Pinocchio aussi ! Peut-être, au fond, des images stéréotypées du bonheur !... [...] Je me jette dans le vide... je suis retenu par un filet, par une toile d'araignée... je sis suspendu dans le vide, sauvé par la toile d'araignée... je vois un très beau paysage, avec des tas de gens... j'avance dans la toile d'araignée... tout à coup, la toile d'araignée s'est percée... je tombe... je tombe comme ne pierre... je deviens une tête !... Plutôt une sphère car le nez, les oreilles, la bouche sont effacés par la vitesse... c'est un visage de cosmonaute... de chien !... Je suis un chien envoyé sur la lune... la terre se reflète dans mon casque..." »

Au-delà du monde visible, au-delà de la toile d'araignée, la plongée dans le néant n'est pas réalisable par une imagination dépendante de sens de la terre ! Christian tente de réaliser l'impossible en effaçant les oreilles, le nez et la bouche, mais il ne peut se passer de l'image. A la limite du monde, celle du chien est l'ultime recours pour se défendre contre la peur du néant. Le rêve de Christian n'est pas un document isolé, qui s’offrirait opportunément pour la démonstration. la légalité des associations est attestée par de nombreuses production dont l'originalité interdit toute suspicion portée sur le rôle du hasard. Pour établir une conviction, il suffit de rapprocher quelques phrases du septième scénario de Clément des images qui précèdent : « Là, je vois un patineur qui évolue sur la glace... tout à coup, la glace se fendille, en étoile, comme une toile d'araignée... elle vole en éclats... le patineur se retrouve au-dessus du vide... il aperçoit un troupeau de moutons... mais il n'y a pas de chien, vraiment, autour des moutons... seulement un berger... »

La chaîne d'associations dans laquelle s'intègrent la toile d'araignée, le vide et le chien est ainsi nettement établie.

Dès lors, il est aisé de réaliser la synthèse entre le contenu des interprétations reposant sur l'étude des mythes qui confèrent au chien le rôle de gardien du seuil de l'au-delà et la traduction que l'observation des textes littéraires nous conduisit naguère à développer, en opposant radicalement les valeurs symboliques représentées par le chien et celles dont le chat est porteur.

*

L’image du chien expose les valeurs de la permanence, de la sécurité, de la règle, de la maîtrise, de la stabilité. Le chat incarne les concepts d'ouverture, de plasticité, de renouvellement, de risque, de disponibilité pour la transformation. Si le chien et le chat apparaissent fréquemment dans les mêmes scénarios, les scènes oniriques où les deux acteurs se donneraient la réplique sont d'une exceptionnelle rareté. Ils interviennent isolément l'un de l'autre, maintenant entre eux la plus grande distance possible à l'intérieur du rêve.

Le chat, dans la langue des images, est la racine de tous les symboles exprimant la liberté d'être, l'acceptation du devenir imprévisible.

Le chien est le synonyme de toutes les images qui disent le besoin de repères, du maintien des références, il est le gardien sécurisant des limites.

La dynamique de l'imaginaire, tellement active dans le rêve éveillé, repose sur l'opposition constante de la poussée évolutive, du flux de vie qui porte vers le devenir et du besoin de permanence, de l'aspiration au maintien de la forme atteinte, de l'ambition de durer. Au seuil de chaque franchissement, il y a, invisibles, un chat qui incite au passage et un chien qui défend le seuil.

Lorsqu'il apparaît dans le rêve - très sobrement en règle générale - le chien marque une limite que le rêveur hésite à franchir. Le plus souvent, il offre une pause, un bref repli sécurisant dans un processus de restructuration active de la psyché.

*

*




Mythologie :


Dans ses Métamorphoses (Traduction (légèrement adaptée) de G.T. Villenave, Paris, 1806, disponible sur le site de référence https://remacle.org), Ovide raconte celle d'Hécube en chienne :


Hécube. Les Troyennes (XIII, 399-438)

Ulysse, après sa victoire, s'embarque pour Lemnos, terre infâme où jadis les hommes qui l'habitaient, furent tous égorgés par ordre d'Hypsipylé, fille de Thoas. Maître des flèches d'Hercule, et suivi de Philoctète, Ulysse revient sous les remparts de Troie.

Enfin les derniers travaux de cette longue guerre s'achèvent. Troie et Priam tombent en même temps. Hécube, épouse infortunée, après avoir tout perdu, perdit encore la forme humaine, et, par des aboiements nouveaux, épouvanta les airs sur des rives étrangères.

[408] Ilion brûlait aux bords où l'Hellespont s'allonge, se resserre et s'enferme entre deux mers. L'autel de Jupiter avait bu le vieux sang de Priam. Traînée par les cheveux, la prêtresse d'Apollon, Cassandre, tendait vers le ciel de suppliantes mains. Prix injurieux de la victoire, les mères Troyennes, embrassant, tandis qu'elles le peuvent encore, les autels des Dieux de leur patrie, et réfugiées dans les temples embrasés, en sont arrachées par le vainqueur. Le jeune Astyanax est précipité du haut de ces tours d'où sa mère lui montrait si souvent Hector combattant pour lui et pour le trône de ses aïeux.

[418] Déjà le souffle heureux de Borée invite les Grecs à partir. Les voiles s'enflent et frémissent. Le pilote veut qu'on profite de la faveur des vents : "Adieu, Troie ! on nous arrache de ton sein !" s'écrient les Troyennes captives. Elles embrassent la terre qui les vit naître, et quittent les toits fumants de leur patrie. Hécube, quel spectacle ! Hécube arrive la dernière. Ulysse l'entraîne : il l'a trouvée errante au milieu des tombeaux de ses fils, et baisant leurs froids ossements. Elle a pu du moins avaler les cendres de son Hector ; elle les emporte dans son sein, et n'a laissé sur le monument que ses cheveux blancs et ses larmes, seules offrandes aux mânes de son fils.

 

Selon Jacques Albin Simon Collin de Plancy, auteur du Dictionnaire infernal, ou bibliothèque universelle, sur les êtres, les personnages, les livres, les faits et les choses : qui tiennent aux apparitions, à la magie, au commerce de l'enfer, aux divinations, aux sciences secrètes, aux grimoires, aux prodiges, aux erreurs et aux préjugés, aux traditions et aux contes populaires, aux superstitions diverses, et généralement à toutes les croyants merveilleuses, surprenantes, mystérieuses et surnaturelles. (Tome troisième. La librairie universelle de P. Mongie aîné, 1826) :


GURME. — Chien redoutable, espèce de Cerbère de l'enfer des Celtes ; pendant l'existence du monde, ce chien est attaché à l'entrée d'une caverne ; mais au dernier jour il doit être lâché, attaquer le dieu Tyr, et le tuer.

*

*

Selon Hélène Vial auteure d'un article intitulé "Le rire dans le mythe ovidien de la métamorphose" (paru dans la revue Humoresques, CORHUM Humoresques, 2006) :


Passons rapidement sur la métamorphose d’Hécube, la reine de Troie, en chienne, au livre XIII (1), dans laquelle l’apparition du rictus (2), qui s’ouvre sur un aboiement au lieu de paroles humaines, signe l’invasion irréversible de l’humanité par l’animalité et dessine l’image effrayante d’un visage autrefois humain éternellement figé dans une grimace d’angoisse et de détresse ou un rire dément. Au livre XIV, la métamorphose de Scylla, effet de la jalousie de la magicienne Circé, représente, elle aussi, l’irruption monstrueuse du chien, et de son rictus, dans l’humain, mais cette irruption est d’autant plus terrifiante qu’elle n’est que partielle :

  • Scylla arrive ; à peine est-elle descendue dans l’eau jusqu’à la taille qu’elle aperçoit autour de ses deux aines une hideuse ceinture de monstres aboyants. D’abord, ne pouvant croire qu’ils font partie de son corps, elle veut fuir. Elle repousse ces chiens menaçants dont les crocs l’épouvantent ; mais elle a beau fuir ; elle les entraîne avec elle. Elle examine sa personne, cherchant ses cuisses, ses jambes, ses pieds, elle ne trouve à leur place que les gueules béantes d’une meute de Cerbères (Cerbereos rictus) ; elle ne reste debout que grâce à ces chiens furieux. Et elle voit au-dessous d’elle les croupes de ces animaux sauvages qu’elle retient assemblés par ses aines mutilées et son buste les domine (Statque canum rabie subiectaque terga ferarum / Inguinibus truncis uteroque extante coercet). (3)

L’horreur de Scylla devant les chiens qui envahissent le bas de son corps renforce la brutalité de cette métamorphose décrite comme un viol suivi d’un monstrueux accouchement. La métamorphose est plus que jamais, ici, une forme de mort, comme en témoignent les Cerbereos rictus, gueules béantes et sardoniques de chiens infernaux. Placée, comme Cerbère, sur un seuil entre la vie et la mort, entre l’humanité et l’animalité, Scylla est par là même l’emblème de tous les personnages métamorphosés. Les deux derniers vers offrent, dans un paroxysme de violence, un emblème de ce statut oxymorique : les chiens qui mutilent Scylla sont aussi, pour elle, le seul moyen de rester debout, c’est-à-dire de vivre. Comme dans la légende d’Hécube, la métamorphose, si elle représente une dévorante abolition de l’être matérialisée par l’apparition du rictus, est aussi la condition d’une accession à l’éternité (que vient d’ailleurs garantir, dans les deux cas, l’emploi d’un verbe étonnamment triomphant : stare, extare (4)).


Notes : 1) : Ovide, Métamorphoses, XIII, 567-571.

2) : Ibid., XIII, 568.

3) : Ibid., XIV, 59-67.

4) : Ibid., XIII, 569 et XIV, 66 et 67.

*

*


*





Littérature :


Georges Sand, dans une pièce intitulée Le Diable aux champs (1869), donne aussi l parole aux animaux :


SCÈNE VIII (3e partie)

Devant la porte du château de Noirac

PYRAME, LÉDA, MARQUIS.


MARQUIS. — Belle Léda, reine des levrettes, je vous présente mes hommages. Ah ! que vous avez les pattes blanches ce matin ! Bonjour, bonjour, Pyrame ; je me porte bien, merci !

PYRAME. — As-tu fini, avec tes manières ! chien de comtesse, va ! chien de manchon, chien de couvre-pied rose, chien de gimblettes !… Léda, ne faites pas attention à ce roquet-là !

LÉDA. — Je trouve qu’il sent bon, il sent la crème !

PYRAME. — Vous aimez donc ça la crème ? C’est écœurant ! Parlez-moi d’un bon manche de gigot !

MARQUIS. — Toi, tu manges du gigot, portier ? Tu ne connais que le pain de munition, et quant à la crème, tu n’y as jamais goûté. Voyez, belle Léda, comme j’ai la barbe bien peignée et comme on m’a tondu les pattes ce matin !

LÉDA. — Il est drôle, ce petit, il m’amuse !

PYRAME. — Léda, vous êtes une coquette ! Vous me disiez tout à l’heure que vous aimiez les grandes dents blanches, et celui-là n’en a plus ; c’est un vieux folâtre.

LÉDA. — J’aime les marquis, c’est mon faible ; mon maître est un marquis !

PYRAME. — Vous ne détestez pourtant pas les paysans !

LÉDA. — Mon cher, j’aime à rire et à causer avec tout le monde. Mais où est donc mon maître ? Je l’ai perdu. Il faut que je le cherche.

MARQUIS. — Ah ! voilà Jenny qui m’appelle. Je me sauve. Si elle me savait ici en compagnie d’un gros chien malpropre !…

PYRAME. — Gare le fouet, Marquis ! Ah ! que c’est agréable d’être grand seigneur et de ne pouvoir faire société avec personne de son espèce ! Allons, pauvre esclave, viens faire un tour avec moi, dépêche-toi avant qu’on te voie filer !

MARQUIS. — Où vas-tu ?

PYRAME. — Trouver mon maître, qui déjeune par là-bas.

MARQUIS. — Est-ce qu’on y mange de la viande ?

PYRAME. — Tiens, je crois bien !

MARQUIS. — Ah ! j’y vais. On ne m’en laisse pas manger, et je l’aime tant la viande ! JENNY, courant après Marquis. — Ici, ici, monsieur ! Je vous vois vous sauver ! Fi, que c’est vilain ! Vous vous couchez, à présent ? vous demandez pardon ! Allons, venez voir votre maîtresse qui a du chagrin. Venez l’amuser et lui dire que vous l’aimez bien aussi, vous !

(Elle l’emporte.)

PYRAME, seul. — Est-on malheureux d’être chien de qualité ! Ah ! je vais prendre un bain dans la mare verte, pour me mettre en appétit !

*

*

Dans Un peu plus loin sur la droite (Éditions Viviane Hamy, 1996) Fred Vargas imagine un meurtre qui est découvert à partir de l'os mal digéré que rejette un chien sur la grille d’un arbre de Paris :


"Le fauteuil était aussi mou que son maître, de même que le chien qui était couché sur le sol. Là au moins, la règle s'appliquait. C'était un gros mâle bouledogue, fatigué d'avoir couru les femelles bouledogue, et qui estimait qu'il en avait assez fait, ça suffisait comme ça le métier de chien, qu'on ne compte pas sur lui pour hurler sous prétexte qu'un inconnu pénétrait dans la maison.

- Vous avez là une bête qui sait y faire avec la vie, dit Louis.

- Si ça vous intéresse, dit Chevalier en s'enfonçant dans le canapé, il n'a jamais mordu personne, ni mangé de pieds non plus.

- Jamais mordu ?

- Une ou deux fois, quand il était jeune, et parce qu'on l'avait emmerdé, admit Chevalier.

- Bien sûr, dit Louis.

[...] Louis présenta Marc, qui ne pensait plus qu'à une chose, éviter le pit-bull s'il entrait dans la pièce. Il parvenait à se raisonner devant les chiens ordinaires, mais un pit-bull, et un pit-bull qui bouffait les pieds des morts, ça lui coupait les jambes en deux.

[...] - Un chien dans le jeu de quilles, dit Louis doucement." (p. 195)

*


Dans L'Homme aux cercles bleus (Éditions Viviane Hamy, 1996) de Fred Vargas, on découvre le commissaire Adamsberg qui fait connaissance avec son adjoint Danglard :


- Je ne vous ai pas raconté l'histoire du grand chien baveux ? lui demanda Adamsberg.

- Non. Je dois dire que non.

- Après, vous me jugerez le plus sale flic de la terre. Il faut vous asseoir un moment, je parle lentement, j'ai beaucoup de mal à me résumer, souvent même je m'égare. Je suis un homme vague, Danglard. J'étais parti tôt du village pour passer la journée dans la montagne, j'avais onze ans. Je n'aime pas les chiens, je ne les aimais pas non plus quand j'étais petit. Celui-là, un gros chien crétin et sympathique. Je lui ai dit : "Écoute, gros chien, je vais loin, j'essaie de me perdre et de me retrouver ensuite, tu peux venir avec moi, mais bon Dieu arrête de me baver dessus, ça me dégoûte." Le gros chien a pigé et il m'a suivi.

Adamsberg s'interrompit, alluma une cigarette et prit un petit bout de papier dans sa poche. Il croisa une jambe, s'appuya dessus pour griffonner un dessin et continua, après un coup d’œil à son collègue.

- Ça m'est égal de vous ennuyer, Danglard, je veux raconter l'histoire du gros chien. Le gros chien et moi on a discuté tout le long du chemin, des étoiles de la Petite Ourse et des os de veau, et on s'est arrêtés à une bergerie abandonnée. Là, il y avait six mômes d'un autre village, je les connaissais bien. On s'était souvent battus. Ils ont dit : "C'est ton clebs ?", "Pour aujourd'hui", j'ai répondu. Le plus petit a saisi le gros chien par ses longs poils, le gros chien qui était peureux et mou comme un tapis, et il l'a tiré jusqu'au bord de la falaise. "Je l'aime pas ton clebs, il a dit, il est con , ton clebs." Le gros chien gémissait sans réagir, c'est vrai qu'il était con. Le petit môme lui a foutu un coup de pied au cul, et le chien est tombé dans le vide. J'ai posé mon sac par terre, lentement ? Je fais tout lentement. Je suis un homme lent, Danglard.

[...] Vous vous souvenez ? J'en étais au chien qui avait basculé. J'ai détaché ma gourde en der de ma ceinture et j'ai tapé fort sur la tête du petit môme.

Et puis je suis parti chercher ce gros crétin de chien. J'ai mis trois heures à l'atteindre. De toute façon, il était mort. La chose importante de cette histoire, Danglard, c'est l'évidence de cruauté qu'il y avait qu'il y avait chez le petit môme. Je savais depuis longtemps que que quelque chose n'allait pas chez lui et c'était ça qu'il avait, la cruauté.

[...] - Je suis devenu comme un chien, Mathilde, maugréa Charles. Un chine qui entend plus que les hommes et qui sent plus que les hommes. Un sale chien qui peut faire mille kilomètres en ligne droite pour retrouver sa maison. Alors, moi aussi, par d'autres chemins qu'Adamsberg, je sais des choses.

*

*

Martin Cruz Smith, auteur de Chiens et loups (Éditions Titanic Productions, 2004 ; traduction française Robert Laffont, 2006) raconte comment la faune et la flore vivent à nouveau dans la zone sinistrée de Tchernobyl :


Roman les précéda jusqu'au poulailler. Dans la fraîcheur d'après la pluie, Arkady sentit la chaleur qui se dégageait des poules en train de couver. Le vieil homme montra à Arkady comment il attachait la barrière avec un bout de fil de fer.

- Ils sont rudement malins, les renards.

- Et si vous aviez un chien ? suggéra Arkady.

- Les loups mangent les chiens.

Tout le village semble d'accord là-dessus, pensa Arkady. Roman secoua la tête comme s'il avait longuement réfléchi à la question.

- Les loups détestent les chiens, reprit-il. Ils les attaquent parce qu'ils les considèrent comme des traîtres. Si on y réfléchit, les chiens ne sont des chiens qu'à cause des humains. Sinon, ils seraient tous des loups, pas vrai ? Et que deviendrons-nous quand tous les chiens auront disparu ? Ce sera la fin de la civilisation.

*

*

Dans Un lieu incertain (Éditions Viviane Hamy, 2008), Fred Vargas imagine un suspect inquiétant qui entretient pourtant un rapport très tendre avec son chien :


- A quelle heure avez-vous déposé votre mère ?

- Dix heures tapantes. Ensuite, comme tous les samedis, j'ai été voir mon chien.

Emile sortit son portefeuille et tendit une photo sale.

- Lui, dit-il. Tout rond, il tiendrait dans ma poche avant, comme un kangourou. Quand j'ai été en taule pour la troisième fois, ma sœur a déclaré qu'elle voulait plus garder le chien, et elle l'a donné. Mais je savais où, dans la ferme des cousins Gérault, près de Châteaudun. Après le restaurant, je prends la camionnette et je vais le voir, avec des cadeaux, de la viande et des trucs. Lui il sait, il m'attend dans le noir, il saute la barrière et on passe la nuit ensemble dans la camionnette. Qu'il pleuve ou qu'il vente. Il sait que je viens toujours. Alors qu'il est pas plus gros que ça.

Les mains d'Emile formaient une boule de la taille d'un ballon.

[...] - Minute. Je ne visualise pas le chien.

- Et la mère ? Tu la visualises ?

- Parfaitement.

- Le chien est un poil long, blanc sale avec quelques taches, oreilles pendantes, petit comme un ballon, bâtard avec des gros yeux.

- Je le vois.

*

*


*


826 vues

Posts récents

Voir tout

Le Coyote

Le Fennec

bottom of page