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La Solandre




Étymologie :

  • SOLANDRA, SOLANDRE, subst. masc.

Étymol. et Hist. 1823 solandre (Boiste Hist. nat.) ; 1964 solandra (Lar. encyclop.). Du n. du naturaliste suéd. Solander [1735-1782] qui accompagna Cook dans son tour du monde ; la plupart des dict. des xixe et xxe s. att. solandre, forme francisée du lat. bot. solandra (v. Murray ds Linné Syst. Veget. 1798, p. 513).


Lire également la définition du nom solandre afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Solanum marginatum ; Tomate sauvage marginée ;

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Botanique :


Jacques Lefrêne (pseudonyme d'Elie Reclus), auteur de Physionomies végétales, Portraits d'arbres et de fleurs, d'herbes et de mousses (In : La Science sociale, 1er avril-19 août 1870 ; Éditions Héros-Limite, 2012) dresse un portrait délicat de la Solandre :


- Est-elle belle ? Est-elle laide ?

- Je ne sais. Examinons-la en détail. La tige sous-arborescente monte presque à hauteur d'homme ; bien que grosse et grasse, elle se tient droite et inflexible. Grandes, pleines, fortes, élégantes, un peu bizarre, les feuilles ont pris la noble forme de celles du chêne et une teinte générale de blanc verdâtre tirant sur le jaune. Les fleurs en grappe, plus petites et décolorées que leurs cousines, nos pommes de terre, affichent de hautes prétentions, malgré leur mesquine apparence. Dans le calice d'un violet suspect (ces solanées ont si mauvaise réputation !)des étmines jaunes s'agglutinent en un paquet conique. Les pétales épais, tendus de toiles d'araignées, ont l'aspect impur et flétri d'un manteau d'hermine qui aurait traîné dans les poussières d'un bal de cour. Les boutons chlorotiques, d'un blanc sale, réveillent l'idée d'un virginité malsaine. Aucun parfum. Mais une puanteur délicate.

Ce qui donne à cette individualité sa physionomie la plus caractéristique, ce sont eds épines fermes et droites, qui, de distance en distance, émergent de tout le corps de la plante. La tige, si molle pourtant, les pétioles, les feuilles aux jaunâtres nervures, ces feuilles larges et d'un tissu si lâche, se hérissent d'aiguilles inquiétantes : entre les plis de cette étoffe végétale qui a les douceurs du velours, les suavités de la soie lisse et de la moire glacée, apparaissent des pointes de poignards.

Le houx hargneux n'a que des piquants marginaux, extérieurs, sur les seuls rebords de la feuille, mais ici, les stylets sortent du coeur et des vertèbres. Des lances et des piques sont fichées tout autour du berceau où les feuilles naissantes dorment dna sun duvet cotoneux aux draperies vert-jaunes, délicatemnet ourlées de violet. Toutefois, le lit de noces est libre et d'aspect pacifique, afin de ne point rebuter les abeilles sages-femmes, afin qu'aux javelines acérées, les papillons, messagers d'amour, ne se déchirent point les ailes.

Pourquoi tant de précautions ? Serait-ce pour se protéger contre les grands herbivores affriandés par la tige charnue et les feuilles épaisses, juteuses, de haut goût ? - Quant à la foule des bestioles, ces épines distantes les unes des autres ne sont guère redoutables. Hurbecs et charançons se promèneraient à leur aie entre ces palissades et chevaux de frise, mais ils sont repoussés peut-être par les miasmes qu'exhalent les substances délétères et les acides violents dont regorge le parenchyme.

 


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Symbolisme :


Jacques Lefrêne (pseudonyme d'Elie Reclus), auteur de Physionomies végétales, Portraits d'arbres et de fleurs, d'herbes et de mousses (In : La Science sociale, 1er avril-19 août 1870 ; Éditions Héros-Limite, 2012) s'appuie sur la description botanique de la plante (voir ci-dessus) pour en déduire des traits symboliques :


L'aspect de cette solandre suffit pour nous mettre en garde ; et son caractère mixte, à équilibre instable, nous déroute. Contradiction vivante, elle attire la curiosité et repusse les sympathies, aussi est-elle qualifiée de perfide, aprce qu'on ignore les lois de son être moral. Malgré ses os en gélatine, ses os dégénérés en graisse, elle se tient hautaine et fière, incapable de ployer ou de s'humilier. Malgré son indolence, qui est faire d'orgueil et d'incapacité, elle a des malices venimeuses, des résistances irritantes et son apathie se mélange de mélancolie chagrine et de rancune amère.

D'aspect tragique et sombre, de tournure hautaine et magnifique, vêtue d'étoffes riches et pesantes, de robe en velours vert, nuancé d'or, poussiéré d'argent, on dirait une jeune Mevrouw de Batavia, lymphatique et bilieuse, la fille dune de ces maisons hollandaises dans lesquelles on mange des Javanais de père en fils.

Ou encore, une opulente créole, florissant à l'ombre de quelque parceria tropicale. La senhora aux dents blanches et longues, aux ongles taillés en griffes, somnole accroupie sur les sofas... mais la voilà qui bondit soudain et enfonce l'aiguille d'or de ses cheveux dans la joue de la négrite qui, d'un éventail maladroit, l'aura réveillée en sursaut et interrompu le cours de ses lourds songes de meurtre et de volupté.

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