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  • Photo du rédacteurAnne

La Gyromitre




Étymologie :

  • GYROMITRE, subst. fém.,

bot. Champignon ascomycète dont le chapeau a une forme de cervelle humaine. La Gyromitre géante (...) [est] assez commune dans les sapinières de montagne en automne. Elle est beaucoup plus développée, et se récolte dans le Jura sous le nom de « Nez de chat » (G. Becker, Champignons, Paris, Éd. Gründ, 1983, p.61).

Prononc. et Orth .: [mɔ ʀij]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. [1500 ds Bl.-W.3-5] 1. 1552 bot. (Rabelais, Quart Livre, éd. R. Marichal, p.149, 36) ; 2. 1909 « excroissance charnue du bec de certains pigeons » (Coupin, loc. cit.). D'un lat. *maurīcŭla, dér. de maurus « brun foncé », v. maure, en raison de la couleur sombre de ce champignon. Fréq. abs. littér.: 17. Bbg. Colomb. 1952/53, p. 93 ; pp. 412-414.


  • MORILLON, subst. masc.

Étymol. et Hist. 1. Ca 1280 moreillon « canard de couleur noire » (Caresme et Charnage, éd. G. Lozinski, 460) ; 2. 1283 « variété de raisin noir » (Philippe de Beaumanoir, Coutumes Beauvaisis, éd. A. Salmon, §790, t. 1, p. 404 : vin de moreillons) ; ca 1393 morillon (Ménagier, éd. J.Pichon, t. 2, p. 67) ; 3. 1723 joaill. (Savary). Dér., p. anal. de couleur, de more (var. de maure*) ; suff. -illon (de -ille* et -on*).


Selon Didier Borgarino et Christian Hurtado, auteurs de Le guide des champignons, (Edisud, 2006) :


[Le terme gyromitre vient du] grec ancien, composé de γῦρος, gŷros (« anneau, cercle ») et de μίτρα, mitra (« bandeau »).


Autres noms : Gyromitra esculenta - Cervelle de sorcier - Cervelot - Champignon-cerveau - Gyromitre "comestible" - Gyromitre commune - Gyromitre fausse morille - Moricaude - Morille - Morillon - Nez-de-chat -

Gyromitra infula - Gyromitre en turban - Morille d'automne -


N.B. Malgré la mention explicité du genre de la gyromitre dans le dictionnaire, la plupart des articles, même scientifiques persistent à considérer ce nom comme masculin. (Anne)

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Mycologie :


G. Chevassut, C. Andary, J.P. Rascol, J.L. Roussel, J. Moutet, et al.. dans "Les meilleurs et plus toxiques champignons des Cévennes (Espinousse, Aigoual,...) et d’un peu toutes les montagnes méditerranéennes". (In : Forêt Méditerranéenne, 1987, IX (2), pp. 127-132) proposent une description un peu ancienne :


Gyromitre comestible (Gyromitra esculenta) : Elle diffère de la proche Morille par un chapeau, brun-rouge globuleux, caractérisé par des rides, des méandres, des sinuosités rappelant une cervelle, le tout porté par un pied court, épais, blanchâtre ou lavé d'incarnat. La chair est mince, blanchâtre, à odeur fongique, agréable, assez forte à la coupe.

Bon comestible mais attention, il peut devenir très toxique, et même mortel, dans le cas suivant : consommation excessive à plusieurs repas consécutifs du champignon frais et insuffisamment cuit dont on n'a pas jeté l'eau de cuisson. Donc, pour consommer ce champignon, il faut suivre impérativement ces consignes : bien faire bouillir les spécimens frais, jeter l'eau de cuisson, ne jamais les manger à plusieurs repas consécutifs et, mieux encore, les faire sécher car, à l'état sec, ils n'occasionnent jamais de troubles ; au contraire ce sont alors de délicieux champignons comparables à la Morille.

Ecologie : Champignon de printemps (avril à fin juin), elle pousse, en montagne ou dans les Causses surtout sous les Pins, mais aussi sous les Feuillus, dans les prés-bois, dans l'herbe, au bord des ruisseaux et des chemins, des forêts ouvertes.

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L. Trueb, auteur d'un article intitulé "Intoxication par les champignons". (In : Revue Medicale Suisse, 2013, vol. 9, pp. 1465-1472.) décrit les risques encourus par le consommateur de gyromitre :


Syndrome gyromitrien : La toxine responsable est la gyromitrine. On la trouve dans le gyromitre (Gyromitra esculenta), qui peut être pris par erreur pour une morille. Son effet diminue le taux de GABA intracérébral et peut provoquer des convulsions. Les symptômes peuvent être très variables, mais débutent en général par des troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées). Ils apparaissent dans un délai de 6 à 24 heures après l’ingestion et sont suivis après deux à trois jours d’une atteinte hépatique (cytolyse) modérée. Cette atteinte peut être accompagnée d’une hémolyse et d’une insuffisance rénale, et en cas d’intoxication sévère, d’une agitation, d’un coma et de convulsions. Le traitement consiste en une réhydratation, une correction des troubles électrolytiques et la prise en charge éventuelle des convulsions. L’administration de vitamine B6 IV peut être proposée en cas de troubles neurologiques.

 

Nicolas Chiron et Didier Michelot dans un article intitulé "Odeurs des champignons : chimie et rôle dans les interactions biotiques - une revue". (In : Cryptogamie-Mycologie, 2005, vol. 26, no 4, pp. 299-364) précisent quelle odeur est associée à la gyromitre :

Espèces fongiques

​Descripteurs olfactifs (lexique mycologique)

​Références bibliographiques

Gyromitra esculenta (Pers. : Fries) Fries

spermatique

Mazza, 1998

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Pierre Kaldy dans un article paru dans le magazine Sciences et Avenir-La Recherche (n°895, septembre 2021) fait le point sur l'énigme de Montchavin :


Un champignon lié à des cas de maladie de Charcot : la fin d'une énigme médicale vieille de plus de dix ans

La consommation de fausses morilles est à l'origine d'une dizaine de cas de sclérose latérale amyotrophique dans un petit village de Savoie. Le résultat de dix années d'enquête.


Une équipe franco-américaine vient de résoudre une énigme médicale vieille de plus de dix ans dans le village de Montchavin, près de la station de ski de La Plagne (Savoie). En effet, c'est là qu'en 2009, une médecin généraliste observe un fait troublant : pour la troisième fois, elle diagnostique chez un habitant une affection neurodégénérative mortelle assez rare, la sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou maladie de Charcot. Elle alerte des spécialistes de cette pathologie qui lancent alors une enquête approfondie. Dans un premier temps, ils trouvent d'autres cas dans le village entre 1991 et 2013, dont la moitié sont déjà décédés. Une concentration de malades d'autant plus surprenante qu'ils n'ont aucun lien de parenté. Âgés de 39 à 75 ans, ils se connaissent tous.


Une situation similaire sur l'île de Guam : Une cause environnementale étant dès lors suspectée, toutes les pistes possibles sont explorées : traces de toxines bactériennes ou de plomb dans l'eau, de gaz radon dans les habitations, de pollution de l'air ou de la terre par des pesticides ou des métaux lourds… en vain. Dans l'impasse, les chercheurs ont toutefois attiré l'attention de Peter Spencer, toxicologue à l'université de l'Oregon aux États-Unis, qui a déjà enquêté sur une situation similaire sur l'île de Guam, dans l'ouest du Pacifique. La graine d'une plante locale, le cycas du Japon (ou "petit rameau" aux Antilles) consommée traditionnellement s'était révélée à l'origine de nombreux cas de SLA. Le spécialiste va relancer les recherches en suspectant non pas le cycas, mais un champignon toxique répandu, le gyromitre géant, ou fausse morille (Gyromitra gigas), qui contient des toxines proches de celles du cycas par leur mode d'action. Dans l'étude publiée par le Journal of Neurological Sciences, les scientifiques rapportent que les 14 malades ont bien consommé le champignon à plusieurs reprises des années auparavant, contrairement aux autres villageois.


La fausse morille reste un mets prisé en Finlande : Habitués à cuisiner des plantes ou des champignons sauvages, certains malades se souviennent même avoir été sérieusement incommodés après de copieux repas comprenant, avec de vraies morilles, des gyromitres dont la vente est interdite en France depuis 1991 en raison d'une toxicité potentielle. Parallèlement, en Finlande, une recrudescence de SLA a été observée dans une région où le champignon est un mets prisé. Sur l'île de Guam en revanche, les cas de la maladie ont chuté depuis que les graines de cycas ont été bannies de la cuisine locale. De quoi convaincre définitivement de renoncer à la fausse morille dans les repas entre amis.

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Usages traditionnels :


Selon Eric R. Boa, auteur de Champignons comestibles sauvages : vue d'ensemble sur leurs utilisations et leur importance pour les populations. (Vol. 17. Food & Agriculture Org., 2006) :


Gyromitra esculenta : En Finlande, c'est une gourmandise (mets délicat) (Härkönen, 1998) et il est aussi largement consommé dans la Fédération de Russie et dans des régions voisines. Dans d'autres pays, il est considéré comme vénéneux et peut être fatal lorsqu'il est consommé cru (Hall et al., 1998a). Les propriétés toxiques sont atténuées par une préparation appropriée avant le repas.

Gyromitra infula : Consommé au Mexique (www.semarnat.gob.mx) mais aussi signalé comme étant toxique (Lincoff et Michel, 1977).

 

Lemounard.com publie un article le 15 avril 2021 à propos de la dégustation de Gyromitres :


La Gyromitre, le "Fugu" des Bougnats


Dans les temps lointains où je "faisais" pharmacie à Lyon, sur les bancs des amphithéâtres de l'avenue Rockefeller, le professeur Odoux, grand mycologue devant l'éternel, nous évoquait avec émotion, les banquets de la société de mycologie, où, faisant fi des très rares cas, disait-il, d'idiosyncrasie anaphylactique par ingestion de gyromitres, on servait traditionnellement un plat de ces champignons cérébriformes. Il semble que l'intoxication par la gyromitre est due plus à un de ses composants toxiques, la gyromitrine qu'à une réaction anaphylactique.

[...]

En Auvergne, ce champignon a une place particulière, beaucoup de pharmaciens le consomment bien cuit. Les médecins en mangent aussi parfois, et, ceux que je connais, n'ont jamais été confrontés à de réelles intoxications. Les Auvergnats lui vouent une sorte de culte ancestral comme les Japonais au fugu et expliquent qu'ils en mangent depuis qu'ils ont cessé de téter. On peut conseiller fortement de n'en pas abuser, les effets toxiques semblent être cumulatifs et en rapport avec la quantité ingérée. [...]

La façon la moins dangereuse de consommer des gyromitres serait de ne récolter que des spécimens jeunes et en bon état, de les faire sécher, de les ébouillanter un bon moment, puis de rejeter leur eau de cuisson avant de les apprêter. Il faut aussi savoir que les vapeurs qui se dégagent des champignons pendant leur dessiccation et leur cuisson sont toxiques." [...]

La consommation des gyromitres dans nos montagnes par des gaulois réfractaires comme dirait Manu, s'apparente à la dégustation du fugu au Japon.

"Le fugu est surnommé "poisson-lune" ou "poisson-globe" car il se gonfle en absorbant une grande quantité d'eau pour repousser ses prédateurs en se hérissant alors de piquants, opérant ainsi une véritable métamorphose. Mais il possède une autre arme redoutable : le poison que contiennent ses organes (le foie, les ovaires et les yeux) : la tétrodotoxine, une toxine neurotoxique plus puissante que le cyanure. Ses effets sont fulgurants : la langue s’engourdit d’abord, puis les lèvres et la bouche entière. Le système nerveux est atteint, la victime peut être prise de convulsions, perdre la parole, être paralysée puis perdre conscience et en mourir. Quatre à huit heures : c’est le délai moyen de survie après l’absorption du poison. Il n'y a pas d'antidote. Chaque année, on déplore au Japon plusieurs empoisonnements liés à une mauvaise préparation de ce poisson. "

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Symbolisme :


Sa ressemblance notée dans la majorité des descriptions avec un cerveau réveille l'ancienne théorie des signatures quand on sait qu'elle peut causer la maladie de Charcot. Mais elle inverse la théorie (en tout cas dans l'état actuel des connaissances) puisqu'elle ne propose pas de remèdes à une maladie du cerveau mais au contraire la provoque.


Sur le site Maladie de Charcot on trouve cette définition de la maladie :


"La maladie de Charcot ou SLA (Sclérose Latérale Amyotrophique) parfois également appelée Maladie de Lou Gehrig, est une maladie neurologique à évolution rapide presque toujours mortelle et qui attaque directement les cellules nerveuses (neurones) responsables du contrôle des muscles volontaires.

La maladie de Charcot appartient au groupe des maladies connues comme étant des maladies des neurones moteurs qui sont caractérisées par la dégénérescence progressive et la mort de ces neurones moteurs."

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Philatélie :




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