Étymologie :
Étymol. et Hist. 1. a) xiiie s. bot. « églantier » (Livr. Simpl., 33 dans Z. rom. Philol., t. 85, p. 130 : Bedegar c'est esglenciers, et est froiz el premier degré) − Ac. 1762 ; b) xve s. id. « épine blanche » (G. Herb., 41, ibid. : Bedegar, c'est espine blanche), bedegua dans Trév. 1752 et 71 ; 2. xve s. « excroissance spongieuse produite sur les rosiers et les églantiers par le cypnis de la rose » (G. Herb., 41 dans Z. rom. Philol., t. 85, p. 131 : Aucuns dient que bedegard est une superfluité qui croist sur le fust du rosier, mais c'est faulx) ; 1751 bedeguar (Encyclop. t. 2). Empr. à l'arabo-persan bāḏāwärd (lui-même composé du persan bād « vent, souffle », et de l'ar. ward « rose », Lok.), par l'intermédiaire du lat. médiév. attesté au sens 1, 1076-87 (Constantinus Africanus, Grad., p. 352, 22 dans Mittellat. W. s.v., 1405, 40 : bedigar) au sens 2, viiie-xie s. (Glossae, éd. Steinmeyer et Sievers, III, 537, 8, ibid., 1405, 53 : bedegar).
Étymol. et Hist. 1. Av. 1105 gales « noix de galle, galles du chêne » (Gl. fr. de Raschi, 534, p. 75 ds T.-L.) ; ca 1256 galles (A. de Sienne, Rég. du corps, 44, 17, ibid.) ; 2. ca 1160 jale « (d'un animal) excroissance cornée de l'épiderme ; sorte de rogne » (Eneas, 3936, ibid.). Empr. au lat. de l'époque impériale galla « galle, noix de galle ».
Lire également la définition du nom galle afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Barbe de Saint-Jean - Barbe de Saint-Pierre - Bédégar - Éponge du Rosier - Galle du Rosier - Garrabié (Languedoc) - Rose cochonnière - Rose de bédégar -
Selon L. Marcel Devic, auteur d'un Dictionnaire étymologique des mots français d'origine orientale: arabe, persan, turc, hébreu, malais. (Imprimerie nationale, 1876) :
BÉDÉGAR, BÉDÉGARD OU BÉDÉGUARD. Excroissance chevelue produite sur les églantiers et les rosiers par la piqûre d'un insecte. Chez nos anciens botanistes, le bédéguar est une plante du genre echinops, le chardon de Notre-Dame. bā- C'est l'arabe-persan , داورد با دورد با بادآورد بادآورده , ba dhaouard, badaward, bādāwourd, badawourdé. La première forme est celle que donne l'unique man. de Razi de notre Bibl. nat. (1). Gérard de Crémone, dans sa synonymie (1481), explique bedegar par « spina alba vel odor rosa » , ce qui indique qu'il regardait le mot comme formé du persan باد bad, vent, souffle , et de l'arabe ouard, بدوی . rose.
Note : 1) 2 Fol. 47 verso. Razi donne le bédégar comme fébrifuge.
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Zoologie :
Sébastien Carbonnelle et Marie-Thérèse Romain, auteurs d'une "Enquête sur une faune méconnue dans un site d’exception : les galles de l’entité de Virelles". (In : Natura mosana, 2016, vol. 2, no 69, p. 1) nous apprennent que les bédégars contiennent divers insectes :
L’étude des communautés vivant aux dépens des galles est une autre histoire passionnante (CARBONNELLE & ROMAIN, 2015). Le bédégar (Diplolepis rosae) est sans doute, par sa taille, la galle la plus facile à étudier de ce point de vue ; elle constitue un habitat de choix pour une biocénose particulièrement riche et diversifiée, et dont la communauté semble stable à travers l’Europe entière. À titre d’essai, quelques échantillons ont été prélevés pour élever et identifier les adultes qui en émergeaient. Ce ne sont pas moins de dix espèces différentes qui colonisaient un même échantillon. (1)
Note : 1) En plus de Diplolepis rosae, ont émergé : Periclistus brandtii, Orthopelma mediator, Eurytoma rosae, Caenacis inflexa, Glyphomerus stigmae, Torymus rubi, Diastrophus rubi, Eupelmus urozonus, Pteromalus bedeguaris et Torymus bedeguaris. L’échantillon mis en élevage contenait 6 bédégars collectés sur 2 rosiers dans une même haie. Détermination par Sébastien CARBONNELLE et Marie-Ève CHARLOT.
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Botanique :
Fernand Lot, dans un article intitulé “Le Cancer Chez Les Végétaux.” (In : Revue Des Deux Mondes (1829-1971), 1969, pp. 154–59) distingue clairement les bédégars d'éventuels cancers des plantes :
Ainsi, on n'avait plus aucun doute quant à l'équivalence biologique des tumeurs dans les deux règnes. Le cancer des plantes existait aussi, qu'il ne fallait d'ailleurs pas confondre avec certains néoplasmes produits par des larves d'insectes, comme les excroissances sphériques, les galles, apparaissant sur les feuilles du chêne, ou comme le curieux bédégar du rosier.
Vertus médicinales :
Selon Pierre-Joseph Buc'hoz, auteur d'une Histoire des Insectes utiles... (Chez Le Boucher le jeune, 1782) :
Un excellent remède contre la gravelle, est celui que nous tirons du Bedeguar, qui est une excroissance spongieuse qui se trouve sur les rosiers sauvages ; ce Bedegar n'a cette propriété qu'autant qu'il sert de nid à une espèce de petites Guêpes.
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Éditions Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Galle d'Églantier sauvage :
On nomme bédéguar ou galle d'églantier une excroissance chevelue qui se forme sur les branches de l'églantier par suite de la piqûre d'un insecte hyménoptère nommé Cynips rosae. Cette galle est divisée intérieurement en un grand nombre de cellules qui renferment autant de larves de l'insecte. Elles y passent l'hiver sous forme de nymphes et en sortent au printemps à l'état d'insectes parfaits. C'est le Spongius rosaceus des anciennes officines ; on lui attribuait des propriétés astringentes, diurétiques, lithontriptiques, fondantes, antistrumeuses, etc. Aujourd'hui ce produit végétal est tout-à-fait inusité.
Robert Bosch, auteur de L'ours-totem d'Arles-sur-Tech : Essai de monographie folklorique (1987) mentionne un usage antique de la gale du rosier :
Il fallait aussi compter sur la graisse, la fameuse graisse d'ours, celle que l'on trouve principalement dans la bosse caractéristique du garrot de la bête. Alimentant les médications les plus diverses, au profit de charlatans aux discours plus ou moins inspirés, quand ce n'était pas au service de magies ou de sorcelleries plus ou moins fantaisistes, cette graisse avait la réputation de posséder mille vertus. L'Histoire naturelle de Pline l'Ancien contient un véritable catalogue de ses multiples utilisations à l'époque antique, mais également durant presque tout le Moyen âge, époque où l'écrivain latin jouissait de son intégrale autorité dans le monde occidental. Au hasard de la lecture de cet énorme ouvrage, nous découvrons quelques usages possibles de la graisse du plantigrade :
Le bédégar de la rose sauvage avec de la graisse d'ours est un remède à l'alopécie. (L. 21, Ch. 63)
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Fabrice Bardeau, dans La pharmacie du bon Dieu. (Éditions Fernand Lanore, 1977) cite Lemery :
Nicolas Lemery parle des vertus de l'églantier, et surtout « d'une espèce d'éponge, grosse comme une petite pomme, ou comme une grosse noix, de couleur rousse, elle est appelée éponge d'églantier ou bédégar. Elle est astringente ; on en tire par distillation une eau propre pour les maladies des yeux ».
Usages traditionnels :
Pierre Boitard, dans son Manuel complet de l'amateur de roses, leur monographie, leur histoire et leur culture (Vol. 1. à la librairie encyclopédique de Roret, 1836) évoque rapidement des usages magiques du bédégar, malheureusement sans les expliciter :
C'est une substance spongieuse, filamenteuse, quelquefois grosse comme un œuf, en ayant à peu près la forme ovale , quelquefois arrondie, verte ou rougeâtre, et d'une saveur à peine acerbe. Elle est connue sous les différents noms d'éponge d'églantier, de bédégar ou bedeguar, et de galle du rosier.
Les anciens lui attribuaient toutes sortes de vertus merveilleuses, et la regardaient comme un puissant astringent. Soumise à l'analyse chimique, ces vertus imaginaires se sont évanouies comme de la fumée, et si l'on parle du bédégar en médecine, c'est pour rappeler un préjugé.
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Symbolisme :
D'après Pierre Borel, auteur du Dictionnaire des termes du vieux françois : ou, Trésor des recherches & antiquités gauloises & françoises. (Vol. 1. L. Favre, 1882) :
Bédégar. C'est l'espine blanche (selon le Jardin de Santé) et selon les Modernes, c'est une esponge qui se trouve sur l'esglantier ou rosier sauvage, qui est fort propre aux dissenteries : on l'appelle rose de Bédégar. On l'appelle en Languedoc un Garrabié : et on a là un quolibet où on appelle ceux qui aiment personne, amoureux comme un Garrabié ; à cause que c'est un arbrisseau fort épineux et peu aimable ; ou s'il s'attache aux choses, c'est pour leur faire du mal.
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