Autres noms : Chrysosplenium alternifolium L. - Cresson de roche - Cresson de rocher - Cresson doré - Dorine à feuilles alternes - Feuille sans couture - Hépatique dorée - Herbe d'archamboucher - Saxifrage dorée -
Chrysosplenium oppositifolium L. - Dorine à feuilles opposées - Dorine des montagnes - Hépatique des marais -
Botanique :
Jean Henri Jaume Saint-Hilaire, auteur de Plantes de la France: décrites et peintes d'après nature, Volume 2 (Chez l'auteur, 1808) décrit ainsi la Dorine à feuilles alternes :
Famille naturelle : LES SAXIFRAGÉES.
Système sexuel : Décandrie - Digynie.
Chrysosplenium alternifolium . Linn.
Vulgairement : la saxifrage dorée , cresson de roche , herbe d'archamboucher.
Dans quelques forêts humides des environs de Paris et de plusieurs montagnes de la France on trouve cette plante , nommée par les anciens saxifrage dorée ; elle ne diffère, en effet, des saxifrages que par l'absence de la corolle. Ses racines sont chevelues ; elles donnent naissance à une tige charnue, haute de cinq ou six pouces, glabre, et un peu anguleuse. Les feuilles de la base sont portées sur de longs pétioles ; leur limbe est arrondi, reniforme, crenelé, et chargé de quelques poils courts ; les feuilles supérieures sont alternes et presque sessiles. Les fleurs sont de couleur jaune, ramassées au sommet de la plante, et comme posées sur les feuilles. Le calice est coloré, à quatre ou cinq divisions. Les étamines, au nombre de huit ou rarement de dix, sont plus courtes que les divisions calicinales. L'ovaire est adhérent et surmonté de deux styles. La capsule est à une loge, à deux valves, terminée par deux pointes ; elle renferme plusieurs graines.
FLEURIT : dans le mois d'avril.
HABITE : la France et une partie de l'Europe.
DENOMINATION. Le nom générique est formé de deux mots grecs qui signifient or, rate, c'est-à-dire plante à fleur de couleur d'or et propre à guérir les maladies de la rate. En allemand, die Goldmilz, das goldene bilzkraut. En hollandais, goudweil. En anglais, the golden saxifrage. En italien, sassifraga dorata. En hongrois, arany veselke.
USAGES. Cette plante mérite une place dans les parcs et dans les jardins humides ou traversés par des ruisseaux ; elle contribuera à leur ornement, en augmentant la verdure et les fleurs du premier printemps.
CULTURE. Elle est vivace ; ou la multiplie facilement, par la séparation de ses pieds, en octobre et en mars : il faut lui donner une situation fraiche et ombragée.
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Vertus médicinales :
Henri Ferdinand Van Heurck et Victor Guibert, auteurs d'une Flore médicale belge. (Fonteyn, 1864) nous apprennent les propriétés thérapeutiques de la Dorine :
Usages médicaux. - Cette plante a été indiquée autrefois comme apéritive et diurétique ; on l'administrait surtout dans les obstructions des viscères, foie et rate, mais elle était surtout préconisée, probablement par signature à cause de la forme rénale de ses feuilles, dans les maladies des reins et de la vessie. Son emploi est généralement abandonné aujourd'hui. On l'administrait en décoction, 4 à 8 grammes par 500 grammes d'eau.
Françoise Nicollier et Grégoire Nicollier, auteurs de « Les plantes dans la vie quotidienne à Bagnes : noms patois et utilisations domestiques », (Bulletin de la Murithienne, no 102, 1984, pp. 129-158) proposent la notice suivante :
fole sin tœudora, f. = « feuille sans couture » / fole de tàle, f. / = Chrysosplenium alternifolium. v
Vulnéraire, hémostatique, favorise la cicatrisation (mettre sur la plaie la face de la feuille qui est contre le sol) (le premier nom patois se réfère au fait que les nervures sont peu apparentes).
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Usages traditionnels :
Selon les dires de notre guide botaniste de ce matin, Alain (de Bitche), la Dorine des Vosges, au petit goût acidulé dans lequel, personnellement, j'ai reconnu le goût de l'oseille sauvage, était mâchée pour couper la soif...
Renseignement très utile en cette période de grande sécheresse, même ici dans le Pays de Bitche. Néanmoins Ali me fait justement remarquer que si on trouve de la Dorine, vu son environnement, on trouve aussi une source !
Mythologie :
Jean-Pierre Delville, auteur d'un article intitulé "Bernadette Soubirous et les apparitions de Lourdes (1858) : l’histoire nourrit notre aujourd’hui" (Vies consacrées, n°2010-3 • Juillet 2010, pp. 163-176) nous révèle un lien inattendu entre la grotte de Lourdes et la dorine des rochers :
[...] À la neuvième apparition (jeudi 25 février). Bernadette est invitée à approcher son visage de la terre, à se salir, à creuser un trou (de la grandeur d’une soupière) et à boire l’eau de la source qui en jaillit progressivement et à s’en laver : « Anat beve en’a hount è b’y lavà » ; elle s’avance sur ses genoux, parcourt la grotte en tout sens. Elle est même invitée à manger de l’herbe qui est là (en l’occurrence de la dorine ou cresson doré) : « Que minyarat d’aquére yèrbe qui ey athéu ». Elle comprend cela comme une pénitence pour les pécheurs. Mais elle se fait mal voir, ridiculiser même. Cependant Jeanne Montat vient prendre de cette eau le même jour. Le dimanche 28 février, à la 11e apparition, Bernadette refait ses déplacements à genoux, elle boit à la fontaine, en présence de 1000 personnes. Cela impressionne et dérange.
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Littérature :
Pour qui connaît un peu ses classiques, Dorine appelle aussitôt le personnage de Molière, servante d'Orgon et adversaire rusée de Tartuffe dans la comédie éponyme de Molière (1669).