Étymologie :
FRITILLAIRE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1658 fritilaire (P. Morin, Remarques nécessaires pour la culture des fleurs, 16 ds R. Ling. rom. t. 36, p. 228). Lat. sc. fritillaria, (dér. du lat. class. fritillus « cornet à dés » pris à tort au sens de « damier ») nom donné à « ces sortes de plantes à cause que la fleur de la plupart de leurs especes sont marbrées en échiquier comme un damier » (Tournefort Bot. t. 1, p. 300).
Lire également la définition du nom fritillaire afin d'amorcer la réflexion symbolique.
Autres noms : Fritillaria imperialis - Fritillaire impériale - Impériale -
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Vertus médicinales :
A. B., auteur discret de Les Vertus des plantes - 918 espèces (Tours, 1906) recense les propriétés thérapeutiques d'un grand nombre de plantes :
Couronne impériale. Corona imperialis.
Lys de Saint-Bruno. Liliastrum alpinum minus.
Asphodèle mais qui n'est qu'un lys à fleur de racine d'asphodèle. Lilium Asphodelas luteo.
VERTUS : Toute Ia plante est émolliente, adoucissante, maturative, on fait par la distillation des fleurs une eau très odorante ; l'oignon sert à amollir, relâcher, résoudre, adoucir pour faire suppurer les abcès, on fait infuser au soleil, dans l'huile, la fleur, on peut l'ajouter aux lavements dans les grandes coliques ; elles entrent dans l'emplâtre de Vigo qui est émollient et fondant, la racine de la couronne impériale entre dans le diabotanum qui est digestif et résolutif, les oignons cuits sont excellents pour les brûlures quelles qu'elles soient.
Symbolisme :
Dans le calendrier républicain, la Fritillaire était le nom attribué au 22e jour du mois de floréal.
Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme de l'impériale :
IMPÉRIALE - PUISSANCE.
Les fleurs de l'Impériale ressemblent à des Tulipes renversées ; elles sont disposées en couronne à un ou deux rangs sur le haut de la tige, que termine un faisceau de feuilles d'un beau vert. Chacune des fleurs contient plusieurs gouttes d'eau qui restent attachées au fond de la corolle jusqu'à ce qu'elle soit fanée. Alors les pédicules des fleurs se relèvent pour mûrir leurs graines. Le jeu des six étamines est aussi fort curieux ; toutes sont écartées du pistil, trois viennent d'abord offrir leur hommage, les trois autres viennent à leur tour lorsque celles-ci se sont retirées.
Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :
Couronne impériale - Puissance.
A cause de la forme de sa fleur, qui ressemble à un diadème. Cette plante fut aimée de Napoléon et fort cultivée sous l’Empire.
Méléagre fritillaire [Fritillaria meleagris] - Rareté.
A cause de la bizarrerie de son coloris.
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Selon Pierre Zaccone, auteur de Nouveau langage des fleurs avec la nomenclature des sentiments dont chaque fleur est le symbole et leur emploi pour l'expression des pensées (Éditeur L. Hachette, 1856) :
COURONNE IMPÉRIALE - DIGNITÉ.
Espèce de fritillaire (plante liliacée), à tige unique et droite. Les feuilles l'entourent jusqu'à la moitié de la taille ; à son extrémité, un rang circulaire de belles tulipes la couronne.
Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :
Fritillaire ou couronne impériale : Puissance - Majesté.
Cette plante est une magnifique liliacée, dont les fleurs pendantes en forme de tulipe renversée, forment une couronne ombragée par un panache de feuilles. Son port est majestueux, mais certaines de ses parties exhalent une mauvaise odeur, ce qui l'empêche d'occuper dans les parterres la place que lui mérite son élégance. L'espèce appelée damier se trouve à l'état sauvage et ne porte qu'une seule fleur blanche, jaune ou pourpre, tachetée en damier. Elle a la forme d'un cornet à jouer aux dés, d'où son nom latin fritilla.
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Dans son Nouveau Langage des fruits et des fleurs (Benardin-Béchet, Libraire-Éditeur, 1872) Mademoiselle Clémentine Vatteau poursuit la tradition du Sélam :
COURONNE IMPÉRIALE : Fierté.
Ses fleurs, disposées en couronnes, lui ont donné son premier nom. Elle doit son second apparemment à la prédilection de l'empereur Napoléon, qui voulait la voir dans tous ses palais répandue avec profusion.
Noble et brillante fleur, ornement des parterres,
Elle séduit les yeux par ses vives couleurs,
Le sage, en la voyant, rêve sur les grandeurs,
Et de plus d'un mortel déplore les misères :
« 0 fleur, dit-il, ton nom ne touche point mon cœur ;
Tu me rappelles la victoire, Les faisceaux, la pourpre, la gloire.
Les muses, les beaux-arts, l'honneur,
Mais tu n'étais pas le bonheur ! » Comtesse de BRADI.
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Édouard Grimard, auteur de L'esprit des plantes, silhouettes végétales. (Éditions Mame, 1875) propose sa propre vision des plantes :
Nous pouvons, sans aucune transition, passer de la Tulipe à la Fritillaire. Celle-ci, en effet, ressemble à une petite Tulipe sauvage, je parle de la Fritillaire Pintade ou Damier, noms dus aux petits carreaux blancs et lilas qui font de ses gentilles clochettes une véritable mosaïque. Ces Fritillaires, bien que de couleurs ternes et d'aspect plus que modeste, font un assez joli effet, lorsqu'au mois d'avril, dans les bois et sur tout dans les prés, elles se réunissent par bandes innombrables. Au moindre vent, elles se balancent avec grâce, et font entendre, sous les pas du promeneur, un petit bruit sec de grelot fêlé, qui ne manque ni d'originalité ni de charme.
La Fritillaire impériale nous vient de la Thrace ou de la Perse. Elle a été transportée, en 1570, de Constantinople à Vienne, et dès lors elle a acquis, par sa beauté, une place honorable dans les parterres.
Selon Marius Barbeau, auteur de Les Archives du folklore (1946) (cité par Anne-Marie Desdouits et Laurier Turgeon dans Ethnologies francophones de l'Amérique et d'ailleurs (Éditions Les Presses de l'Université Laval, 1997) :
La Fritillaire (Fritillaria imperialis L.) qui sert de blason ou de symbole à la Corporation des folkloristes, remonte chez nous jusqu'aux débuts de la Nouvelle-France. Mère Marie de l'Incarnation du monastère des Ursulines à Tours arrivée à Québec en 1639, semble s'en être servie la première, dans la décoration d'un parement d'autel... Aussi canadien que français, ce motif figure parmi de nombreux patrons dans le répertoire traditionnel, les uns plus anciens que les autres, du Canada d'autrefois.
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Sheila Pickles écrit un ouvrage intitulé Le Langage des fleurs du temps jadis (Édition originale, 1990 ; (Éditions Solar, 1992 pour la traduction française) dans lequel elle présente ainsi la Couronne impériale :
Mot clef : Majesté et puissance.
Bien que de la rose et du lys
Deux rois d'éternelle mémoire
Fassent voir leurs fronts embellis,
Ces fleurs sont moindres que ta gloire ;
Il faut un plus riche ornement
Pour récompenser dignement
Une vertu plus que royale,
Et si l'on se veut acquitter,
On ne peut moins te présenter
Qu'une couronne impériale.
Malleville (1597-1647), "La Couronne impériale".
La Couronne impériale, originaire de Perse, doit son nom à la beauté majestueuse de ses fleurs, mais aussi au fait qu'elle a été introduite pour la première fois en Europe dans le parc impérial de Vienne, en 1576. On l'appelle également Fritillaire, le nom du genre, qui signifie « cornet à dés » et évoque la longue clochette de la fleur.
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Littérature :
La Guirlande de Julie (1638) offerte à Melle de Rambouillet par Charles de Sainte-Maure s'ouvre sur un madrigal en l'honneur de la fritillaire :
LA COVRONNE IMPERIALE.
Madrigal.
Je suis ce Prince glorieux
De qui le bras victorieux
A terracé l'orgueil d'un redoutable Empire.
Au plus froid des climats je me sentis brusler
Par un nouveau Soleil que l'uniuers admire,
Et que celuy des Cieux ne sçauroit égaler.
Du rivage inconnu de l'aspre Corélie,
Où la mer sous la glace est toute ensevelie,
Le flambeau de l'Amour mes voiles conduisant,
Je vins pour rendre hommage à l'auguste JULIE ;
Mais, jugeant ma Couronne un indigne présent,
Je voulus conquérir le riche Diadème
Dont jadis les Caesars en leur pompe suprême
Eurent le front si reluisant.
Au comble d'un succès qui les peuples étonne,
Vainqueur des ennemis et vaincu du malheur,
Je rencontray la mort dans le champ de Bellonne.
L'Amour vid mon désastre, et, flattant ma douleur,
Me convertit en une illustre Fleur
Que de l'EMPIRE il nomma la COURONNE.
Ainsi je fus le prix que cherchait ma valeur,
Ainsi par mon trépas j'achevay ma conqueste.
En cet état, JULIE, accorde ma requeste,
Sois pitoyable à ma langueur ;
Et si je n'ay place en ton cœur,
Que je l'aye au moins sur ta teste. De M. CHAPELAIN.
LA COURONNE IMPERIALE. LA COURONNE IMPERIALE
Madrigal. Madrigal.
BIEN que de la Rose et du Lys QUELQUE diversité que le parterre étale,
Deux Roys, d'éternelle mémoire, Je me treuve sans effroy :
Facent voir leurs fronts embellis, LA COURONNE IMPÉRIALE
Ces Fleurs sont moindres que ta gloire ; Est seule digne de toy.
Il faut un plus riche ornement Tant de Fleurs que la nature
Pour récompenser dignement Esmaille de sa peinture
Une vertu plus que Royale ; N'ont rien qu'on doive estimer.
Et si l'on se veut acquitter, Voy l'éclat qui m'environne :
On ne peut moins te présenter Moy seule fais LA COURONNE
Qu'une COURONNE IMPÉRIALE. Que tant d'autres ensemble ont peine de former
De M. DE MALLEVILLE. De M. DE SCUDÉRY.
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