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L'Échidné




Étymologie :


  • ÉCHIDNÉ, subst. masc.

Étymol. et Hist. 1806 (Duméril Zool., p. 20). Dér. (suff. *) du lat. sc. echidna (1797-98, Cuvier, Tableau élémentaire de l'hist. nat., p. 143), lat. class. echidna « vipère femelle, serpent » gr. ε ́ χ ι δ ν α (cf. echidne « vipère » ds Cotgr. 1611).


Lire également la définition du nom échidné afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Tachyglossus aculeatus ; Échidné à nez court ;




Zoologie :


Hugues Demeude, dans Les Incroyables Pouvoirs de la Nature (Éditions Arthaud, 2020) nous en apprend davantage sur cet étrange animal, de la famille d'un autre animal bizarre, l'ornithorynque :


L'Échidné et le phénomène de bioturbation


Les animaux peuvent avoir des comportements sanitaires d'automédication pour se guérir ou guérir leurs proches. Ils peuvent également souvent s'avérer d'indispensables alliés de leur milieu pour en garantir le bon fonctionnement, remplissant ainsi de précieux services écosystémiques et allant même parfois jusqu'à le guérir ou le réparer. C'est le cas par exemple de l'échidné, cousin de l'ornithorynque, qui, l'air de rien, est tout bonnement essentiel au bon fonctionnement du bush australien.


Cet échidné à nez court (Tachyglossus aculeatus) est un animal d'apparence farfelue. Semblable à un gros hérisson couvert d'épines sans lui être apparenté, il mesure environ 40 centimètres et arbore un long museau pointu de près de 8 centimètres, à la base duquel percent deux petits yeux. Particularité de cet animal insectivore très actif, de jour comme de nuit, il possède de très solides pattes de devant prolongées par de longues griffes avec lesquelles il creuse frénétiquement le sol à la recherche de nourriture.

Dans ce royaume des marsupiaux qu'est l'Australie, il figure en bonne place, même s'il est moins connu que les kangourous, koalas, possums ou diables de Tasmanie. Caractéristique des marsupiaux : les femelles donnent naissance à des bébés embryonnaires qui parachèvent leur développement au sein de la poche ventrale maternelle. Pourtant, l'échidné se distingue des autres marsupiaux parce qu'il est un mammifère monotrème. Autrement dit, un mammifère qui pond et allaite ses petits. C'est, avec son cousin l'ornithorynque, les seuls du genre; Une autre curiosité de la nature. Concrètement, la femelle échidné pond son unique œuf annuel directement dans la poche marsupiale et l'embryon s'y développe ensuite.

Et l'Échidné n'a pas fini de nous surprendre. Ce mammifère autochtone qui possède le plus vaste territoire en Australie a fait du bush son royaume. Un espace immense de 800 000 kilomètres carrés avec deux types de paysages constitués de forêts et de broussailles. Un territoire occupé par les Aborigènes depuis cinquante mille ans, riche en biodiversité avec un haut degré d'endémisme, mais qui a subi de plein fouet la pression des activités humaines, notamment un fort déboisement lié aux exploitations agricoles et minières. Ce qui a réduit de façon significative l'habitat d'espèces emblématiques comme le koala, qui est désormais classé parmi les espèces « vulnérables » sur la liste rouge de l'UICN.

Comment la nature peut-elle faire face à la dégradation du bush ? Sur quoi ou sur qui peut-elle compter pour sauvegarder cet environnement ? Sur les échidnés qui jouent un rôleprimordial dans la santé de l'écosystème australien ! Comment ? En fouillant le solde façon inlassable à la recherche de leur nourriture - termites et fourmis -, ils ont une action dite bioturbatrice qui permet de façon très bénéifuqeu de méalnger les sols. Pour mieux comprendre ce phénomène, l'équipe du biologiste Christopher Clemente, de l'univerisité de Queensland en Australie, a mené une étude permettant d'établir, grâce à de nombrex suivis et relevés GPS, les distances parcourues par ces animaux et le temps passé à creuser. Christopher Clemente explique que chaque échidné est capabel à lui seul de déplacer vers le haut (« move up ») 204mètres cubes de sol par an. Ce qui signifie que douze échidnés seulement peuvent chaque année retrourner une quantité de terre équivalente à une piscine olympique ! Simplement à l'aide de leurs quatre membres trapus aux cinq doigts armés de solides griffes. Cette bioturbation, qui permet de mélanger activement les couches de sols et d'établir des transferts d'éléments nutritifs, contribue à lutter contre l'érosion et à augmenter la santé de l'écosystème.

Les échidnés sont donc effectivement des acteurs indispensables au bon fonctionnement de l'écosystème du bush australien. pas étonnant qu'il soit devenu l'animal totem de plusieurs tribus aborigènes, come celle des Noongar.

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Le pénis à quatre têtes de l'échidné n'est plus un mystère pour la science
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A lire sur le site du Huffington Post : =>








Symbolisme :


Selon Laurent Dousset, auteur de Uniques et pourtant identiques : devenir une personne et se penser en société dans le Désert de l’Ouest australien. (hal.archives-ouvertes.fr 2019) :


En effet, dès lors que la mère sent bouger le fœtus pour la première fois, elle sait que son enfant a été animé par la pénétration d’un enfant-esprit. L’identité et l’histoire totémique — également appelées tjuma (littéralement « histoire individuelle ») — de cet enfant seront celles de l’ancêtre mythique duquel l’enfant-esprit s’était détaché et ses lieux principaux d’affiliation territoriale seront ceux que cet ancêtre aura créé au temps du Tjukurrpa (Temps du Rêve) tout comme le lieu où la pénétration de l’enfant-esprit s’est produite. Or, rien de précis n’est dit sur l’identité de l’enfant-esprit en question. Rien d’immédiat ne permet à la mère de savoir quel ancêtre mythique s’est reproduit dans le corps de son enfant et rien ne lui permet ainsi d’asseoir son enfant dans une légitimité identitaire et territoriale. La théorie autochtone reste vague sur cette question. Elle dit simplement qu’avant de pénétrer la future mère, l’esprit enfant se transforme temporairement sous la forme la plus souvent animale de l’ancêtre mythique, pour annoncer par un comportement étrange ou inattendu son intention de se réaliser dans un enfant. Aux êtres humains donc à identifier ces comportements. Voici par exemple les propos d’une femme Ngaatjatjarra qui explique comment elle a su identifier le totem de conception de l’un de ses fils :


Je marchais avec mon premier fils près de la communauté de Docker River, dans la plaine d’acacias, lorsque j’ai vu un échidné [porc-épic australien]. L’échidné, c’est de la bonne viande et nous avons essayé de le ramasser. Je pris un bâton afin de le retourner sur son dos pour pouvoir le saisir, mais cela prit beaucoup de temps. Je le poussai et le poussai encore avec le bâton mais il ne voulait pas se retourner et demeurer sur le dos pour que je puisse le prendre. C’était étrange, d’habitude j’y arrive bien, à ramasser les échidnés. Plus tard, mon second fils est né. Il a une marque de naissance [également appelée tjuma] sur le dos, juste à l’endroit où j’appuyais avec le bâton pour retourner l’animal. Son totem, son tjuma, c’est certain, c’est donc l’échidné, et son histoire mythique [tjuma], c’est celle de cet animal.


L’identification du totem de conception — et donc la position de la personne dans la cartographie spatiale et rituelle — est sujette à la capacité des humains à interpréter les signes. Mais elle est de fait surtout conditionnée par la validation par autrui de l’identité que les parents proches, le plus souvent la mère, ont voulu avancer au sujet de l’enfant. En réalité, près de la moitié des jeunes adultes ne connaissent toujours pas avec certitude leur totem au moment du mariage, car leurs parents proches n’ont pas encore réussi à trouver un consensus à ce sujet.

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Mythologie :


Laurent Dousset, auteur d'une « Ontogenèse d’un mythe événementiel en Australie », (Techniques & Culture [En ligne], pp. 43-44 | 2004) rapporte un mythe qui concerne l'échidné :


La scène de ce mythe est un site cérémoniel important au cœur du désert de Gibson, que je nommerai Yurntakurlta pour ne pas avoir à dévoiler son vrai nom. [...]

Le mythe qui accompagne et explique Yurntakurlta est celui de Tjilkamarta, l’échidné, qui voyageait par là, venant du nord-ouest et se dirigeant vers le sud-est. De campement en campement, Tjilkamarta suivait les traces des humains depuis plusieurs jours sans succès. Un jour, il trouva les cendres chaudes d’un foyer et sut qu’il s’approchait des humains ; il se mit à les appeler : « Où sont les hommes, où sont les femmes, où sont les enfants ? » Il ne reçut aucune réponse et continua à suivre les traces (tjina).

Notons au passage que tjina, l’empreinte laissée par les pieds, notion centrale dans ce mythe, est un concept important pour les Ngaatjatjarra et les autres groupes dialectaux du Désert de l’Ouest. Elle est la marque de l’identité et de l’individualité des hommes et des femmes. Seul un enfant qui laissera des traces —qui sait donc marcher— recevra un nom définitif. Ou encore, c’est la similitude des traces (donc des pieds), et non les traits du visage, qui permettront d’affirmer une ressemblance entre un enfant et l’un de ses parents ou grands-parents.

Tjilkamarta suivait donc ces traces, identifiant chacune d’entre elles. Elles étaient parfois floues et non reconnaissables car les humains avaient mis des pantoufles de plumes d’émeu. Parfois aussi, les traces se séparaient : celles des femmes et des enfants partaient d’un côté, celles des hommes de l’autre. Elles ne se rejoignaient que là où il avait été décidé d’établir un campement pour la nuit. Car les hommes partaient pour chasser des kangourous et des émeus, alors que les femmes ramassaient des fruits et des graines.

Puis, un matin, après avoir marché toute la nuit malgré les mamu, ces mauvais esprits qui dans les ténèbres dévorent les humains et surtout les enfants, Tjilkamarta arriva à Yurntakurlta. Il entendit des voix et derrière des acacias il aperçut les femmes assises qui discutaient autour d’un feu, tandis que les enfants jouaient.

Tjilkamarta s’approcha et demanda : « Vous êtes là, les femmes et les enfants. Mais où sont les hommes ? Qu’avez-vous fait des hommes ? »

Les femmes lui répondirent d’une seule voix en indiquant l’est : « Ils sont partis par là ».

Suivant les indications des femmes, Tjilkamarta se remit en route vers l’est, mais après une longue marche sans trouver les hommes ni leurs traces, il revint sur ses pas.

De retour au campement, il demanda à nouveau : « Où sont les hommes ? Ils ne sont pas allés vers l’est ».

Les femmes lui répondirent encore : « Oh, alors ils sont partis par là », et elles indiquèrent le sud.

Tjilkamarta partit vers le sud, mais comme la première fois, il dût rebrousser chemin : il n’y avait ni hommes ni traces. C’est ainsi que les femmes envoyèrent Tjilkamarta dans toutes les directions et cela dura toute la journée. Tjilkamarta, ne trouvant pas les hommes, se mit en colère. Il prit son bâton à fouir et commença à frapper le sol, en hurlant : « Où sont les hommes, où sont les hommes ? Les femmes m’ont envoyé dans toutes les directions, je les ai écoutées, mais je n’ai pas trouvé les hommes. »

Et il frappa si longuement et si violemment que ses coups creusèrent un trou dans le sable, un trou qui devenait à chaque coup plus profond. Le sable giclait et s’entassait sur le côté, formant la colline derrière laquelle campent aujourd’hui les femmes ; quant à la cavité, elle devint Yurntakurlta. Tjilkamarta se fatigua et finalement partit pour de nouvelles péripéties, abandonnant son bâton à fouir sur place. Les hommes que Tjilkamarta chercha si longtemps et avec tant d’ardeur sortirent du trou qu’il avait creusé ; l’un après l’autre, ils escaladèrent les parois de Yurntakurlta. Ils étaient les hommes Tingari ; c’est la tjina tingari, la trace ou voie des Tingari, que Tjilkamarta cherchait.

Or, les Tingari sont un groupe de « pré-humains » dont les hommes naquirent déjà adultes, et qui voyagèrent à l’instar des autres héros du Dreamtime. Ils créèrent la morphologie géographique, vécurent des aventures, enseignèrent à leurs jeunes les secrets religieux, se reproduisirent selon les règles —mais commirent aussi des incestes—, chassèrent, cueillirent et campèrent ; ils vécurent donc à la manière d’une société humaine.

(Le terme Tingari désigne également un ensemble de cycles de chants et d’itinéraires mythiques, associés à ces « pré-humains », qui traversent de larges parties du Désert de l’Ouest —Myers 1986 : 62 et suiv.).

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