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Symbolisme du 4




Étymologie :

  • QUATRE, adj. et subst. masc. inv.

Étymol. et Hist. 1. Fin xe s. adj. numéral cardinal (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 31) ; ca 1200 subst. (Mort Garin, 235 ds T.-L.) ; ca 1316 quatre et quatre (Geffroy de Paris, Chron. métrique, éd. Ar. Diverrès, 79) ; 1690 (Fur. : On dit proverbialement, Quatre à quatre et le reste en gros) ; 1636 se mettre en quatre (Corneille, Illusion comique, III, 3, 689) ; 1640 (Oudin Curiositez, s.v. chemin : il n'en faut point aller par quatre chemins .i. il faut faire résolument) ; 1674 aux quatre coins du monde (Mme de Sévigné, Lettre au comte de Guitaut, éd. M. Monmerqué, t. 3, p. 405, n°380, avril ou mai) ; 1539 subst. (Est. : Le nombre de quatre) ; 1671 (Pomey : Le quatre; au jeu des cartes, ou des dez) ; 2. 1254 adj. numéral ordinal (ds Ordonnances des rois de France, t. 1, p. 75b) ; 1694 « 4ème jour du mois » (Maintenon, Lett. à Mme de Veillhant, mai ds Littré). D'un lat. quattor « quatre » (cf. CIL VI, 13302 ds Vään., p. 48, ALL 7, 65 ds FEW t. 2, p. 1440b, et aussi quator CIL 10, 5939 ds OLD), issu p. dissim. du class. quattuor « id. ».

Lire également la définition du mot quatre pour amorcer la réflexion symbolique.

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Symbolisme :


Dans ses Morceaux choisis. (Éditions Gallimard, 1936) Lucien Lévy-Bruhl nous dévoile une part du symbolisme du 4 chez les Amérindiens :


VERTU MYSTIQUE DU NOMBRE QUATRE : Dans la plupart des sociétés indiennes de l'Amérique du Nord, le nombre quatre a une vertu mystique supérieure à celle de tout autre, « Parmi presque toutes les tribus d'Indiens Peaux-Rouges, quatre et ses multiples avaient un sens sacré, comme se rapportant spécialement aux points cardinaux et aux vents qui soufflent de là, le signe et le symbole employé étant la croix grecque à bras égaux (1) ... » Dans le grand récit épique des Navajos, les dieux sont tous au nombre de quatre, et tous se rangent aux points cardinaux, peints de la couleur propre à chacun de ces points. Il y a quatre dieux ours, quatre porcs- épics, quatre écureuils, quatre déesses au long corps, quatre jeunes saints, quatre oiseaux de l'éclair, etc. Le héros a quatre jours et quatre nuits pour raconter son histoire ; quatre jours sont employés à sa purification, etc. De même, la fonction mystique du nombre quatre apparaît à chaque instant dans les mythes des Zuñis que Cushing a si admirablement publiés et com- mentés, comme aussi dans leurs coutumes et dans leurs rites décrits par Mme Stevenson. « Choisissez quatre jeunes hommes... Vous ferez le tour de l'autel quatre fois , une fois pour chaque région, pour le vent et la saison de cette région... Ils portaient les flèches du destin, au nombre de quatre, comme les régions des hommes... (2) » Chez les Sioux, « Takuskanskan, le dieu moteur, est supposé vivre dans les quatre vents, et les quatre esprits noirs de la nuit exécutent ses ordres. Les quatre vents sont envoyés par le « quelque chose qui meut (3) ». Chez eux encore, il y a quatre dieux du tonnerre (thunder beings), ou du moins quatre formes diverses de leur manifestation extérieure car, dans leur essence, ils ne font qu'un ( on reconnaît ici un effet de la loi de participation). L'un est noir, l'autre jaune, l'autre écarlate, le dernier bleu. Ils habitent à l'extrémité du monde, sur une haute montagne. Cette demeure ouvre sur les quatre régions de la terre, et à chaque issue est postée une sentinelle un papillon à l'Est, un ours à l'Ouest, un cerf au Nord, et un castor au Sud (4).


Notes : 1) BUCKLAND, Four as a sacred number, J. A. I., XXV, pp. 96-99.

2) F. H. CUSHING, Zuñi creation myths, E. B. Rep., XIII, p. 442 sqq.

3) DORSEY, Siouan Cults, E. B. Rep., XI, p. 446.

4) Ibid., p. 442.

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Selon Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, auteurs du Dictionnaire des Symboles (1ère édition, 1969 ; Édition revue et augmentée Robert Laffont, 1982),


"Les signification symboliques du quatre se rattachent à celles du carré et de la croix. Depuis les époques voisines de la préhistoire, le 4 fut utilisé pour signifier le solide, le tangible, le sensible. Son rapport avec la croix en faisait un symbole incomparable de plénitude, d'universalité, un symbole totalisateur. La croisée d'un méridien et d'un parallèle divise la terre en quatre secteurs. Dans tous les continents, chefs et rois sont appelés : Maîtres des quatre mers... des quatre soleils... des quatre parties du monde... etc... : ce qui peut signifier à la fois l'étendue de leur pouvoir en surface et la totalité de ce pouvoir sur tous les actes de leurs sujets.

Il existe quatre points cardinaux, quatre vents, quatre piliers de l'Univers, quatre phases de la lune, quatre saisons, quatre éléments, quatre humeurs, quatre fleuves du Paradis, quatre lettres dans le nom de Dieu (YHVH), du premier des hommes (Adam), quatre bras de la croix, quatre Évangélistes, etc. Le quatre désigne le premier carré et la décade ; la tétrachtys pythagoricienne, est produite par l'addition des quatre premiers nombres (1 + 2 + 3 = 4). Le quatre symbolise le terrestre, la totalité du créé et du révélé.

Cette totalité du créé est en même temps la totalité du périssable. Il est singulier que le même mot shi signifie en japonais quatre et mort. Aussi, les Japonais évitent-ils avec soin de prononcer ce mot ; ils le remplacent dans la vie quotidienne par Yo ou You.

Nombre sacré dans le Véda, qui est divisé en quatre parties (Hymnes, Charmes, Liturgie, Spéculations). L'homme aussi se compose du carré de quatre, 16 parties, selon la Chandogya Upanishad, ainsi que la féerie du Soma qui comporte 16 récitations, de même que l'enseignement sur le Brahman, qui est distribué en quatre quarts, correspondant aux quatre domaines de l'Univers : les régions de l'espace, les mondes, les lumières, les sens : Celui qui, sachant ainsi, connaît ce quart du Brahman, ou quatre seizièmes, qui est lumière, celui-là brille en ce monde. Il conquiert des mondes lumineux celui qui, sachant ainsi, connaît le quart du Brahman, ou quatre seizièmes, qui est lumière. Quand il sait les quatre quarts du Brahman, ou quatre fois quatre seizièmes, le disciple ou initié connaît toute la science du maître. Le quatre se révèle ici encore, avec ses multiples et se diviseurs, le symbole de la totalité.

Dans la Bible, et notamment dans l'Apocalypse, ce chiffre suggère aussi l'idée d'universalité : les quatre vivants, c'est l'ensemble des vivants dans le monde de la lumière (ils sont constellés d'yeux). Les quatre cavaliers apportent les quatre fléaux majeurs. Les quatre couleurs des chevaux correspondent aux couleurs des quatre points cardinaux. et à celles de la journée, pour montrer l'universalité de l'action dans l'espace et dans le temps : blanc est l'Est et l'aube ; rouge, le Sud et midi ; glauques l'Ouest et le crépuscule ; noir le Nord et la nuit. Les quatre anges destructeurs debout aux quatre coins de la terre ; les quatre fleuves du Paradis; les quatre murailles de la Jérusalem céleste faisant face aux quatre orients ; les quatre camps des douze tribus d'Israël (Nombres, 2) ; les autre emblèmes des tribus, un pour chaque groupe de trois, le lion, l'homme, le taureau, l'aigle ; les quatre lettres du nom divin YHVH, chacune correspondant à l'un de ces emblèmes, selon une tradition juive ; Y à l'homme, H au lion, V au taureau, le second H à l'aigle ; les quatre Évangélistes : il ne pouvait, selon Saint Irénée, y en avoir ni plus, ni moins ; et chacun des quatre emblèmes des tribus d'Israël a été attribué à un des quatre Évangélistes, dans un accord assez singulier, avec les caractéristiques de chacun des Évangélistes : le lion à Marc, l'homme à Matthieu, le taureau à Luc, l'aigle à Jean ; ces animaux, d'autre part, correspondent aux quatre constellations cardinales de la bande zodiacale : le Taureau, le Lion, l'Homme et l'Aigle ; tous ces quaternaires expriment une totalité.

Dans la vision d’Ézéchiel (1, 5 et s.) qui remonte vers 593 avant notre ère, on observe déjà cette extraordinaire symbolique : ... Je discernai comme quatre animaux dont voici l'aspect : ils avaient une forme humaine ; ils avaient chacun quatre faces et chacun quatre ailes... Leurs faces étaient tournées vers les quatre directions... Ils avaient une face d'homme et tous les quatre avaient une face de lion à droite, une face de taureau à gauche... et une face d'aigle. Les exégètes y voient le symbole de la mobilité, de l'ubiquité spirituelle de Yahvé, qui n'est pas attaché seulement au Temple de Jérusalem, mais qui assure tous ses fidèles de sa présence, quelle que soit la direction de leur exil. Les mêmes exégètes observent que ces figures étranges de la vision d’Ézéchiel rappellent les Karibu assyriens (dont le nom correspond à celui des Chérubins de l'arche, voir Exode, 25, 18, s.), êtres à tête humaine, corps de lion, pattes de taureau et ailes d'aigles, dont les statues gardaient le palais de Babylone. Ces serviteurs des dieux païens sont ici attelés au char du Dieu d'Israël : expression frappante de la transcendance de Yahvé (Bibj, 475). Ils servent aussi de support au trône de Dieu, les têtes ressemblant à une voûte éclatante comme le soleil... au-dessus de la voûte, il y avait comme une pierre de saphir en forme de trône ; ... au-dessus du trône, une être ayant apparence humaine, avec l'éclat du vermeil et tout autour de lui comme du feu... et une lueur semblable à l'arc qui apparaît dans les nuages, les jours de pluie... C'était quelque chose ayant l'aspect de la gloire de Yahvé (Ezéchiel, I, 26-28). On ne saurait mieux suggérer, par une escalade des degrés du ciel, la supériorité transcendantale de Dieu, par rapport à tout ces quaternaires.

Quatre est encore le chiffre qui caractérise l'univers dans sa totalité (le plus souvent il s'agit du monde matériel, sensible). Ainsi les quatre fleuves qui sortent d'Eden, selon Genèse 2, 10 ss., arrosent et délimitent l'univers habitable. L'Apocalypse (7, 1 ; 20, 8) parle des quatre extrémités de la terre d'où soufflent les quatre vents (Jérémie, 49, 63 ; Ézéchiel, 37, 9 ; Daniel, 2 et 7) et distingue quatre grandes périodes qui embrassent toute l'histoire du monde.

Le nombre 4, selon Alexander, joue un rôle déterminant dans la pensée et la philosophie des Indiens d'Amérique du Nord. Il est un principe d'organisation et, d'une certaine façon, une force. L'espace se divise en quatre parties ; le temps se mesure par quatre unités : le jour, la nuit, la lune et l'année ; il y a quatre parties dans les plantes : la racine, la tige, la fleur et le fruit ; les espèces animales sont au nombre de quatre : celles qui rampent, celle qui volent, celles qui marchent sur quatre pattes, celles qui marchent sur deux pattes ; les quatre êtres célestes sont le ciel, le soleil, la lune et les étoiles et quatre sont les vents qui marchent autour du cercle du monde ; la vie humaine se divise en quatre collines : l'enfance, la jeunesse, la maturité et la vieillesse ; quatre vertus fondamentales chez l'homme ; le courage, l'endurance, la générosité et la fidélité ; chez la femme : l'habileté, l'hospitalité, la loyauté et la fécondité, etc.

Quatre est aussi le nombre totalisateur. Nous avons fait quatre fois quatre tours autour de la loge... Quatre fois quatre signifie plénitude. Maintenant toutes les forces de là-haut et d'ici-bas, mâles et femelles, ont été invoquées. (Cérémonies de Hako chez les Indiens Pawnee). Sur le plan métaphysique, Wakantanka, le Grand Mystère, est une quaternité, faite du Dieu Chef, du Dieu Esprit, du Dieu Créateur et du Dieu Exécutant. Chacun de ces dieux est lui-même une quaternité faite de deux dyades opposées. (Théologie des Dakota).

Rappelant que les disciples de Pythagore faisaient eux aussi de la tétrade la clé d'un symbolisme numérique qui pût donner un cadre à l'ordre du monde. Alexander voit dans le panthéon Dakota un pythagoricisme du Nouveau-Monde.

Dans la tradition Maya-Quiché (Popol-Vuh) il y a eu quatre créations successives, correspondant à quatre soleils et à quatre âges. L'homme définitif - homme de maïs - n'apparaissant qu'avec le dernier âge.

Quatre degrés initiatiques conduisent à l'initiation parfaite, dans la Société des Hommes-Médecine chez les Algonquins, en liaison avec le symbole d'un univers quadripartite. Le grand Manitou qui règne sur le 4e degré est représenté par une série de symboles quaternaires, dont une croix sur un pilier carré, chaque face étant peinte d'une couleur cosmique.

Dans la cosmogonie des Zuni, basée sur la hiérogamie élémentaire Terre-Ciel, la Terre est appelée La Terre-Mère quadruple qui contient. Ce qui confirme l'universalité de la valeur symbolique du nombre quatre, comme définissant la matérialité passive. Quatre, comme la Terre, ne crée pas, mais contient tout ce qui se crée à partir de lui. Sa valeur est potentielle. Quatre est le nombre de la terre ; mais, par extrapolation, il peut convenir au Dieu suprême, en ce qu'il contient tout, lui qui est l'alpha et l'oméga et qui laisse aux démiurges le soin de créer, d'animer en lui.

En plus des quatre éléments et des quatre directions cardinales (commandées pour les Indiens Pueblo par les Quatre Dieux de la Pluie, et chez les Maya, par les quatre tigres, ou jaguars, défendant les plantations du village) les Zuni (Pueblo) voient, au fond de la terre, quatre cavernes les quatre ventres de la Terre-Mère. De l'étage le plus bas, l'obscurité extrême du monde, viennent les hommes, grâce à l'action des jumeaux divins, les guerriers Ayahutas, créés par le soleil et envoyés par lui à la recherche des hommes. Pour arriver à la lumière, les hommes ont traversé le monde de la suie, le monde du soufre, le monde du brouillard, le monde des ailes.

Au Pérou, le chroniqueur Guaman Poma de Ayala parle également de quatre ères mythiques qui ont précédé la création de l'homme sous sa forme actuelle.

En résumé, quatre apparaît comme le signe de la potentialité, attendant que s'opère la manifestation, qui vient avec le cinq.

Pour les Dogons du Mali, quatre est le nombre de la féminité, et, par extension, celui du soleil, symbole de la matrice originelle. La matrice fécondée, représentée comme un œuf ouvert vers le bas, réplique terrestre de l’œuf cosmique (fermé) a pour valeur numérique 4 (le haut, les deux côtés, l'ouverture). Quatre est également le nom donné au prépuce, considéré comme l'âme femelle de l'homme, qui est circoncis pour cette raison.

Pour les Dogons, l'unique est l'erreur, l'impur. La pureté, c'est la justesse voulant que toute chose créée soit deux en un, jumelle faite de l'association des sexes - des principes contraires, comme on l'a vu en ce qui concerne l'âme. De ce fait, c'est sous la forme de son double, le huit, que le nombre quatre est le symbole de la création: il y a huit ancêtres et huit familles d'hommes, d'animaux, de plantes, etc. à l'origine des temps. Mais la perfection est représentée pour les Dogons et Bambaras par le 7, associant les deux principes - ou sexes - opposés : le 4, principe femelle et le 3, principe mâle.

La division du monde en quatre plans sur les branches d'une croix verticale orientée Ouest-Est, est attestée chez les Balubas et Luluas du KassaÏ (Congo).

Frobénius relève parmi les traits caractéristiques des cultures de la côte occidentale d'Afrique, de l'embouchure du Sénégal à celle du Congo, une sexualisation inverse des nombres Trois et Quatre, quatre étant ici un symbole masculin et trois un symbole féminin. Mais cette inversion des symboles paraît plutôt exceptionnelle.

Quatre, nombre des éléments, est le nombre des portes que doit franchir l'adepte de la voie mystique, selon la tradition des Soufi et des anciennes congrégations de derviches turcs. A chacune de ces portes est associé un des quatre éléments, dans l'ordre de progression suivant : air, feu, eau, terre. Ce symbolisme peut s'interpréter ainsi : à la première porte (le Sheriat), le néophyte qui ne connaît que le livre, c'est-à-dire la lettre de la religion, est dans l'air, c'est-à-dire dans le vide. Il se brûle au passage du seuil initiatique, représenté par la deuxième porte, qui est celle de la voie, autrement dit de l'engagement dans la discipline de l'ordre choisi (Tarikat) ; ceux qui ont passé cette deuxième porte sont parfois nommés les ascètes (Zahitler). La troisième porte ouvre à l'homme la connaissance mystique . Il devient un gnostique (Arif) et correspond à l'élément eau. Enfin, celui qui atteint Dieu et se fond en lui comme en l'unique réalité (Hak), passe, avec la quatrième et dernière porte (celle de Hakikat) dans l'élément le plus dense, la terre. On nomme ces élus les Amants. De l'air à la terre, l y a là un renversement de l'évolution mystique, telle qu'elle est habituellement imaginée par un esprit européen ; et pourtant le chemin de perfection d'un Ibn Mansour el Alladj ou d'un Mewlana Jalal ed din Rûmi n'est pas si éloigné de celui d'une Thérèse d'Avila ou d'un Jean de la Croix.mais la doctrine Soufi, plus nettement peut-être que la mystique chrétienne, est partie du postulat selon lequel ce que nous nommons Réalité n'est qu'un reflet (irréel donc) de la seule Réalité, divine et transcendante, cachée par le voile de dualité qui sépare le non-croyant de Dieu et le met ainsi en état de péché (pour la Théorie des Quatre Portes, voir J. M. Birges). On a remarqué qu'entre ces quatre états successifs de l'ascension mystique, figurés par autant de portes, il n'y en a qu'une, la seconde, associée à la symbolique purificatrice et transformatrice du feu, qui constitue un seuil initiatique. Les étapes de l'ascension mystique proprement dites ne sont donc que trois : Tarikat, Marifet, Hakikat. Ce qui est extrêmement proche des trois degrés de perfection que reconnaissaient les néo-platoniciens d'Alexandrie : successivement la vertu, la sagesse et l'extase. C.-E. Monod-Herzen commente ces étapes en ces termes : Le premier degré correspond à la perfection de la vie sociale et s'atteint par la pratique de la morale, la contemplation intellectuelle procure le second et l'enthousiasme conduit au plus haut terme. Ces idées étaient alors aussi bien celles d'un chrétien comme Clément d'Alexandrie que celles d'un païen comme Plotin.

De ces quatre stades ou portes du perfectionnement mystique, on peut rapprocher l'évolution quaternaire de l'anima selon les théories de Jung ; le psychanalyste en prend pour représentations archétypales : Ève, qui représente des fonctions purement instinctuelles et biologiques ; l'Hélène de Faust, qui personnifie le niveau romantique et esthétique, encore caractérisé cependant par des éléments sexuels ; la Vierge Marie, chez qui l'amour (l’Éros) atteint l'altitude de la dévotion spirituelle ; et enfin la Sulamite du Cantique des Cantiques, incarnation de la Sagesse qui transcende même la sainteté de la pureté. La figure de Mona Lisa constituerait, selon Marie-Louise von Frantz, une autre représentation de ce stade quatrième et ultime de l'anima. On voit clairement, toutefois, combien cette conception spiritualiste de l'Ecole jungienne diffère des hiérarchies mystiques traditionnelles.

Quoi qu'il en soit, le système entier de la pensée jungienne est fondé sur l'importance fondamentale qu'il reconnaît au nombre quatre, la quaternité représentant pour lui le fondement archétype de la psyché humaine, c'est-à-dire la totalité des processus psychiques conscients et inconscients. Toute son analyse des types psychologiques repose en effet sur sa théorie des quatre fonctions fondamentales de la conscience : la pensée, le sentiment, l'intuition et la sensation. Le psychanalyste maintient ici une attitude humaine qui paraît constante depuis le paléolithique et qui depuis la croix des directions cardinales, présente à l'aube de toutes les cosmologies, passe par la théorie des initiés et des alchimistes, pour lesquels la quaternité constituait un axiome fondamental dans la poursuite du Grand Œuvre et la recherche de la Pierre Philosophale."

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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


Le chiffre quatre, qui est celui des saisons, des éléments (aire, eau, terre, feuà, des oints cardinaux et des phases lunaires, était considéré par les pythagoriciens comme le chiffre parfait et la source de la nature éternelle : ils prêtaient serment sur ce chiffre, notamment sous la forme de la Tétraktis (triangle dont la base correspondant au quatre symbolise la Terre ; voir Di). Toujours pour les disciples de Pythagore, le carré (qui est associé à ce nombre) était une figure magique.

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D'après Didier Colin, auteur du Dictionnaire des symboles, des mythes et des légendes (Larousse Livre, 2000) :

Les figures du carré et de la croix sont les deux plus belles et fidèles représentations du Nombre 4. Mais celui-ci est aussi un symbole du destin et du libre arbitre. Nous ne chercherons pas à compter jusqu'à 4 , même si compter et conter, c'est-à-dire énumérer et raconter - ont un sens et une étymologie communes et si, donc, les rapprocher l'un de l'autre présente un certain intérêt, dans la démarche qui est la nôtre ici. En effet, le science, quel que soit l'angle sous lequel on l'aborde, a d'autant plus d'attraits que nous savons nous émerveiller de ce qu'elle nous fait comprendre et connaître ; la nature. Non pas comme une mécanique impeccable dont nous saurions maîtriser et utiliser tous les rouages à notre profit, mais comme un livre fabuleux dont nous ne finirions jamais de tourner les pages, découvrant ainsi, encore et encore, tout au long de notre vie, de nouvelles formes de vie, de nouveaux horizons, de nouveaux espaces, là, sous nos yeux éblouis.

Un monde parfait. Nous ne faisons pas ce préambule par hasard. Car nous venons de résumer tous les pièges tendus ou figurés par le 4, et toutes les ouvertures, tous les possibles offerts par lui. Car le 4, par tout ce qu'il représente symboliquement à nos yeux, nous permet de disposer d'une puissance et d'un pouvoir potentiels sur la matière constituée des 4 éléments primordiaux. Mais, ce faisant, il nous enferme dans une réalité concrète immuable, par le fait même qu'il sous-tend un univers clos, parfait, la structure fondamentale du cosmos tel que le percevait Pythagore de Samos au VIe siècle avant notre ère. Ainsi, le monde reposerait-il sur 4 piliers, 4 colonnes, 4 arbres sacrés, soutenant le temple de l'univers manifesté. Bien sûr, les 4 pieds du monde, si l'on ose dire, sont en analogie avec les 4 points cardinaux.

Carrefour et territoire. Mais remontons dans le temps et dans la vision que purent avoir nos lointains ancêtres du monde qui était le leur et est encore le nôtre, mais dont, alors, ils commençaient à prendre conscience et voulurent comprendre et connaître les principes, la structure, l'ordre. Su un point de l'horizon, ils voyaient le Soleil se lever, parcourir un certain trajet dans le ciel, puis disparaître de l'autre côté de l'horizon. Comme nous l'avons déjà vu, cela permit à l'homme de symboliser le grand principe de la dualité : le jour et la nuit, la vie et la mort, le monde visible et le monde invisible, le haut et le bas. Cependant, si le lever ou point du jour peut être observé, relevé et donc anticipé, c'est-à-dire prévisible - car chaque année, à la même période, il se produit toujours au même endroit -, si l'on peut faire de même avec le coucher du jour ou ce que l'on pourrait appeler le point de nuit, on est alors en mesure de considérer avec la même attention un phénomène similaire produit cette fois par les levers et couchers de la Lune. L'homme put donc disposer de 4 directions, qui sont les 4 points révélées par les levers et couchers du Soleil et de la Lune, un certain jour, à un certain endroit. De même, l'homme peut avancer ou reculer, se diriger vers la droite ou vers la gauche, c'est-à-dire marcher dans 4 directions. Toutefois, il ne peut en emprunter qu’une à la fois, bien sûr. Nous sommes là dans l'univers symbolique du carrefour. En résumé, le Nombre 4 révèle deux principes fondamentaux de l'éveil de la conscience et de l'intelligence de l'homme : la notion de territoire ou, si l'on préfère, de propriété, pour parler en termes plus modernes, et celle de choix, donc de volonté propre, de libre arbitre.


Carré et destin. En effet, en situant les 4 points du monde, de son monde, définis par les levers et couchers du Soleil et de la Lune, l'homme établit un univers clos qui n'appartenait qu'à lui, même si celui-ci était, selon lui, déterminé ou régi par les dieux. En reliant ces 4 points un par un, il créa la grande figure géométrique du 4 : le carré. Dans l'esprit de nos ancêtres, la Terre était carrée et le ciel circulaire. Par ailleurs, nous devons souligner que c'est à partir de 4 points que l'on forma le premier volume, le tétraèdre, reposant sur 4 points lui aussi, mais qui ne se trouvent pas dans le même plan, et constitué de 4 triangles.. Or qui dit volume dit réalité physique, manifestation dans le monde concret, forme. Dans l'univers du 4, qui produit le carré, soit 4 lignes qui sont comme les limites du monde, de son monde, l'homme existe. Il peut vivre en sécurité. Au-delà de ces 4 lignes ou repères, c'est l'inconnu, l'interdit. On comprend que le 4 favorise la prise de conscience de nos richesses et sécurise, mais qu'il limite et enferme, par là même. En faisant se rejoindre ces 4 points de l'horizon deux par deux, non pas à l'extérieur mais à l'intérieur, on crée un point supplémentaire, celui qui se trouve à l'intersection des deux lignes formées ainsi. Mais avant d'en arriver là - car ici, nous en sommes déjà au Nombre 5 -, l'homme peut-être lui-même ce centre capable de se mouvoir vers l'un de ces 4 points, se trouvant donc à un carrefour, pouvant choisir la direction, la voie qu'il va prendre. C'est ainsi que le Nombre 4, symbole évident du carré et du carrefour est, par analogie, celui du destin imposé à l'homme pour qu'il puisse exprimer son libre arbitre. Lorsqu'il se trouve à un carrefour et qu'il choisit de prendre une direction plutôt qu'une autre, l'homme choisit son destin."

Fiche d'identité du 4 :

Noms : quaternaire, quarte, quatuor, quadruple.

Correspondances arithmomanciques, avec les lettres de l'alphabet : D, M et V.

Correspondance avec les lettres-nombres du code de la kabbale : Daleth.

Correspondance astrologique : Mars.

Couleurs : le vert.

Symbole géométrique : le carré, la croix et le tétraèdre.

Quelques figures et symboles du 4 :

Ce sont d'abord les points cardinaux que suggère le 4 ; l'Est ou l'Orient, dit aussi le Levant, le point de l'horizon où le Soleil se lève ; l'Ouest ou l'Occident, dit également le Couchant, le point de l'horizon où le soleil se couche ; le Nord, que l'on repère aisément dans le ciel grâce à l'étoile polaire, située dans la constellation de la Petite Ourse, à moins de 1 degré du pôle céleste boréal ; le Sud, dont le point se trouve bien sûr à l'opposé de l'étoile polaire. Ces 4 points cardinaux sont en concordance avec les 4 points équinoxiaux et solsticiaux et, de ce fait, avec les 4 saisons et les 4 éléments, dont nous vous rappelons qu'ils forment ensemble la structure même du Zodiaque.

Dans l'Ancien Testament, le nom de Yahvé ou de Jéhovah s'écrit à l'aide des 4 lettres-nombres de l'alphabet hébraïque YHWH, soit Yod-Hé-Waw-Hheith ou 10-5-6-8.

Qu'on ne s'étonne donc pas que les rédacteurs de la Bible aient trouvé 4 grands prophètes : Isaïe, Jérémie, Ézéchiel et Daniel, et que, ensuite, dans le Nouveau Testament, figurent 4 évangélistes : Marc, qui était représenté par un lion, Luc, symbolisé par un taureau, Jean, qui apparaissait sous les traits d'un aigle, et Matthieu, qui incarnait l'homme ou l'ange ; qu'on ne soit pas surpris enfin que, plus tard, l'Eglise comptât 4 docteurs : saint Augustin, saint Ambroise, saint Jérôme, saint Grégoire le Grand. Bien sûr, les 4 lettres-nombres qui constituent le nom mythique et sacré de Yahvé sont en analogie avec le symbole de la croix du Christ. Pour être tout à fait complet en ce qui concerne la Bible, nous nous devons de faire allusion aux 4 fleuves du Paradis et aux 4 cavaliers de l'Apocalypse.

Comme on le voit, le Nombre 4 est omniprésent dans le Livre des livres."

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Selon Nathalie Le Luel, auteure du Dictionnaire des Symboles (Éditions Jean-Paul Gisserot, 2015),


"Quatre est un chiffre hautement symbolique dont le sens est à mettre en rapport avec les formes géométriques du carré et du cercle dans beaucoup de cultures et de religions.

Quatre est ainsi le signe de la totalité terrestre, mais aussi de l'organisation et du rythme parfait. Il symbolise la constance et la stabilité. de fait, on parle des quatre vents, des quatre piliers de l'univers, des quatre points cardinaux, des quatre éléments, des quatre phrases de la lune, des quatre saisons, des quatre âges de la vie (tradition pythagoricienne), des quatre fleuves du Paradis, des quatre évangélistes, des quatre Vivants (le lion, l'aigle, le taureau et l'homme, qui forment le Tétramorphe), des quatre cavaliers de l'Apocalypse aux quatre couleurs distinctes, etc. Dans ce livre et dans la Bible en général, Quatre est le chiffre de l'universalité, il représente la totalité du créé et du révélé.

Il renvoie aussi aux quatre vertus cardinales (Prudence, Tempérance, Force, Justice). Le chiffre Quatre est également associé au signe de la croix composée de quatre segments qui partent de quatre côtés opposés."

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Dans La numérologie dans l'après-vie, Décryptage de la stratégie qui précède une incarnation (Éditions Arcana Sacra , 2017) écrit par Denis Schneider, voici comment est présenté le 4 :

Symbolique : La Terre. La matière, les éléments. Carré et croix. La réalité ; la totalité du créé.

L'Empereur des Tarots.


Signification : Le travail. La matérialité. La réalisation et le résultat.

Courage et honnêteté, souci de justice, fidélité, dévouement, devoir, fatalité, dureté.

Ténacité, solidité, sérieux, application, patience, rigueur, ordre et méthode.

Lutte pour l'existence. Énergie limitée, enfermée.

Personnalité : Grand travailleur, économe, endurant, constant et discipliné, volontaire. Sait se sacrifier dans le travail et la peine pour croître et prospérer.

Telle la tortue de la Fable, avance lentement mais sûrement.

Réfléchi, sobre, patient, honnête, loyal, attaché aux traditions ; sens du devoir. Minutieux, a le sens de l'analyse mais pas de la synthèse.

Discret, peu démonstratif, difficile d'accès, pudique ; sensibilité non exprimée, sentiments trop contenus.

Attiré par les métiers qui demandent constance, minutie, volonté, application, travail régulier.

Au négatif : Peut être routinier, rigide, maniaque, obstiné, aux vues étroites, bourru, pessimiste, se croire méconnu et en tirer de l'amertume. Manque d'humour. Peut avoir l'esprit de contradiction, être révolté, un opposant incitateur ou fanatique, plus rarement explosif et coléreux.

 

Même analyse, mot pour mot dans La Numérologie appliquée, Ontologie et Holistique (Éditions Arcana Sacra, 2018) de Denis Schneider.

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