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Le Mélèze



Étymologie :


  • MÉLÈZE, subst. masc.

Etymol. et Hist. 1552 fém. (Ch. Estienne, Dict. Latinogallicum, 752b ds Rom. Forsch. t. 32, p. 104), encore fém. ds Trév. 1771, souvent fém. dans les parlers région. (v. FEW t. 6, 1, p. 654a et Roll. Flore t. 11, p. 232) ; 1765 melese masc. [p. anal. avec les autres noms d'arbres] (Encyclop. t. 10). Empr. à l'a. dauph. melese (attesté en 1313, v. J. Hubschmid, Alpenwörter romanischen und vorromanischen Ursprungs, Berne, 1951, p. 55) qui remonte à une forme *melice, issue, après changement d'accentuation propre aux parlers de cette aire géogr. (cf. rŭmĭce > rumeze dans les parlers de la Drôme, Hubschmid, loc. cit. et FEW t.10, p. 557b), de *melice (d'où a. prov. melse ca 1540, v. P. Meyer, Doc. ling. des Basses-Alpes ds Romania, t. 27, p. 376 ; cf. encore Rabelais, Tiers Livre, chapitre 52, éd. M. A. Screech, p. 352 qui atteste melze comme mot employé par « les Alpinois »), formé du croisement d'un rad. gaul. mel- désignant cet arbre, avec le mot lat. larix qui le désignait.


Lire également la définition afin de pouvoir amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Larix europea - Blétoun - Brenvette - Brinva - Larège - Larice sauvage - Laza - Mélandzé - Mélesse - Mélèze commun - Merzé - Pin de Briançon -

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Botanique :

Lire la fiche Tela Botanica sur le mélèze d'Europe.



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Vertus médicinales :


Dans "Ethnobotanique abénakise". (In : Archives du Folklore, 1947, vol. 11, pp. 145-182), Jacques Rousseau rapporte les usages suivants :


LARIX LARICINA. (Mélèze, épinette rouge), oblanda'gasouk. (D'après Laurent, pôbnôdageso). Pour les toux persistantes, faire une tisane d'écorce d'épinette rouge (nom connu de Paquette) et de racines d'épilobe.




Usages traditionnels :


Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


L'eau de boisson dans certaines montagnes est aromatisée avec les cônes du pin sylvestre, arola blanste ; on lui conserve sa fraîcheur en la mettant dans les seaux de mélèze, Larix europoea, placés sur des torches en paille de seigle. L'eau est d'autant plus fraîche que la torche est pus grosse et plus humide.

[...]

Je me bornerai à rappeler que le bois de mélèze, laza, Larix europoea, passe pour incorruptible et qu'il est très recherché pour la fabrication des tonnelets destinés à contenir l'eau-de-vie.

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Symbolisme :


Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme du mélèze :


MÉLEZE - AUDACE.

Les naturalistes regardent le Mélèze comme le géant de la végétation . Cet arbre croit sur les plus hautes montagnes , où il s'élève à une élévation prodigieuse. Dans le Nord , les Mélèzes sont souvent couverts d'un lichen qui les revêt comme d'une épaisse fourrure. Les bergers s'amusent à mettre le feu à ce singulier vêtement. Il s'embrase spontanément et élève jusqu'au ciel une flamme légère qui, au même instant, pétille et s'évapore. On dirait que ces beaux arbres ont été disposés exprès pour donner au désert l'étonnant spectacle des plus magnifiques feux d'artifice.

 

Dans Les Fleurs naturelles : traité sur l'art de composer les couronnes, les parures, les bouquets, etc., de tous genres pour bals et soirées suivi du langage des fleurs (Auto-édition, Paris, 1847) Jules Lachaume établit les correspondances entre les fleurs et les sentiments humains :


Mélèse - Audace.

A cause de la hardiesse de sa végétation. Le mélèse croit sur les hautes montagnes, et brave la tempête et les glaces. On l’a surnommé le géant de la végétation.

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Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Mélèze - Audace.

Cet arbre s'élève jusqu'à cent pieds et passe pour être le géant des arbres de l'Europe. Son bois rougeâtre, quoique léger, est plus dur que celui du sapin ; on l'emploie pour les charpentes, les constructions navales et dans la tonnellerie. C'est lui qui a fourni, dit-on, les premiers pilotis pour la fondation de Venise. Son écorce astringente est bonne pour le tannage des cuirs, et il en suinte une résine liquide connue sous le nom de térébenthine de Venise qui est très estimée .

 

Édouard Grimard, auteur de L'esprit des plantes, silhouettes végétales. (Éditions Mame, 1875) propose sa propre vision des plantes :


Arbre vert ? Oui, à coup sûr ; toutefois moins vert que les autres, puisque, seul parmi les Conifères, il perd ses feuilles au retour de chaque hiver. Le Mélèze est d'humeur sauvage. On le trouve isolé, près des neiges, sur les hautes Alpes, qu'il affectionne particulièrement, et où il croît bien au-dessus des Sapins, dans les glaciales solitudes Là il acquiert parfois un accroissement énorme. On en rencontre dont le tronc, de cinq à six mètres de circonférence à la base, s'élève à une hauteur prodigieuse et rappelle cette fameuse poutre historique qui, transportée à Rome par les ordres de Tibère, fut ensuite employée à la construction de l'amphithéâtre de Néron ; - elle avait cent dix pieds de longueur sur deux pieds d'équarrissage.

Le bois de Mélèze ne fend jamais, et est considéré comme à peu près incorruptible : témoin ce vaisseau trouvé dans la mer après mille ans de submersion, et dont toutes les planches de Mélèze avaient acquis une telle dureté, qu'elles étaient difficilement entamées par la hache. Mais nous avons hâte d'arriver au plus célèbre de tous les Conifères.

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Albert Dauzat dans son article "Noms prélatins d'arbres et d'animaux d'après la dénomination du sol." (In : Revue des Études Anciennes. Tome 42, 1940, n°1-4. Mélanges d'études anciennes offerts à Georges Radet. pp. 609-612) relie l'origine de l'appellation mélèze au sol sur lequel il pousse :


On expliquait jadis mélèze (mot emprunté par le français au dauphinois vers le XVIe siècle ; var. melze, Rabelais) comme un dérivé du latin mel, c'est-à-dire « l'arbre à miel » : explication qui ne m'a jamais satisfait, car les abeilles n'ont aucune prédilection pour un arbre de haute altitude, et elles butinent plus bas ; d'autre part, les noms d'arbres, animaux, objets... spéciaux aux Alpes ont passé des dialectes alpestres en latin, loin que le latin les ait créés. L'un des premiers, M. Jud a vu qu'il s'agissait d'un radical prélatin, hypothèse admise par Meyer-Lübke dans la troisième édition de son Romanisches etymologisches Wörterbuch (5481 α). La racine est vraisemblablement une variante vocalique de la base mala, montagne, celle qu'on trouve en celtique sous la forme mello- (rabaissé — vu l'orographie du pays — à « colline » dans l'irlandais mell). Une formation *mell-iciu ou * mellice, [l'arbre] de la montagne, est satisfaisante. Allant plus loin, M. Jud s'est demandé si on ne pouvait pas réduire à l'unité trois noms du mélèze qu'on trouve dans des régions voisines : tandis que mélèze, melze, est spécial à la région qui environne le mont Thabor, plus au Sud (Queyras, etc.), « mélèze » se dit bletoun, et au Nord (vallée d'Aoste, etc.) brenca, mots qui pourraient être les dérivés, avec double suffixe (-itt-one, -en-ua), d'une même racine mel(l), avec voyelle au degré zéro, et offrant, après contraction, la double évolution ml → bl et ml → mr →br. Mais on ne pourra conclure tant qu'on n'aura pas établi un ensemble de concordances phoniques pour des mots similaires.

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Dans un article intitulé "L'énigme de l'art quaternaire peut-elle être résolue par la théorie du culte des Ongones ?." (Revue des Sciences religieuses, 1964, vol. 38, n°4, p. 337-388), André Glory rapporte quelques croyances chamaniques à propos du mélèze :


Les Chamanes Iakoutes croyaient que leur âme était logée dans un mélèze dont les branches noueuses servaient à fabriquer leur tambourin rituel. Les Nènes transmettaient leurs maladies à un mélèze et suspendaient à leur cime les bois des rennes sacrifiés. Les Ostiaks regardaient comme sacrés, le pin, le mélèze, les Minousiens le mélèze, les Finnois le sorbier, les Iakoutes le bouleau et le mélèze, etc.. En Scandinavie, on a retrouvé un témoin de ce culte dans les archives du Néolithique.

 

Selon Jean Chevalier et Alain Gheerbrant dans le Dictionnaire des symboles (1ère édition, 1969 ; édition revue et corrigée Robert Laffont, 1982),


"Le mélèze est, comme tous les conifères, un symbole d'immortalité.

Chez les peuples sibériens, il joue à ce titre le rôle d'Arbre du monde, le long duquel descendent le soleil et la lune, figurés par des oiseaux d'or et d'argent. Associé à la lune seule, il a parfois aussi - comme le cyprès en Europe - un caractère funèbre."

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Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), le Mélèze (Larix europea) a les caractéristiques suivantes :

Pouvoir : Protection, en particulier contre le feu.


Utilisation magique : Une ancienne tradition, dont l'origine se perd, veut que cet arbre, lorsqu'il est vivant et bien en sève, soit insensible aux flammes ; l'aubier de Mélèze a longtemps servi d'amulettes contre les incendies.

Dans les Alpes bavaroises et au Tyrol, les jeunes cônes, lorsqu'ils sont poisseux et d'un beau rouge violacé, sont brûlés sur des réchauds contre les sorts, le mauvais œil.

D'après une tradition tyrolienne, la Salgfräulein, habillée de blanc, va chanter certains soirs sous les vieux Mélèzes.

 

Dans Le livre des superstitions, mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995, réédition, 2019), Eloïse Mozzani nous propose la (courte) notice suivante :


"Le mélèze symbolise l'immortalité. L'aubier de mélèze, arbre qui passe pour être insensible aux flammes, protège des incendies. Brûler les jeunes cônes de mélèze chasse le mauvais œil et les sorts (Alpes bavaroises)."

 

Selon Émilie Maj, auteure de « Croyances et convenances iakoutes autour du sobo », (L’Homme [En ligne], 177-178 | 2006) :


Ivan Xudjakov décrit ainsi un rite chez les Iakoutes de Verkhoïansk :

« Ils invitent un chamane avant la pêche. Les participants au rituel plantent neuf petits mélèzes sur la rive qui soutiennent une corde sacrificielle. Un bout est orienté vers la rivière. À l'autre bout, sur la rive, se trouvent des récipients avec du kumys (1) et du beurre. Le chamane prononce une demande à l'esprit de l'eau, puis fait une aspersion de kumys en disant : “ Toi, esprit de ce lieu ainsi que tes neuf fils libres, mangez ! ” » (1969 : 221).


Note : 1) Lait de jument fermenté.

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Charles Stépanoff, auteur de Chamanisme, rituel et cognition : Chez les Touvas de Sibérie du Sud. (Vol. 11. Les Éditions de la MSH, 2014) évoque le lien entre mélèze et chamanisme :


[...] Si la qualité chamanique est conçue comme une nature innée (törümelinden), il n'est pas surprenant que les gens s'intéressent assez souvent aux « indices », « marques » (demdek) particuliers qui peuvent la révéler dès l'enfance. Une apparition précoce des signes permet de repousser l'idée que le statut de chamane ait été choisi, nécessairement ultérieurement, comme une carrière.

La présence d'ancêtres chamanes dans la généalogie d'un enfant rend son entourage particulièrement attentif à la manifestation d'indices et stimule des inférences sur les causes sous-jacentes qu'ils peuvent révéler. Aleksandr M., un Touva de l'Övur d'une cinquantaine d'années, est le petit-fils d'un chamane. Il raconte qu'après la mort de ce dernier, ses habits et instruments ont été déposés selon l'usage ancien dans une grotte des environs de l'ancien campement d'hiver (kystag) du chamane. A proximité y pousse un arbre, le « mélèze chamanique » (ham dyt) protecteur de la famille. Chaque année, un rituel réunit autour de cet arbre les descendants (cognatiques) du chamane.

 

Sylvie Verbois, auteure de Les arbres guérisseurs : Leurs symboles, leurs propriétés et leurs bienfaits (Éditions Eyrolles, 2018) transcrit le message que lui inspirent les arbres :


Mot-clé : Droiture intérieure.

Élément : Terre ; Feu ; Air.

Émotion : Peur ; Colère ; Tristesse.


Sachez que je suis insensible aux flammes, et mon aubier me protège des incendies. Je suis l'arbre parfait pour extraire de votre corps exaspération, emportement, courroux, et dissiper ressentiment et aigreur. reprenez confiance réapprenez la douceur et la patience. Ne soyez plus dans l’impatience et l’irascibilité, cela ne donne jamais de bons fruits. Songez plutôt à exprimer vos talents enfouis et vos dons naturels, cela sera bien plus profitable. Effacez les doutes, la crainte d'échouer ou de ne pas être à la hauteur, détendez-vous, reprenez pied, grandissez, retrouvez le cours de l'intériorité te de la détermination, autorisez-vous à être.

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Liz Marvin, autrice de Grand Sage comme un Arbre (Michael O’Mara Books Ltd, 2019 ; First Éditions, 2021 pour la traduction française) transmet les messages qu’elle a pu capter en se reconnectant aux arbres :

En cas de coup dur, prends une pause : le Mélèze de Dahurie

Quand on est fatigué et débordé, on ne voit pas le monde de la même manière. Vous risquez de prendre une ombre pour un monstre tapi sous le lit. Le remède ? Le repos. Et se montrer bienveillant avec soi-même. Le Mélèze de Dahurie est un expert de la survie prenez-en de la graine ! Il pousse sous des latitudes peu clémentes et a appris à survivre aux longs hivers sibériens en faisant tomber ses aiguilles pour entrer en hibernation jusqu’à ce que le temps soit plus doux.

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Mythes et légendes :


D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),


MELEZE (larix). — Castrén, cité par M. Girard de Rialle, rapporte qu’un bouquet de sept mélèzes constitue pour les Ostiakes un bois sacré ; chaque passant doit y laisser une flèche ; on y suspendait autrefois une grande quantité de pelleteries ; mais, comme ces offrandes étaient souvent dérobées par les étrangers, les Ostiakes se décidèrent à couper un tronçon d’un de ces mélèzes et à le transporter dans un endroit caché où ils purent lui faire leurs dévotions sans crainte de sacrilège. « Nous trouvons, continue M. Girard de Rialle, le même culte du mélèze à Bérézof, où un arbre de cette essence, de cinquante pieds de haut et si vieux que seul le sommet avait encore des feuilles, avait reçu les hommages des Ostiakes. Ce qui l’avait surtout désigné à leur piété, c’était sa conformation singulière : à six pieds au-dessus du sol, il se séparait en deux troncs qui se rejoignaient un peu plus haut, et c’était dans cette niche que les dévots plaçaient leurs offrandes. » D’après une tradition tyrolienne, la Salgfräulein, habillée de blanc, va chanter sous un vieux larix.

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