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La Liane



Étymologie :

  • LIANE, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1640 lienes « plantes sarmenteuses des forêts d'Amérique » (Le Père Bouton, Relation [de l'establissement des François... en l'isle de la Martinique], p. 68 ds R. Philol. fr., 1933, p. 26) ; 1694 pommes de lianes (Corneille, s.v. lienes). Empr. au fr. des Antilles où le mot semble importé des dial. de l'Ouest de la France dans lesquels le mot désigne diverses plantes, la plupart grimpantes (armoise, clématite, liseron, chèvrefeuille, v.FEW t. 5, p. 318b) ; liene, liane est prob. un dér. régr. du verbe dial. liener « lier des gerbes » (relevé pour Loches par FEW, loc. cit., p. 318a ; cf. la collision homon. et sém. entre liener « lier des gerbes » et le type liener dial. du Centre et de l'Ouest, var. de glener « glaner », FEW t. 4, p. 152b et t. 5, p. 318b, note 4), lui-même dér. de lien* avec dés. -er ; liene, liane refléteraient l'alternance lien, lian des dial. de l'Ouest, v. FEW t. 5, p. 317b ; v. aussi Barbier ds R. Lang rom. t. 67, 1933-36 [1935], p. 333.


Lire aussi la définition du nom pour amorcer la réflexion symbolique.

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Botanique :

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Symbolisme :


Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme de la liane :


LIANES - NŒUDS.

Lianes, nom commun à toutes les plantes sarmenteuses des quatre parties du monde ; ces plantes effectivement enlacent de leurs nœuds tout ce qui les environne.

 

Emma Faucon, dans Le Langage des fleurs (Théodore Lefèvre Éditeur, 1860) s'inspire de ses prédécesseurs pour proposer le symbolisme des plantes qu'elle étudie :


Lianes - Nœuds indissolubles.

On donne le nom de lianes à une foule de plantes grimpantes, volubiles ou sarmenteuses, qui servent à faire des liens d'une solidité remarquable. Il en existe depuis la grosseur du corps d'un homme jusqu'à la ténuité d'un fil à coudre. Les unes ressemblent à des racines de chiendent ; les autres, au contraire, sont couvertes de feuilles et des fleurs les plus belles. On s'en sert pour attacher les bouquets.

 

Selon le Dictionnaire des symboles (1ère édition, 1969 ; édition revue et corrigée Robert Laffont, 1982) de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,


"Chez les populations thaïes, la liane fut le lien primitif entre le Ciel et la Terre, lien dont la rupture est de tradition universelle. Certains voient dans les courges, qui constituent les fruits de cette liane-axe du monde, l'origine même de leur race.

La dualité de la liane et de l'arbre autour duquel elle s'enroule est un symbole d'amour. Plus précisément dans l'Inde, la liane est Pârvatî, l'arbre étant Shiva sous la forme du linga (phallus). Ce symbole n'est pas sans analogie avec celui du bétel. L'enroulement hélicoïdal des plantes volubiles évoque tout naturellement en outre le symbolisme général de la spirale."

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Selon Michel Aufray, auteur d'un article intitulé « Note sur les messages de végétaux : quelques exemples océaniens », (Journal de la Société des Océanistes [En ligne], pp. 114-115 | Année 2002) :


La réalité langagière d’une culture ne concerne pas seulement la communication linguistique ; elle recouvre aussi les modes de communication non verbaux, ceux-ci pouvant utiliser divers supports : langage du corps, objets, marques, icônes et signes. Leur existence dans les sociétés océaniennes a souvent été signalée mais, généralement, ces systèmes d’information n’ont suscité qu’un simple intérêt documentaire. Ils mériteraient à notre avis d’être inventoriés et étudiés car ils participent aux échanges sociaux au sein d’une communauté.

Les messages de végétaux, en particulier, tiennent un rôle non négligeable. À la différence de la communication verbale, ils permettent de transmettre une information sans limitation de temps et d’espace. [...]


Les messages, annonces d’événements graves

La littérature orale mélanésienne fait parfois allusion à des plantes utilisées comme signes pour aviser d’une mauvaise nouvelle. Ainsi, dans un récit en langue paicî, Le chef de Göbwînyârâ (Guiart, 1957 : 61-65) 3 , le héros avant de partir en voyage, attache au toit de sa maison, une touffe de méâmöru (Plectranthus parviflorus Henck., Labiées) et s’adresse ainsi à son cadet :


« Je jette sur le toit de la maison une liane méâmöru, tant qu’elle sera verte, c’est qu’il ne m’arrivera que de bonnes choses ; si elle crève, c’est que j’aurai rencontré un malheur ».

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Symbolisme onirique :


Selon Georges Romey, auteur du Dictionnaire de la Symbolique, le vocabulaire fondamental des rêves, Tome 1 : couleurs, minéraux, métaux, végétaux, animaux (Albin Michel, 1995), la liane, dans la rêve, renvoie à un type de paysage bien particulier :


"Les oiseaux jacasseurs, soudain, se sont tus. Le gros serpent enroulé autour d'une branche a dressé la tête. La panthère s'est arrêtée. La jungle écoute, attentive. Du haut des frondaisons vient de retentir le long cri modulé de tarzan. La forêt entière résonne et répercute l'appel, le prolonge. L'homme(singe apparaît, cheveux au vent, solidement cramponné, dans le mouvement qui l'emporte, à l'extrémité de la liane. Tarzan, ce personnage de la mythologie moderne, est inséparable de la liane et du mouvement de balancier. la symbolique de la liane devient immédiatement accessible dès qu'on a reconnu qu'elle est un complément d'image de l'homme-singe. Présente dans près de 3% des rêves, la liane n'est pas un symbole anodin. Elle se distingue nettement de le corde par plusieurs caractéristiques. Comme nous le montrons dans l'article consacré à la corde, celle-là se rencontre surtout dans les scénarios produits par les femmes. Elle est en corrélation avec les nœuds, et, lorsqu'elle se déploie verticalement, elle est le plus souvent une incitation à l'élévation. La liane est l'une des très rares images qui apparaissent beaucoup plus fréquemment dans les productions oniriques des hommes que dans celles des femmes. trois fois plus, ce qui est une proportion exceptionnelle. La liane invite le plus souvent le rêveur à descendre ou à se livrer au mouvement de balancement. la liane, dans les rêves féminins, fait en général l'objet d'une évocation insignifiante.

Les corrélations observées autour du symbole concernent, pour plus de 60% d'entre elles, des images qui expriment la nature, le naturel. en tête de celles-là se détache résolument tarzan. L'imaginaire n'est pas un dispositif de mémorisation propre à se charger de tout cliché qu'on lui propose. S'il associe la liane et tarzan aussi étroitement, c'est que l'une et l'autre présentent des caractéristiques susceptibles de provoquer des projections identiques ou complémentaires. Tarzan est un homme né dans la civilisation et que les circonstances ont contraint à s'adapter à a vie sauvage. Les animaux sont ses amis. il parle leurs langages et tous sont prêts à lui prêter assistance. La forêt est devenue sa patrie. Les redoutables pièges de la jungle sont pour lui autant de protections. L'homme-singe ! Ici le singe n'est lié à l'image paternelle que très secondairement. Nous reviendrons sur ce thème dans la conclusion. L'expression homme-singe désigne les deux composantes fondamentales de la psychologie humaine : la raison et le sentir. Autour de la liane, on voit s'organiser, dans les rêves, les innombrables déclinaisons de ces composantes : la civilisation et la vie primitive, la ville et la nature, l'intellect et l'instinct, l'organisation et la liberté, etc.

La liane, par le mouvement de balancement qu'elle suggère, est une image de passage, de franchissement d'un invisible seuil qui sépare les formes normatives et les formes naturelles de la vie. Une corde lie ou relie. Elle attache. La liane aussi, nous le montrerons. Mais, avant tout, elle est l'instrument d'une dynamique d'union entre des pôles jusqu'alors antagonistes dans la psychologie du rêveur. Dans beaucoup de scénarios où l'on rencontre le symbole, apparaît aussi le vieux sage, ce prototype de toutes les représentations médiatrices. Adrien, dont la cure exemplaire fut en son temps à l'origine de nos découvertes concernant les mécanismes de passage du seuil dans le rêve éveillé, propose, dans son septième scénario, des images très claires. Adrien, dont l'intelligence mentale maîtrisait jusqu'à l’étouffement les potentialités intuitives, commence à se libérer. Les réflexions et les images s'entremêlent avec un rare bonheur. Nous extrayons de ce scénario les phrases les plus significatives :

"... Je sens que beaucoup de "points chauds" ont disparu... je suis davantage dans l'être... ressentir ! Ressentir sa source et agir ! Une image me vient : celle d'un handicapé à grosse tête qui ne peut pas se mouvoir tout seul... emporté par le poids de sa tête !... [..] Impression de voir un embryon formé, avec une grosse tête, sans doute dans e ventre de sa mère... comme s'il réfléchissait déjà... avant même d'être né ! Sortir du ventre ou pas?... Là, je vois une mer... une mer aux vagues agitées, transparente... synonyme de vie... c'est une plage sans âge... qui pourrait être d'un autre âge, en arc de cercle, très longue... cette mer semble vivre... c'est une mer primitive... je marche sur cette plage... j'imagine que, dans cette mer, il y a plein d'animaux. Pas seulement des poissons?... comme s'il y avait une jungle sous la mer... comme s'il y avait sous l'eau une forêt vierge... je me demande si je vois un singe... en tout cas je vois des lianes... la végétation est touffue... sans trace d'homme, sans trace d'organisation... impression d'être dans un monde mort pour moi depuis longtemps et que je fais revivre. J'perçois une sorte de gardien... c'est un Robinson Crusoé ! c'est un vieillard à longue barbe... et puis, là, j'ai vu un décor, un décor de théâtre derrière lequel il y a la vie... le comprends tout à coup que je suis spectateur de ma vie et qu'il faut être acteur..."

Quelle étonnante composition onirique que le vieux sage surgissant près de la liane, sous une mer primitive, et qui prend les traits de Robinson Crusoé ! Mowgli, Tarzan et Robinson sont trois membres de la même famille symbolique ! Dans la suite du scénario, Adrien réalise un passage déterminant qui le réconcilie avec les pulsions naturelles. Ainsi, un mouvement de liane, dans le rêve, peut être regardé comme un indice purement dynamique, équivalent aérien de la traversée du miroir. L'observation attentive des scénarios et de la problématique de leurs auteurs, amène cependant d'autres remarques. Beaucoup d'images, à proximité de la liane, renvoient à la difficulté éprouvée par le rêveur à se détacher de l'emprise de la mère. L'une de ces images, comme nous le développons à propos du poisson, place le rêveur dans la situation où il s'efforce de revenir à la source de la rivière au lieu d'accepter d'accomplir son destin dans le sens du courant. La liane, alors, est aussi la première attache, celle qui lie le rêveur à la mère primitive. La résonance avec les mots d'Adrien n'a pas besoin d'être soulignée ! L'embryon emporté par le poids de sa tête et qui réfléchit déjà sur la grave question de quitter ou non le sein maternel est une image à multiples sens ! Une brève séquence du vingt et unième rêve de Germain complétera l’illustration de cette autre facette de la traduction :

"... Je suis tombé du ciel sur un arbre qui a amorti ma chute... mais je suis encore très loin du sol.. il faut que je trouve une liane pour descendre... j'en trouve une mais elle est bientôt trop courte... je suis obligé de la lâcher... et je tombe dans une toile d'araignée... toute tissée... je me remets debout... je me déplace facilement car les fils sont très serrés... j'en prends un qui pend et je recommence à descendre... alors que je suis encore au milieu, une énorme araignée vient vers moi... elle tisse un fil pour me rejoindre... je suis obligé de la chasser à coups de pied... je touche enfin le sol... là... il y a un ruisseau... je remonte vers la source... mais c'est fermé de chaque côté par des parois de roche, au fond aussi... et je trouve pas d'issue... que je le veuille ou non, il faut repartir dans l'autre sens..."

Dans ce rêve de Germain, la liane se confond avec le fil d'araignée. Celle-là étant regardée comme représentation de la relation à l'image négative de la mère, le fil symbolise clairement le cordon ombilical.

Comme nous l'avons écrit ci-dessus, la liane apparaît surtout dans les rêves émis par les hommes. Lorsqu'on a remarqué que 70% des rêveurs concernés ont été de jeunes orphelins de père et que les autres se sont trouvés confrontés à une image paternelle écrasante, il n'est pas difficile de déterminer ce qui rassemble les deux axes d'interprétation que nous proposons du symbole.

Le jeune orphelin de père est placé dans une situation qui légitime sa vocation d'usurpateur de la position du père. Œdipe voit réalisé le premier épisode de son destin tragique. Le triomphe illusoire qui accompagne cette ambition substitutrice participe sans doute à la composition de l'image de l'homme-singe, de l'homme-père ! Il en résulte un renforcement naturel de l'attachement à la mère. Le désir culpabilisant peut se développer sus e masque d'une responsabilisation assumée et le fait de revêtir le rôle du père, de s'identifier à l'animus, voue le garçon à l'épanouissement emphatique du mental, de l'attitude organisatrice.

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Qui tranchera ce cordon ombilical renforcé ? Qui s'opposera à l'hégémonie tentaculaire de la raison ? Le rêve a ce double pouvoir. Le symbole s'infiltre à l'intérieur des réseaux justificateurs les plus solidement défendus, pour préparer les nouveaux équilibres. Lui seul mène l'action qui rendra à l'état total s liberté de devenir.

Quand la liane paraît dans l'onirisme et particulièrement dans l'onirisme masculin, elle est toujours l'indice d'une usure du système de défense, l'expression d'un besoin de réhabilitation du naturel. elle laisse aussi prévoir la réalisation de l'autonomie par rapport à l'image maternelle. On ne commettra pas d'erreur en l'interprétant comme un témoin de ce double mouvement de la dynamique d'évolution, c'est-à-dire comme symbole d'équilibration entre la pensée et le sentir, et d'aspiration à la rupture du cordon ombilical."

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Littérature :


René de Chateaubriand dans son roman Atala (1801) évoque la variété des lianes :


Telle est la scène sur le bord occidental ; mais elle change sur le bord opposé, et forme avec la première un admirable contraste. Suspendu sur les cours des eaux, groupés sur les rochers et sur les montagnes, dispersés dans les vallées, des arbres de toutes les formes, de toutes les couleurs, de tous les parfums, se mêlent, croissent ensemble, montent dans les airs à des hauteurs qui fatiguent les regards. Les vignes sauvages, les bignonias, les coloquintes, s’entrelacent au pied de ces arbres, escaladent leurs rameaux, grimpent à l’extrémité des branches, s’élancent de l’érable au tulipier, du tulipier à l’alcée, en formant mille grottes, mille voûtes, mille portiques. Souvent égarées d’arbre en arbre, ces lianes traversent des bras de rivières, sur lesquels elles jettent des ponts de fleurs.

[...]

Atala écouta ma prière. Comme un faon semble pendre aux fleurs de lianes roses, qu’il saisit de sa langue délicate dans l’escarpement de la montagne, ainsi je restai suspendu aux lèvres de ma bien-aimée.

[...]

Ce lieu était un terrain marécageux. Nous avancions avec peine sous une voûte de smilax, parmi des ceps de vigne, des indigos, des faséoles, des lianes rampantes, qui entravaient nos pieds comme des filets. Le sol spongieux tremblait autour de nous, et à chaque instant nous étions près d’être engloutis dans des fondrières.

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A propos du curare :


Nicolas Simon, dans une thèse intitulée Le poison dans l’histoire : crimes et empoisonnements par les végétaux et soutenue à la faculté de pharmacie de Nancy, (Sciences pharmaceutiques. 2003. ffhal-01732872f) analyse l'emploi des poisons dans différentes œuvres littéraires :


Mais la romancière britannique [Agatha Christie] n'était pas la seule à affectionner les toxiques pour donner naissance à tous ces meurtres imaginaires. Un de ses illustres concitoyens, Sir Arthur Conan Doyle, utilisa lui aussi souvent le poison pour déclencher l'intrigue des célèbres enquêtes de Sherlock Holmes. Dans la nouvelle "Le Vampire du Sussex", un gentleman anglais, passionné par la culture des indiens d'Amérique, fait appel au détective et à son fidèle Watson pour tenter de résoudre l'énigme qui entoure sa femme d'origine péruvienne. En effet, celle-ci a été surprise plusieurs fois en train de sucer une plaie au cou pratiquée sur leur bébé de moins d'un an et refuse de s'expliquer sur la nature de ses agissements.

Un autre élément troublant réside dans le fait que le chien de la maison a été retrouvé, à chaque fois, à moitié paralysé au moment des faits.

Holmes comprit très vite la nature du problème :


« - Vous avez ici des souvenirs de l'Amérique du Sud. [... ] Quand j'ai vu le petit carquois vide à côté de l'arc pour oiseaux, c'était exactement ce que j'avais pressenti. Si le bébé était piqué par l'une de ces flèches trempée dans du curare ou une autre drogue diabolique, la mort serait survenue si le poison n'avait pas été aspiré immédiatement. »


La mère de l'enfant sauvait donc le bébé en le protégeant des agissements d'un autre membre de la famille. Et elle protégeait en même temps l'assassin car celui-ci n'était autre que le fils de quinze ans de son mari, qu'il avait eu d'un premier mariage. L'adolescent, pour punir sa nouvelle mère qu'il détestait, tentait désespérément de tuer l'enfant avec les flèches empoisonnées de son père et essayait avant chaque tentative la pointe sur le chien pour vérifier que l'instrument avait gardé toute sa virulence.

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