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La Grassette




Étymologie :


  • GRASSETTE, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1556 subst. fém. bot. (B. Dessen, De Compositione medicamentorum, p. 802 d'apr. A. Boucherie ds R. Lang. rom. t. 19, p. 120). Dér. de gras* (cf. aussi lat. bot. crassula désignant l'orpin, Roll. Flore t. 6, p. 90 et lat. médiév. grassola d'apr. FEW t. 2, p. 1286, note 14).


Lire également la définition du nom grassette afin d'amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Pinguiculla - Caille - Herbe de coupure - Petite qui soude (Val d'Aoste) - Taliéta (Savoie) -

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Botanique :


Dans Les Langages secrets de la nature (Éditions Fayard, 1996), Jean-Marie Pelt évoque les différents modes de communication chez les animaux et chez les plantes :


Proche des droseras, la grassette (Pinguicula), petite plante fleurs ornementales, n'est, à première vue, pas suspecte : une simple rosette de feuilles entoure une hampe dressée, couronnée d'une jolie fleur violette en cloche ; ni tentacules visibles, ni glande écarlate. Pourquoi les insectes hésiteraient-ils à s'y poser ? D'autant que son aspect luisant semble promettre quelque succulente sécrétion.


Si l'on atterrit fréquemment sur les feuilles de grassette, on n'en décolle guère ; car leur surface est, en réalité, constituée de milliers de glandes microscopiques sécrétant un revêtement gluant qui évoque un véritable papier tue-mouches. A les voir constellées de minuscules cadavres rabougris, on ne saurait douter de l'efficacité de ce piège. Marie Perrenou et Claude Nuridsany on peut même observer sur des grassettes ce qu'ils qualifient de véritables scènes d'horreur : « Si la fantaisie morbide nous prenait de regarder à la loupe des journées durant ce qui se passe sur un papier tue-mouches, nous ne serions pas autrement scandalisés. Nous avons vu un jour un puceron femelle agonisant continuer à pondre ses rejetons, telle une machine incapable de débrayer son mécanisme absurde. Il livrait ainsi sa progéniture à l'impitoyable ogre végétal. Les minuscules créatures titubantes se trouvaient digérées dès leurs premiers pas. »

 

La grassette à grandes fleurs roses est une plante endémique très localisée. Elle est répertoriée uniquement dans les départements de Savoie, Haute-Savoie et Isère.

Pinguicula grandiflora
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En Isère et Savoie, cette espèce montagnarde vit principalement dans le massif de Belledonne et dans le massif de Chartreuse, sous le mont Granier. En Haute-Savoie, elle se plaît dans le massif des Bornes-Aravis.

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Usages traditionnels :


Selon Alfred Chabert, auteur de Plantes médicinales et plantes comestibles de Savoie (1897, Réédition Curandera, 1986) :


On emploie aussi [dans la fabrication du fromage] la taliéta, Pinguicula, nommée aussi caille, parce qu'elle a la propriété de coaguler le lait. Dans les Alpes de Beaufort, on faisait autrefois avec cette plante et plusieurs autres dont le souvenir s'est perdu, et d'ont l'une est peut-être le trenstolen, Hypericum quadrangulum, Hypericum Richerii, une présure employée à fabriquer un fromage tout à fait hors ligne dont la recette est tombée dans l'oubli depuis un demi-siècle. La raison en est que, si avec cette présure on obtenait du bien meilleur fromage et en plus grande quantité, le petit lait était trop dépouillé et devait être jeté.

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Dans "La vie traditionnelle dans les Vallées Vaudoises du Piémont" de Teofilo G. Pons., Victor Bettega, Christian Abry et Charles Joisten (Traduit et adapté de l'italien par V. Bettega, C. Abry, C. Joisten. In : Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie, n°3-4/1978. pp. 7-161), on apprend que :


Si on se blessait à la maison, on recourait à une toile d'araignée, la plus serrée et la plus poussiéreuse possible, qu'on appliquait sur la coupure. On pouvait aussi y appliquer directement des feuilles de grassette (de même sur une brûlure) ; mais on préférait, si on l'avait préparée à l'avance, une infusion de feuilles de cette même plante (èrbo d'ia talhôiro, herbe à la coupure), qu'on avait fait macérer au soleil dans un flacon pendant quelques jours. Ce remède était aussi employé par les bergers pour soigner et cicatriser rapidement les crevasses fréquentes des mamelles des animaux.

 

Selon Jean Froc, auteur de l'article intitulé "Nomadisme et sédentarisation : de l'airag au soja natto, du sapsago au vin jaune" (in Les fermentations au service des produits de terroir, INRA, 2005) :


Dans le Nord, en Laponie suédoise (mais aussi en Norvège), le lait de vache donne des laits filants riches en bactéries Lactobacillus helveticus et L. brevis et en Leuconostocs. Autre exemple, après acidification par cette flore, la coagulation traditionnelle est faite par une enzyme végétale issue d'une plante carnivore des zones humides et froides, la grassette (Pinguiculla vulgaris) qui porte aussi le nom de « caille ». Avec ce cocktail, on fabrique le yaourt du nom de tâttmjôlk qui signifie « lait de grassette ».

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Littérature :


Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) associe la grassette à trois autres plantes :

7 juillet

(Tincave)


Éclair d'orage pourpre

Sur le troupeau des laîches

Orchis à larges feuilles


Enfer d'enzymes

Pour les fourmis

Grassette commune


Coton blanc qui nettoie

Les fesses de la montagne

Linaigrette


Étoile polaire

Rayons de cristal

Parnassie palustre

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