Étymologie :
URANIE, subst. fém.
Étymol. et Hist. 1810 zool. (Latreille, Considérations gén. sur l'ordre naturel des animaux, p. 356). Empr. au lat. sc. urania (1807, Fabricius ds Neave), formé prob. sur le gr. ο υ ̓ ρ α ́ ν ι ο ς « céleste ; merveilleux, prodigieux, très grand ».
Zoologie :
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Mythologie :
Selon Pierre Commelin, dans Mythologie grecque et romaine (Paris : Éditions Garnier Frères, 1960, 516 pages. Collection : “Classiques Garnier”) :
"Les Muses étaient filles de Jupiter et de Mnémosyne ou Mémoire. Au même titre que les Grâces, elles ont leur place dans l'Olympe, dans les réunions, les festins, les concerts, les réjouissances des dieux. Toutes sont jeunes, également belles, quoique différentes dans leur genre de beauté. Selon Hésiode elles sont au nombre de neuf, et, sur la Terre, comme dans l'Olympe, chacune a ses attributions, sinon distinctes, du moins déterminées : [...]
URANIE (du grec Ouranos “ ciel ”) présidait à l'Astronomie. On la représente vécue d'une robe de couleur d'azur, couronnée d'étoile, et soutenant des deux mains un globe qu'elle semble mesurer, ou bien ayant près d'elle un globe posé sur un trépied, et plusieurs instruments de mathématiques. Selon Catulle, Bacchus la rendit mère de l'Hyménée. [...]
Non seulement les Muses furent considérées comme des déesses, mais on leur prodigua tous les honneurs de la divinité. On leur offrait des sacrifices en plusieurs villes de la Grèce et de la Macédoine. Elles avaient à Athènes un magnifique autel ; à Rome elles avaient plusieurs temples. Ordinairement le temple des Muses était aussi celui des Grâces, les deux cultes étaient communs ou rarement séparés.
On ne faisait guère de festins sans les invoquer et sans les saluer la coupe en main. Mais personne ne les a tant honorées que les poètes qui ne manquent jamais de leur adresser une invocation au commencement de leurs poèmes.
Le Parnasse, l'Hélicon, le Pinde, le Piérus étaient leur demeure ordinaire. Le cheval ailé, Pégase, qui ne prête son clos et ses ailes qu'aux poètes, venait paître habituellement sur ces montagnes et aux environs. Parmi les fontaines et les fleuves, l'Hippocrène, Castalie et le Permesse leur étaient consacrés, ainsi que, parmi les arbres, le palmier et le laurier. Quand elles se promenaient en chœur, Apollon, couronné de laurier, et la lyre en main, ouvrait la marche et conduisait le cortège.
On les surnommait, à Rome, Camènes, expression qui signifie “ agréables chanteuses ”. Leur surnom de Piérides vient de ce qu'elles fréquentaient le mont Piérus en Macédoine. Mais certains poètes donnent à ce mot une autre explication.
Piérus, roi de Macédoine, disent-ils, avaient neuf filles. Toutes excellaient dans la poésie et la musique. Fières de leur talent, elles osèrent aller défier les Muses jusque sur le Parnasse. Le combat fut accepté, et les nymphes de la contrée, désignées pour arbitres, se prononcèrent pour les Muses. Indignées de ce jugement, les Piérides s'emportèrent en invectives et voulurent même frapper leurs rivales. Mais Apollon intervint, et les métamorphosa en pies. À cause de leur victoire dans ce concours, les Muses auraient pris le nom de Piérides.
Le surnom de Libéthrides, donné aussi aux Muses, leur vient soit de la fontaine Libéthra, en Magnésie, soit du mont Libéthrius, lesquels leur étaient consacrés.
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Littérature :
"C'est ainsi qu'au hasard des lectures je fis connaissance avec les uranies. Sans doute les avait-on mentionnées devant moi dans un cours, le nom ne m'était pas étranger. Mais je ne savais rien de leur robe ni de leurs habitudes. Grande comme une main d'enfant, striée de vert métallique, de noir brillant, parfois aussi de rouge orangé, avec, à l'arrière, un liséré blanc, l'uranie peut s'observer dans diverses régions du globe, du Pacifique à Madagascar, de l'Inde à l'Amazonie. L'espèce qui a retenu plus particulièrement mon attention est celle que l'on connaît sous l'appellation d'Urania ripheus, et que l'on rencontre notamment en Amérique tropicale.
Les savants qui s'y sont intéressés ont pu observer un phénomène surprenant et spectaculaire : certains jours de l'année, ces uranies se rassemblent par dizaines de milliers dans des lieux où la forêt touche à l'océan, puis elles s'envolent droit devant elles, sur des centaines de milles marins, jusqu'à ce que, ne trouvant nulle île où se poser, elles tombent d'épuisement et se noient.
Certaines femelles déposent leurs œufs dans la forêt avant la migration, ce qui assure la survie de l'espèce : mais la plupart s'envolent encore grosses, entraînant leur progéniture dans leur suicide collectif.
Le vol des uranies me fascina dès l'instant où j'eus sous les yeux le compte rendu des premières observations. Je me demandais si ce voyage vers le néant reflétait une "panne" de l'instinct de survie, un dérèglement génétique, une tragique "erreur de transmission" dans les signes codés qui semblent régir ces migrations ; on pouvait multiplier les hypothèses.
Instant béni dans l'existence d'un chercheur que celui où il se découvre une nouvelle passion. A cette étape de mon itinéraire, j'en avais besoin.
[...]
Nous avons pu formuler certaines hypothèses. Elles ont fait l'objet d'une monographie que les circonstances ne m'ont pas donné le loisir de publier et qui se trouve encore dans mes tiroirs. J'y exprime l'opinion que le comportement des uranies ne résulte pas d'une perte de l'instinct de conservation, mais, au contraire, de la survivance d'un réflexe ancestral qui conduit encore ces bestioles vers un lieu où elles se reproduisaient autrefois, peut-être une île qui aurait disparu ; ainsi, leur suicide apparent serait un acte involontaire causé par une mauvaise adaptation de l'instinct de survie à des réalités nouvelles ; ces idées avaient séduit mes étudiants, mais certains collègues s'étaient montrés sceptiques quant à la formulation."
Extrait de Le premier siècle après Béatrice , chapitre T de Amin Maalouf (1992)
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