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Doré



Étymologie :


  • DORER, verbe trans.

  • DORÉ, ÉE, part. passé, adj. et subst.

Étymol. et Hist. Ca 1130 helmes dorez (Le Couronnement de Louis, éd. E. Langlois. 276) ; xiiie s. dont se tarte voloit dorer (Du prestre qu'on porte, éd. Montaiglon et Raynaud, IV, p. 3, 69). Du b. lat. deaurare « dorer », lui-même dér. de de (préf. à valeur intensive) et du b. lat. aurare « dorer », dér. de aurum « or ».


Lire également la définition du verbe dorer pour amorcer la réflexion symbolique.




Symbolisme onirique :


Selon Georges Romey, auteur du Dictionnaire de la Symbolique, le vocabulaire fondamental des rêves, Tome 1 : couleurs, minéraux, métaux, végétaux, animaux (Albin Michel, 1995),


"Qu'il s'agisse d'une image brièvement aperçue, simple touche d'or déposée dans le rêve d'un pinceau léger, ou d'une séquence au cours de laquelle le patient s'attarde en un lieu doré, il semble que les mêmes thèmes soient repérables autour de cette couleur.

La pénétration du sens requiert un effort particulier parce que le doré se place à la frontière entre la gamme des jaunes, dont il est une des extrémités, et l'or matière, lesté des ambiguïtés qu'entraîne celui-là. Les nuances de jaune évoluent depuis la couleur acide du citron en passant par le jaune franc pour aboutir à ces jaunes miel, évocateurs de blés mûrs, que l'imaginaire qualifie volontiers de dorés. Dans l'article consacré au jaune, nous montrons que toutes ces nuances expriment la pulsion de vie, l'Amour et le besoin de rétablissement d'une relation positive à l'image maternelle. L'or matière, lui, porte la charge d'une lourde ambivalence qui en fait soit un symbole de l'intuition supérieure, soit l'indice d'une avidité de pouvoir. Il n'est pas inutile de rappeler qu'il se relie parfois à la disposition narcissique. Le doré, dans le rêve, occupe une place inconfortable entre le jaune, qu'il n'est plus tout à fait, et l'or, dont il n'a pas la consistante réalité.

Cette situation ambiguë est mise en évidence par de nombreuses séquences où le doré devient un liquide épais dans lequel le rêveur peut être appelé à se baigner ou une pâte dont il s'enduit le corps tout entier. La traduction de cette couleur dans l'imaginaire serait relativement simple si la lecture pouvait en être faite sur un vecteur conduisant du flux de vie, d'Amour, représenté par le jaune, au piège de l'attrait des possessions ou du narcissisme, voire à l'intuition inaltérable, exprimés par l'or métal. L'exploration des rêves dans lesquels apparaît le doré oblige cependant à reconnaître des axes d'interprétation qui sont spécifiques à cette couleur sans jamais être totalement étrangers aux thèmes qui précèdent !

Au praticien soucieux de ne pas s'égarer dans les méandres qui mènent du jaune vif à la dorure, nous proposerons une distinction dont l'étude d'un grand nombre de rêves nous a permis de vérifier la pertinence. Il lui suffira d'observer une démarche qui consiste à considérer, d'une part, les séquences dans lesquelles les expressions blés d'or, miel, doré, interviennent comme compléments de qualification du mot jaune et, d'autre part, celles dans lesquelles ce dernier terme n'est pas prononcé, laissant leur pleine résonance aux mots couleur d'or et doré. Dans la première situation, il suffira de se reporter aux contenus de l'article consacré au jaune. Dans le second on se référera aux présents développements.

A parcourir les scénarios où se répandent les dorures, le chercheur est amené à se demander si or ne se traduit pas par décor. Bien des phrases construites autour des mots apparence, façade, décoré, légitiment une telle interrogation. Pourtant, d'autres rêves, ou d'autres passages des mêmes scénarios, donneront au contraire l'impression qu'à travers le doré c'est le cœur de l'être qui est atteint. Des images associent le centre, l'intérieur, au doré, dans une atmosphère de ferveur joyeuse qui caractérise la connexion avec le centre du Soi. La dorure imaginée prend un sens qui s'écarte résolument de celui d'ornement que l'étymologie reconnaît au mot décor. Le doré touche au sacré, c'est-à-dire ce qui est inaccessible au profane. La couleur d'or à la fois protège et donne accès au cœur de l'être. Si la dorure, dans le quotidien, peut émettre une tonalité d'artifice, de décoration dérisoire, dans l'imaginaire elle relie l'esprit à sa dimension originelle, celle où il se confond avec la Source, avec une Totalité qui échappe à l'emprise du raisonnement.


Comment n'aurions-nous pas hésité à communiquer le sentiment qui se formait au fil de nos investigations ? Il aura fallu les résultats d'une étude comparative minutieuse du contenu des rêves pris en référence pour nous convaincre de sa probable justesse. Le doré, dans le rêve, renvoie au plus profond mystère qui défie la raison : celui de l'incarnation. L'or du rêve parle toujours peu ou prou de l'origine éthérique de la personne. Un patient engagé dans une rêverie dorée est en acte de renaissance. Il ne s'agit pas ici de ces revécus de la naissance, si nombreux dans les scénarios et dont l'action est de réduire les séquelles du traumatisme natal. Le doré parle de l'instant où l'esprit s'est fait chair, instant originel qui décide de la manifestation de la vie et prépare la propulsion d'un nouvel être dans le monde. L'or onirique est un lieu retrouvé. Tout se passe comme si le rêveur revenait en contact avec une Totalité lumineuse dont il fut séparé par l'incarnation et le développement de l'appareil cérébral. Il serait exagéré d'affirmer que tous les rêves dans lesquels apparaît le doré sont le lieu d'une telle réalisation, mais tous, pour le moins, l'amorcent.

Ainsi, la rose d'or des alchimistes, symbole du ferment de l'Œuvre et que C. G. Jung propose comme image de l'accomplissement du Soi, la rose d'or serait l'union de la rose, figuration de la psyché totale et de la couleur d'or, signe d'accès au cœur de l'être.

Quelques exemples illustreront ces thèmes à travers des images et des commentaires convaincants. Anne commence son seizième scénario par ces mots : "Je vois une maison, un vieille maison dans un parc.. devant, il y a une rose, une très belle rose rouge... cette maison, elle est ancienne, en pierre meulière, c'est une pierre dorée... oui ! C'est tout à fait la couleur vieil-or... la rose est très grande mais la maison la surplombe... elle la protège... cette maison a une forme très enveloppante... c'est une image... comment dire ?... Idéale ! Mais non ! Je sais qu'au cœur de cette maison il y a une pièce où on pratique le bouddhisme... et, das ce centre, dans ce cœur, il y a une espèce de rayonnement très très fort... il y a un parchemin qui irradie... presque comme un soleil. C'est un peu comme le noyau terrestre, le centre de la terre, le noyau chaud, mystérieux... à la surface, c'est vraiment une croûte insensible, morte ! A l'intérieur c'est tout le contraire... il faut que je régularise l’échange entre l'effervescence du noyau et la croûte !..."

Le rêve s'achèvera par une longue séquence au cours de laquelle Anne, chef d'orchestre en habit bleu et or, dirige une symphonie de liberté, dans le vent, vivant "le contraire d'une situation protégée". La maison dorée dont le centre irradie, la croûte terrestre insensible et le noyau effervescent expriment le rapport extérieur-intérieur, façade-centre, apparence-essence, qui revient dans presque toutes les séquences évoquant le doré. Le seizième rêve d'Armelle reprend les mêmes thèmes, mais ceux-là sont entremêlés avec des fantasmes de pénétration. Une combinatoire subtile superpose le désir et la crainte d'être pénétrée, aux désir et crainte de la pénétration dans l'inconscient. L'attitude de défense, qui gêne chez la rêveuse la réalisation sexuelle, alimente des résistances dans le déroulement de la cure, la proposition inverse étant naturellement plausible. Mais les images n'en sont pas moins démonstratives de la signification du doré :

"Ce sont des remparts de château fort, avec des tours... une forteresse qui protège contre l'envahisseur... c'est une façade qu'on ne peut pas pénétrer... je vois des flèches mortes qui se brisent sur la muraille et tombent... et puis les murailles s'effondrent... c'est comme si je perdais mes cheveux par exemple, comme si je me retrouvais nue, sans vêtement... comme si le vent arrachait tout ça, comme si, au-delà de l'apparence ou de la protection, il n'y avait plus rien... comme s'il y avait la façade et, après, c'est la nudité... je revois la forteresse et maintenant je vois tout ce qu'on peut voir à l'intérieur... je vois des pièces ornées et colorées en doré... c'est comme si, au-delà de l'apparence austère, c'était éclairé... je vois un lustre, avec plein d'ampoules... c'est très éclairé mais c'est comme un décor... y a pas d'âmes, y a pas d'être humain... c'est comme un lieu abandonné mais tout est en place, prêt pour être réhabité... Maintenant, je pense à la main du gynécologue qui rentre les doigts pour toucher l'utérus... je ressens cette main comme une intruse... et puis, là, j'ai l'image d'un poulet que l'on vide, une main qui pénètre et qui arrache le cœur... un bébé aussi, attrapé dans l'utérus et qu'on sort... qu'on met au jour... l'enfant qu'on met au monde..."


De la croûte terrestre morte d'Armelle aux flèches mortes brisées sur la façade du château fort d'Anne, du cœur de la maison qui irradie au centre éclairé du château, de la symphonie jouée dans le vent aux vêtements dispersés par le vent, il est aisé de montrer à quel point les thèmes se rejoignent en dépit d registres d'expression très différents. Les dernières phrases d'Armelle établiront une transition opportune vers l'évocation de la séparation du corps de la mère qui apparaît dans beaucoup de scénarios enrichis de la couleur d'or.

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Cela renvoie simultanément au jaune, par sa fonction de rétablissement d'une relation positive à l'image maternelle et à l'incarnation qui devient manifeste au moment de la naissance. Au-delà de l'évocation de l'événement natal, ce type d'image relie toujours le rêveur au besoin de se ré-enfanter lui-même, de renaître par l'illumination d'un centre retrouvé.

Les icônes, les représentations du Bouddha, les statues des églises, les tabernacles et autres objets de culte sont dorés parce que chargés du sens de la réalisation dans le sacré, dans le temple intérieur, dans le centre, dans le Soi.

Devant l'or du rêve, le praticien sera fondé à considérer que la dynamique de la cure a conduit le patient jusqu'à ces zones de l'être ou s'accomplissent des transformations que leur profondeur met hors de la capacité descriptive des mots.

La mystérieuse alchimie de l'âme ne se réduisant pas à des dosages arithmétiques, on se référera utilement aux articles : jaune, rouge et or, or métal."

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