Étymologie :
Étymol. et Hist. Ca 1180 frelun entomol. (M. de France, Fables, 65, 26 ds T.-L.). De l'a. b. frq. *hurslo, cf. m. néerl. horsel entomol. (Verdam), cf. FEW t. 16, p. 271.
Lire également la définition du nom frelon pour amorcer la réflexion symbolique.
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Zoologie :
Selon Ignace MARIÉTAN, auteur d'un article intitulé "Un nid de frelons." paru dans le Bulletin de la Murithienne, 1952, n°69, pp. 97-98 :
[…] Le Frelon (Vespa crabro) est la plus grande de nos guêpes. Les ouvrières mesurent 25 mm., les femelles, en particulier celle qui fonde la colonie, au printemps, atteint 35 mm. Il existe dans toute l'Europe, jusqu'en Laponie, en Asie et dans l'Amérique du nord. [...]
Contrairement à ce qu'on pense, les Frelons sont peu agressifs, même si on circule près de leur nid. Dans le public ils inspirent une crainte exagérée, on va répétant que trois piqûres tuent un cheval, mais on ne dit pas combien il en faut pour tuer un homme. On serait bien embarrassé pour citer des cas précis. En réalité la piqûre n'est pas si. grave qu'on le croit et doit être assez semblable à celle des guêpes ordinaires, dont le venin cause parfois un peu d'œdème et dans les cas sérieux un prurit, ou une sorte d'urticaire ; la piqûre faite directement dans une veine a peu d'effets locaux, mais des effets généraux plus marqués. C'est seulement si on a la malchance d'irriter tout un guêpier, ou chose plus fâcheuse encore, d'avaler une guêpe cachée dans des fruits, ce qui peut amener un œdème de la gorge suivi d'asphyxie, que le cas peut devenir grave.
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Symbolisme :
D'après Josèphe Jacquiot, auteur d'un article intitulé "Des traits caractéristiques de l'œuvre de Racine perceptibles dans ses devises de médailles." paru In : Cahiers de l'Association internationale des études francaises, 1979, n°31. pp. 155-167, le frelon devient l'ennemi de l'abeille :
Pour le jeton des Bâtiments du roi, il [Racine] veut donner de Louis XIV une image différente, nouvelle, libérée des contraintes. Aussi imagine-t-il de représenter une abeille sur des fleurs et des frelons qui fuient ; il compare le roi à cette abeille « qui va de fleur en fleur, dit-il, et voltige dans les jardins et chasse en même temps les frelons qui voudraient attaquer sa ruche. Ce qui convient au Roy qui s'amuse et se délasse dans ses jardins, tandis que ses ordres sont portés dans ses différentes armées, éloignent les Ennemis de nos rivages et de nos frontières ».
Ainsi, Racine sépare ici le roi de ses obligations quotidiennes, de la cour, le dépouillant de cette majesté qu'il incarne auprès de ses sujets. La devise de ce jeton rappelle le premier Racine, décrivant les charmes de la nature, mettant en compétition les papillons et les abeilles sur les herbes des prairies :
C'est là qu'en escadrons divers,
Ils répandent dedans les airs
Mille beautés nouvelles
Et que les essaims abusés
Vont chercher sous leurs ailes
Les pleurs que l'Aurore a versés.
Racine, Le Paysage de Port-Royal, Ode 6, Des Prairies.
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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :
Selon une légende des Côtes-d'Armor, « dans les temps anciens, le bon Dieu prépara au commencement de l'hiver une ruche en simple paille et y mit des abeilles. Le diable voulut faire mieux, il construisit une ruche en glace qui était toute resplendissante et il y mit des frelons qui étaient bien plus gros que les abeilles du bon Dieu. Quand arriva le printemps, la ruche en glace fondit et les frelons se répandirent partout sans ensemble [sic], tandis que les habitants de la ruche de paille prospérèrent. »
Si, à l'inverse des abeilles, le frelon est une créature qui plaît plus au diable qu'à Dieu, la légende lui attribue un grand rôle pendant le siège d'Orléans par les troupes d'Attila où l'insecte est d'ailleurs associé à un saint : il s'agit de saint Aignan, évêque de la ville, qui lança en l'air une poignée de sable de la Loire. « Les grains de sable se seraient subitement changés en frelons qui tourmentèrent à tel point l'armée de Huns qu'elle fut obligée de lever le siège ».
Trois piqûres de l'insecte entraînent la mort d'un homme, sept celle d'un cheval. Chez les Anglo-Saxons, un frelon qui pénètre dans une maison présage la venue d'un étranger.
Dans le Gard, on dit que lorsque les frelons manifestent des signes de nervosité et piquent, ils annoncent le mauvais temps.
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Mythologie :
Paul Rossi, dans un article intitulé "Apiculture et auteurs antiques." et paru dans le Bulletin de l'Académie Vétérinaire de France (1972) nous rappelle le lien mythologique qui existe entre les abeilles et les frelons :
« Parmi les Insectes, seules les Abeilles ont été faites pour l'homme. La nature est si puissante que, d'un avorton ou de l'ombre d'un animal, elle a fait une merveille incomparable. Quelle puissance musculaire, quelle force à mettre de pair avec tant d'habilité et d'industrie ! ! ! Et même, quels génies humains comparer à leur intelligence ! ! ! »
La légende nous fait comprendre l'origine de ces dons. « Filles des Frelons et du Soleil, élevées par les nymphes Phryxonides, elles devinrent les nourrices de Zeus dans une grotte de Crête. »
« Dans une grotte de Crête, elles nourrirent le Roi du Ciel. »
Par gratitude, Zeus ne pouvait que les combler, d'autant plus qu'elles nourrirent plus tard son fils MÉLITÉE. Quand entrèrent-elles dans la vie agricole du monde grec ? En Thessalie, au temps d' ARISTÉE, sur le Mont Hymette, sous le règne d'EREICHTON, en Crête à l'époque de Saturne ? Peu importe ! La priorité de l'art de les élever reviendrait à ARISTÉE, berger d'Arcadie.
Selon Marcel Meulder, auteur d'un article intitulé "Le tyran platonicien et les divinités noires" paru dans la Revue de Philosophie Ancienne, Vol. 17, N°1 (1999), pp. 43-74 :
La République met en effet en lumière, après Hérodote, la relation que le tyran entretient avec Erôs ; elle fait un grand frelon ailé (573a) du dieu de l'amour, lequel a, selon Ibycos et Euripide, un regard sombre comme la mort. Les céramistes, dès 460 av. n.è., Aristophane ensuite le représentent doté d'ailes ; de cette manière, ils le font entrer dans la catégorie des ravisseurs ailés tels que Borée, Hypnos, Thanatos, les Harpyies et le Sphinx. Platon insiste d'ailleurs sur l'aspect négatif de l'Amour, en l'inscrivant dans la lignées des désirs oisifs et gaspilleurs, puisque ceux-ci le mettent à leur tête et lui servent de maîtres de banquet. C'est donc un Amour à la mètis pervertie et semeuse de mort, qui prend la tête des désirs terribles, sauvages et ignorant toute loi ; ceux-ci l'escortent comme une garde personnelle (573e).
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Contes et légendes :
Dans la Revue des Traditions populaires, tome VII, n°11, novembre 1893, la Société des Traditions populaires (Paris) rapporte un conte ariégeois mettant en scène frelon et guêpe :
LE MARIAGE DU FRELON ET DE LA GUÊPE
Au beau temps où les bêtes parlaient, le frelon et la guêpe se marièrent. Ils n'étaient pas riches ; mais ils ne se crurent pas dispensés de faire la noce. Comment y parvenir ? Ils n'avaient absolument rien. Voilà pour eux la grande difficulté. Tandis qu'ils se préoccupaient ainsi de leur situation plus que précaire, le roitelet se présente avec un gros pain de deux onces sous l'aile.
— Ah ! maintenant nous avons du pain ! se dirent-ils tout joyeux ; qui nous donnera du vin ? »
Maitre loriot vint à passer portant une outre sur le cou.
— Ah ! maintenant, nous avons du vin ; il nous manque de la viande. »
Aussitôt arrive le corbeau avec un gigot sous le bras.
— Ah ! maintenant nous avons de la viande ; il nous faut la faire rôtir ; d'où tirerons-nous le feu ? »
Voici le grillon, vieux charbonnier, chargé d'un peu de braise.
— Ah ! mainte
La puce s'élance et fait quatre ou cinq sauts par terre ; le pou s'échappe du tamis, prend la puce par le bras, et le bal commence.
— Le complément naturel de la danse est la musique, se dirent nos deux époux, où trouverons-nous des musiciens ? »
Le rat vient au plus vite avec un tambour sous le bras. Malheureusement il fait trop de tapage ; le chat l'entend, le guette, l'attrape et le mange. La noce commencée par le comique finit par le tragique.
MARTIAL SÉRÉ.
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Dans la Revue des Traditions populaires, tome XVI, n°06, juin 1901, la Société des Traditions populaires (Paris) rapporte la légende des frelons de Saint-Aignan :
LES FRELONS DE SAINT AIGNAN
On sait que saint Aignan, évêque d'Orléans, est regardé comme ayant sauvé par ses prières, cette ville assiégée par Attila, que le secours inespéré d'Aétius obligea de s'éloigner avec ses barbares. D'après une légende que tout le monde connaît encore à Orléans, saint Aignan aurait pris à poignée le sable de la Loire et l'aurait jeté en l'air où les grains de sable se seraient subitement changés en frêlons qui tourmentèrent à tel point l'armée des Huns qu'elle fut obligée de lever le siège.
(Recueilli personnellement à Orléans, vers 1872)
Dans la même Revue, tome XXIV n°4-5, avril-mai 1909 :
MILLE CONTRE UN CONTE DES ENVIRONS DE DIXMONT (Yonne)
Jean Coydon revenait belliqueux et plein de gloire des guerres de la Révolution et de l'Empire. En s'approchant de son village, il s'attaqua à une grosse fourmilière et la hacha à coups de sabre en criant : Mille contre un, mille contre un.
Les pauvres fourmis ne pouvaient se défendre et il démolit entièrement la fourmilière.
Tout fier de son succès, il avisa un énorme pommier dont le tronc creux renfermait un -nid de grosses guêpes frelons et, poussant son cri de guerre : Mille contre un ! il attaqua à grands coups de sabre l'arbre ; mais les frelons se défendirent bravement et mirent en fuite l'audacieux, qui rentra piqué et meurtri, vaincu et tout honteux à son village, l'oreille bien basse, ayant oublié son premier chant de victoire contre les malheureuses fourmis incapables de se défendre.
HlPPOLYTE MARLOT
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Dans Le Courrier picard du 1er mai 2020, le picardisant Jacques Dulphy vous raconte des légendes sur les animaux de Picardie :
Ceux-là n’étaient pas exotiques, mais picards, et tout aussi diaboliques que ceux qui nous effraient depuis peu chaque nouvel été. La légende du « miracle de Foigny » est ancienne, puisqu’on la situe au XIIe siècle, lors de la consécration de l’abbaye de Foigny par ses deux fondateurs : Barthélémy de Jur, évêque de Laon, et Bernard de Clairvaux. Foigny est aujourd’hui un hameau de Thiérache, dans l’Aisne, dépendant de la commune de La Bouteille, qui tire son nom d’une ancienne verrerie. Mais de la riche abbaye cistercienne il ne reste rien, sinon quelques ruines… Et les frelons n’y sont pour rien non plus : incendiée en 1542, reconstruite en 1736 puis pillée à la Révolution, elle compta pourtant à ses plus belles heures cent moines et 200 frères convers.
L'essaim du Diable
Ainsi, quand on consacra le chœur de l’église abbatiale en 1124, et alors que l’évêque s’apprêtait à procéder à l’Élévation, un nuage de frelons envahit l’édifice, empli d’une foule immense de seigneurs, de moines et de paysans. L’essaim prodigieux - le Diable sans doute - après avoir épouvanté les fidèles, s’élança soudain comme une seule bête noire et bourdonnante vers le chœur et le maître-autel, semblant vouloir assaillir l’officiant. Bernard, qui n’était pas encore le saint qu’il devint, se leva, écarta les bras et prononça cette sentence : « Insectes venimeux, je vous excommunie ! ». Alors le nuage de frelons s’arrêta dans sa course volante et chut comme une pluie noire sur le pavement et les marches du chœur. La foule alors cria au miracle, la messe fut menée à son terme et jamais plus on ne revit à Foigny, tant que l’abbaye y était encore, ni frelons, ni guêpes… ni Diable.
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