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La Langue-de-bœuf



Étymologie :


  • LANGUE-DE-BŒUF, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1. Ca 1240 lange de boef « buglosse » (Roger de Salerne, Chirurgia, 267r ds Z. fr. Spr. Lit. t. 86, p. 246) ; xiiie s. langue de buef (Livre des simples médecines, éd. P. Dorveaux, § 186) ; 2. 1441 langue de bœuf « arme de guerre (au Moyen Âge) » (Arch. JJ 176, pièce 15 ds Gdf.) ; 3. 1676 « outil de maçon » (Félibien, 629) ; 4. 1790 (J.-J. Paulet, Traité des champignons, I, 528a ds R. Ling. rom., t. 42, p. 451). Composé de langue*, de la prép. de* et de bœuf*; le terme de bot. est peut-être la trad. du nom lat. de cette plante : lingua bubula, que l'on trouve également attesté en b. lat. sous les noms de lingua bouina et lingua bouis (cf. André Bot.).


Lire également la définition du nom pour amorcer la réflexion symbolique.


Autres noms : Fistulina hepatica - Bolet hépatique - Bolet foie - Fistuline buglossoïde - Fistuline hépatique - Foie-de-bœuf - Glu de chêne - Glu de Chine - Glu des chênes - Hypodris - Langue de châtaignier - Langue de chêne - Lenga de boù - Lenga de roure - Lengo-de-biou -

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Mycologie :


Louis Fabre, auteur de Les champignons comestibles du canton de Neuchatel et les espèces vénéneuses avec lesquelles ils pourraient être confondus. (Imprimerie de C. Leidecker, 1861) propose une description et une illustration intéressantes :


FISTULINA HEPATICA Fries. - Langue de bœuf - Langue de chêne - Foie de bœuf


Caractères. Il est quelquefois dépourvu de pédicule ; sa substance est charnue et juteuse. Chapeau entier, couleur de sang, avec des tubes jaunes fort courts.


Description. Caractères. Il est quelquefois dépourvu de pédicule ; sa substance est charnue et juteuse. Chapeau entier, couleur de sang, avec des tubes jaunes fort courts. Le pédicule est latéral, raboteux, un peu tordu, long de 2 à 4 pouces ou plus, large de 1 à 3 pouces ; il manque souvent ; il est rougeâtre ou couleur de chair, et ordinairement couvert de tubes tombants ; sa consistance est coriace et sa substance fibreuse. Le chapeau est plat ou faiblement voûté, large de 6 à 12 pouces, pourpré, un peu brillant et gluant, assez semblable à un morceau de viande crue et couvert de très petites verrues jaunes et étoilées, plus ou moins serrées ; il est aussi coriace et fibreux. Les tubes sont libres, quoique liés à la chair du chapeau ; chaque petit tube est cylindrique et de couleur jaune-pâle. -La chair est rouge, veinée de blanc, et a la plus grande analogie avec la langue de bœuf fumée, au dehors comme au dedans. -Sa forme est variable ; tantôt il est allongé, tantôt il se présente comme un demi-cercle, sans pédicule. Quand il est frais, son odeur rappelle celle des fruits.

On le trouve à la fin de l'été et en automne, dans les forêts de chênes, sur les troncs malades ou en décomposition. Je l'ai cueilli plusieurs fois au-dessus de Neuchâtel et à Jolimont. On n'est pas exposé à le confondre avec d'autres espèces, aucun champignon ne ressemble à celui- ci.

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Dans son Atlas des champignons comestibles et vénéneux de la France et des pays circonvoisins. (Doin Éditeurs, 1888) Charles Richon nous propose une description de la Langue-de-bœuf :


Chapeau latéral, plus ou moins aplati, à contour irrégulier, squameux-verruqueux, d'un rouge sanguin plus ou moins foncé, visqueux, sessile ou stipité ; stipe, dans ce cas, de longueur variable, latéral, fortement plissé, aminci vers la base, de la couleur du chapeau ; hyménium d'abord ponctué, blanchâtre, puis à la maturité constitué par des petits tubes cylindriques, libres, séparés, d'abord clos, puis s'ouvrant à l'air par une sorte de péristome en forme de rosette, et prenant alors une teinte ferrugineuse rougeâtre ; spores d'un blanc jaunâtre, presque sphériques, apiculées. Propagation par cellules conidiales se développant à la surface du réceptacle, parfois en si grande abondance que le développement du chapeau ou tout au moins de l'hyménium est arrêté (M. de Seynes). l

Chair molle d'un rouge sanguin, parcourue par des zones fibreuses concentriques plus foncées.

Odeur nulle, saveur acidulée.

Automne. Sur les troncs de chênes, de châtaigniers, etc.

Espèce comestible, crue ou cuite, peu estimée.


 

Selon le site http://permaforet.blogspot.fr/ :


"La langue de bœuf est un champignon saprophyte qui pousse sur les arbres blessés ou morts, notamment les vieux chênes et les châtaigniers, qui appartiennent à la même famille des fagacées. On le trouve aussi à même les souches. La fistuline se consomme crue ou cuite. Crue, elle a l'allure et le goût de la viande rouge. D'ailleurs quand on le coupe, le champignon saigne, comme du sang; il exsude un liquide rouge sang, d'où son nom "fistuline hépatique". Le champignon peut être finement tranché comme un carpaccio ou haché menu comme un tartare avec du citron, des oignons, de la câpre, des cornichons et du persil. La fistuline a déjà une note salé, donc vous pouvez la consommer telle qu'elle ou avec du sel en plus, à votre guise.

Cuite, elle ressemble à du foie, ou à du bœuf, comme un steak haché. Pour être agréable, il est important de choisir des exemplaires jeunes et de retirer la pellicule visqueuse, voir de faire rendre le jus rouge acide avant de le faire cuire."

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Usages traditionnels :


Louis Fabre, auteur de Les champignons comestibles du canton de Neuchatel et les espèces vénéneuses avec lesquelles ils pourraient être confondus. (Imprimerie de C. Leidecker, 1861) rapporte les recettes suivantes :


Pour le préparer, on le coupe par tranches sans le cuire, et on en fait une salade avec des herbes. - On l'apprête aussi comme le Bolet. Lorsqu'on le coupe, il laisse échapper un suc rouge assez abondant.

 

Charles Richon, auteur d'un Atlas des champignons comestibles et vénéneux de la France et des pays circonvoisins. (Doin Éditeurs, 1888) rend compte d'usages de nos ancêtres :


Micheli a fait connaitre que ce Champignon était assez recherché en Italie, puisqu'il se vendait sur les marchés de Florence. Il en a donné le premier une figure que nous reproduisons ici. D'après Roques, ce Champignon doit être mis au nombre des espèces alimentaires les plus utiles. C'est beaucoup dire. Il ajoute, du reste, qu'on recherche de préférence les individus qui ne sont pas trop développés , comme plus tendres et d'une digestion plus facile. C'est, en effet, à cet état seulement qu'il nous a paru avoir des qualités alimentaires. Vittadini est , du reste, de cette opinion. D'après lui , les individus trop âgés seraient indigestes, et l'on ne doit recueillir pour la consommation que les individus jeunes ou peu développés. Cordier dit que la Fistuline fournit un aliment agréable ; qu'on préfère, pour l'usage, les individus qui ne sont pas trop avancés, et qu'un seul suffit quelquefois à faire un repas. M. Quélet déclare qu'on en fait, à l'état cru, une salade plus originale que succulente, et que ce Champignon est à peine mangeable étant cuit. Nous avouons être nous-même de cet avis, mais nous devons reconnaître que certaines personnes très compétentes, notamment M. de Seynes, ne partagent pas cette opinion.

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Adrien Bolay, auteur d'un article intitulé "Les champignons et l'alimentation humaine." (In : Bulletin du Cercle vaudois de botanique., 1967, vol. 12, pp. 47-53), retrace l'histoire de l'usage alimentaire des champignons :


Les champignons comestibles semblent avoir été de tous temps consommés par l'homme, mais nous n'avons que peu d'indications en ce qui concerne l'époque préhistorique. D'après Muller-Beck (1961), cité par Heim (1963), des restes de champignons ayant servi à l'alimentaton humaine ont étér retrouvés dasn des stations lacustres suisses. Ces restes prouvent que les Bolets, la Fistuline hépatique étaient déjà consommés au Néolithique.

Par analogie avec les populations primitives actuelles d'Afrique, d'Océanie et d'Amérique du sud, qui, d'après Heim (1963), consomment beaucoup de champignons, on peut admettre queles peuplades préhistoriques devaient également compléter leur nourriture tirée du produit de la pêche et de la chasse, par la cueillette des baies, de rainces et de champignons (Leroi-Gourhan, 1955).

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D'après Jean-Baptiste de Panafieu, auteur de Champignons (collection Terra curiosa, Éditions Plume de carottes, 2013), "faute de gui ou de houx, on pouvait à partir de la fistuline produire de la glu, dite glu de chêne.


Un champignon très animal : La langue-de-bœuf pousse à la base des arbres, surtout les chênes. Son mycélium envahit peu à peu son hôte sans provoquer de gros dégâts tant que celui-ci n'est pas trop affaibli. On confond parfois cette espèce avec les autres gros champignons qui parasite les arbres mais elle se distingue par une caractéristique importante : contrairement aux autres, elle est comestible ! Revêtue d'une cuticule rouge rosé, elle a l'apparence d'un morceau de foie. Vue de dessous, la présence des tubes évoque plutôt la langue de bœuf. Et quand on la coupe, sa chair marbrée fait penser à de la viande. Tout cela explique les différents surnoms à base de langue ou de foie dont on a affublé ce champignon très animal. Les Anglais nommait la fistuline champignon-bifteck.


Repas pour pauvres : Du fait de son apparence carnée, on recommandait parfois d'en faire du bouillon, comme avec de la viande. Mais comme souvent; les apparences sont trompeuses ! Selon Bulliard, "lorsqu'on le mâche, on croiroit avoir à la bouche de la betterave cuite, il a un goût vineux et un peu acide, il n'a pas d'odeur déterminée, il se fond en une eau rougeâtre et se corrompt en très peu de temps." Sa chair est effectivement légèrement acidulée, surtout lorsqu'elle est consommée crue, en salade, marinée dans une vinaigrette. Soucieux de la situation des paysans qu'ils côtoyaient souvent, les mycologues recommandaient sa consommation : "Par son volume et sa saveur agréable, ce champignon doit être mis au nombre des espèces alimentaires les plus utiles. Un seul individu peut fournir amplement de quoi faire un bon repas." Un auteur anglais affirmait même en avoir trouvé un qui pesait 15 kilos. Cependant, trop vieux, il n'est plus comestible, car sa chair durcit et devient âcre.


Langue en saumure : Les médecins, qui le nommaient hypodris, le recommandaient pour soulager les crises de goutte, selon la prescription du médecin allemand Reiner Solenander en 1596 : "Je le coupe en petites tranches que je mets dans un pot de terre avec du sel, faisant une couche de sel et une couche de petites tranches. Je mets le tout dans une cave, où il se dissout et se change en saumure, et je frotte les parties malades avec cette saumure." On lui reconnaît aujourd'hui une activité antibactérienne et antitumorale. Une technique de culture de son mycélium a été mise au point au Japon, dans le but d'en tirer une substance active. Une autre technique, brevetée aux États-Unis en 1997, permet d'obtenir le champignon lui-même, mais il lui faut cinquante jours pour atteindre une taille convenable pour la cuisine. Compte tenu du faible intérêt que suscite généralement cette espèce, cela explique peut-être pourquoi on n'en trouve toujours pas sur les marchés !"

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Symbolisme :


Jean-Baptiste de Panafieu, auteur de Champignons (collection Terra curiosa, Éditions Plume de carottes, 2013), rapporte que :


"Par sa forme et sa couleur, il ressemble tant à une langue, qu'à l'époque des arbres enchantés, on ne se serait avisé sous aucun prétexte de le couper pour le manger ou le faire confire, de peur que le chevalier auquel il avait appartenu ne vinsse plus tard le réclamer"

(David Badham, 1847).

 

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Littérature :


Dans La Grande Maison (Éditions Pré aux clercs, 1988) Jean Cau évoque rapidement la fistuline :


- Il achète la maison ?

- Je me demande d'où il sort, ce type. Il sait tout, tout ! Fistuline ! C'est comestible !

- Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que tu racontes ?

- Je raconte que la fistuline, c'est ce champignon rouge qui ressemble à un foie de bœuf et qui s'accroche aux chênes. Ça t'en bouche un coin, hein ? Ça s'appelle fistuline et c'est comestible. Il me l'a dit et j'ai bien l'honneur de te l'apprendre.

- Il est spécialiste des champignons ? Hagard, le notaire se tait. L'épouse, inquiète, le regarde. Enfin un filet de voix coule de ses lèvres. « Et pardon ! Ne pas confondre la fistuline et le polypore... »

- Il achète la maison ?

- C'est coriace le polypore. Pas comestible.

- Je te demande s'il achète la maison.

Avant de répondre, il pose une main sur sa poitrine et écoute battre son cœur de martyr.

- Oui, il m'a demandé de préparer les actes avec lui. Je vais passer des heures d'enfer.

Huit jours plus tard, Romain signait.

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