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La Buse

Photo du rédacteur: AnneAnne

Dernière mise à jour : 9 janv.



Étymologie :


  • BUSE, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1. 1460 « oiseau du genre rapace » (Meschinot, Lunettes, sign. F VI ro, éd. 1493 dans Gdf. Compl.) ; 2. 1545 fig. et fam. « personne sotte » (Jean Godard, Les Desguisez, scène III dans Anc. Théâtre françois, t. 7, p. 413). Dér. régr. de l'a. fr. buison, buson (xiiie s., R. de Blois, Œuvres, III, 34, 1158 dans T.-L.), issu du lat. buteo, -onis.


  • Voir aussi la définition détaillée du nom "buse" qui propose quelques éléments de symbolisme.

Autres noms : Buteo buteo - Buse variable -

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Zoologie :


Colette Méchin, autrice de "Les garçons et la buse dans l'espace rural traditionnel lorrain". (In : Anthropozoologica (Paris), 2014, vol. 49, no 1, pp. 135-144) rend compte de la vision de la buse en pays messin :



De la buse et de ses méfaits… Dans les campagnes françaises (et encore aujourd’hui), la buse a mauvaise réputation. Les larges cercles qu’elle décrit en planant en fait le rapace diurne le plus connu par tous. De ce fait on lui attribue systématiquement toutes les rapines visant les poussins de la basse-cour. Le faucon émerillon (Falco colombarius L.) et l’épervier (Accipiter nisus L.) par exemple, bien que familiers de ces régions, passent inaperçus ou plus prosaïquement sont confondus dans un désignatif commun (cf. infra).

Les naturalistes ont de longue date pris la défense de l’animal. Ainsi Alfred Edmund Brehm, naturaliste allemand raconte :

« Le directeur du Musée d’un petit état allemand a annoncé au monde scientifique, que, dans le seul printemps de 1854, il a tué chaque jour quatorze ou quinze buses, et que dans les environs, on a, à la même époque, tiré quatre cents de ces oiseaux de proie. Un tel méfait est sans excuses, surtout de la part d’un homme qui s’est fait connaître comme naturaliste, et qui ne peut alléguer d’avoir péché par ignorance. Qu’un paysan, qui vient d’apprendre à manier le fusil, tue une buse, croyant abattre un vautour, on peut, sinon l’excuser, le comprendre du moins ; mais qu’un homme, qui, par sa position officielle, doit avoir lu au moins un traité d’histoire naturelle, se rende coupable d’un pareil méfait, c’est une chose à flétrir énergiquement. Après les oiseaux de proie nocturnes et la crécerelle, la buse est le plus utile de tous nos rapaces, un des animaux qui rendent à l’homme le plus de services. » (1885).

De même le grand vulgarisateur que fut Jacques-Henri Fabre, dans un ouvrage pédagogique qui met en scène Louis et l’oncle Paul, explique : «  A côté de l’éloge, ne dissimulons pas le blâme. Je sais que la buse ne se gêne pas, quand une belle occasion se présente, pour achever un levraut blessé ; je sais aussi qu’en temps de neige, pressée par la faim, elle enlève le petit poulet qui s’émancipe hors de la basse-cour. Mais que sont ces rares larcins en comparaison des milliers de rongeurs de toute espèce dont elle purge nos champs ?  » (1873).

Dresser le bilan globalement positif de l’oiseau par les savants n’entame en rien les préjugés tenaces. Repérable par son vol spectaculaire, l’oiseau est aussi très visible lorsque, installé sur une branche ou un piquet, il guette des heures durant une possible proie. Ces techniques de chasse antithétiques et spectaculaires (immobilisme à terre, vol planant en altitude) le désignent alors comme à la fois voleur et idiot : « Cet oiseau est stupide et paresseux ; il ne quitte point nos forêts, où il reste quelquefois une journée entière perché sur le même arbre. Mais c’est assez vous entretenir d’un oiseau dont le nom se donne aux enfants qui ne possèdent aucune bonne qualité. Vous savez qu’on dit du petit Justin, qui a l’air si bête, que c’est une buse. » (Anonyme 1817).

Mais le principal défaut de cet auxiliaire de haut mérite, grand mangeur de mulots et de campagnols, grand destructeur de taupes et autres vipères c’est qu’il n’a jamais été élu oiseau de fauconnerie : « Parmi les rapaces diurnes de l’avifaune européenne, seul un nombre restreint a été utilisé pour la chasse au vol. […] Certains types de rapaces étaient inutiles à la chasse parce que totalement ou partiellement charognards, comme les vautours ou les milans. […] La distinction entre les rapaces affaitables [susceptibles d’apprivoisement] et les autres, fonction d’une optique utilitaire, a donné lieu à une hiérarchie culturelle très particulière, où buses, busards, milans et rapaces nocturnes sont devenus des oiseaux dépréciés et ridicules comme il a été démontré pour le milan, l’escoufle des textes en ancien français » (Van den Abeele 1994).

Dans le système classificatoire mis en place par l’aristocratie, l’incapacité de l’oiseau à apprendre la chasse au vol ne peut que renforcer le délit de « stupidité » dénoncé par les observations populaires.

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Croyances populaires :


Selon Jean Baucomont, auteur d'un article intitulé "Les formulettes d'incantation enfantine", paru dans la revue Arts et traditions populaires, 13e Année, No. 3/4 (Juillet-Décembre 1965), pp. 243-255 :

La tradition orale se perpétue dans le folklore de la vie enfantine. […] Une des catégories les plus curieuses de ces formulettes est celle des formulettes d'incantation.

L'incantation, nous disent les dictionnaires, signifie étymologiquement : un enchantement produit par l'emploi de paroles magiques pour opérer un charme, un sortilège. Le recours à l'incantation postule une attitude mentale inspirée par l'antique croyance au pouvoir du verbe, proféré dans certaines circonstances.

[…]

« L'incantation, dit Bergson, participe à la fois du commandement et de la prière. » On constate effectivement, que la plupart des formulettes d'incantation comportent à la fois une invocation propitiatoire : promesse d'offrande en cas de succès et une menace de sacrifice expiatoire, d'immolation en cas d'échec. Ce qui est proprement le caractère de l'opération magique traditionnelle.

[…]

Se dit à la buse qui menace les volailles de la basse-cour :

Buse buse barbaroux

Ta maison qui brûle

Tes petits sont dedans.

(Dauphiné).

 

Abel Pasquier, dans un article intitulé "Interprétation symbolique d'un conte mosi (A Symbolic Interpretation of a Mosi Folk-Tale)". (In : Cahiers d'études africaines, 1975, pp. 669-698) relève certaines croyances africaines :


Lorsque une buse s'empare d'une poule dans la cour de celui qui est sur le point de recevoir un hôte, c'est un bon présage ; l'hôte sera heureux de l'accueil qui lui sera réservé et toutes les affaires traitées avec lui seront bénéfiques. Si la buse ne s'empare pas de la poule, c'est un mauvais présage ; mieux vaut prendre garde à cet hôte.

[...]

Certains traits de la buse nous paraissent plus significatifs et, en premier lieu, sa force. A nyôkda kêkê, dit-on d'une buse ; « elle serre très fort sa proie et ne la lâche pas ». Plusieurs proverbes soulignent cette particularité : « La buse mange ce qu'elle obtient par la force, le panamtugri (sorte d'aigle qui mange les animaux mourants ou faciles à attraper) mange ce que Dieu lui donne ». « Le milan sans force, s'il enlève un poussin, fait honte à la buse. » « Une seule buse ne craindra pas cent tourterelles ».

Sa force évoque celle de l'éclair, du tonnerre qui frappe et tue ; on reste dans le contexte de notre conte, celui des Nyonyosé, maîtres des éléments déchaînés.

Sa vue perçante est aussi un trait caractéristique de ce chasseur : « Une buse pondu un œuf », dit le proverbe ; « le poussin veut que les petits à éclore soient aveugles ; mais la buse a refusé et fait éclore des enfants au regard clairvoyant ».

Un conte relatif à l'aveugle nous oriente dans la même direction : on y voit la buse frapper le visage de l'aveugle pour lui rendre la vue.

Pauvre singe monté dans l'arbre pour voir ! Il est comme l'aveugle de la fable soumis à l'attaque fulgurante de la buse.

La couleur de la buse : Wibga yâ pugsri. « La buse est grise », dit-on. Mais la plupart du temps on ne la distingue pas. Gris clair et blanc, c'est tout un, comme la buse et les excréments prélevés sur le tas de cendres. Une autre version de notre conte munit la buse de lait et non plus d'excréments. Nous sommes, semble-t-il, dans le symbolisme du blanc. Le blanc est la couleur des morts ordinaires. Les kiimse (mânes des ancêtres) apparaissent toujours en blanc ; on habille le mort de blanc ; c'est la couleur du deuil.

Toujours perchée sur du bois sec, la buse est peu rassurante dans son aspect extérieur ; certains animaux blancs inspirent la même peur. Un mouton totalement blanc ne peut pas être tué par importe qui. Une chèvre dont la gueule est blanche et le reste du corps noir porte malheur. On affirme aussi que le blanc chasse les kinkirsi.

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Symbolisme :


Pour Ted Andrews, auteur de l'ouvrage intitulé Le Langage secret des animaux, pouvoirs magiques et spirituels des créatures des plus petites aux plus grandes (Édition originale, 1993 ; traduction française : Éditions Dervy, 2017), la Buse correspond aux caractéristiques suivantes :


Points clés : Pouvoir visionnaire et garde vigilante.

Cycle de puissance : Équinoxes de printemps et d'automne - nouvelle lune.


Les buses sont une des espèces d'oiseaux de proie les plus intrigantes et les plus mystiques. Ce sont les messagères, les protectrices et les visionnaires de l'air. Les buses et les chouettes ont les yeux les plus affûtés de tous les rapaces.

La taille, l'apparence et l'environnement des buses changent d'une variété à l'autre. Il en existe tant d'espèces différentes qu'il est parfois ardu de parler d'elles de manière distincte. Pour retenir les grandes divisions, il y a les buses (ou busards) des marais, les buses des forêts, les buses des mers et les buses des prairies. le milieu de vie de votre buse vous en dira beaucoup sur les modalités probables de manifestation des énergies de cette dernière dans votre existence.

Mais quand on ne peut reconnaître une espèce de buse d'une autre, on peut au moins dire que l'oiseau appartient à cette famille. Toutes les buses sont impressionnantes et exaltent l'imagination. Leur don pour la chasse, leur vue exceptionnelle, leurs vols puissant et d'autres comportements sont des symboles dynamiques.

Chez la plupart des rapaces, les couleurs des mâles et des femelles d'une même espèce sont très similaires. Mais c'est pratiquement toujours la femelle qui est la plus grande. Cette caractéristique est très liée au fait que c'est la mère qui garde le nid. De nombreuses buses s'accouplent pour la vie ; la buse à queue rousse est de celles-là. C'est souvent le nombre de saisons consacrées à élever des petits qui détermine le temps de vie des oiseaux en couple.

Un examen des espèces spécifiques de buses et de leurs comportements sera très instructif. Par exemple, le nom du balbuzard pêcheur renvoie à son alimentation principale (il en va de même en anglais où, si on le connaît sou le nom d'osprey, il est aussi appelé fish hawk, busard pécheur). Cet oiseau splendide est souvent pris pour un aigle à cause de sa tête presque totalement blanche, mais c'est bien la seule grande buse qui a le dessous du corps blanc. On trouve de très nombreux balbuzards pêcheurs dans les régions côtières, comme si ce ventre blanc reflétait l'écume blanche des eaux dans lesquelles il chasse. On peut citer d'autres exemples comme l'épervier de Cooper (Cooper's hawk), l'autour (goshawk) et l'épervier brun (sharp-skinned hawk) qui se nourrissent fréquemment d'autres oiseaux. S'il leur arrive de manger des rongeurs et autres petits mammifères du même ordre, la plupart de leurs proies ont des plumes. En quelque sorte, cela rappelle la vieille idée selon laquelle on devient ce que l'on mange.

Je n'ai pas la place ici pour évoquer toutes les caractéristiques des différentes buses, mais je vais quand même examiner une espèce plus précisément. Cette espèce, c'est la plus nombreuse en Amérique du Nord de toute la famille des buses, la buse à queue rousse. Comme on le devine, elle doit son nom à la coloration des plumes de sa queue. Mais seules les queues rousses adultes arborent cette couleur. Les jeunes de cette espèce ont les yeux plus clairs, ce qui les distingue des buses plus matures.

La queue rousse est très symbolique. Elle a des liens avec la Kundalini, le siège de la force vitale primordiale. Dans le corps humain, elle est associée au chakra racine, situé à la base de la colonne vertébrale, au niveau du coccyx ou du sacrum. Ceux qui ont une buse à queue rousse pour totem vont travailler avec la Kundalini. Cela peut aussi vouloir dire que cet oiseau ne va intervenir dans votre vie qu'après l'activation de votre Kundalini. Mais cela peut aussi signifier que les visions de l'enfance sont elles-mêmes réactivées et réalisées. Ainsi, l'oiseau peut entrer dans votre existence au moment précis où vous commencez à vous concentrer plus activement sur le but de votre âme.

La buse à queue rousse est un membre de la famille des buteo, c'est-à-dire du groupe des buses volant le plus haut (le groupe le plus important de la famille des buses, les accipitridés). L'aptitude à s'élever et à planer dans les courants aériens fait partie de ce que la buse peut vous enseigner. Si le vol plant est une caractéristique de l'espèce, le plus souvent, c'est perchée au sommet d'un arbre ou d'un pylône électrique qu'on va la voir, en train d'utiliser son regard perçant pour localiser une proie. Elle nous apprend à nous élever tout en gardant les pieds sur terre.

Les buses sont occasionnellement harcelées et attaquées par de plus petits oiseaux. C'est très significatif pour ceux d'entre vous qui l'ont pour totem. Cela indique que vous avez de grandes chances d'être attaqués par des personnes qui ne vous comprendront pas, vous ou les différentes et multiples utilisations que vous faites de votre énergie créatrice. Ces gens-là peuvent attaquer votre capacité à vous élever.

La buse à queue rousse est généralement la résidente permanente d'un territoire (même s'il peut lui arriver de migrer). Cette permanence signifie que si elle est votre totem, elle restera constamment avec vous dès qu'elle se sera montrée.

Si, en anglais, elles est improprement appelée parfois chicken hawk (littéralement « buse à poules »), la buse à queue rousse se nourrit principalement de lapins, de rongeurs et de serpents. Elle a un régime alimentaire très adaptable, ce qui lui a permis de survivre. La queue rousse a néanmoins été fréquemment accusée de tuer les poules, et pourchassée et tuée pour cela, alors qu'en réalité il s'agissait d'autres buses, telles que l'épervier de Cooper.

Il est généralement admis que la buse à queue rousse s'accouple pour la vie. Tant le mâle que la femelle s'occupent des petits. Deux ou trois œufs sont pondus au printemps. Le couple défend vigoureusement son nid contre ls intrus. Ils restent fixés sur leur territoire pendent des années. Et ils peuvent vivre jusqu'à quatorze ans dans la nature.

Ce « 14 » est signifiant. La 14e carte du Tarot est la tempérance. C'est la carte qui représente l'enseignement de manifestations supérieures du psychisme et de la vision. On peut l'utiliser dans le développement de la projection astrale - des vols hors du corps. Tout cela a encore des liens avec l'activation de vos énergies vitales (Kundalini) et l'expression la plus manifeste de celle-ci. Ce nombre est donc lié aux forces archétypales qui enseignent la beauté et l'harmonie dans la modération Il détient la clé vers de plus hauts niveaux de conscience.

S'élever vers un niveau supérieur peut entraîner un développement rapide des énergies psychiques. La buse à queue rousse nous aide à nous équilibrer et à utiliser ces sens de manière approprié. Elle nous enseigne l'équilibre nécessaire pour découvrir notre véritable but dans la vie. Si vous avez une buse à queue rousse comme totem, méditer sur la 14e carte du Tarot vous aidera à voir comment ce rapace peut vous apprendre à utiliser votre énergie créatrice pour manifester cet objectif de l'âme.

Le rouge de la queue rousse révèle qu'une plus grande intensité énergétique est à l'œuvre dans votre vie. Il montre que l'intensité des forces physiques, émotionnelles, mentales et spirituelles est renforcée. Cet oiseau est un catalyseur stimulant l'espoir et la maturation de nouvelles idées. Il traduit un besoin d'être ouvert à la nouveauté ou il vous montre des voies qui vous aideront à convaincre les tiers de s'ouvrir à la nouveauté.

Pour les Indiens pueblos, la buse à queue rousse était appelée « aigle rouge ». Ses plumes et ses énergies étaient utilisées dans les cérémonies de guérison et pour faire venir la pluie et les eaux nécessaires à la vie. Pour les Indiens ojibwés, elle représentait le commandement, la réflexion consciencieuse et la prévision de l'avenir. « La buse est semblable à Mercure, le messager des dieux. La médecine de la buse vous apprend à être observateur.... la vie vous envoie des signaux. » [ Samie Jams, Carson David, Medicine Cards, 1988]. La queue rousse peut déployer ses ailes ç une grande amplitude et elle peut vous apprendre à utiliser vos énergies créatrices de la même manière. Ainsi peut-elle développer et amplifier la vision de votre vie.

Le bec et les serres sont toujours commentés par les observateurs. Ils sont les traits les plus frappants de n'importe quelle buse, mais particulièrement de la queue rousse. C'est un oiseau intrépide capable d'attraper des serpents venimeux. Il a des écailles sur les pattes pour se protéger contre les morsures empoisonnées, et dès qu'il a attrapé le reptile, il lui coupe la tête. Au cours d'un de mes périples vers le Colorado, alors que je traversais le Kansas, j'ai eu la chance de voir une queue rousse fondre sur un serpent. En quelques secondes, il a repris son vol en me coupant la route. J'ai pu voir la tête du serpent pendouillant et ne tenant plus qu'à quelques lambeaux de chair. Cela s'est passé si vite que le temps que je comprenne ce qui s'était passé, le rapace avait déjà disparu.

En raison de la puissante énergie (la force vitale amplifiée) activée par ce totem, l'individu qui travaille avec celui-ci doit faire attention à la manière de s'exprimer et d'agir. Vous allez déployer en vous la capacité de trancher la tête de tous les « serpents » de votre vie ou de tout ce que vous percevez comme un ennemi; Vos commentaires et vos actions seront comme le bec et les serres de la buse : forts, puissants, avec une capacité de déchirer, de couper et/ou de tuer.

Le plumage de la queue rousse connaît deux phases dans l'année. Les deux sont significatives pour ceux qui l'ont pour totem. En été, il est un peu plus clair et, en hiver, plus sombre. Le clair symbolise souvent des types d'énergie plus joyeuses et plus sociables. Les phases plus sombres peuvent refléter un temps pour rester seul ou pour flamboyer si vivement et si intensément que nous pourrions nous consumer.

Le ciel est le royaume de la buse. Par son vol, il communique tant avec les humains qu'avec le Grand Esprit créateur. Il réveille notre vision et inspire notre maturation d'un but de vie créatif.

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Selon Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani :


La réputation de la buse est double et contradictoire : de bon augure dans les Ardennes pour celui, à son réveil, la voit voler - elle lui annonce en particulier une excellente journée -, elle est considérée comme un oiseau de malheur dans les Vosges, où la tuer est bénéfique car disent les habitants de cette région : "Dieu nous a fait un devoir de la détruire". Le surnom de "bon oiseau" que lui donnaient les Savoyards s'explique certainement par le fait que prononcer son nom la ferait venir, ce qu'on souhaitait éviter. En outre, dans quelques régions de France, comme la Saintonge, la fiente de buse porte malheur.

On se méfie bien sûr d'un rapace capable d'attaquer et de dévorer les poulets ; on l'en empêche grâce à une conjuration relevée dans le pays messin : "Buse, buse, fais trois fois le tour de la maison, tu auras le plus beau de mes oisons". Une légende de la même région raconte pourquoi la buse apprécie tant les volailles : "La buse étant allée porter au paradis une pétition demandant que les enfants marchent en venant au monde, le bon Dieu lui donna une lettre agréant la requête des femmes, à condition qu'elles ne coucheraient plus avec leurs maris. Elles ne voulurent pas y consentir et refusèrent de payer le messager qui ne leur avait pas apporté de bonnes nouvelles. Alors la buse leur dit qu'elle se paierait elle-même en prenant les poules et les oies".

En même temps et malgré lui, cet oiseau peut jouer un rôle protecteur : un récipient de terre contenant les petits d'une buse placé dans un colombier en éloigne tous les animaux susceptibles de s'attaquer aux oiseaux.

Si la buse est un oiseau sinistre en Angleterre, les Américains, eux, recommandent de faire un vœu en en vouant une : si elle bat des ailes, il a toutes les chances de se réaliser. De plus, elle porte chance à celui qui l'aperçoit le vendredi matin avant le petit déjeuner et annonce une visite en volant au-dessus d'une maison. Outre-Atlantique toujours, on met cependant en garde celui qui est survolé par une buse : s'il n'évite pas on regard, elle vomira sur lui.

D'un point de vue météorologique, on croit qu'elles annoncent l'orage quand, les jours d'été à tendance orageuse, elles volent groupées très haut, en criant et formant de larges cercles.

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Selon Didier Colin, Auteur du Dictionnaire des symboles, des mythes et des légendes (Larousse Livre, 2000) :


"La buse est un gros rapace au plumage brun que les hommes ont toutes les raisons d'apprécier, car il se nourrit essentiellement de rats et de mulots dont on sait qu'ils sont de vrais fléaux pour les cultures. Toutefois, certaines buses se nourrissent également de poissons, d'autres petits oiseaux et même de grenouilles.

Certaines espèces sont sédentaires, d'autres migratrices, mais toutes les femelles pondent chacune 4 à 6 œufs par an, dans un nid le plus souvent confectionné en bordure d'eaux calmes ou, en tout cas, tout près du sol. Et c'est une des causes essentielles du fait que, de nos jours, les buses sont en voie de disparition, tandis que les rongeurs prolifèrent...

Il n'est pas très agréable de s'entendre traiter de tête de buse ou de triple buse ! Cette expression est née dans l'esprit de ceux qui ont cru pouvoir comparer un homme aux idées fixes ou particulièrement têtu à la tête immobile de ce rapace lorsqu'il guette sa proie. Toutefois, comme c'est souvent le cas à propos des rapaces, il fut apprécié différemment selon les régions et les peuples. Certains ont vu en la buse un bienfaiteur, chassant les démons qui détruisaient leurs cultures, d'autres un oiseau de malheur qui n'hésitait pas à s'attaquer aux poulaillers et plus particulièrement aux poussins. Mais pour autant, ce ne fut jamais un oiseau mythique."

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D'après le site Les soins de parole :


"C’est le symbole de l'élévation spirituelle comme beaucoup de rapaces. Elle monte sur les vents ascendants… près du Soleil…

La buse représente la force discrète, la puissance magique sur les choses terrestres, le monde occulte par rapport au monde visible, et le lien qui existe entre eux. Le rapace est souvent libérateur de situations inextricables et en ce sens il est favorable malgré sa couleur sombre. Mais il invite à acquérir davantage de grandeur, et tout dépendra par conséquent de l’attitude que vous aurez dans la vie éveillée. C'est un oiseau courageux. Il peut être vu perché sur les poteaux électriques et les cimes, observant la vie avec attention et intérêt.


Son message : Se fondre avec la vie, se laisser porter par elle, au lieu de lutter contre.

Si vous avez la médecine de la buse, vous êtes un visionnaire et vous pouvez voir au-delà de la surface des choses et des situations. Vous êtes capable d'analyser l'ensemble des choses avant de prendre des décisions importantes. N'oubliez pas de mettre l'accent sur les problèmes avant d'essayer de les résoudre. Vous êtes une personne forte et courageuse. La liberté est pour vous importante afin de vous donner de l'espace relationnel.

La buse est un messager du Grand Esprit et si vous en voyez une tournoyer au dessus de vous, voyez cela comme une bénédiction du Créateur."

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Dans Rencontre avec votre animal totem (édition originale 2010, traduction française 2015), Phillip Kansa et Elke Kirchner nous proposent la fiche suivante sur la buse :


"Caractéristiques positives : Gagner une vision d'ensemble - comprendre le passé - voir clairement et interpréter le présent et l'avenir.


En quoi cet animal m'aide : La buse plane dans ta vie pour t'inciter à adopter une vision nouvelle. Où en es-tu en ce moment ? Dans quels domaines stagnes-tu ? Elle peut t'aider en te faisant survoler les choses avec elle, pour identifier ton chemin de vie. De son point de vue élevé, tu peux ainsi percevoir les liens entre le passé et le présent et reconnaître clairement comment tu peux créer ton avenir au mieux.


Comment la buse me protège : La buse t'invite à observer le passé sans le juger et à identifier les connexions avec le présent, pour que tu puisses avancer plus facilement. Elle te protège des accidents de parcours et des échecs. Invoque-la quand tu as le sentiment que les projets qui te tiennent à cœur n'avancent pas, ou quand tu ne cesses de rencontrer des obstacles sur ton parcours. Par ailleurs, il est peut-être simplement temps de regarder ta vie dans sa globalité.


Exercice pour me relier à cet animal : Choisis un endroit où tu ne seras pas dérangé. Demande à ton moi supérieur de te guider. Pense à une buse, qui plane haut dans le ciel. Tu contemples sa légèreté et sa grâce. Dans ton cœur naît le profond souhait de voler avec elle. De là-haut, tu contemples un paysage verdoyant et tu distingues chaque chose parfaitement. Tu n'as jamais vu aussi bien. Tu remarques maintenant que tu planes haut dans les airs. La buse t'a prêté son corps pour un voyage méditatif. Prie l'esprit de la buse de parcourir ton chemin de vie. Tu reconnais ainsi facilement les points importants et peux réfléchir comment avancer avec le plus d'aisance possible. Prends tout le temps nécessaire. Inspire profondément et reviens dans ton corps. Remercie la buse pour son aide."

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Symbolisme celte :

D'après Gilles Wurtz, dans Chamanisme celtique, Animaux de pouvoir sauvages et mythiques de nos terres (Éditions Véga 2014) les mots-clefs associés à la buse sont :


Le discernement - La médiation.

La buse repère ses proies à vue. Elle les guette, à l'affût sur un poste naturel d'observation ou en vol : elle plane en cercles ou bat des ailes sur place, à basse altitude ou jusqu'à plusieurs centaines de mètres de hauteur. La buse variable est le rapace le plus répandu en Europe. On lui attribue la vue la plus perçante de tous les oiseaux de proie. Elle est un oiseau migrateur partiel. Certaines buses migrent, d'autres sont sédentaires. Ces dernières sont très attachées à leur territoire. Lorsqu'un couple de buses se forme, il reste ensemble pour la vie. De même, il ne quitte pas son territoire.


Applications chamaniques celtiques de jadis : La buse était pour les Celtes le guetteur. Elle était sollicitée pour surveiller et prévenir en poussant son cri d'alerte. Les éclaireurs et les sentinelles s'alliaient à l'esprit de la buse pour bénéficier de son regard vif et perçant, auquel rien n'échappe. Attribut indispensable pour espionner les positions ou les agissements de l'adversaire. Qualité redoutable aussi pou le chasseur à l'affût ou pour le garde en poste.

Mais le regard de la buse passait aussi pur voir au-delà de la matière et déceler des phénomènes qui se produisaient dans le monde des esprits.

Elle était une messagère qui apportait des informations aux hommes capables de communiquer avec elle. Ce procédé aidait beaucoup les humains à trouver et respecter un équilibre dans leur environnement, avec les esprits de la nature avec lesquels ils partageaient leurs lieux de vie. La buse était une véritable médiatrice, porte-parole entre les hommes et les esprits de la nature. Capable de prendre de la hauteur, d'avoir une vue d'ensemble, de bien mesurer les choses, elle possédait le discernement.

Ses qualités étaient invoquées en cas de relations ou de cohabitations conflictuelles, d'individus ou de communautés.

De même, l'esprit de la buse était souvent convoqué lors de réunions ou rencontres importantes, lorsqu'on voulait s'assurer qu'aucune des parties ne mentait. La perspicacité de la buse en faisait un témoin indiscutable de la vérité. Quand deux camps ennemis négociaient des conditions de paix ou autres accords, chaque partie était accompagnée de son chaman investi de l'esprit de la buse. Tous deux étaient chargés de valider la bonne foi et l'intégrité des personnes en présence.


Applications chamaniques celtiques de nos jours : Aujourd'hui plus que jamais en ces temps difficiles pour la nature et la Terre, l'esprit de la buse est un excellent passeur entre les hommes et les esprits de la nature, un relais idéal qui nous permet de communiquer avec les esprits de la nature pour trouver des solutions, des compromis pour le bien de tous. Être à l'écoute des esprits de la nature pourrait nous aider à comprendre bon nombre de problèmes liés à notre environnement, les effets profonds de nos action sur nos lieux de vie...

De même, toute personne initiée au chamanisme celtique peut, dans sa vie privée ou professionnelle, faire appel à l'esprit de la buse lorsqu'elle a besoin de discernement, d'affiner sa vision des choses qui lui arrivent ou de prendre du recul, de la hauteur, pour avoir une meilleure vue d'ensemble et prendre les décisions les plus justes possible.

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Message reçu de l'Esprit de la Buse le 5 février 2017, lors de la cérémonie d'Imbolc à Clérieux :

"Je vous permets de développer l'acuité visuelle afin d'assurer votre survie matérielle et d'accroître votre élévation spirituelle. C'est le double mouvement du céleste au terrestre et du terrestre au céleste que ne cesse d'accomplir le Visionnaire."

 

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Contes et légendes :


Colette Méchin, autrice de "Les garçons et la buse dans l'espace rural traditionnel lorrain". (In : Anthropozoologica (Paris), 2014, vol. 49, no 1, pp. 135-144) propose une explication anthropologique d'un vieux conte messin :


CONTE ÉTIOLOGIQUE DE LA RÉGION DE METZ

Une fois réalisé le portrait de l’oiseau il est temps, comme au théâtre, de faire entrer en scène les personnages de ce « conte du pays messin » qui explique « pourquoi les enfants ne marchent pas en venant au monde » :


«  Il y avait une fois deux femmes qui se promenaient avec leurs enfants. En voilà une qui dit : je suis bien fatiguée de porter toujours comme ça mon poupon sur mon dos. Ma foi, dit l’autre femme, encore moi aussi, les enfants devraient bien marcher au venir au monde. Ecoute dit l’une, nous devrions faire une pétition au bon Dieu. Eh bien dit l’autre, je le veux bien, mais c’est que nous ne savons pas écrire – Nous irons chez le maître d’école. Les voilà parties. En arrivant elles l’ont salué comme de bien entendu et puis le maître d’école leur a demandé qu’est-ce qu’il avait pour leur service ? Elles lui ont raconté qu’elles venaient voir s’il voulait faire une pétition. Le maître d’école leur a dit qu’il le voulait bien, en payant (c’est-à-dire à condition qu’elles paieraient) mais qu’il ne voulait pas la faire chez lui parce que ses enfants avaient des oreilles et qu’il ne voulait pas qu’ils apprissent des choses de ce genre. Les voilà partis dans leur jardin dessous un arbre ; ils écrivent la pétition au bon Dieu, pour que les enfants marchent en venant au monde. La pétition faite, personne ne voulait la porter. Il y avait un halèr [buse] dessus l’arbre qu’ils étaient dessous (sous lequel ils étaient). Eh bien, dit le halèr, donnez-la moi, je l’emporterai. Les femmes bien contentes, elles lui ont donnée. Le voilà envolé. Il frappe à la porte de Saint Pierre ; il lui donne la pétition pour la donner au bon Dieu. Mais, dit Saint Pierre, le bon Dieu n’est pas à la maison. Il faut que tu attendes jusqu’à demain. Eh bien dit le halèr, je le veux bien. – Ma foi, le lendemain, Saint Pierre a donné la pétition au bon Dieu et puis il a rapporté la réponse au halèr – Le voilà revenu. Le maître d’école qui attendait, encore les femmes, les voilà qui lisent que le bon Dieu voulait bien agréer leur demande à condition qu’elles ne coucheraient plus avec leur homme. – Eh bien, dit l’une, il peut bien aller se promener. – Et moi aussi dit l’autre (sous entendu, je dis de même) ; j’aime encore mieux tenir mes enfants. Mais après le halèr voulait être payé de sa commission. Les femmes lui ont dit : va t’en, parce que tu n’as pas rapporté de bonnes nouvelles, tu n’auras rien. – « Eh bien ! mais ! dit le halèr, vous lâcherez vos poules, encore vos oies quand vous voudrez, mais vous êtes sûres que je me paierai ». Et voilà pourquoi les halèrs prennent les poussins.  » (Rolland 1877-1915, t. 2).


A première lecture ce récit révèle une préoccupation des femmes : non content de « faire » les bébés (ordre naturel), elles doivent les « finir » en leur apprenant à marcher. Mais c’est aussi un conte qui fait partie d’un corpus bien connu : celui du messager ailé chargé de porter une requête à Dieu. Dans d’autres provinces, plusieurs oiseaux, grands voyageurs et doués d’un vol spectaculaire, remplissent ce rôle : l’aigle, le faucon… (cf. Amades 1988). Le choix de la buse, en région messine, est, à l’évidence, en lien avec sa réputation d’animal prédateur du poulailler. Et le conte n’a pas besoin de mentionner l’information, tant elle est banale, à cette époque et en ces lieux. Dans la société rurale traditionnelle, ce sont les femmes qui ont l’entière responsabilité de la basse-cour. Elles mettent en place les couvées, nourrissent la volaille, vendent les œufs à leur profit, tuent une poule si nécessaire (1) et stockent les plumes pour réaliser matelas et édredon indispensables au moment de la constitution de la dot de la mariée. Dans le texte, la pétition des femmes est rédigée par l’instituteur puisqu’elles disent ne pas “savoir écrire” (probablement elles ne savent pas “bien” écrire, c’est-à-dire tourner convenablement une lettre à un personnage aussi considérable que Dieu).

Ce conte des origines se propose de répondre à deux questions : 1) pourquoi les enfants ne marchent pas à la naissance, 2) pourquoi le rapace vole les poussins. En riposte à la traitrise des femmes qui ne lui donnent rien alors, qu’après tout, il a rempli sa part du contrat, l’oiseau s’en prend, en bonne logique, à leurs “biens propres”, c’est-à-dire aux poussins. On pourrait s’arrêter là et tirer la leçon : la buse est bernée (c’est normal puisque, d’après les proverbes, les récits populaires, elle est “sotte”, cf. supra) et les méfaits qu’on lui attribue (s’emparer des poussins) trouvent une parfaite justification dans cette historiette. Mais d’autres leçons apparaissent en filigrane. L’une est, peut-on dire, donnée en mode burlesque. Pour ne plus avoir de souci à faire marcher les enfants, c’est simple, il suffit que les femmes s’abstiennent de relations sexuelles… ce qui peut aussi se dire : si vous ne faites plus l’amour, vous n’aurez pas d’enfant et donc plus la peine de leur apprendre à marcher… L’autre, plus difficile à repérer, nécessite de reprendre les différents éléments mis en place précédemment pour assembler les pièces comme dans un puzzle.

[...]

Si le lien entre le haler (martelet des enfants de chœur) et le haler (buse) n’est pas dû au hasard, je propose cet assemblage des différentes pièces exposées précédemment à titre d’hypothèse.

La buse, ambassadeur des femmes auprès de Dieu, n’est pas récompensée de ses services (pour une demande qui, à y bien regarder, aurait mis en péril les générations futures si le marché avait été accepté) ; elle se payera donc en nature en volant les poussins qui naissent aux environs de Pâques. Les jeunes garçons, portant l’objet « buse », et intervenant pendant une période religieuse de forte intensité, sont garants de la bonne marche de la société villageoise en signalant les heures essentielles. Eux sont récompensés par les femmes qui leur donnent des œufs à l’occasion de la fête de Pâques. Ils peuvent néanmoins se révéler un peu voleurs aussi lorsqu’il y a, par exemple, un des leurs caché dans la hotte, et c’est cette menace à peine voilée qui explique, pensons-nous, ces strophes énigmatiques rapportées, par chance, par Léon Zeliqzon : Entendez tous si Laon [?] est avec nous. Qu’est-ce qu’il fait ? Il mange toute notre viande. Nous allons le tuer avec notre grand couteau etc. Voici notre hypothèse : Parmi les noms attribués à l’un ou l’autre des oiseaux de proie diurnes, on trouve un « laye » qui, par dérivation peut bien être ce « laon » énigmatique qui accompagne explicitement les garçons quêteurs d’œufs. La menace que représente l’animal « qui mange toute notre viande » est maîtrisée par les jeunes gens (« nous allons le tuer »). Si notre proposition est exacte, cette formule révèle la place essentielle qu’occupe le prédateur au centre de cette constellation symbolique. D’une certaine façon, les gamins, au sortir de l’enfance, sont semblables à cet oiseau stupide et inapprivoisable, d’après les fauconniers, qu’est la buse représentant générique de toute une classe de prédateurs. Le maniement du « haler(e) », martelet cérémoniel de la Semaine Sainte, les socialise et préfigure leur entrée dans le monde des jeunes hommes qui, de douze à vingt ans environ, leur conférera certaines prérogatives au village (en particulier le droit de sonner les cloches toute la nuit la veille de la Toussaint pour commémorer les morts de la paroisse). La proximité des garçons avec la buse ne s’arrête pas là. Des données, sans grande signification a priori, prennent maintenant sens comme c’est souvent le cas avec des informations folkloriques éparses, mentionnées au hasard des trouvailles des enquêteurs. Ainsi cette imprécation utilisée en Vosges en période de Saint Nicolas (6 décembre) lorsque les mamans mettaient en garde leurs enfants turbulents par ce quatrain : « Saint Nicolas réwaude [veille sur] les enfants / Qui n’sont mi méchants [ne sont pas] / Et les peuts [méchants] garçons / sont pris du buhon [la buse] » (2).

La jeunesse en mode-buse peut alors s’énoncer ainsi : le tout jeune enfant (celui qui sait à peine marcher ?) peut être enlevé par la buse-croquemitaine ; plus tard, lorsqu’il passe au statut supérieur d’enfant de chœur, il devient lui-même buse par martelet interposé. Ainsi l’enfant (le garçon) est-il d’abord sous la menace de la buse pour être ensuite son représentant. Il est donc logique qu’en Meuse, pour “se moquer d’un adolescent qui veut faire le jeune homme” on disait en patois, selon le précieux dictionnaire de Louis Lavigne (1939) : “Ite co zous le chaffe » (il est encore sous la mue), cette fameuse cage protectrice des poussins.

La buse, comme souvent d’autres espèces animales, permet une lecture du monde dans lequel chacun trouve sa place, selon les classifications de la société particulière qui produit cette compréhension. Mais pour entrer dans cette compréhension d’une société à jamais disparue, celle des provinces françaises d’avant la Révolution industrielle, il a fallu mettre en liaison : des pratiques religieuses, des usages alimentaires, des rôles sociaux liés à une classe d’âge, des activités spécifiques dévolues aux femmes, des croyances animalières, des objets usuels, et, pour couronner le tout, un conte bon enfant qui sert de clé de voûte à cet inventaire à la Prévert.


Notes : 1) Les femmes sont rarement autorisées à tuer un animal hormis quelques exceptions. Cf. Méchin, 1991.

2) 4. Zéliqzon ajoute s.v. Buhon : « Se dit aussi d’une personne brusque, emportée »… On voit, là encore, la prégnance de l’association du prédateur et du grossier mal éduqué.

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Littérature :


Buse et zébu


Le zébu rencontre la buse

dans une soirée où l’on se croise lui crie toi mon gros pas de bise ! le zébu, déçu, boit de la Suze La buse qui n’a pas de ruse trouvant le zébu beau mais obèse Ainsi souvent une buse belle déchirant l’air de décibels jette un pauvre zébu au rebut

quand il voit la buse il la toise c’est vous la buse si je ne m’abuse sous prétexte qu’il n’est qu’un mufle mais comment, sans mufle, être un buffle ? ici finit l’histoire de ma buse et du bel zébu

Jacques Roubaud, "La buse et le zébu in Les Animaux de tout le monde,

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Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque à son tour la Buse :

27 janvier

(Saint-Genix-sur-Guiers)

Entre les peupliers du bord du Rhône, la buse au ventre de soie...

L'abdomen du rapace est un tissu de Shanghaï à reflets roux pâle. Le dessus de ses ailes est brun sombre ; le dessous s'organise en camps de lumière blanche et fauve. L'oiseau perche au sommet d'un arbre sec.

Le mystère de sa rapacité se concentre dans son bec crochu qui déchire les nuages.

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