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Photo du rédacteurAnne

La Corneille

Dernière mise à jour : 9 mars


Pour Armelle...


Étymologie :


  • CORNEILLE, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1174-87 corneille (Chr. de Troyes, Perceval, éd. W. Roach, 479). Du b. lat. *cornĭcŭla, lat. class. cornīcŭla, dér. de cornix « corneille ».


Lire aussi la définition des noms corbeau et corneille pour envisager les premières pistes symboliques.

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Expressions populaires :

Claude Duneton, dans son best-seller La Puce à l'oreille (Éditions Balland, 2001) nous éclaire sur le sens d'expressions populaires bien connues :


Il y a bâiller et bayer ! Bâiller d'ennui, ou de sommeil, avec ou sans discrétion, et bayer, de l'ancien baer, ou béer, qui est tenir la bouche ouverte, de surprise ou d'innocente attention, lequel a donné la bouche bée, la gueule béante, les badauds (par l'occitan badar), et les bégueules (bée gueule) !


Et Galopin, la bouche bée,

Qui a la gorge longue et crème

Tretout giefe en comme en la beuse


dit Le Roman du comte d'Anjou, quand le messager avale une grande « hennapée » de bon vin. Pantagruel naquit au temps d'une telle sécheresse, après trente-six mois sans pluie, que « les loups, les regnards, cerfs, sanfgliers, daims, lièvres, connilz, bellettes, foynes, blereaulx et aultres bestes, lon trouvoit par les champs mortes, la gueulle baye », dit Rabelais.

Bayer aux corneilles est donc une « manière de parler proverbiale, pour exprimer un homme oisif, et qui s'amuse à regarder niaisement toutes choses. » (Furetière). Pourquoi les corneilles ?... Parce qu'elles sont en l'air probablement, et que ça donne l'air encore moins futé… Rabelais disait aussi "bayer aux mouches", mais il disait n'importe quoi !

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Croyances populaires :


Paul Sébillot, auteur de Additions aux Coutumes, Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne (Éditeur Lafolye, janv. 1892) relève des croyances liées aux cycles de la vie humaine :


Le cri de la corneille est, comme on sait, un présage de mort ; s'il se fait entendre trois fois, c'est un homme qui mourra ; si on l'entend deux fois, ce sera une femme.

 

Selon Ignace Mariétan, auteur d'un article intitulé "Légendes et erreurs se rapportant aux animaux" paru dans le Bulletin de la Murithienne, 1940, n°58, pp. 27-62 :


Dans la région de Porrentruy si les Corneilles noires volent près d'une maison on dit que quelqu'un de la maison va mourir.

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Selon Grażyna Mosio et Beata Skoczeń-Marchewka, auteurs de l'article "La symbolique des animaux dans la culture populaire polonaise, De l’étable à la forêt" (17 Mars 2009) :


"Des propriétés toutes différentes étaient attribuées aux corbeaux et aux corneilles. On leur accordait des qualités qui les situaient à la limite de l’au-delà et du monde humain (Tomicki 1981 : 34). On disait qu’ils provenaient des échardes du bois dont le diable avait taillé le loup (Tomicki 1981 : 34). En raison de leur plumage noir, de leur rapacité, du fait qu’ils se nourrissaient de charogne, ils étaient traités comme impurs, on voyait en eux la personnification des démons, des aides des magiciens et des sorcières. “Lorsque des corneilles, des freux et des choucas se posent quelque part sur un champ et y restent assez longtemps, on dit que ce sont des diables qui se préparent à enlever un damné” (Kolberg 1962b : 145) – comme on le croyait dans la région de Lublin. Leurs nombreuses volées au coucher du soleil éveillaient la crainte. On soupçonnait que ce sont des mauvais esprits qui vont prendre une âme perdue (Kolberg 1962b : 145). En raison de leurs propriétés médiatrices ils étaient aussi utilisés dans les augures. Leurs rapports avec le monde chtonien causaient néanmoins que les informations qu’ils apportaient étaient le plus souvent mauvaises. Leur voix criarde était considérée comme un signal de malheur (Kolberg 1962a : 112). Aujourd’hui encore l’expression “ne croasse pas” signifie “ne provoque pas le malheur”. On leur imputait aussi de savoir parler d’une voix humaine, ce qu’ils utilisaient quelquefois pour transmettre aux gens des informations sur leur sort, tout particulièrement sur l’approche de la mort (Kolberg 1962a : 112). On croyait que le battement d’aile de la corneille à la fenêtre prédisait la mort d’un habitant de la maison. De même son vol trois fois répété et son croassement au-dessus de la maison étaient de mauvais signes. La présence d’un nombre impair de corneilles sur un sentier prédisait une querelle (Kowalski 1998: 261). On les pensait très utiles dans divers procédés magiques. Dans les nids de corneilles on pouvait trouver des pierres magiques, grâce auxquelles la personne qui les possédait devenait invisible (Kolberg 1962b : 141). Ces oiseaux ou des éléments de leur corps étaient aussi employés dans les pratiques thérapeutiques."

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Symbolisme :


La Corneille n’est plus que l’ombre d’elle-même. L’Ombre de la Corneille, c’est le gardien gaucher. Si vous regardez au plus profond de l’œil de la Corneille, vous découvrirez l’entrée vers le surnaturel. Ce grand oiseau noir connaît les mystères insondables de la création ; il est gardien de toutes les lois sacrées.

 

Dans le Dictionnaire des symboles (1ère édition, 1969 ; édition revue et corrigée, Robert Laffont 1982) proposé par Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, on apprend que :


"La corneille ou Bodh est, en Irlande, l'un des noms de la déesse de la guerre qui, du reste, apparaît souvent sous cette forme. Elle peut, à son gré, se transformer en de nombreux animaux et c'est ce qu'elle fait pour combattre Cuchulainn qui a repoussé ses avances. On en retrouve le nom en Gaule dans le théonyme Cathubodua, la corneille du combat.

Aspect nocturne du corbeau, elle est, en Grèce, consacrée à Athéna tandis que celui-ci l'est à Apollon.


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Selon Ted Andrews, auteur de Le Langage secret des animaux, Pouvoirs magiques et spirituels des créatures des plus petites aux plus grandes (Édition originale, 1993 ; traduction française, Éditions Dervy, 2017), la colombe répond aux caractéristiques suivantes :

Points clés : La magie secrète de la création nous appelle.

Cycle de puissance : Toute la journée, toute l'année.


Ma grand-mère m'a dit un jour que la corneille était l'oiseau le plus intelligent. Mieux encore, elle le savait et exploitait pleinement cette qualité. En réalité, elle était si maline qu'elle choisissait de rester corneille plutôt que de passer à d'autres stades d'évolution. La corneille manifeste une aptitude unique à surpasser et à duper la plupart des oiseaux, des animaux, et même parfois des humains. Elle sait parfaitement se créer une vie merveilleuse. En un sens, elle nous fait penser à un autre être qui préférait régner en enfer au lieu de servir au paradis. Les corneilles semblent avoir parfaitement intégré ce principe.

Les corneilles nous intriguent et nous agacent même. Elles et d'autres membres de leur famille comme les corbeaux sont associés à un très grand mysticisme et à une mythologie importante. A dire vrai, il existe cinq espèces de corvidés, les corneilles comme les corbeaux en faisant partie. Parce qu'ils sont donc de la même famille (la seule différence entre corneille et corbeau étant en fait la taille), il sera profitable à ceux qui ont la corneille pour totem d'étudier aussi les qualités et les aspects mystiques du corbeau.

La première caractéristique évidente de cet oiseau est sa couleur noire éclatante. Parfois, elle aura aussi des nuances de bleu foncé ou de violet sur les plumes. Le noir est la couleur de la création. Il est la matrice d'où sort ce qui est nouveau. Il est aussi la couleur de la nuit. Le noir est la couleur maternelle et c'est de la nuit noire que naît le jour. Si la corneille est un oiseau diurne, elle nous rappelle que la magie et la création sont potentiellement très actives au cours de la journée. Du fait de sa couleur, la corneille était un symbole commun de l'alchimie médiévale. Elle représentait le nigredo, l'œuvre au noir, l'état initial de la substance - informée, mais riche de potentiel.

Dans la mythologie romaine, le corbeau et la corneille étaient couramment aussi blancs que des cygnes. En réalité, un corbeau blanc veillait sur Coronis, la compagne enceinte d'Apollon à Delphes. Un jour, le corbeau s'étant montré négligeant dans sa surveillance et rapportant de mauvaise nouvelles au dieu, Apollon changea son plumage en noir.

Cette connexion avec la vigilance est encore très forte aujourd'hui. Les hordes de corneilles ont toujours des sentinelles postées autour d'elles pour monter la garde. Elles construisent leurs nids au sommet des arbres pour avoir une vue sur toute la zone dans laquelle elles vivent et se nourrissent. Il est arrivé que l'on voie des corneilles attaquer et tuer un membre de leur propre espèce. Une vieille croyance laissait entendre qu'une corneille prose à partie de cette manière était une sentinelle qui s'était montrée défaillante. Cela peut aussi être un rappel de ce qui est susceptible d'arriver si nous ne cherchons as la magie et la création chaque jour.

Cette vigilance leur permet non seulement de prévenir leurs congénères, mais aussi d'autres animaux, contre l'irruption d'intrus ou de menaces - qu'il s'agisse d'humains ou d'animaux. On a pu fréquemment les observer en train de faire du remue-ménage à l'approche de chasseurs, avertissant ainsi les cervidés et les autres oiseaux du secteur. Les corneilles identifient les dangers potentiels et elles postent toujours des guetteurs quand elles se nourrissent - moment où elles sont les plus vulnérables.

Cette aptitude à avertir est connectée à la seconde caractéristique la plus remarquable de la corneille, à savoir sa voix. La corneille appartient à la famille des oiseaux chanteurs, du fait de la structure de son larynx. Même si peu de personnes la voient comme tel, des témoignages (non prouvés) ont régulièrement prétendu qu'elle chantait d'une douce voix mélodieuse quand elle était seule.

Les corneilles ont un langage complexe. Si elles ont une gamme vocale remarquable, elles ne chantent pas réellement. Elles peuvent croasser de bien des manières différentes, chacune ayant sa propre signification. Nous pouvons tous apprendre à comprendre le langage des corneilles avec de la pratique. Si elle a une langue, elle ne s'en sert pas pour produire des sons. Pline a écrit jadis que si la langue d'une corneille était coupée, elle apprendrait à parler comme les humains. Ce n'était bien évidemment pas vrai. Tout ce qui arriverait, c'est que l'oiseau serait saigné à mort. Le croassement de la corneille doit nous rappeler que la magie et la création nous appellent quotidiennement.

Le grand-duc est probablement le plus grand ennemi de la corneille. Si un hibou pénètre dans le secteur d'une corneille, elle attaque l'intrus et le chasse. Les corvidés savent que si le rapace nocturne découvre ses nids, la nuit suivante peut amener la mort. De nombreux corbeaux et corneilles ont perdu la vie au cours de chasses nocturnes silencieuses des hiboux.

La corneille, je l'ai dit, a une grande intelligence. elle s'adapte à son environnement et mange presque tout. Cet aspect omnivore constitue d'ailleurs une part de son aptitude à la survie. Les corneilles ont un don unique pour communiquer et collaborer.

Leur vigilance et leur intelligence ont contribué à leur conférer une réputation de brigandage. Elles volent la nourriture d'autres oiseaux ou de n'importe quelle source disponible dans les parages - y compris les réserves de nourriture des humains.

Les corneilles et tous les corvidés s'imprègnent aisément de l'image de ceux qui les gardent. Ceux qui ont une corneille pour animal domestique constatent qu'elles sont très facilement éducables, avec un véritable don pour compter et développer une relation complexe avec leur propriétaire. Mais dans la nature, même si on peut les voir et les entendre constamment, elles se laissent difficilement approcher. Encore une fois, j'ai pu constater que la plupart des individus avaient très peu conscience que les corneilles reflétaient la magie nécessaire pour créer ou recréer leur vie.

Les processus de courtise et d'accouplement en disent en revanche beaucoup sur l'association de la corneille avec la magie. Le mâle s'efforce de se faire aussi beau que possible et c'est au cours de cette période que sa voix prend une tonalité chantante (l'amour fait chanter le monde entier). Le mâle et la femelle construisent leur nid ensemble. Il est positionné en hauteur pour des questions de sécurité et est tenu en grande propreté et très en ordre. Même les jeunes corneilles ne le salissent pas. Une petite méditation sur cet aspect révélera quantité d'éléments sur la santé, le logis et le respect.

De très nombreux récits mythologiques concernent les corneilles. Avoir cet oiseau pour totem peut non seulement indiquer des connexions avec des vies passées dans ces temps-là, mais cela peut aussi exprimer certaines forces archétypales avec lesquelles la corneille est susceptible de nous relier. Comme de nombreux animaux, les corneilles seraient connues pour prédire les tornades, la pluie et d'autres changements climatiques à leur façon de voler. Travailler avec les corneilles peut vous permettre de voir comment les vents vont souffler dans votre vie et comment ajuster les trajectoires de votre existence. Cela fait bien longtemps que les corneilles sont considérées comme des oiseaux magiques et mon grand-père m'a dit un jour que même la découverte d'une corneille morte était un bon présage.

J'ai parlé des corneilles et de leur lien avec la mythologie grecque et romaine, mais elles apparaissent dans bien d'autres. En Chine, on vénérait comme une divinité solaire une corneille à trois pattes. Elle était un symbole de solitude. Pour les Indiens athabaskans d'Alaska, une corneille (sous la forme d'un corbeau) fut le créateur du monde. Pour les Celtes, la corneille (ou le corbeau) était également associée avec la Création. Dans la tradition biblique, le prophète Elie fut nourri par des corbeaux et des corneilles tandis qu'il se cachait dans le désert. Et dans la tradition nordique, le dieu Odin avait deux corbeaux pour messagers.

Partout où il y a des corneilles ou des corbeaux, il y a de la magie. Ce sont des symboles de création et de force spirituelle. Ils nous rappellent de chercher des occasions de créer et manifester la magie de la vie. Ce sont des messagers nous annonçant que la création et la magie sont actives quotidiennement dans nos existences et nous sont accessibles.

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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


Cet oiseau, doté d'une longévité exceptionnelle, cinq cents ans pour les anciens Égyptiens et Grecs, huit cent soixante-quatre ans pour Hésiode, fut consacré à Athéna, déesse de la Raison, jusqu'à ce que celle-ci lui préférât la chouette : « La déesse s'était en effet entichée d'une jeune fille également aimée par Neptune ; pour la soustraire au dieu de la Mer qui la poursuivait sur la plage, Athéna le transforma en une corneille blanche afin de la garder pour toujours auprès d'elle. Mais l'ingrate corneille insulta les filles de Cécrops, chères au cœur de la déesse. Furieuse d'une telle grossièreté, Athéna ne se contenta pas d'éloigner la médisante et de teindre en noir son plumage immaculé : comme animal préféré, elle choisit la chouette ».

Dans une légende d'Ille-et-Vilaine, la corneille était également blanche à l'origine : elle devint noire à partir du moment où « envoyée par Noé pour voir si les eaux s'étaient retirées, elle se mit à croquer les morts ». Comme tous les oiseau noirs, la corneille, qui selon une croyance du Languedoc est la métamorphose d'une mauvaise religieuse morte (les mauvais prêtres deviennent eux des corbeaux), est le plus souvent funeste : en volant devant, au-dessus ou à droite d'une personne, elle lui promet le malheur. Si elle apparaît sur sa gauche, le présage est atténué mais incite tout de même la prudence. Si l'on en voit une à son lever il ne fait rien entreprendre d'important dans la journée. Les Anglo-Saxons disent, eux, que voir une corneille est signe de colère.

Son chant, depuis l'Antiquité, est également de mauvais augure. Selon une croyance bretonne, lorsque l'oiseau chante près d'une maison où se trouve un malade, elle dit : « Je t'aurai, je t'attends » ; toujours en Bretagne, entendre son cri deux fois de suite présage la mort d'une femme, trois fois celle d'un homme.

Des corneilles qui se battent annoncent la guerre, la famine en volant haut ou en criant en l'air (Normandie), des temps difficiles si elles quittent le bois où elles nichaient (l'Angleterre). Dans l'Allier, au XIXe siècle, on déconseillait de conduire les bœufs le jour de l'an à l'abreuvoir ; il suffisait qu'une seule corneille les aperçût pour entraîner une épizootie.

Aux États-Unis, où les corneilles portent également malheur, en voir une seule est au contraire l'occasion de formuler un vœu : il se réalisera si elle ne bat pas des ailes, et si elle bat des ailes, il faudra ne plus la regarder pour que le vœu devienne effectif. Dans la Beauce, si deux corneilles sont de mauvais augure, une seule est messagère de bonne fortune. Les Auvergnats la respectent et l'appellent le

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Selon les Cartes médecine, Découvrir son animal-totem (édition revue 1999, traduction française 2010) de Jamie Sams et David Carson,


"Une histoire de médecine raconte comment la Corneille est fascinée par son ombre. Elle la regarde constamment, la griffe, la gratte jusqu'à l'érafler ; l'ombre s'éveille alors, s'avive et dévore la Corneille. La Corneille n'est plus que l'ombre d'elle-même.

L'Ombre de la Corneille, c'est le gardien gaucher. Si vous regardez au plus profond de l’œil de la Corneille, vous découvrirez l'entrée vers le surnaturel. Ce grand oiseau noir connaît les mystères insondables de la création ; il est gardien de toutes les lois sacrées.


Puisque la Corneille est la gardienne des lois sacrées, elle peut se permettre de bouleverser les lois de la physique en se métamorphosant. L’art de la métamorphose est rare et unique et il a peu d’adeptes dans le monde actuel. Moins de gens encore ont maîtrisé cet art « cornélien » de la transformation ; dédoublement ou faculté d’être à deux endroits à la fois ; possibilité de se transformer physiquement et de devenir la "mouche sur le mur" afin d’observer ce qui se passe au loin, etc.

Lente Tortue désigna les Européens qui arrivèrent sur l’Île de la Tortue du nom de « gens des bateaux ». Même s’ils connaissaient l’alchimie, ces « gens des bateaux » n’avaient jamais pris conscience d’une puissance de métamorphose égale à celle des chamans qui utilisaient la médecine de la Corneille. Plusieurs « gens des bateaux » furent terrifiés par l’apparition dans leur demeure d’animaux qui semblaient venir étudier leurs mœurs. Les adeptes de la médecine de la Corneille sont passés maîtres dans l’art de l’illusion. Tous les textes sacrés sont sous la protection de la Corneille. Le Livre des Lois du Créateur (ou le Livre des sceaux) est relié avec des plumes de ce grand oiseau noir. Les plumes de la Corneille évoquent l’esprit fait chair. La Corneille est aussi la protectrice de « l’ogallah » ou des annales anciennes.

Les ceintures de la Loi sacrée (ou ceintures Wampum), perlées par les femmes autochtones bien avant que les Européens n’arrivent sur ce continent, renferment le savoir du Grand Esprit ; on les conserve dans les Loges noires, les loges des femmes. C’est la Corneille qui proclame la loi qui énonce que "les femmes mettent toute chose au monde".

On enseigne aux enfants à se comporter selon les lois d’une culture particulière. La plupart des systèmes religieux orthodoxes ont créé un code de comportements acceptables pour la conduite des choses du monde. Faites ceci, vous irez au ciel. Faites cela, vous irez en enfer. La formule du salut varie selon chaque « vraie foi ».

La loi humaine ne ressemble pas à la Loi sacrée. Plus que toute autre médecine, la Corneille perçoit l’illusion qui réside dans l’interprétation que l’humanité donne aux mondes, tant physique que spirituel. Il existe des milliards de mondes et une infinité de créatures. Le Grand Esprit les habite tous et toutes. Si une personne obéit aux lois parfaites de la Corneille, telles qu’émises par le Créateur, alors elle meurt d’une bonne mort – elle passe à l’incarnation suivante en se rappelant clairement son passé. La Corneille augure le changement ; cet oiseau noir habite le vide et n’a pas le sens du temps qui s’écoule. Les Chefs anciens nous révèlent que la Corneille voit simultanément les trois destins – le passé, le présent et l’avenir. La Corneille intègre la lumière et l’ombre ; elle voit à la fois les réalités extérieures et les réalités intérieures.

Si la Corneille s’est présentée dans votre tirage, arrêtez-vous et réfléchissez à la façon dont vous percevez les lois du Grand Esprit par rapport aux lois de l’humanité. La médecine de la Corneille est source première d’une plus haute vérité sur le bien et le mal que celle qu’indiquent les lois créées par les humains. Avec la médecine de la Corneille, vous parlez d’une voix puissante pour tenter de résoudre les questions qui vous semblent peu harmonieuses, peu équilibrées, détraquées ou injustes. Rappelez-vous que la Corneille regarde le monde d’abord d’un œil ; puis, de l’autre – en louchant. Dans la culture des Mayas, on accordait aux gens qui louchent le privilège et le devoir de scruter l’avenir. En participant à la médecine de la Corneille, vous avez donc acquis ce droit vous aussi et vous devez repousser la crainte d’être une voix dans le désert et vous permettre de « grailler » comme vous l’entendez. À mesure que vous vous laisserez guider par votre intégrité personnelle, vous cesserez de vous sentir seul au monde. Votre volonté personnelle s’affirmera et votre vérité occupera l’espace qui lui revient. Les vrais adeptes de la Corneille doivent d’abord être attentifs à leurs opinions et à leurs actions. Acceptez que vos actions appuient vos paroles, dites ce que vous pensez vraiment, prenez conscience de votre mission dans la vie et équilibrez le passé, le présent et l’avenir dans l’ici et maintenant. Transformez l’ancienne réalité en un nouvel être. Permettez-vous de bousculer les lois de la physique pour aider à transformer le monde actuel en un monde de paix.


A l’envers : Alors comme ça vous êtes un hors-la-loi ? Voilà l’un des divers messages de la Corneille à l’envers. Le rebelle qui vous habite vient de lancer le cri d’alarme et le diable est aux vaches ! Une opportune parole de sagesse : si vous avez l’intention d’écraser les pieds de quelqu’un, assurez-vous que vous avez quelque appui. Celui qui fomente la bagarre se retrouve souvent avec deux yeux au beurre noir. Quelle humiliation ! Si vous n’avez pas l’intention d’aller aussi loin, la Corneille à l’envers indique peut-être que vous « trichez » un tant soit peu sur votre régime amaigrissant ; ou que vous épiez, sans en avoir l’air, bien sûr, les voisins qui se querellent ; ou encore, que vous pensez secrètement : « Les promesses sont faites pour être brisées. » Dans chacune de ces situations, c’est vous qui êtes le grand perdant. Si vous vous leurrez à quelque niveau que ce soit, vous avez perdu contact avec la puissance de la Corneille. Pensez-y bien et vous entrerez peut-être en contact avec votre vérité intérieure.

En cherchant la vérité, vous devrez peut-être arracher certaines croyances, certaines idées périmées pour mieux vivre au rythme d’aujourd’hui. La Corneille à l’envers nous rappelle que la Loi divine ne juge pas, ni ne rejette les vérités personnelles. La Loi divine respecte l’harmonie qui découle d’un esprit serein, d’un cœur ouvert, d’une parole vraie, d’un pas léger, d’une nature qui pardonne et d’un amour qui s’étend à tous les êtres. Appréciez le passé qui vous a appris ; le présent que vous créez ; l’avenir qui vous inspire. Si vous refusez de reconnaître les transformations de votre réalité, cela entraînera des douleurs émotionnelles. Rébellion et implosion d’énergie vont de pair, et la Corneille à l’envers parle de lois défiées. La suppression brime la loi de l’expansion : ce principe s’applique à une situation, à une vieille habitude, à la personne à qui vous avez délégué votre autorité et même à vos propres peurs. Il s’agit toujours de quelque chose que vous avez créé, alors, faites appel à la Corneille et transformez cette création en une nouvelle réalité."


Mot clef : Loi.

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Selon Didier Colin, auteur du Dictionnaire des symboles, des mythes et des légendes (Larousse Livre, 2000) :


"On distingue deux types de corneilles : la noire, , la plus commune, vivant en solitaire dans les épaisses forêts, et la corneille freux, qui niche en colonie dans les campagnes boisées. Si la corneille et le corbeau - son cousin qui, comme elle, est de la famille des passereaux - présentent une ressemblance qui empêche parfois de les distinguer, on reconnaît toujours la première à son bec et son œil noirs, à sa tête ronde, à sa face entièrement recouverte de plumes, et le second à son bec et sa face blanchâtres et à son front busqué. La corneille, très sociable, s'apprivoise facilement. Elle vole à près de 500 mètres d'altitude. Elle est plutôt sédentaire.

Si, dans l'Antiquité, le corbeau fut considéré comme l'attribut d'Apollon et pour cette raison pouvait avoir des dons prophétiques, la corneille, quant à elle, était l'attribut du dieu grec Cronos (Saturne) et avait elle aussi des vertus oraculaires. C'est à tort que, parfois, elle fut assimilée à Athéna. En revanche, il est vrai qu'elle figurait une déesse guerrière redoutable dans la mythologie celtique et druidique, dont le seul chant était redouté ou mortel. Pour les Égyptiens comme pour les Grecs, là encore, elle symbolisait la longévité. Au Moyen Âge, elle devint surtout le symbole de la fidélité conjugale, du fait même qu'il est dans ses mœurs de vivre en couple. Mais en Europe, elle conserva son statut de déesse guerrière, et l'on crut pendant longtemps que le fait de voir des corneilles en grand nombre constituait un signe avant-coureur d'une guerre ou d'une destruction prochaine, quelle qu'elle soit. "

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D'après Madonna Gauding, auteure de Animaux de pouvoir, Guides, protecteurs et guérisseurs (Octopus Publishing Group 2006 ; traduction française : Éditions Véga, 2006) :


"Guide d'interprétation


En tant que symbole onirique : Adaptabilité - Illusion - Création - Espièglerie - Vérité - Sagacité - Intelligence.


En tant que gardien ou protecteur : Défend en surveillant - Assure la sécurité d'un groupe.


En tant que guérisseur : Favorise la thérapie de groupe - Soigne par la créativité.


En tant qu'oracle ou augure : Vous faites un voyage - Le danger est proche.


Mythes et contes

Pour les Amérindiens, la corneille connaît les profonds​​ mystères de la vie. Beaucoup de cultures pensent que le croassement des corneilles annoncent la tempête.


Si la corneille est votre animal de pouvoir

Jamais timide, vous êtes le premier à prendre la parole dans une réunion. Jamais malhonnête, vous pouvez être sournois et perfide. Quelque peu filou, vous donnez de fausses impressions pour désorienter les autres. Rien n'échappe à votre intelligence aiguë. Vous avez un groupe d'amis proches, en compagnie desquels vous faites des bêtises. Vous apprenez de vos explorations mutuelles, vous vous conseillez l'un l'autre quant au mariage et à la voiture à acheter. Vous êtes si proches que vous avez pratiquement un langage secret. Vous entendez la vérité derrière les mots. Au premier abord, vous intriguez les étrangers, puis les imitez en faisant parade de votre intelligence. vous aimez la divination et interprétez le Tarot ou les runes.


Demandez à la corneille de vous aider

  • à remédier à votre solitude et à vous faire plus d'amis ;

  • à découvrir que la vie est magique et riche de potentiel.

Accéder au pouvoir de la corneille en

  • fondant un club ou un groupe de soutien ;

  • créant un jeu stimulant.

La corneille est noire, ce qui symbolise le potentiel. Le noir n'est pas une couleur, plutôt une absence de couleur. Mystérieux, il suggère un sentiment de possibilité. Quels dons n'avez-vous pas encore développés ?

Élément Air."

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Pour David Carson, auteur de Communiquer avec les animaux totems, puisez dans les qualités animales une aide et une inspiration au quotidien (Watkins Publishing, 2011 ; traduction française Éditions Véga, 2011), le corbeau et la corneille appartiennent à la famille des Qualités intérieures, au même titre que le serpent, la taupe, la tortue, le faucon, le singe, le phénix, le jaguar, le chat, l'éléphant, le l'araignée, le lion, l'ours grizzly, le loup, le gorille, le crocodile, le bison et le dragon.

Qualités intérieures : Le rythme effréné du monde dans lequel nous vivons - exigences du travail, évolution technologique et pressions financières - nous fait aisément oublier notre parenté aux animaux. Il est encore plus facile de négliger notre esprit animal, personnel et intérieur, où nous pouvons puiser force, sagesse et conseils.

Il existe diverses façons de nous reconnecter à nos guides intérieurs. L'une d'elles est de fournir un effort conscient pour trouver l'animal qui compense les faiblesses que nous sentons en nous-mêmes - le lion peut par exemple nous aider à combattre notre timidité. Une autre approche consiste à identifier un ou plusieurs animaux avec lesquelles nous sentons une affinité particulière et à travailler en lien étroit avec eux sur une large gamme de problèmes et de peurs. Ce chapitre sonde des créatures susceptibles d'offrir un éclairage intérieur particulier sur notre caractère et notre psyché. [...]

"Si les humains avaient des ailes et des plumes noires, peu d'entre eux seraient assez intelligents pour être corbeaux." Voici les mots du révérend Henry Ward Beecher, réformateur social au XIXe siècle. Le corbeau et la corneille sont de puissants animaux spirituels, et vous pouvez vous considérer chanceux si l'un, ou les deux, forment votre totem.

Souvent, corbeaux et corneilles ont une belle longévité. On raconte que ces amoureux des objets brillants sont capables de voir la mort. Ces beaux oiseaux bleu-noir peuplent le monde entier ; on reconnaît un vrai corbeau à ses longues ailes noires et il partage avec la corneille un bec puissant. Habiles et rusés, il sont dotés d'extraordinaires pouvoirs psychiques ; ils sont aussi tapageurs et bruyants.

Corbeau et corneille représentent le néant cosmique, la noire vacuité de l'univers. Dans de nombreuses traditions, ces deux oiseaux s'échappèrent de ce vide pour parcourir la réalité quotidienne que nous connaissons. Laissez-les vous transporter à l'intérieur et à l'extérieur de cette matrice noire ; ils vous aideront ainsi à acquérir une plus grande conscience de cette vérité profonde sur la nature de la réalité.

Quand vous vous sentez dans l'obscurité, demandez au corbeau et à la corneille de vous envoyez un signe quant à la direction à prendre. Les peuples indigènes pensaient que les corbeaux transmettaient des messages, des signaux et parfois même des mises en garde. La corneille était vue comme un présage - sorte de message généralement de grave et dramatique augure. Dans la mythologie celtique, la grande reine guerrière Morrigan, associée à la prophétie et à la mort, apparaissait parfois sous forme de corbeau survolant le champ de bataille.

Corbeau et corneille vous guideront à travers les dédales sombres ; faites-leur confiance. Ils sont chez eux dans cette confusion qu'est la vie. Bien que voleurs et rusés de nature, ils vous enseignent le juste comportement à adopter, en délivrant indices et messages.

Si un corbeau passe au-dessus de votre tête en émettant une série de cris puissants, il convient d'en tenir compte, de vous ouvrir et d'être vigilant aux prochains signes. Certaines cultures tribales présument que ces deux oiseaux ont même apporté la vie sur Terre lorsqu'ils ont transporté les âmes humaines de l'obscurité primitive vers la lumière.

Dans diverses mythologies d'Asie et d'Afrique du Nord, le corbeau était associé au soleil ; dans certaines traditions, on croyait même qu'il habitait le soleil, illustrant ainsi sa qualité d'éclaireur, de "porteur de lumière". Certaines tribus amérindiennes affirment que depuis les entrailles d'une nuit éternelle, l'astucieuse et intrépide corneille et son cousin le corbeau ont, du bout de leurs ailes, apporté la lumière au monde.

Laissez ces mystérieux oiseaux éclairer toute situation obscure, confuse ou désespérée de votre vie. S'il s'agit de votre totem, vous communiquerez avec de puissants esprits. Ils peuvent néanmoins renfermer beaucoup de sens différents, c'est pourquoi vous devez considérer les interprétations avec soin. Par exemple, la corneille n'est pas toujours de mauvais augure : elle peut représenter l'ombre ou l'âme. Le corbeau peut aussi être malin, vous menant à la recherche d'un brillant trésor. Quel que soit le rôle que le corbeau ou la corneille joueront dans votre vie, une chose est sûre : vous serez forcément éclairé.

Mot-clé : Le vide.

Deux corneilles : Pensée et Mémoire.

Odin, chef dieu scandinave, était un guerrier assoiffé de sang qui prenait plaisir au carnage sur le champ de bataille. Il avait deux corneilles. Pensée (Huginn) et Mémoire (Muninn), une posée sur chaque épaule. Au service de ce dieu, elles volaient quotidiennement en reconnaissance au-dessus de la terre et revenaient l'informer, lui susurrant les nouvelles à l'oreille.


Pensée et Mémoire ont peut-être raconté des histories différentes, car la mémoire peut être inexacte ou limitée, ou encore déformée par des émotions fortes. Faites comme Odin lorsque vous mesurez les leçons des choses : écoutez Pensée autant que Mémoire."

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Dans l'édition revue et augmentée de Les Animaux totems dans la tradition amérindienne (Éditions Le Dauphin blanc, 2019) Aigle bleu nous transmet la médecine de la corneille :


La corneille est la gardienne de la loi divine. Elle est celle qui peut modifier les lois de la création, parce qu'elle les connaît bien.

Elle est le patron des shapeshifters (1), ceux qui peuvent modifier leur forme physique. C'est une médecine extrêmement rare qui permet à celui qui la possède de prendre une forme autre que la sienne. Il peut devenir la mouche sur le mur qui écoute tout ce qui se dit ana le camp d'à côté, le lynx qui se faufile dans la nuit pour changer de territoire, l'aigle qui vole très haut dans le ciel et voit tout le pays et ceux qui s'y déplacent, l'élan qui avance rapidement et longtemps pour fuir toute forme de danger... Extrêmement rares sont ceux qui ont cette capacité de changer de forme.

Les gens qui ont la médecine de la corneille sont nos maîtres de l'illusion, puisqu'ils ont trouvé les portes vers le surnaturel? Ils ont obtenu cette connaissance en interrogeant les lois de la création. Dès lors qu'ils les connaissent bien, ils comprennent comment ils peuvent les modifier pour qu'elles répondent à leurs désirs et à leurs besoins. Il faut comprendre ici que la loi divine, la loi sacrée, n'est pas la loi des hommes. Il faut faire la distinction pour comprendre la réalité du monde dans laquelle nous vivons.

Ainsi, la corneille est la gardienne des livres et des textes sacrés. Elle est aussi la protectrice des archives akashiques, un ogallah (terme indien), appelées le « temple de la compréhension » par le peuple cherokee. En ce lieu situé dans les mondes subtils sont écrites les histoires des nombreuses vies de tous les hommes et femmes qui ont existé et qui viendront. La corneille est aussi la protectrice des loges noires, ces loges de femmes où son enseignés les mystères féminins. a loi qui affirme que toutes choses sont nées d'une femme est représentative de la corneille.

L'apparition de la corneille est toujours signe d'un changement. On dit d'elle qu'elle voit les trois temps : passé, présent et futur.

La corneille regarde chaque chose avec un œil et ensuite avec l'autre. Une personne qui a la médecine de la corneille aura souvent un strabisme : ses yeux ne regardent pas dans la même direction. Dans les cultures autochtones souvent, les personnes qui louchaient étaient celles à qui l'on confiait le devoir et le privilège de regarder l'avenir.

Il est très important, pour les personnes qui ont lé médecine de la corneille, de toujours êtres justes dans ce qu'elles disent et ce qu'elles font, de connaître leur vérité et de toujours l'exprimer.

Ceux qui ont la médecine de la corneille et qui ne respectent pas cette loi se retrouveront facilement dans des situations dangereuses et extrêmes. Ce sont des rebelles, ceux qui ignorent la vérité, qui se permettent de tricher, qui disent que les promesses sont faites pour être brisées... Les seuls perdants dans ce genre de situations sont les tricheurs eux-mêmes. Mais, il est relativement facile pour les gens de la corneille de modifier leur réalité et de revenir à la vérité et à la voie juste et étroite.

Il n'est pas recommandé de faire appel à la médecine de la corneille, à moins que cet oiseau ne soit votre totem. sa médecine est trop puissante à gérer pour celui ou celle qui n'a qu'une compréhension sommaire des lois universelles. Il est trop facile de faire des erreurs dans ce domaine et les retours sont alors à la mesure des lois immuables de l'univers. N'oubliez pas que la corneille vous surveille toujours, avec un œil et ensuite avec l'autre ! Seuls les sages qui ont purifié leur âme et leur esprit dans l'eau pure de la compréhension peuvent sans danger faire appel à la médecine de leur corneille.


Note : 1) traduction libre de l'auteur : changeformes.

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Symbolisme celte :


Jean-Paul Persigout, auteur d'un Dictionnaire de mythologie celtique (Éditions du Rocher, 1985, 1990, 1996) propose l'article suivant :


CORNEILLE. Équivalent du Corbeau ; la déesse de la guerre, Bodb l'Irlandaise porte le nom de la Corneille ; c'est sous l'aspect de la Corneille que la Morrigane vient inciter au combat le Taureau de Cualngé ; c'est aussi sous cet aspect que Badb Catha « la Corneille de Combat » apparaît à Cuchulainn : une nuit, ce héros « sans peur » perçoit un cri si terrifiant qu' il en tombe de son lit ; il part en char en direction du Cri et voit en face de lui un autre char, « attelé à un cheval rouge qui n'a qu'une jambe et dont le timon traverse le corps jusqu'au front ». Sur le char, une Femme Rouge, aux sourcils rouges, vêtue d'un long manteau rouge ; à côté du char, un homme tenant une fourche de Noisetier et poussant une Vache appartenant à Cuchulainn ; s'ensuit une discussion violente jusqu'à ce que Cuchulainn saute sur le char rouge et que celui-ci disparaisse pour laisser place à une Corneille Noire qui le regarde fixement : c'est la Bodb (ou Badb/Bodba). D'autres déesses, telles que Modron, adoptent souvent cette apparence de Corneille, surtout lorsqu'elles veulent signifier leurs pouvoirs dans l'Autre Monde.

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Selon Sabine Heinz, auteure des Symboles des Celtes (1997, traduction française : Guy Trédaniel Éditeur, 1998),


"Dans le monde entier, les corneilles et autres oiseaux semblables (corbeaux, choucas, pie, etc.) sont porteurs de symboles. En Inde, le corbeau était le principal oiseau permettant aux âmes humaines de s'enfuir ; dans l'ouest de l'Amérique, il était, en tant que créateur du monde, l'ancêtre de différentes tribus indiennes. Les corbeaux étaient également vénérés par les Germains et les Vikings. Ces derniers en firent leurs étendards qu'ils amenèrent en Bretagne en 1787.

Chez les Celtes, les corneilles ou corbeaux (leur distinction est difficile quand il est question de symboles) sont représentés sur les pièces de monnaie, les casques et en compagnie de certaines divinités. Les femmes aux côtés desquelles elles apparaissent ont à voir avec la guerre et la mort, ou encore avec ses prophéties ; ces femmes peuvent entre autres prendre elles-mêmes la forme d'une corneille ou autre oiseau du même genre. il s'agit essentiellement de Macha, Badh et Morrigan. La corneille devient donc un oiseau de combat. Medb apparaît également sous la forme d'une corneille.

Les corbeaux jouent un rôle important dans la légende de la création de Lyon, puisque l'on dit qu'ils sont tombés du ciel. Il existe également d'autres liens entre la ville et cet oiseau. Il est probable que c'est un corbeau qui orne les pièces de monnaie de la ville et sur une coupe en argent du Ier siècle, trouvée à l'ouest de Lyon, on voit une tribu, les Brannovices, en français les "guerriers du corbeau".

On est en droit de supposer qu'à l'origine, les corbeaux et corneilles savaient faire plus que semer la zizanie et provoquer la dispute. Peut-être étaient-ils même sages et rendaient justice.

De nombreux lieux ont des noms comportant le mot corbeau et il y eut peut-être un dieu corbeau qui pourrait être Bendigeidvran, en français "le corbeau béni", frère de Branwen, en français "la corneille blanche". Ses traits belliqueux sont alors remplacés par des attributs magiques. Quand sa more approche, il prédit aux compagnons qui lui survivront les prochaines 87 années et il fait enterrer sa tête à Londres, là où, dit-on, se dresse aujourd’hui la tour au-dessus de laquelle tournoient tant de corbeaux.

La légende galloise d'Artus, Le rêve de Ronabwy, se limite au caractère belliqueux du corbeau. Elle a pour thème les corbeaux d'Owain, l'armée du général britannique qui apporte la mort :


Artus et Owain ap Urien, s'assirent pour jouer au Gwyddbwyll pendant que leurs deux armées combattaient. Au bout d'un moment, trois écuyers vinrent trouver Owain pour l'informer que les guerriers d'Artus écrasaient, torturaient et tuaient les corbeaux d'Owain. Owain demanda à Artus de rappeler ses guerriers. mais Artus ne l'entendait apparemment pas de cette façon. Ils terminèrent la partie, en commencèrent une autre et de nouveau, un écuyer vint apporter la même nouvelle. Une fois de plus, Owain pria Artus de retenir ses hommes. Mais Artus ne bougera pas. On termina de nouveau la partie, on en commença une autre. Un écuyer revint encore pour annoncer la mort de nombreux corbeaux. Owain exigea qu'Artus rappelât ses guerriers. Lorsque ce dernier, une fois de plus, fit mine de ne pas entendre et enjoignit Owain à continuer le jeu, Owain fit planter ses étendards au milieu de la plus grande mêlée. Les corbeaux d'Owain reprirent alors des forces et entreprirent de contre-attaquer. Ils arrachèrent les têtes et les yeux, les oreilles et les bras de ceux qu'ils blessaient, dépeçaient et tuaient. Un chevalier vint bientôt trouver Artus et lui annonça la mort d'un grand nombre de ses guerriers. Artus demanda à Owain de battre en retraite. Cette fois, ce fut Owain qui insista pour continuer à jouer. Le combat se poursuivit donc jusqu'à ce qu'un chevalier revienne voir Artus pour lui annoncer qu'il y avait tellement de bons fils de la Bretagne qui étaient tombés qu'il ne serait plus facile maintenant de défendre l'île. De nouveau, Artus enjoignit Owain de rappeler ses corbeaux. Mais Owain, impassible, tint à continuer la partie. On la termina donc et on commença une autre. Lorsque cette partie approcha de la fin, un chevalier revint voir Artus pour lui annoncer cette fois que tous les nobles jeunes gens de l'île avaient été tuées. Artus demanda alors une fois encore que les corbeaux d'Oxwain se retirent ; ce faisant, il écrasa les pièces en or du jeu. Alors seulement, Owain baissa les étendards et la paix fut rétablie.


Il est intéressant de voir que le conducteur de char du héros irlandais Cùchulainn, lorsqu'il se prépare au combat, se pare d'un manteau à capuche fait de plumes de corbeau.

On raconte encore aujourd'hui la légende selon laquelle Artus, métamorphosé en énorme corbeau après son assassinat dans la bataille de Camlan, plane au-dessus de la Grande-Bretagne et de la Bretagne et attend l'occasion de se présenter en souverain d'une Bretagne unie.

Dans les contes, nous retrouvons les corbeaux, mais cette fois, ils accompagnent surtout les sorcières et les magiciens.


L'aspect destructeur des corbeaux s'est perpétué dans certaines expressions galloises :

rhwng y cwn a'r brain - entre les chiens et les corbeaux = la situation empire

ym mhig y frân - dans le bec du corbeau = dans des conditions difficiles."

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D'après Jean Markale, auteur du Nouveau Dictionnaire de Mythologie celtique (Éditions Pygmalion - Gérard Watelet, 1999),


La corneille est un "oiseau symbolique et sacré dans la tradition celtique, qui se dit bobdh en gaélique, nom que porte parfois la déesse-mère aux trois visages (et aux trois noms). C'est sous forme de corneille qu'apparaissent l'irlandaise Morrigane et la bretonne Morgane la fée, lorsqu'elles volent dans les airs à la tête d'une troupe d'oiseaux."

 

Pour Thierry Jolif, auteur de B. A.-BA Mythologie celtique (Éditions Pardès, 2000),


"Ces oiseaux sont associés à la guerre, en particulier à la déesse de la guerre, la Bodb, dont le nom signifie justement "corneille". Il existe un théonyme gaulois, Cassibodua, qui signifierait "corneille de combat" et qui pourrait être l'équivalent gaulois de la Bodb, qui est parfois appelé Bodb catha, "corneille de combat".

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Dans Animaux totems celtes, Un voyage chamanique à la rencontre de votre animal allié (2002, traduction française : Éditions Vega, 2015), John Matthews nous propose la fiche suivante :


"Corneille = irlandais : feannog, fuinche ; gallois : bran, morfran ; gaélique : feannag ; langue de Cornouailles : bran ; breton : kavan.


L'histoire de la corneille et du corbeau dans les légendes et traditions celtes est à la fois complexe et fournie. Les déesses irlandaises des batailles, Morrigan et Badbh Catha se transformaient régulièrement en corneilles. Avec le corbeau, c'était leur animal fétiche. Dans la mythologie galloise, le dieu de la sagesse et de la mémoire ancestrale, Bran le Saint, était associé au corbeau (son nom signifie corbeau), et dans l'histoire de Owein et les corbeaux, qui fait partie du Mabinogion, il y a une scène célèbre où Arthur et Owein s'affrontent dans une partie d'échecs, tandis que les corbeaux d'Owein (peut-être des guerriers habillés en corbeaux) se battent avec les soldats d'Arthur. Un grand nombre de ceux-ci est tué, jusqu'à ce qu'Arthur lui-même intervienne pour mettre fin au carnage.

Dans le folklore écossais, il est dit que la corneille pousse vingt sept cris distincts (trois fois neuf), chacun d'entre eux correspondant à un événement particulier - ceci est peut-être lié à leur capacité à prédire l'avenir - et lorsque les corneilles sont en groupe (molmacha) et poussent leurs cris ensemble, il est dit que seul le plus sage des prophètes du pays est capable de les comprendre. Cela renvoie à la tradition selon laquelle les druides observaient le comportement des corneilles pour leur divination, comme dans la maladie dévorante de Cuchulainn, où le grand héros est conseillé par deux corneilles prophétiques. Dans une autre histoire, le héros d'Ulster tue un grand nombre de corneilles, après quoi il coupe la tête de la dernière et se baigne les mains dans son sang. Cela explique peut-être en partie l'animosité de Morrigan envers le héros.

Les corneilles et les corbeaux transmettent donc tous deux la connaissance - il ne s'agit cependant pas toujours de celle que l'on souhaite recevoir. En tant que compagnon dans l'Autre-Monde, la corneille possède sagesse et connaissance, même s'il lui arrive de jouer des tours. Outre ses qualités sur le champ de bataille, le corbeau était lui aussi considéré comme un oiseau oraculaire offrant des présages, et dont la réputation est également associée à la malchance. A approcher avec précaution."


Préceptes du totem :

Éclaireur : La voie est ouverte lorsque l'intention est sincère.

Protecteur : J'observe et j'attends.

Challenger : Pourquoi mets-tu ton nez là-dedans ?

Aide : Utilise ta mémoire.

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Littérature :

Dans son roman Eugénie Grandet (1834), Honoré de Balzac utilise une expression quelque peu tombée en désuétude et qu'il place dans la bouche d'un des personnages secondaires, le notaire Cruchot :


"Tu t'es bien suffisamment montré, mon neveu ; mais assez de dévouement comme ça. L'envie d'avoir la fille t'aveugle. Diable ! il n'y faut pas aller comme une corneille qui abat des noix. (1) Laisse-moi maintenant conduire la barque, aide seulement à la manœuvre. Est-ce bien ton rôle de compromettre ta dignité de magistrat dans une pareille..."


Note de l'édition Étonnants classiques de Flammarion : 1) "expression familière normalement précédée "y aller de cul et de tête", signifiant "se donner beaucoup de mouvement pour arriver à quelque chose", "s'employer à une affaire avec un zèle maladroit".

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Dans le roman policier intitulé Temps glaciaires (Éditions Flammarion, 2015) de Fred Vargas, c'est la corneille mantelée qui est convoquée :


- C'est une tour hantée. Ca servait d'oubliette pour les condamnés.

- Ah, c'est eux qui gueulent la nuit alors. On les comprend, remarque.

- Non, ce sont des corneilles mantelées.

- Tu crois ? Parce que moi, j'y suis passé devant à vélo une nuit, et ça criait pas humain je t'assure.

- C'est pas humain, le cri d'une corneille. Ca chante pas. Tu connais drôlement bien le coin, Lucio.

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