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La Pomme de terre


Étymologie :

  • POMME DE TERRE, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1. Désigne une racine tubéreuse, un tubercule comestible a) ca 1240 agn. désigne un tubercule − ou une courge ? − (Chirurgie de Roger de Salerne, éd. D.J.A. Ross, 261 ro d'apr. W. Rothwell ds Z. fr. Spr. Lit. t. 86, p. 252) ; b) 1488 [éd. 1491] désigne la racine de mandragore (La Mer des histoires, I, 110c, d'apr. H. Vaganay ds Rom. Forsch. t. 32, p. 130 : Mandragores sont pommes tres belles... Le fruict est en espece, en saveur et en odeur semblable au poupon [«melon»]. Et pource les Latins l'appellent pomme de terre) ; c) xve s. sert à traduire malum terre désignant le bulbe du cyclamen europaeum dit ,,pain de pourceau`` (Le Grand herbier, n°128, Camus ds Gdf. Compl. : Ciclamen... est autrement appelé pain a porc et malum terre ou pomme de terre) ; d) 1562 id. désignant l'artistoloche (Du Pinet, Hist. du monde de C. Pline Second, XXV, Lyon, Cl. Senneton, t. 2, p. 310 : ... l'aristolochie... Nos Latins appellent ceste herbe pomme de terre) ; e) 1655 désigne le topinambour (N. de Bonnefons, Les délices de la campagne, 2e éd., p. 111, d'apr. R. Arveiller ds Fr. mod. t. 18, 1950, p. 237 : Des taupinambous, pomme de terre), cf. Trév. 1771, qui, s.v. pomme, renvoie pour pomme de terre à topinambour ; v. aussi FEW t. 20, p. 82b ; 2. « tubercule comestible du solanum tuberosum » [1716 d'apr. Bl.-W.1-2] 1750 (E.F. Geoffroy, Matière médicale et Suite de la Matière médicale, trad. en fr. par M.*** [A. Bergier], t. 10, p. 94, d'apr. A. Tolmer ds Fr. mod. t. 14, p. 298 : Pomme de terre ou la Batate commune des jardins, Solanum tuberosum esculentum) ; 1765 (La Henriade travestie, p. 12, d'apr. Roll. Flore t. 8, p. 107) ; 1913 p. abrév., cuis. pommes [soufflées] (Colette, L'Entrave, p. 71 ds Quem. DDL t. 16). 1 est comp. de pomme* A 2 a, de de* et de terre* sur le modèle du lat. malum terrae, terme désignant le cyclamen (Pseudo-Apulée ; Oribase), l'aristoloche (Pline, 25, 95), la mandragore (Isidore ; Pseudo-Dioscoride, André Bot., p. 198) et un tubercule −ou une sorte de courge − (s.d. Collectio salernitana, II, 87 ds Nov. Gloss., s.v. malum). Étant donné que la pomme de terre, venue des Andes du Chili et du Pérou, répandue en Allemagne, via l'Espagne et l'Autriche, dep. la fin du xvie s., a pénétré en France par les régions de l'Est, il est probable que 2 s'est formé indépendamment de 1, qu'il a supplanté, comme calque du néerl. aardappel ou de l'all. dial. Erdapfel «pomme de terre», termes désignant antérieurement diverses plantes à racines tubéreuses ou à gros fruits ronds (cf. le m. néerl. erdappel «racine de mandragore», l'a. h. all. ertapfel ,,pepo, pomum in terra crescens``, erdaphel ,,terre malum`` d'apr. E. Björkman, Die Pflanzennamen der altdeutschen Glossen ds Z. für deutsche Wortforschung, t. 3, 1902, p. 285), l'all. ayant désigné le solanum tuberosum esculentum dep. le xviie s. et demeurant dans les dial. de l'Ouest et du Sud, v. Paul-Betz, s.v. Erdapfel ; Kluge 20, s.v. Kartoffel. Le sens 2 s'est généralisé dans la seconde moit. du xviiie s. avec l'action de l'agronome philanthrope A. Parmentier, qui, à partir de 1773 (Examen chimique des pommes de terre), s'efforça de répandre en France l'usage du nouveau tubercule dont il avait étudié les propriétés alimentaires durant six années passées en Allemagne. Sur l'appellation de la pomme de terre dans le domaine gallo-rom., v. ALF, carte 1057 ; Roll. Flore t. 8, pp. 106-107 ; A. Litaize ds Mél. Lanly, pp. 571-575 ; v. aussi patate et truffe (cf. m. fr. cartoufle 1600 O. de Serres, Theatre d'agriculture, Paris, Jamet-Métayer, p. 563 ; suisse alémanique Cartoffel, all. Kartoffel ; FEW t. 13, pp. 386b et 387b-388b).


Lire également la définition du nom composé pomme de terre pour amorcer la réflexion symbolique.

Autres noms : Solanum tuberosum ; Morelle tubéreuse ; Patate ; Tartoufle ; Trifola ; Truffiole ; Trufle (à cause de sa ressemblance avec la truffe).

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Botanique :


Jean-Marie Pelt, auteur de Des légumes (Librairie Arthème Fayard, 1993) nous en apprend davantage sur l'histoire de la pomme de terre et sur ses propriétés :


La pomme de terre n'est pas un légume racine, mais un légume tige, les tubercules souterrains étant des tiges modifiées. On la classera néanmoins par analogie dans la rubrique des légumes racines.

La pomme de terre est originaire de la cordillère des Andes et comme tous les légumes originaires d'Amérique, elle mit beaucoup de temps à s'imposer, surtout en France. Seul le topinambour dégorgea à la règle, puisqu'il fit dès le début du XVIIe siècle une carrière rapide et brillante. Il provenait, il est vrai, d'Amérique du Nord, région du monde d'où n'ont cessé d'essaimer tous les trucs et tous les tics de la civilisation planétaire...

L'histoire de la pomme de terre est un extraordinaire roman à épisodes où chaque avancée se trouve brusquement sanctionnée par quelque avatar imprévu. Ainsi, son installation dans les habitudes alimentaires, à la fin du XVIIIe siècle, fit reculer les famines en Europe, et pourtant, quelques décennies plus tard, c'est une maladie de la pomme de terre elle-même qui déclencha la famine en Irlande.

On discute et on dispute à l'infini sur l point de savoir si les pommes de terre proviennent toutes de l'espèce décrite par Linné sus le nom de Solanum tuberosum, ou s'il existe d'autres espèces d'origine. Ce qui paraît en revanche acquis, c'est qu'en 1532 les Espagnols la découvrent au Pérou, conquis par les conquistadores de François Pizarre. En 1533, on en trouve la première mention dans la Chronique du Pérou publiée à Séville par Pedro Cieza de Léon. Les papas - c'est le nom que les Péruviens donnaient à la pomme de terre - forment, avec le maïs, la base de leur nourriture. Les Indiens de la cordillère savaient préparer la pomme de terre pour qu'elle se conserve : comme les tubercules contiennent 75% d'eau, ils les exposaient la nuit au froid, et le jour à la chaleur torride ; au bout de quelques jours de ce traitement drastique, les pommes de terre étaient suffisamment déshydratées pour prendre l'apparence anodine de petites pierres noires de la taille d'une grosse noix, dures et légères ; pour les consommer, il suffisait de les faire retremper dans l'eau. Ce procédé avait permis aux Incas de mettre la pomme de terre en réserve et de la rendre disponible toute l'année, ce qui les autorisa à monter les expéditions nécessaires pour construire leur vaste empire. Pur autant, la pomme de terre ne détrônait pas le maïs, que les précolombiens avaient divinisé.

Les pommes de terre furent introduites vers 1535 en Espagne, d'om elles passèrent rapidement en Italie, car le royaume de Naples était encore sous mandat espagnol Un plant fut adressé au pape Pie IV à titre de panacée.

En 1586, le légat du pape en offre à Philippe de Sivry, gouverneur de Mons, lequel envoie deux ans plus tard le tubercule à Charles de Lécluse, né à Arras et intendant des jardins de l'empereur Maximilien à Vienne C'est à lui qu'on doit la première description scientifique de la pomme de terre ; elle figure dans son Histoire des plantes, parue en 1601. Si l'usage de la pomme de terre était déjà répandu en Italie dès la fin du XVIe siècle, c'est à partir des tubercules de Charles de Lécluse qu'elle se répand en Allemagne, en Autriche, en Suisse et dans l'est de la France. Mais le véritable artisan de la culture de la pomme de terre reste Frédéric le Grand, roi de Prusse, qui en avait vulgarisé l'usage (ce qui explique que Parmentier l'ait découverte en Allemagne). C'est là que prit naissance la mauvaise réputation de la pomme de terre, les Bourguignons prétendant même qu'elle rendait lépreux...

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Dans Les Langages secrets de la nature (Éditions Fayard, 1996), Jean-Marie Pelt évoque les différents modes de communication chez les animaux et chez les plantes :


C'est de l'Inde que nous vinrent les premières informations sur la sensibilité des plantes, à une époque où l'Occident considérait encore celles-ci comme des « choses » inertes, dépourvues de système nerveux, donc de toute sensibilité. Sir Jagadis Chandra Bose, soumettant des plantes de diverses espèces (navet, carotte, marronnier) à des chocs électriques, y observa des réactions analogues à celles de nos muscles. A l'aube de ce siècle, il fut ainsi le premier à entrevoir le rôle de l'électricité dans la vie des plantes, rôle que l'Occident ne redécouvrit - mais avec quelles réserves ! - que près d'un siècle plus tard.

L'histoire de la pendule et de la pomme de terre va en effet totu à fait dans ce sens : il est d'expérience courante que deux électrodes placés aux extrémités d'une pomme de terre génèrent une différence de potentiel suffisante pour faire fonctionner une montre à quartz à affichage digital. Depuis fort longtemps, cette sorte de micro-différence de potentiel a pu également être mise en évidence, en Chine notamment, entre deux parties du coprs humain. S'agirait-il là d'une loi commune à tous les êtres vivants ? Faut-il y voir le témoignage d'une éventuelle sensibilité commune ? Pour l'heure, nous n'en savons pas plus.

 

Selon Carole Faivre auteure d'un article intitulé " La pomme de terre dans les noms de préparations culinaires en France (du XVIIIe siècle à nos jours). “ paru dans l'ouvrage La Pomme de Terre : de la Renaissance au XXIe siècle, Histoire, Société, Économie, Culture (Nov 2008, TOURS, France) :


[…] « La pomme de terre eut d’avantage de mal à s’imposer en Europe, alors que cela faisait environ 2500 ans qu’elle était cultivée au Pérou, sur les hauts plateaux andins. Elle provoqua une certaine méfiance, au premier abord, due au fait qu’elle poussait à partir d’un tubercule et non d’une graine, comme toutes les autres plantes comestibles européennes de l’époque. Cependant, dès le début du XVIII siècle, la pomme de terre était devenue l’aliment de base de nombreux paysans, qui trouvaient en elle la plante idéale lorsqu’ils ne disposaient que d’une faible superficie de terre arable. Il suffisait d’un champ de quarante ares de pommes de terre pour faire vivre pendant presque toute une année une famille de cinq à six personnes, ayant en outre une vache et un cochon à nourrir. La plante s’accommodait d’une très grande variété de sol, et, pour être cultivée, n’exigeait pas d’autre instrument qu’une bêche et une pelle. Elle arrivait à maturité en trois ou quatre mois, alors qu’il fallait un peu plus de six mois de maturation pour les céréales traditionnelles et elle avait l’avantage d’être d’une grande valeur nutritive. » (Farb, Armelagos, 1980 : 78)

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Drs Mathieu Pasquier et Fabrice Dami, Pr Bertrand Yersinnous mettent en garde contre les effets dangereux de certains fruits et légumes dans un article intitulé "Fruits et légumes : peuvent-ils être dangereux ?" (paru dans la Revue Médicale Suisse, 2013 ; 9 : 1483-7) :


La patate qui monte à la tête ! La solanine est un glyco-alcaloïde (GA), une substance présente dans de nombreux légumes, dotée d’un effet protecteur contre certaines maladies causées par des champignons ou insectes. La solanine est présente dans les pommes de terre (mais également les tomates et les aubergines), principalement dans les fleurs, les feuilles, les germes et la peau, et dans une moindre mesure dans le tubercule. Certains facteurs génétiques, mais aussi les conditions de stockage, l’exposition à la lumière ou encore les meurtrissures produites pendant la récolte, peuvent augmenter significativement la teneur en solanine.1 Une amertume marquée, voire des sensations de brûlures peuvent alors faire suspecter la présence d’un taux élevé en glyco-alcaloïde, substance habituellement imperceptible par les papilles gustatives. La solanine est un inhibiteur réversible de l’acétylcholinestérase provoquant des symptômes tels que transpiration, vomissements, diarrhées, céphalées et bronchospasme. Elle présente également un effet cytotoxique sur la membrane cellulaire pouvant principalement affecter la perméabilité intestinale. Dans la plus grande série publiée d’intoxications (78 écoliers anglais), les symptômes sont apparus dans les sept à dix-neuf heures sous la forme de fièvre, céphalées et hallucinations. Dix-sept patients ont été hospitalisés, dont l’évolution a été favorable.

Les intoxications à la solanine sont relativement rares au vu de l’usage fréquent des pommes de terre et tomates dans notre alimentation. Les épidémies surviennent principalement lorsque la concentration intrinsèque de solanine augmente de manière substantielle dans les légumes vendus. Le traitement est purement symptomatique.

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Historique :


Thérèse Bouysse-Cassagne, auteure d'un article intitulé « Pomme de terre et maïs chez les Aymaras des hauts-plateaux de Bolivie », paru In : Journal d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, 29ᵉ année, bulletin n°3-4, Juillet-décembre 1982. pp. 321-330, raconte l'histoire de la culture de la pomme de terre chez les Aymaras :

[…]

Au niveau d'altitude supérieure se trouvent donc les tubercules : pomme de terre, olluco, oca. Les pommes de terre sauvages poussent jusqu'à 5 000 mètres par - 7 °C et les variétés cultivées prospèrent jusqu'à 4 000 mètres. Ces dernières constituaient la nourriture de base des Aymaras. A l'époque précolombienne c'est le temps de cuisson d'une variété de tubercules amers, les luki, qui servait d'unité de mesure du temps. Quatre cents ans après l'invasion européenne, la taxonomie aymara distinguait 220 variétés de pomme de terre. Il s'agit dans leur grande majorité de plantes de puna, résistantes au gel, mais très dépendantes de l'intervention humaine. Les variétés amères luki, les plus résistantes, ne peuvent pousser au dessous de 2 500 mètres. La propagation de ces hybrides en altitude semble indiquer que pendant une grande partie de son histoire, l'homme andin s'acharna à développer ses établissements humains sur la puna d'altitude. Et de fait, les flancs pentus des gorges plus chaudes, qui à première vue pourraient paraître plus attrayants ne peuvent vraiment être utilisés que si l'on y construit des terrasses et des canaux d'irrigation. Or, sur la puna, pas plus l'irrigation que l'engrais ne sont nécessaires. La dispersion des champs de culture s'explique en partie par le fait qu'une grande quantité de terre était nécessaire; il arrivait que l'on cultive une parcelle quatre années consécutives puis qu'on la laisse reposer 7 ou 9 ans. On considère d'ailleurs que la mesure agraire qu'est le topo de terre froide de pomme de terre doit être au moins sextuplée par rapport au topo des vallées où poussait le maïs.

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Carole Faivre dans un article intitulé " La pomme de terre dans les noms de préparations culinaires en France (du XVIIIe siècle à nos jours). “ paru dans l'ouvrage La Pomme de, Terre : de la Renaissance au XXIe siècle, Histoire, Société, Économie, Culture (Nov 2008, TOURS, France) nous rappelle les étapes de l'adoption de la pomme de terre en France :


[…] Après avoir été découverte au Pérou au début du XVIe siècle et bien que cultivée et consommée depuis longtemps en Amérique du Sud, la pomme de terre mit du temps (environ deux siècles) à être adoptée en France de manière officielle, alors qu’elle fut adoptée plus rapidement dans d’autres pays européens. Elle a d’abord été consommée par les plus pauvres, la faim venant à bout de bien des réticences, les premiers à l’inclure dans leur quotidien sont les paysans qui habitaient soit des régions frontalières ou proches de pays déjà consommateurs (Lorraine, Alsace, Dauphiné…), soit des régions pauvres et produisant peu ou prou de céréales (par exemple en Bretagne).

Elle s'est ainsi peu à peu généralisée dans certains provinces (le Lyonnais, le Vivarais, dans certaines parties des Pyrénées, des Alpes…) même si son introduction en France se déroule de manière inégale dans le temps et dans l'espace et qu'elle doive surmonter l'image peu ragoûtante d'aliments pour animaux qui l'accompagne.

Bien que dans une ultime action promotionnelle, Parmentier organise en 1785 un menu « spécial pomme de terre » à la cour et que le roi en porte la fleur à la boutonnière, il s’agit toujours d’un aliment pour les paysans . Réminiscence du principe de distinction verticale des aliments en fonction de la classe sociale du Moyen Age ? Toujours est-il que la pomme de terre ne fait pas partie de la nourriture des élites, elle n’apparaît donc pas dans les livres de recettes.

En 1705 on ne trouve pas de nom de préparation culinaire comprenant des pommes de terre dans Le cuisinier roïal et bourgeois de François Massialot. Rien non plus, un demi-siècle plus tard dans Le Cannameliste français , de Joseph Gilliers, publié à Nancy en 1768. Elle est mentionnée de manière scientifique autour de 1765 dans L’Encyclopédie et pourtant « [P]our les rédacteurs et les lecteurs de l’ Encyclopédie la pomme de terre n’est pas l’aliment-roi, associé à la disparition de la disette et dont on chante les bienfaits dans des couplets humanitaires : elle est encore nettement au-dessous du mangeable (Bonnet, 1976 : 898).

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Selon Nicolas Simon, auteur d'une thèse intitulée Le poison dans l’histoire : crimes et empoisonnements par les végétaux et soutenue à la faculté de pharmacie de Nancy, (Sciences pharmaceutiques. 2003. ffhal-01732872f) :


La Morelle tubéreuse (Solanum tuberosum L.) : La morelle tubéreuse, mieux connue sous le nom de pomme de terre, connut après son introduction en Europe des débuts difficiles, elle fut d'abord consommée avec beaucoup de précautions en raison du glucoside très actif qu'elle contenait: la solanine. Puis on s'est rendu compte que la mise en culture de cette plante permettait de diminuer nettement puis de pratiquement faire disparaître sa vénénosité, ce qui permit d'en faire le légume de base de l'alimentation humaine. Mais presque cinq siècles de culture n'ont pas aboli totalement la dangerosité de cette plante qui, dans certaines conditions, peut retrouver sa toxicité. Si on laisse trop longtemps des tubercules (c'est-à-dire la partie que l'on consomme) en plein soleil, on voit rapidement apparaître des taches de couleur verte sur celui-ci (qui signent la production de solanine) ; à l'inverse, dans un endroit humide, les bourgeons, qui étaient à peine apparents, vont donner des germes qui auront une teneur en solanine très élevée. A plusieurs reprises on a observé dans l'armée française des épidémies de diarrhées qui touchaient parfois des centaines d'hommes et que l'on attribua à la consommation de pommes de terre germées ou pourries. Ces soldats présentaient tous les signes d'un empoisonnement: diarrhée, vomissements, fièvre, dilatation des pupilles, convulsions et sueurs abondantes. De même les fanes de pomme de terre, c'est-à-dire la partie aérienne de la plante, et les baies contiennent des quantités de solanine plus ou moins grandes suivant l'année et la saison et il peut arriver que lorsque on ne trouve pas assez de fourrage pour le bétail, on donne aux animaux les fanes que l'on a coupés. Ceci est à éviter car les animaux ne sont pas moins sensibles que l'homme à la solanine. On a souvent décrit des empoisonnements de vaches qui présentaient une constipation tenace associée à une tuméfaction des paupières, à une salivation visqueuse importante et à un derme recouvert de croûtes très dures et très épaisses. L'amaigrissement est très rapide et on retrouve des excoriations purulentes, telles des aphtes, dans la bouche.

Lorsqu'on introduisit la pomme de terre en Prusse au 18ème siècle, on assista d'abord à des intoxications parce que certains consommaient les baies et non les tubercules. Ceci montre bien que l'on doit toujours se méfier des plantes, même celles dont on croit qu'elles sont parfaitement inoffensives tant on les consomme régulièrement.

Dans le même ordre d'idée, on se méfiera du fruit de la tomate (Solanum lycopersicum L.) qui ne devra jamais être consommé avant complète maturation.

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Utilisations traditionnelles :


Magdalena Koźluk, autrice de "Se nourrir et se soigner : jardin et médecine pratique aux XVIe et XVIIe siècles." (In : Seizième Siècle, N°8, 2012. Les textes scientifiques à la Renaissance. pp. 209-225 rappelle la mauvaise réputation initiale de la pomme de terre :


S’il existe un jardin « idéal » dans lequel on trouve les plantes recommandées par les régimes, il y a aussi un « jardin maudit » fait de plantes malfamées qu’il faut éviter dans son jardin comme sur la table de sa cuisine. Ce qui est intéressant dans la présentation de ces plantes, c’est la façon dont elles sont décrites, tant par les médecins que par les auteurs de manuels d’agriculture. Parfois on tente juste de prévenir le patient en signalant les effets nuisibles de la plante. [...]

Parfois aussi les médecins font preuve de méfiance ou s’opposent même à toute plante ou racine nouvelles. [...] La pomme de terre, « cette curiosité » introduite en France en 1613 », reste, tout autant dans l’opinion des agriculteurs que dans celle des médecins, le produit « le plus mauvais de tous les légumes dans l’opinion générale […] cependant le peuple, qui est la partie la plus nombreuse de l’humanité s’en nourrit ». La pomme de terre, appelée toupinambous et qualifiée de voisine du tournesol, donne ainsi « des vertiges, douleurs de teste, alteration, cruditez et vents à ceux qui en usent ». C’est pourquoi, Guy Patin déclare :


que l’on laisse cette viande barbare à ceux qui sont si fols qu’ils n’ayment que ce qui est estranger et à qui on fait passer la mer pour leur faire tourner meilleur, puisque nous avons en France d’autres racines plus saines et plus agreables.

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Symbolisme :


Louise Cortambert et Louis-Aimé. Martin, auteurs de Le langage des fleurs. (Société belge de librairie, 1842) évoquent rapidement le symbolisme de la pomme de terre :


POMME DE TERRE - BIENFAISANCE.

La Pomme de terre appartient surtout aux malheureux. Cet aliment échappe au monopole du commerce, car il ne dure qu'un an. Modeste comme la véritable charité, la Pomme de terre cache ses trésors ; elle en oblige les riches, elle en nourrit les pauvres. L'Amérique nous a fait ce doux présent, qui pour toujours a banni de l'Europe le plus affreux des fléaux, la famine.

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Selon Thérèse Bouysse-Cassagne, auteure d'un article intitulé « Pomme de terre et maïs chez les Aymaras des hauts-plateaux de Bolivie », paru In : Journal d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, (29ᵉ année, bulletin n°3-4, Juillet-décembre 1982. pp. 321-330) :

[…] Malgré toute l'importance économique des tubercules pour les habitants de la puna, malgré le fait que les rituels qui entourent cette culture soient extrêmement nombreux, aujourd'hui, on a l'impression que les chroniqueurs n'ont pas vu les cérémonies destinées à protéger les cultures de pomme de terre. Ce n'est que 1 5 ans après la conquête espagnole que nous avons la description de l'un de ces rituels. Quelle interprétation donner à cette lacune ?

Ces réticences à donner de l'information peuvent aussi être interprétées comme liées au fait que manger des pommes de terre était considéré dans l'empire inca comme un signe de basse extraction, le mendiant en haillons était un huatyacuri, c'est-à-dire « un mangeur de pommes de terre ». Il faut dire aussi que le portrait que les chroniqueurs indigènes d'autres régions nous tracent des Aymaras est généralement peu flatteur « ils ont peu de force, sont grands, gros et gras, parce qu'ils ne mangent que du chunu et boivent de la chicha de chunu ». […]


La culture de la pomme de terre était avant tout une culture de subsistance et le mais, culture de prestige, était essentiellement utilisé pour des actes d'hospitalité et à des fins cérémonielles. […]


Ainsi, au sein de la dialectique puna-vallée un renversement de tendance se produit sous l'empire inca. Alors qu'avec les chefferies aymaras, le pouvoir était situé en haut, à l'étage des tubercules, et établissait son contrôle sur les vallées au moyen de petites colonies périphériques, dont la production demeurait à l'intérieur de la chefferie, avec l'Etat inca, les déplacements massifs de population du haut vers le bas, le développement considérable des cultures dans les vallées, notamment de la culture de mais, permet d'accroître le potentiel de réserves d'une manière tout à fait nouvelle. La création de ce surplus garantit le maintien et la gestion de nouvelles classes sociales; bureaucratie et armée, dépendantes du pouvoir central. On voit donc à quel point l'extension des cultures de maïs permet au pouvoir central de s'affirmer. Enfin c'est le calendrier du maïs qui deviendra calendrier officiel de l'empire même si dans la puna les travaux et les jours des Aymaras vaincus continuent à être régis par le rythme alterné des tubercules et des Chénopodiacés.

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Pour Scott Cunningham, auteur de L'Encyclopédie des herbes magiques (1ère édition, 1985 ; adaptation de l'américain par Michel Echelberger, Éditions Sand, 1987), la Pomme de terre (Solanum tuberosum) a les caractéristiques suivantes :


Genre : Féminin

Planète : Lune

Élément : Terre

Pouvoirs : Envoûtements ; Maléfices.


Utilisation magique : Les Pommes de terre ont énormément servi à fabriquer des poupées d'envoûtement.

Les sorciers du marais charentais affirment qu'on peut crever les yeux d'un ennemi en plantant des hameçons dans les « yeux » d'une Pomme de terre.

Si une femme enceinte veut que son enfant ait une petite tête, elle ne doit pas manger de ces légumes tant que dure sa grossesse, et surtout pas au repas du soir (Wallonie).

Dans le nord de l'Allemagne, les paysans avaient créé un Kartoffeldemon (démon des Pommes de terre) qui harcèle les pauvres tubercules pour les faire pourrir.

Lorsqu'une Pomme de terre oubliée devient molle, sa peau se ride et des germes blancs commencent à lui sortir de partout : c'est le signe qu'un mort mécontent cherche à revenir pour se venger des habitants de cette maison (région de Guingamp, Côtes-du-Nord).

Une demoiselle de famille noble et fort riche, dont le nom était connu dans tout le pays, ne paraissait jamais en public que la figure couverte d'un voile épais. C'est que, disait-on, sa mère ayant été choquée par la vue d'un porc, elle était née avec un groin au milieu du visage. Elle ne mangeait que des épluchures de Pommes de terre qu'on lui mélangeait avec un peu de paille hachée, et on lui servait cette pâtée dans une auge d'or.

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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont S.A.S., 1995, 2019) proposé par Éloïse Mozzani, on apprend que :

Avoir une pomme de terre crue dans sa poche porte bonheur, dit-on en France, notamment à Paris, met à l'abri des mauvaises rencontres (outre-Manche) et, selon une croyance commune à toute l'Europe, empêche d'avoir des rhumatismes et des maux de reins, certains auteurs recommandant d'en porter deux, et de préférence volées. Si la douleur est déjà là, il faut attendre que la pomme de terre durcisse et la jeter dès que la personne souffre plus ; mais si, au lieu de durcir, elle se flétrit ou pourrit, rien ne pourra guérir le malade. Les Belges croient également soulager les maux de dents en mettant une pomme de terre pelée dans la poche correspondant au côté de la gencive où se tient la dent gâtée. Une rondelle du féculent suffit à se débarrasser d'une sciatique, disent les Anglais, tandis que la pomme de terre tout entière a le pouvoir, selon les Français du pays d'Auge, de protéger de toutes les douleurs, quelle que soit leur origine.

Dans le sud de la France, notamment dans la région de Collobrières (Var), pour faire disparaître les verrues, on y applique des moitiés de pommes de terre qu'on jette ensuite dans la nature derrière soi ; il faut rentrer chez soi sans se retourner pour que le charme agisse. En Provence toujours, on fait de même pour les orgelets, à ceci près qu'on les passe à son voisin en lançant dans le puits de celui-ci la pomme de terre en disant : « Je te laisse. » Dans le Languedoc, on trempe le doigt atteint d'un panaris dans l'eau où on a fait cuire des patates.

Consommer des pommes de terre diminue l'ardeur sexuelle ; selon les Wallons, la femme enceinte qui en mange, surtout au dîner, risque d'avoir un enfant avec une grosse tête.

Tours en Wallonie, rêver de pommes de terre annonce la pauvreté.

Les pommes de terre peuvent jouer un rôle dans la sorcellerie, on a d'ailleurs longtemps façonné avec elles des poupées d'envoûtement. En Charente, certains sorciers « affirment qu'on peut crever les yeux d'un ennemi en plantant des hameçons dans les "yeux" d'une pomme de terre ».

Si une pomme de terre oubliée mollit, se ride et se couvre de germes blancs, c'est qu'un mort cherche à se venger des habitants de la maison (Côtes-d'Armor). Les Poitevins déconseillaient de faire cuire des pommes de terre pelées la veille « parce que ceux qui les mangeraient ne pourraient guérir s'ils venaient à être mordus par un chien enragé ».

Il faut semer les pommes de terre au décours de la lune (Savoie) ou en jeune lune (Deux-Sèvres). Dans les Vosges, pour avoir de belles pommes de terre, on prépare le champ avant les Rameaux, on sème les patates pendant la semaine sainte et on les secoue le jour de la Sainte-Anne (26 juillet). Les Belges préfèrent les semer un vendredi, ou mieux, le vendredi saint. Enfin, les Anglais sont persuadés d'avoir une bonne récolte si chaque membre de la famille goûte les premières pommes de terre nouvelles en formulant un vœu.

Selon une légende de l'île de Sein en Bretagne, jadis, saint Guénolé implora le ciel de faire cesser les famines que produisait le diable. Dieu lui envoya alors le premier boisseau de pommes de terre : « Le saint en planta vingt sillons dans l'enclos de son monastère ; l'année suivante il sema toute sa récolte, et la pomme de terre se répandit partout ; c'est grâce à elle qu'il n'y a plus eu de famine sur terre ».

Lorsque, vers 1830, survint une maladie de la pomme de terre, on raconta dans la région de Dinan que des domestiques de ferme, lassés de manger ces féculents, avaient lancé contre eux une malédiction qui dura six ans. Les Wallons, qui avaient souffert vers 1845 de la même calamité, l'attribuaient à une punition du ciel, « irrité de ce que l'on avait commencé à danser la polka, laquelle n'était autre, suivant les bonnes gens, que la danse que les Juifs dansèrent au moment de la condamnation de Jésus-Christ ».

Signalons une curieuse croyance allemande, voulant qu'un démon des pommes de terre, « harcèle les pauvres tubercules pour les faire pourrir ».

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Arnaud Riou dans L’Oracle du peuple végétal (Guy Trédaniel Editeur, 2020) classe les végétaux en huit familles : les Maîtres, les Guérisseurs, les Révélateurs, les Enseignants, les Nourricières, les Artistes, les Bâtisseurs et les Chamans.


Les Nourricières : la Pomme de terre, la Vigne, le Blé, le Riz, l’Epinard, la Laitue et le Champignon. Les Nourricières alimentent la Terre et ses habitants.

[…]

Telle est ma vocation, mon talent et mon pouvoir.

Je nourrirai l’humanité.


Les Nourricières : Elles nourrissent l’humanité sur les cinq continents. Elles se sont acclimatées aux différents sols, aux conditions météorologiques. Elles se sont laissées domestiquer pour nous offrir leurs fruits, leurs feuilles, leurs racines. Elles nous ont livré leurs secrets pour les cuisiner et mettre en valeur leur goût, le secret de leurs qualités médicinales. On les appelle Salades, Tomates, Carottes, Epinards. Elles sont Céréales, Riz, Blé, Maïs. Elles sont sucrées, amères, salées. Elles se consomment fraîches, séchées, cuites. Elles puisent dans la terre, les oligo-éléments, les vitamines qui font leur richesse. Elles nous ont livré les secrets de leur reproduction, de leur culture. Si l’on prend soin d’elles, elles permettront aux sept milliards d’humains de vivre et de se nourrir sur cette terre. C’est pourquoi les plantes Nourricières méritent notre gratitude infinie.

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Regarde la terre.

Sois conscient que sa générosité

est sans limites.

Regarde-toi.

Tu es de cette même nature.

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Avec quatre cent millions de tonnes produites chaque année dans le monde, la Pomme de terre s'est imposée comme la troisième production de l'homme après le Riz et le Blé. La Pomme de terre s'est offert un jardin de vingt millions d'hectares (la surface du Sénégal) pour étendre sa culture, c'est dire si cette Nourricière est devenue populaire, et si elle dispose de facilités d'adaptation aussi bien en milieu tempéré, tropical qu'aride, pour pouvoir se reproduire par tous les temps sur les cinq continents et sur tous les sols. La Patate se décline en plusieurs familles, la Ratte, la Monalisa, l'Amandine, la Bintje, que l'on reconnaît au goût, à la taille et à la couleur de la peau : du jaune, au rouge, en passant par le gris, le bleuté, l'argenté, le verdâtre. il existe aujourd'hui pour chaque variété un mode de cuisson recommandé. La Pomme de terre se laisse apprivoiser facilement. Les tubercules peuvent être mis à germer dès janvier dans des petits godets et plantés en terre dès début mars, une fois les gelées écartées. La Pomme de terre se plaît dans un sol bien exposé à la lumière et au soleil. Pour éviter les maladies, les Pommes de terre aiment partager leur terrain avec les Haricots, les Radis ou les Navets d'une année sur l'autre en alternance. En fonction du mode d'agriculture, intensif, bio, permaculture, on creusera plus ou moins la terre, on l'aèrera et on la nourrira différemment. Les rendements sont très généreux dès la première année. La Pomme de terre est riche pour la santé. Elle contient des vitamines C, B6, de l'amidon, des fibres alimentaires. Elle est source de cuivre, de fer, de manganèse, de potassium. Elle est antioxydante et protège des radicaux libres. Elle prévient des risques de maladie cardiovasculaires et du diabète. Elle est riche en glucides. Ce tubercule est originaire des Andes péruviennes et colombiennes où elle a été domestiquée il y a dix mille ans à partir de deux espèces sauvages. Le terme patate lui a été transmis par son ancêtre espagnol, batata, emprunté à l'arawak, une langue indienne désignant la patate douce. Au moment des grandes découvertes, les flottes espagnoles et anglaises rapporteront la Pomme de terre de l'autre côté de l'Atlantique dans un premier temps pour la beauté de ses plans et sa curiosité et non pour sa chair, la population trouvant étrange de goûter ce tubercule qui sort de la terre. Ce sont les guerres et les famines qui donneront aux Pommes de terre et Rutabagas et Topinambours leurs lettres de noblesse. Elles se conservent dans le sol pendant longtemps, se cultivent plus facilement que les céréales et produisent un meilleur rendement. Sous terre, elles ne craignent pas pas les incendies ni les dégradations des périodes de combat. Il faudra toutefois attendre le XIXe siècle pour qu'on reconnaisse à la Pomme de terre tout son intérêt et qu'on lui offre dans l'alimentation la place qu'elle mérite. Sa production facile et abondante a mis fin à de nombreuses famines. Aujourd'hui, elle se prête à tout type de cuisson, à la vapeur, à l'eau, en robe de chambre, en gratin, en lamelles, en frites, en potage, en poêlée. cette Nourricière montre sous toutes ses formes que sa simplicité n'a d'égale que sa générosité.


Mots-clés : L'abondance - La simplicité - Le partage - La générosité - L'adaptation - La multiplication - La famine - La constance - La rudesse - La grossièreté - La terre - Les récoltes - L'argent - La fortune.


Lorsque la Pomme de terre vous apparaît dans le tirage : La Pomme de terre est une Nourricière franche, généreuse et très directe. Lorsqu'elle vous apparaît, c'est pour vous parler d'abondance. La terre est notre mère à tous. Elle est la Pachamama, Gaïa, La Terre-maman. Elle nous nourrit chaque jour au quotidien. Chaque graine, germe, oignon, bulbe que nous semons portera un fruit, un légume, une céréale, une fleur. La terre transforme, accueille et porte tout. Nous ne rencontrons pas dans nos civilisations de problème de ressources, mais de partage. Lorsque la carte de la Pomme de terre vous apparaît, c'est pour vous rappeler que l'existence vous donne toujours ce dont vous avez besoin. Il n'y a aucune raison de vous inquiéter, de vous limiter, ou de nourrir des peurs. Comment pourriez-vous manquer alors que vous avez tant de ressources dans votre corps, dans votre cœur ? Les seules limites à votre abondance sont celles de votre imagination et de vos croyances. Chacun exploite la terre comme il le souhaite, vous pouvez faire pousser des Pommes de terre, des fleurs, des plantes médicinales. Chaque semence portera ses fruits. Il en est de même de vos projets. La Pomme de terre vous demande ce que vous souhaitez semer, mettre en terre. Personne ne s'y opposera. Cette carte vous rappelle à la terre, à la matière, au concret. Elle vous invite à arrêter de conceptualiser, de poser des idées, des stratégies, mais de poser des actes qui vous correspondent.


Signification renversée : Dans sa position renversée, la Pomme de terre vous rappelle à un manque d'élégance dans votre comportement. Peut-être avez-vous voulu aller trop vite ou ne pas intégrer dans une relation ou un projet différents paramètres subtils, come la diplomatie, le tact, la patience. La pomme de terre renversée vous parle d'une rudesse non contrôlée, d'un manque de douceur, de sens de la poésie. vous avez voulu être trop terre à terre, avez probablement voulu aller trop vite et risquez de passer à côté d'une dimension importante d'un message. La pomme de terre dans sa position renversée vous invite à vous libérer de l'enjeu et à vous concentrer non pas sur l'objectif, mais sur le chemin en lui-même.


Le Message de la Pomme de terre : Je suis la Pomme de terre. Depuis que l'homme m'a domestiquée, je lui ai offert cent milliards de tonnes de mes fruits. Peux-tu concevoir ce que cela représente ? Mon abondance n'a pas de limites. Pourtant, vois-tu, je n'en tire aucune fierté, comme je n'en ai aucune fausse pudeur. J'offre tout ce que je peux offrir. C'est ma nature. Tu te limites toi-même sur différentes plans. Car tu n'es pas conscient de ton pouvoir. Sais-tu que dans ton existence, tu prononceras sur la terre l'équivalent de trois cents millions de mots. Imagines-tu tous ces mots, toutes ces idées, toutes ces pensées que tu vas partager avec tes amis, tes proches, tes collègues. Tous ces mots qui vont naître de ta bouche et se disséminer dans toutes les directions ? Combien de ces mots sont comestibles ? Combien de mots d'amour sur ces trois cents millions ? Combien de mercis francs ? Prends conscience également de toutes les personnes qui ont partagé ta route depuis que tu es sur cette Terre. Qui as-tu encouragé ? Salué ? Aimé ? Quand tu réaliseras le pouvoir de ta parole et celui de tes gestes, tu multiplieras la production de tes actions pour vivre pleinement et sans tension la pleine abondance.


Le Rituel de la Pomme de terre : La prochaine fois que vous cuisinez, ou que vous vous rendez au restaurant, commandez des Pommes de terre, à l'eau, sautées, en potage, peu importe. Au moment où celles-ci arrivent dans votre assiette, ou lorsque vous commencez à les cuisiner, prenez le temps de vous souvenir d'où elles viennent retracez l'historique de la Pomme de terre dans le temps. Connectez-vous à sa lignée qui depuis dix mille ans a nourri la Terre. Connectez-vous à son chemin, depuis la germination, la pousse, la récolte. Prenez le temps de suivre ce parcours. Toutes ses évolutions, ses endroits de vie, ses modes de culture. C'est tout ce parcours que vous consommez aujourd'hui. Il en est de même de vos actes et de vos paroles. Prenez conscience qu'ils sont influencés par tant de paramètres. La psychogénéalogie, les vies passées, les habitudes, l'enfance, la famille... Toutes ces influences colorent votre présent. Répétez alors ces phrases : « Aujourd'hui, je réalise à quel point je me définis à partir de mon passé. Je me fais croire qu'il est plus simple de répéter ce que je connais déjà. Pourtant, profondément, je sais qu'il ne tient qu'à moi et qu'il est dans mon pouvoir de créer, d'inventer, d'innover ce qui est bon, juste pour moi et vibre dans mon cœur. »

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Symbolisme alimentaire :

Pour Christiane Beerlandt, auteure de La Symbolique des aliments, la corne d'abondance (Éditions Beerlandt Publications, 2005, 2014), nos choix alimentaires reflètent notre état psychique :




Croyances populaires :


Paul Sébillot, auteur de Additions aux Coutumes, Traditions et superstitions de la Haute-Bretagne (Éditeur Lafolye, janv. 1892) rapporte des croyances liées aux cycles de la vie et de la nature :


235. - La maladie des pommes de terre a été attribuée à un sort jeté.

 

Dans Le Folk-Lore de la France, tome troisième, la Faune et la Flore (E. Guilmoto Éditeur, 1906) Paul Sébillot recense nombre de légendes populaires :

On raconte à l'île de Sein qu'autrefois le diable produisait des famines qui faisaient périr beaucoup de monde. Saint Guénolé, qui était alors à Landévennec, se mit en prières et Dieu lui donna un boisseau de pommes de terre qu'il venait de créer tout exprès. Le saint en planta vingt sillons dans un enclos de son monastère. L'année suivante, il sema toute sa récolte, et la pomme de terre se répandit partout ; c'est grâce à elle qu'il n'y a plus eu de famine sur terre.

[...] Suivant une légende très moderne, la maladie qui frappa les pommes de terre vers 1880, eut pour cause première une malédiction. On raconte aux environs de Dinan que les domestiques de ferme fatigués de trop manger de pommes de terre, proférèrent contre elles une malédiction dont on n'a pas conserver le texte, et la terre demeura six ans sans produire aucun de ces tubercules. En Wallonie, vers 1845, on attribua cette maladie une punition du ciel, irrité de ce que l'on avait commencé à danser la polka, laquelle n'était autre suivant les bonnes gens, que la danse que les Juifs dansèrent au moment de la condamnation de Jésus-Christ.

[...] Des conséquences fâcheuses se produisent parfois quand on n'observe pas l'espèce de tabou traditionnel dont certaines espèces sont l'objet. En Poitou, on ne doit peler ni ail ni échalottes, ni pommes de terre le soir pour les faire cuire le lendemain, parce que ceux qui les mangeraient ne pourraient guérir s'ils venaient à être mordus par un. chien enragé.

[...] Beaucoup de personnes du pays d'Auge portent des pommes de terre dans leur poche comme talisman contre les douleurs à Liège une petite pomme de terre (dans chaque poche du pantalon) enlève les rhumatismes.

[...] Ceux [les enfants] des environs de Liège fichent au bout d'une baguette flexible la baie de la pomme de terre, et la lancent très haut.

 

D'après Véronique Barrau, auteure de Plantes porte-bonheur (Éditions Plume de carotte, 2012) :


"Pour ceux qui aiment les multifonctions, rabattez-vous sur une pomme de terre crue. Certes, elle ne paie pas de mine mais une fois placée dans une poche, elle attire la chance, promet de ne pas faire de mauvaises rencontres et préserve des rhumatismes. De quoi laisser ses préjugés de côté une bonne fois pour toutes !

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Mythes et légendes :


D'après Angelo de Gubernatis, auteur de La Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, tome 2 (C. Reinwald Libraire-Éditeur, Paris, 1882),


POMME DE TERRE. — Quoique introduites en Europe après la découverte de l’Amérique, les pommes de terre ont déjà donné lieu à quelques superstitions populaires fondées sur d’anciens mythes. En Allemagne, on prend des mesures contre le démon ou loup (Kartoffelwolf) des pommes de terre. On l’appelle aussi Erdäpfelmann ; après avoir déterré les dernières pommes de terre, on dresse un mannequin et on se rend chez le maître, en prononçant ce quatrain :

Wir kommen hier mit dem Erdäpfelmann

Der sich im Feld nicht ernähren kann ;

Es ist so kalt und ist so nass,

Er will haben Speck und Pfannkuchen satt.


Dans la fable du loup et du renard, certains conteurs ont remplacé la rave par la pomme de terre.

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Selon Véronique Barrau et Richard Ely, auteurs de Les Plantes des fées (Éditions Plume de carotte, 2014), les pommes de terre sont des "tubercules en danger"...


Décomposition revendiquée : Les champs de pomme de terre d'Allemagne reçoivent parfois la visite d'une créature semblable à un loup-garou. C'est l'Erdädpfelmann, également connu sous le nom de Kartoffelwolf. Quand cet être maléfique n'attaque pas les paysans isolés, il creuse la terre de ses griffes acérées et fait périr les légumes par son haleine fétide. Pour lutter contre ses assauts destructeurs, les employés de ferme fabriquaient un mannequin de paille à son image à la fin de chaque récolte. L'objet façonné était ensuite mené jusqu'au propriétaire qui le brûlait tout en scandant :


"Nous venons ici avec l'homme-pomme de terre

Qui ne peut se nourrir dans les champs

Si froids et si humides.

Il veut du lard et des crêpes à satiété".


Quand l'Erdädpfelmann voyait quel traitement on réservait à son effigie, il disparaissait pour ne plus jamais revenir ! Les pommes de terre conservées dans les réserves ne sont guère plus à l'abri des êtres féeriques. En Irlande, l'Homme gris ou Far Liath fait pourrir ces légumes en un rien de temps par un simple contact. Pour éloigner cet être prenant souvent l'apparence d'un épais brouillard, les paysans plaçaient un crucifix ou une médaille religieuse près des provisions. Si l'objet en question avait été préalablement béni par un évêque, son pouvoir de protection était d'autant plus fort. Dans la Haute-Saône, les Ioutons pratiquent la même malfaisance. Ces lutins prenant l'aspect d'un bouc noir marchant sur ses deux pattes arrière, punissent les agriculteurs paresseux en pourrissant notamment leurs réserves de pommes de terre.


Des tubercules en guise de balles : En Alsace, les elfes appelés Erdwibla pratiquaient avec passion le jeu de paume. Mais les châtaignes et fruits de platane utilisés jusqu'alors ne convenaient guère à la chose. Les premiers étaient bien trop lourds pour leur petite taille et les seconds irritaient leur peau si sensible. La découverte des petites baies des pommes de terre fit en revanche leur bonheur et ils prélevèrent toutes celles d'un champ. loin de se fâcher, le propriétaire remarqua que ses tubercules n'en poussaient que mieux !


Incognito : Le Tatty bogle, nain polymorphe vivant notamment en Écosse, adore effrayer les cultivateurs travaillant leurs champs de pommes de terre et brûler leurs parcelles. Dans plusieurs parties d’Écosse et d'Angleterre, son nom signifiait autrefois "épouvantail". Vous ne serez pas étonné d'apprendre que cet être en prend souvent l'apparence pour mieux passer inaperçu dans les cultures.


Éplucher des pommes de terre, c'est pas drôle mais on peut se consoler en se disant qu'il suffit de donner quelques épluchures aux Corriked, lutins bretons de Roscoff, pour s'attacher leurs services domestiques.

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