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La Mouche



Étymologie :


  • MOUCHE, subst. fém.

Étymol. et Hist. 1. 1re moitié xiie s. « insecte diptère » musche (Psautier d'Oxford, 104, 29, éd. Fr. Michel, p.156) ; 2. nom donné à de nombreux insectes qui n'appartiennent pas à la famille des muscidés a) 1213 « mouche à miel, abeille » (Li Fet des Romains, éd. L.-F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, 401, 18) ; b) 1552 mousches guespes (Rabelais, Quart Livre, 58, éd. R. Marichal, p. 235) ; c) 1636 mousche aus beufs « taon » (Monet) ; d) mousche aus chevaus (ibid.) ; e) 1768 mouche-araignée (Valm.) ; f) 1798 mouche bleue de la viande (ibid.) ; 3. loc. diverses a) ca 1350 prendre mouskes « s'irriter » (Gilles li Muisis, Poésies, éd. Kervyn de Lettenhove, II, 196, 15) ; 1640 prendre la mouche (Oudin Curiositez) ; b) 1485 quel mouche le point ? (Le Mistére du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 4443) ; 1611 quelle mousche l'a piqué (Cotgr.) ; c) 1616 pieds de mouche « écriture très fine et peu lisible » (La Comédie des Proverbes ds Anc. Théâtre français, IX, 32) ; d) 1798 pattes de mouches (Ac.) ; e) 1718 on prend plus de mouches avec le sucre qu'avec le vinaigre (ibid.) ; 1740 on prend plus de mouches avec le miel qu'avec le vinaigre (ibid.); f) 1836 on eût entendu voler une mouche (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, p. 223) ; g) 1844 ne pas faire de mal à une mouche (Balzac, Splend. et mis., p.135) ; 4. a) 1486 fine mouche « personne très fine et très rusée » (Jean Michel, Le Mystère de la Passion, 17344, éd. O. Jodogne) ; b) 1574 « espion » (Amyot, De la Curiosité, 27 ds Littré) ; c) 1814, 30 mai « petit navire de guerre » (Registre ds Jal, s.v. flotte, p. 704b) ; d) 1867 « petit bateau à vapeur » (Revue des deux mondes, 72, 182 ds Kemna, p. 80) ; 5. a) 1618 «petit morceau de taffetas collé sur le visage» (La Descouverte du style impudique des courtisanes ds Livet Molière t. 2, p. 124) ; b) 1690 « éclaboussure de boue sur un vêtement » (Fur.) ; c) 1759 « points de broderie dispersés sur une étoffe » (Mémoire présenté par Berry, brodeur de Mme la Duchesse de Valentinois ds Havard) ; d) 1801 pêche mouche artificielle (Crèvecœur, Voyage, t. 1, p. 186) ; e) 1824 « emplâtre vésicatoire préparé avec les cantharides » (Nysten) ; f) 1834 « point noir placé au centre d'une cible » (Musset, Fantasio, I, 2, p. 183) ; g) 1840 « petite touffe de poils qu'on laisse croître au-dessous de la lèvre inférieure » (Ac.) ; h) 1874 « petite marque qui indique sur un tapis de billard l'endroit où doit se placer la boule » (Lar. 19e). Du lat. musca « mouche (insecte) ».

Lire la définition du nom pour amorcer la réflexion symbolique.

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Expressions populaires :

Claude Duneton, dans son best-seller La Puce à l'oreille (Éditions Balland, 2001) nous éclaire sur le sens d'expression populaires bien connues :


Prendre la mouche : « Volonté de folle et vache qui mouche sont trop forts à tenir », dit un ancien proverbe. Tout autant que le cheval c'est en effet la vache qui prend la mouche. P. -J. Héliaz fait une description précise de la chose dans le cas d'un bœuf : « Un taon peut se glisser sous sa queue et c'est la déroute, aveugle, éperdue, la corde entre les jambes, le pieu battant les flancs et l'échiné quand la bête secoue vainement les cornes. » (Le Cheval d'orgueil.) En effet, la notion de "mouche" était autrefois très extensible, et allait jusqu'à la mouche à miel : l'abeille. Comme on s'en doute c'est surtout la mouche à bœufs, ou mouche bovine, autrement dit le taon, énorme, au dard aigu, qui provoque ces fureurs soudaines et à première vue inexplicables.

« On dit aussi Prendre la mouche, pour dire, se piquer, se fâcher sans sujet et mal à propos. Et lorsque quelqu'un s'emporte, se met en colère sans qu'on sache pourquoi, sans qu'il paraisse en avoir eu le moindre sujet, on demande quelle mouche l'a piqué » (Furetière)

Naturellement c'est affaire d'épaisseur de cuir. On disait au XVIIe siècle « être tendre aux mouches », pour dire « avoir le cœur facile aux moindres émotions, ressentir vivement les moindres désagréments ». C'était le cas de Mme de Sévigné : « En vérité, dit-elle la vie est triste quand on est aussi tendre aux mouches que je le suis. »


Une fine mouche : La mouche, j'ai le regret de le dire, a rarement été l'objet d'une grande considération parmi les peuples. On dit que jamais aucune mouche ne pénétra dans le temple de Salomon, et selon une légende mahométane toutes les mouches sont destinées à périr, à l'exception d'une seule : la mouche à miel. Les Grecs sacrifiaient un bœuf à Zeus pour le conjurer de les préserver des mouches, et Pline raconte qu'à Rome un sacrifice était dédié aux insectes eux-mêmes, mais c'était dans le même but de préservation. Pour les Hébreux, Belzébuth, dont le nom signifie "le dieu des mouches", est devenu l'exemple même de la fausse divinité, tandis que chez les Chrétiens il apparaît, avec Lucifer et Satan, comme une des appellations du diable en personne.

On s'est moqué de la mouche ; on l'a avilie. Dans le Roman de Renart, par exemple. Dame Hersant insulte en ces termes sa rivale, la femme de Renart :

... plus estez pute que mouche

qui en esté les genz entouche.


C'est dans ce contexte de mépris généralisé que dès le XVe siècle au moins une mouche a désigné un espion au service d'un puissant : « Il n'y a rien qui rende tant odieux les tyrans que les mouches, c'est-à-dire les espions qui vont partout espiant ce qui se fait et qui se dit », juge Amyot. Plus tard la mouche, avec son dérivé péjoratif le « mouchard », s'est appliqué également aux agents de police spécialisés dans la filature. « Mouche, explique Furetière, se dit figurément d'un espion de celui qui suit un autre pas à pas. Entre les sergents il y en a un qui fait la mouche, qui suit tous les pas de celui qu'ils veulent prendre, & qui marque la piste au coin de toutes les rues où il passe ; c'est de là qu'on a dit, une fine mouche, pour dire un homme qui a de la finesse, de l'habileté pour attraper les autres. »

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Zoologie :

Dans Les Langages secrets de la nature (Éditions Fayard, 1996), Jean-Marie Pelt évoque les différents modes de communication chez les animaux et chez les plantes :


Sur le vaste terrain des odeurs inconscientes ou non perçues, la science est encore silencieuse ; et la substitution des médias floraux aux médias naturels humains reste elle aussi une énigme.

Sur cette énigme, la mouche orientale des fruits (Grapholitha molesta) pourrait bien nous fournir un début d'explication (Science et Vie, novembre 1983, p. 92). Le mâle de cette mouche, en effet, se fabrique un parfum dont il asperge sa femelle une fois qu'il l'a attirée par sa phéromone. Dès lors, ses intentions sont claires et l'affaire ira à son terme. Or, ledit parfum est d'une odeur très agréable, évoquant à la fois le jasmin et la cannelle : c'est l'odeur qui se dégage lorsqu'on jette une rondelle de citron dans du thé chaud. La substance odorante de ce parfum (Jasconate de méthyle) se révèle être une hormone végétale gazeuse de découverte récente et qui n'a sans doute pas fini de faire parler d'elle. La mouche prélèverait-elle son parfum dans les plantes, notamment dans les pommiers qu'elle parasite ? On ne le sait pas encore, mais la chose est possible. Auquel cas, son comportement serait l'exact modèle du nôtre, puisque nous puisons nous aussi nos parfums dans les plantes pour séduire nos partenaires, et aimons, comme la mouche orientale, les odeurs de cannelle et de jasmin. Étrange connivence de l'homme et de la mouche dont Françoise d'Assise se désolait de ne point savoir à quoi elle pouvait bien servir...

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Croyances populaires :


Selon Jean Baucomont, auteur d'un article intitulé "Les formulettes d'incantation enfantine", paru dans la revue Arts et traditions populaires, 13e Année, No. 3/4 (Juillet-Décembre 1965), pp. 243-255 :


La tradition orale se perpétue dans le folklore de la vie enfantine. […] Une des catégories les plus curieuses de ces formulettes est celle des formulettes d'incantation.

L'incantation, nous disent les dictionnaires, signifie étymologiquement : un enchantement produit par l'emploi de paroles magiques pour opérer un charme, un sortilège. Le recours à l'incantation postule une attitude mentale inspirée par l'antique croyance au pouvoir du verbe, proféré dans certaines circonstances.

[…]

« L'incantation, dit Bergson, participe à la fois du commandement et de la prière. » On constate effectivement, que la plupart des formulettes d'incantation comportent à la fois une invocation propitiatoire : promesse d'offrande en cas de succès et une menace de sacrifice expiatoire, d'immolation en cas d'échec. Ce qui est proprement le caractère de l'opération magique traditionnelle.

[…]

Vole vole petite mouche

Sur mon doigt ne te pose pas.

Car si par malheur je te touche

Dans mes mains tu périras.

(Languedoc, Champagne)

Se dit en secouant dans les mains jointes une mouche qu'on vient de prendre.

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Symbolisme :

Selon Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, auteurs du Dictionnaire des symboles (1ère édition, 1969 ; éd. revue et corrigée Robert Laffont, 1982),


"Chez les Bamiléké et les Bamoun (Njinji), elle est le symbole de la solidarité... Au royaume des petits insectes ailés, c'est l'union qui fait la force. Une mouche seule est sans défense.

Chez les Grecs, la mouche était un animal sacré, auquel se rapportaient certains noms de Zeus et d'Apollon. Peut-être évoquait-elle le tourbillonnement de la vie olympienne ou l'omniprésence des dieux.

Sans cesse bourdonnantes, tourbillonnantes, mordantes, les mouches sont des êtres insupportables. Elles se multiplient sur la pourriture et la décomposition, colportent les pires germes de maladies et défient toute protection : elles symbolisent une incessante poursuite. C'est en ce sens qu'une ancienne divinité syrienne, Belzébuth, dont le nom signifierait étymologiquement le seigneur des mouches, est devenue le prince des démons.

D'autre part, la mouche représente le pseudo-homme d'action, agile, fébrile, inutile et revendicateur : c'est la mouche du coche, dans la fable, qui réclame son salaire, après n'avoir fait qu'imiter les travailleurs."

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Sur Wikipédia, on peut lire que :


"Le symbole de la mouche dans l'art militaire est très ancien. Les plus anciennes attestations se rencontrent dans la civilisation mésopotamienne, vers la fin du IIe millénaire avant notre ère, où l’association de l'insecte à la mort revêt une importance toute particulière dans la littérature (1) et l’iconographie (2). Son image sur les sceaux babyloniens a été parfois interprétée comme le symbole de Nergal, le dieu des maladies et de la mort (3). On rencontre l'image de la mouche sur certaines scènes où, parfois associées à des vautours, elles survolent le champ de bataille, ainsi que sur des dagues et des pendentifs donnés aux soldats en hommage à leur bravoure (4). Des pendentifs en forme de mouche furent également découverts en Nubie, dans des tombes de militaires à Kerma et Bouhen, deux cités nubiennes d’importance (5). Les sépultures furent datées d’entre 1700 et 1500 avant notre ère. Ces pendentifs sont de grande taille et en matériaux précieux (or, ivoire, bronze et électrum). Ils furent retrouvés au cou de tous les défunts, par ailleurs inhumés avec une épée ou une dague dans la plupart des tombes mises au jour. Ces découvertes ne sont pas sans rappeler qu’à cette période – qui correspond à l’apogée de la civilisation nubienne – la population était foncièrement guerrière, un fait qui se traduit par la présence de nombreuses armes en contexte funéraire. Enfin, des pendentifs en forme de mouche, très souvent associées à des lions, furent découverts en Egypte antique. Les premières attestations remontent à la XVIIe dynastie mais c'est principalement durant la XVIIIe dynastie que les hauts gradés de l'armée reçurent cette récompense émanant du pharaon en personne. L'image de la mouche est à comprendre en tant que symbole négatif de l’ennemi mort, vaincu, misérable, tandis que l'image du lion est le symbole positif du soldat courageux, voire du pharaon, puissant et en action (6). Ces deux emblèmes diamétralement opposés se rejoignent, dans une vision dualiste, si caractéristique de la pensée égyptienne, pour célébrer la bravoure du guerrier égyptien."


1 : Anne Draffkorn-Kilmer, « The symbolism of the flies in the Mesopotamian flood myth », Language, Literature and History,‎ 1987, p. 175-180

2 : André Godard, Bronzes du Luristan, Van Oest, 1931, pl. 18, cat. 44.

3 : Jean Bottéro et Samuel Kramer, Lorsque les dieux faisaient l’homme, Gallimard, 1989, 768 p. 526 et 551-553.

4 : André Godard, Bronzes du Luristan, Van Oest, 1931, pl. 18, cat. 44.Edith Porada, « Problem of Iranian iconography », The Memorial Volume of the Vth International Congress of Iranian Art and Archaeology,‎ 1972, fig. 2

5 : Georges Reisner, Excavations at Kerma V, vol. I-III, Harvard African Studies, 1923, p. 163, 196, 348-349 et 508Georges Reisner, Excavations at Kerma VI, vol. IV-V, Harvard African Studies, 1923, p. 131, pl. 43David Randall-MacIver et Charles Leonard Wooley, Buhen VII, University Museum, 1911, p. 174-175David Randall-MacIver et Charles Leonard Wooley, Buhen VIII, University Museum, 1911, pl. 51

6 : Amandine Marshall, « Fly & Lion : Military Awards in ancient Egypt », Kmt A Modern Journal of Ancient Egypt,‎ 2015, p. 139-47

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Dans l'Encyclopédie des symboles (1989, édition française 1996) établie sous la direction de Michel Cazenave, on apprend que :


"Les différentes sortes de mouches sont perçues, du point de vue symbolique, comme des êtres négatifs que l'on devait cependant apaiser par des rites bien précis. Le Baal-zebul ou Beel-zebub évoqué dans le Deuxième Livre des Rois (I, 2), "le dieu d'Ekron", est une divinité syrienne dont le nom signifiait "le prince" (zebul), déformé en "la mouche" (zebub). Une légende ultérieure déclare qu'il commandait des escadrons de mouches, l'apparentant de la sorte à Zeus Apomyios ou encore Myiodes et Myiagyros en Grèce. On rencontre aussi l'idée d'une force démoniaque que l'on ne peut exterminer et qui s'incarne dans les mouches. Les camées antiques représentant des mouches étaient censés protéger des "mauvais regards". Son nom grec désignait de façon symbolique un parasite ; on trouve chez Lucien de Samosate (120-180) l'expression "faire d'une mouche un éléphant". Dans la mythologie de la Perse ancienne, Ahriman, le principe de l'obscurité, prend la forme d'une mouche pour s'infiltrer parmi les hommes. Les nuages de mouches annoncent chez Isaïe l'arrivée d'un malheur : "Il adviendra en ce jour-là que le Seigneur sifflera les mouches qui sont à l'extrémité des canaux d’Égypte" (Isaïe VII, 18). Les mouches sont surtout les symboles de figures diaboliques et de groupes de démons tels que ceux qui torturèrent l'ermite saint Matarios réfugié dans le désert."

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Dans Le Livre des superstitions, Mythes, croyances et légendes (Éditions Robert Laffont, 1995 et 2019), Éloïse Mozzani nous propose la notice suivante :


Sacrée chez les Grecs - « peut-être évoquait-elle le tourbillonnement de la vie olympienne ou l'omniprésence des dieux » -, la mouche, partout ailleurs, à cause de sa saleté et de son attirance pour la décomposition , a toujours été l'objet d'une certaine répulsion. Non seulement son impureté lui interdit les lieux sacrés - pas une n'a pénétré dans le temple de Salomon - mais de plus elle est rangée définitivement du côté du mal et en particulier du démon Belzébuth, ancienne divinité assyrienne dont le nom signifie en hébreu « dieu (ou seigneur) des mouches », devenu chez les chrétiens un prince des démons, chef suprême de l'empire infernal juste derrière Satan. Ce dernier peut prendre également la forme d'une mouche qu'il a créée, disent les Bretons. Croyance que semble avoir partagée Luther : un jour qu'une mouche noire volait avec insistance autour de lui, il crut reconnaître le diable et lui jeta son encrier.

Dans les procès de sorcellerie, l'apparition de l'insecte lors de l'exécution du prévenu prouvait que le diable venait chercher l'âme qui lui était promise pour la conduire en enfer. Une mouche vola autour du bûcher d'Urbain Grandier (curé de Saint-Pierre-de-Loudun, accusé d'avoir « possédé » plusieurs religieuses d'un couvent d'Ursulines, et brûlé comme sorcier en 1634.) et à la mort d'un certain Pautier, sorcier également « L'on vit de dessus son épaule droite, proche de l'oreille, son Démon en forme de moucheron de la grosseur d'une noix, qui passant sur la potence en sifflant, traînant une petite queue après lui en forme de fumée, où l'exécuteur le voyant eut comme frayeur, et cria Jésus-Marie, la potence venant à trembler, ce qui fut vu par plus de deux mille personnes » (Discours de trois sorciers exécutés à mort en la ville de Limoges, le 24 avril 1630).

Plus généralement, parce que la mouche (ou le moucheron) est un insecte ailé, elle peut représenter l'âme qui sort de la bouche d'un mourant, même s'il n'a pas versé dans la sorcellerie. Dans le sud du Finistère, on croyait avoir sortir des lèvres du cadavre une petite mouche, peu commune, qui se posait « sur le bord du vase qui contient le miel destiné au gens de la veillée : les gens croient que c'est l'âme du mort qui fait provision de nourriture avant de se mettre en route ». Parfois, au cours d'un enterrement, une mouche se pose sur une personne : il s'agit, dit-on, de l'âme du défunt venu consoler n de ses proches. Selon un récit de basse Bretagne, une grosse mouche ne cessait de voltiger autour d'un assassin ; sur les conseils d'un prêtre, ce dernier, convaincu qu'il s'agissait de l'âme de sa victime, interrogea l'insecte qui lui répondit.

D'après d'autres légendes, des mouches, données par un génie, se rendent utiles aux travaux des champs et tâches domestiques, à la manière de certains lutins bienveillants. Dans le pays basque, on parlait d'une dizaine de mouches qui secondaient efficacement une fermière.

Cependant, la mouche est surtout considérée come l'insecte à faire disparaître, d'autant plus qu'elle peut être envoyée par des sorciers : sept de ces insectes suffisent à tuer un cheval (Wallonie). Saint Bernard les excommunia d'une église du diocèse de Laon où elles importunaient les fidèles. On peut attendre aussi qu'il pleuve le jour de la Saint-Jean car cette pluie leur est fatale et les fait mourir, ou fabriquer un talisman à leur effigie : « Si l'on ne trouve jamais une mouche dans le palais des Doges, à Venise, c'est parce que dans les fondations de ce palais, il y a un tel talisman ». En Algérie, si l'on parvient à écrire sur l'aile d'une mouche : « Va-t'en par la volonté de Dieu », « elle s'en va entraînant à la suite toutes les mouches qui jamais plus ne reviendront au même endroit ».

Selon une croyance du XVIIe siècle, rêver que l'on attrape des mouches annonce qu'on va faire l'objet de médisances ou d'injures. Pourtant la mouche n'est pas toujours de mauvais augure : elle porte même chance si elle tombe dans un verre ou une assiette (alors que dans un encrier, le présage est mauvais). Aux États-Unis, une mouche qui, bien qu'à chaque fois chassée, se pose trois fois sur un homme présage beaucoup d'argent. Si elle semble vous poursuivre, c'est que vous allez voyager prochainement, et si elle se pose sur votre main, une personne désire vous parler : pensez à vos connaissances et quand vous tomberez juste, la mouche s'envolera. Elle prédit une nouvelle en bourdonnant dans une maison mais si elle est noire, la nouvelle risque d'être mauvaise.

En Belgique, on croit que la présence d'une mouche dans la chambre d'une femme sur le point d'accoucher signifie qu'elle va avoir une fille. Une femme enceinte aura également une file si elle est effrayée par ces insectes.

Porter sur soi une mouche vivante enveloppée dans de la toile de lin guérissait, chez les Romains, les infections des yeux ; Mucien, qui fut trois fois consul, utilisait ce procédé, rapporte Pline.

En Roumanie, « on lave les croisées et la vaisselle salies par les excréments des mouches et on boit le liquide comme diurétique ».

L'abondance de mouches annonce une année abondante mais, dans le cas contraire, c'est signe de mauvaise récolte, de maladies ou de guerre.

Les mouches piquent et deviennent insupportables avant le mauvais temps mais il fera beau si elles « tourbillonnent en nuages au couchant ».


Mouche cantharide : La mouche cantharide (appelée aussi mouche d'Espagne ou de Milan), qui contient une substance aphrodisiaque, la « cantharidine », servait au XVIIe siècle au charme d'amour suivant : on en plaçait sous la nappe de l'autel, puis, après la messe, on les pulvérisait pour les jeter dans une boisson destinée à la personne dont on voulait se faire aimer.

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Diana Cooper, auteure du Guide des archanges dans le monde animal (édition originale 2007 ; traduction française : Éditions Contre-dires, 2018) nous délivre un :


Message des insectes de la troisième dimension :


Nous sommes ici, sur cette belle planète, pour apprendre et

parfois pour démontrer ce que nous avons déjà appris.

Nous souhaitons coexister avec vous en paix et

en harmonie. Notre désir est de faire notre travail de service,

car cela permet à la Terre de préserver la vie. Sans nous, vous

ne seriez pas ici. De grâce, reconnaissez-vous, donnez-nous de

l'espace et laissez-nous vivre. Nous vous honorons et nous

vous demandons de nous respecter.


Tous les insectes de la troisième dimension sont originaires de Neptune à l'exception des araignées, qui viennent d'un univers lointain et sont descendues sur Terre en passant par Sirius.

Les mouches : La mission d'âme de ces insectes ailés est de nous rappeler l'importance de l'hygiène et de la propreté. Durant l'âge d'or de l'Atlantide, il n'y avait pas de mouches, mais la fréquence des humains a commencé à décliner, et elles sont arrivées de partout dans le monde.

Leur travail de service quand elles ne sont encore que des asticots est d'éliminer la matière en décomposition et d'aider à créer une couche arable. Elles digèrent les arbres morts, les animaux et les déchets des animaux. Quand elles sont adultes, elles s'offrent come nourriture aux animaux insectivores.


VISUALISATION POUR REMERCIER LES INSECTES DE LA TROISIEME DIMENSION

  1. Aménagez un espace où vous pourrez vous détendre sans être dérangé.

  2. Affirmez votre intention de comprendre et de remercier le royaume des insectes.

  3. Vous êtes assis sur un rocher doux et lisse surplombant la campagne.

  4. Ouvrez votre cœur au monde des insectes.

  5. Remerciez les coléoptères d'avoir décomposé la matière indésirable, afin qu'elle puisse être recyclée pour servir un but plus élevé.

  6. Remerciez les myriapodes d'avoir démontré la beauté de la coordination et la possibilité de régénération.

  7. Remerciez les cafards d'avoir détruit les déchets nauséabonds pour conserver les nutriments dans l'écosystème.

  8. Remerciez les puces de nous rappeler l'importance de la propreté.

  9. Remerciez les mouches de nous rappeler l'importance d'une bonne hygiène.

  10. Remerciez les moustiques de nous rappeler de garder l'eau propre et en mouvement.

  11. Remerciez les limaces et les escargots d'avoir mangé les vieilles feuilles sèches.

  12. Remerciez les tiques de nous enseigner que nous vivons dans un monde interdépendant et de transmettre la sagesse des autres créatures.

  13. Remerciez les grillons, les sauterelles et les criquets d'avoir fertilisé la terre et de nous avoir appris à élargir notre niveau de possibilités.

  14. Remerciez les araignées d'avoir démontré la géométrie sacrée et de nous avoir appris à nous concentrer sur notre vision.

  15. Remerciez les guêpes de nous enseigner la géométrie sacrée et du travail qu'elles accomplissent en pollinisant et en dévorant les insectes.

  16. Demandez que les humains et les insectes puissent vivre en harmonie divine.

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Pour Melissa Alvarez, auteure de A la Rencontre de votre Animal énergétique (LLewellyn Publications, 2017 ; traduction française Éditions Véga, 2017), le Mille-pattes est défini par les caractéristiques suivantes :


Traits : La Mouche symbolise le changement, le développement et la persévérance pour atteindre ses buts. Leur population s'accroît rapidement car la femelle pond jusqu'à cinq cent œufs à chaque fois. c'est là l'indication que vous êtes productif et que vous pouvez réaliser de grandes choses dans un laps de temps très court. La préférence de la mouche va vers des nourritures dégoûtantes : elle aime les ordures et le fumier. C'est le signe que vous devez veiller à garder votre environnement propre. La mouche utilise ses antennes pour sentir. Elle peut voler jusqu'à plus de 70 km/h. cela symbolise l'acuité de vos sens ainsi que votre capacité à aller très vite lorsque c'est nécessaire.


Talents : Abondance ; Adaptabilité ; Changement ; Détermination ; Excellente vue ; Épanouissement dans des circonstances difficiles ; Intuition ; Prospérité ; Ingénieux ; Forte volonté ; Transformation.


Défis : Ennuyeux ; Bigoterie ; Intolérance ; Harcèlement ; Déloyal ; Pas propre.


Élément : Air.


Couleurs primaires : Noir.


Apparitions : Lorsque la mouche apparaît, cela veut dire que vous laissez de petits riens vous irriter. Au lieu de vous laisser obnubiler par eux, ayez une vision plus vaste des choses en adoptant un autre point de vue pour les voir clairement. La mouche veut dire que des changements se préparent et qu'ils vont arriver de façon abrupte. Cela peut vous prendre au dépourvu, mais vos capacités de survie et votre aptitude à prendre des décisions et à agir vont vous permettre de surmonter la négativité et de vous épanouir. La mouche n'abandonne jamais. Elle continue à poursuivre ses buts, sans prendre du tout en compte le fait que sa façon de faire a tout du harcèlement. Vous avez la même caractéristique : alors, si vous vous rendez compte que vous êtes en train d'ennuyer les autres, changez rapidement votre façon d'agir pour vous assurer de réussir sans vous faire d'ennemis au passage.


Aide : Vous avez besoin de voir une situation dans une perspective nouvelle. La mouche a deux yeux, mais dans chacun d'eux il y a plus de quatre mille petits yeux ! Pouvez-vous vous imaginer avoir plus de huit mille façons de voir une même situation ? Cette incroyable vision qu'a la mouche peut vous aider à considérer les situations sous une multiplicité de points de vue en même temps. Cela peut vous donner une grande clairvoyance envers les personnes, les projets et les situations pour lesquels il vous faut prendre en compte un large éventail de possibilités. La mouche vous aide aussi à voir la valeur de choses qui pour d'autres sont bonnes à jeter. Vous pourriez même découvrir des trésors, aussi prenez le temps de vraiment regarder avant d'émettre un jugement. Si vous vous diminuez, ou si votre estime de vous-même a récemment pris un coup, la mouche vous encourage à avoir un point de vue positif au lieu d'être négatif envers vous. Vous avez vraiment de la valeur, et vous devez la voir en vous, même si les autres ne savent pas l'apprécier.


Fréquence : L'énergie de la mouche bouge très vite, elle vrombit çà et là dans un tourbillonnement d'activité. Cela donne la sensation d'entrer en contact avec un courant électrique qu vient agacer votre corps, qui vous touche et disparaît en une fraction de seconde. Elle vous fait vous sentir vivant, vous énergise et vous transforme avec des émissions de positivité. Sa sonorité ressemble au bruit d'une pluie serrée de neige drue qui rebondit sur un toit en zinc.

Imaginez...

Vous êtes en train de travailler sur votre ordinateur, lorsque vous entendez un bourdonnement tout près de votre oreille. Vous reculez brusquement la tête en ayant un mouvement pour taper sur le coupable que vous cherchez des yeux. Et vous voyez une mouche qui zigzague dans votre espace de travail. Vous n'aimez vraiment pas découvrir qu'il y a des mouches chez vous, aussi vous roulez une feuille de papier pour en faire une tapette. Vous la cherchez partout du regard, mais ne la trouvez pas. Vous abandonnez, retournez à votre bureau, vous asseyez et posez à nouveau vos doigts sur le clavier. Posée sur la lettre I [Je en anglais], il y a la mouche ! Vous pensez que c'est vraiment drôle qu'elle se soit posée sur cette lettre. Est-ce que ce serait un message qu'elle aurait à vous donner ? Vous vous tournez intérieurement vers votre centre et ouvrez votre intuition au contact avec la mouche. La première chose que vous entendez, c'est "Je veux sortir". Vous lui envoyez ce message en retour : "Va vers la porte, et je te fais sortir." La mouche ne bouge pas, mais vous allez vers la porte et attendez. Un instant après, la mouche bourdonne autour de vous à nouveau. Alors vous ouvrez la porte et elle s'envole. Vous vous asseyez pour vous remettre au travail, heureux d'avoir considéré la situation d'un point de vue différent.

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Littérature :


Éloge de la mouche

La mouche n’est pas le plus petit des êtres ailés, si on la compare aux moucherons, aux cousins, et à de plus légers insectes ; mais elle les surpasse en grosseur autant qu’elle le cède elle-même à l’abeille. Elle n’a pas, comme les autres habitants de l’air, le corps couvert de plumes, dont les plus longues servent à voler ; mais ses ailes, semblables à celles des sauterelles, des cigales et des abeilles, sont formées d’une membrane dont la délicatesse surpasse autant celles des autres insectes qu’une étoffe des Indes est plus légère et plus moelleuse qu’une étoffe de la Grèce. Elle est fleurie de nuances comme les paons, quand on la regarde avec attention, au moment où, se déployant au soleil, elle va prendre l’essor.

Son vol n’est pas, comme celui de la chauve-souris, un battement d’ailes continu, ni un bond comme celui de la sauterelle ; elle ne fait point entendre un son strident comme la guêpe, mais elle plane avec grâce dans la région de l’air à laquelle elle peut s’élever. Elle a encore cet avantage, qu’elle ne reste pas dans le silence, mais qu’elle chante en volant, sans produire toutefois le bruit insupportable des moucherons et des moustiques, ni le bourdonnement de l’abeille, ni le frémissement terrible et menaçant de la guêpe : elle l’emporte sur eux en douceur autant que la flûte a des accents plus mélodieux que la trompette et les cymbales.

En ce qui regarde son corps, sa tête est jointe au cou par une attache extrêmement ténue ; elle se meut en tous sens avec facilité et ne demeure pas fixe comme dans la sauterelle : ses yeux sont saillants, solides, et ressemblent beaucoup à de la corne ; sa poitrine est bien emboîtée, et les pieds y adhèrent, sans y rester collés comme dans les guêpes. Son ventre est fortement plastronné, et ressemble à une cuirasse avec ses larges bandes et ses écailles. Elle se défend contre son ennemi, non avec son derrière, comme la guêpe et l’abeille, mais avec la bouche et la trompe, dont elle est armée comme les éléphants, et avec laquelle elle prend sa nourriture, saisit les objets et s’y attache, au moyen d’un cotylédon placé à l’extrémité. Il en sort une dent avec laquelle elle pique et boit le sang. Elle boit aussi du lait, mais elle préfère le sang, et sa piqûre n’est pas très-douloureuse. Elle a six pattes, mais elle ne marche que sur quatre ; les deux de devant lui servent de mains. On la voit donc marcher sur quatre pieds, tenant dans ses mains quelque nourriture qu’elle élève en l’air d’une façon tout humaine, absolument comme nous.

Elle ne naît pas telle que nous la voyons : c’est d’abord un ver éclos du cadavre d’un homme ou d’un animal ; bientôt il lui vient des pieds, il lui pousse des ailes, de reptile elle devient oiseau ; puis, féconde à son tour, elle produit un ver destiné à être plus tard une mouche. Nourrie avec les hommes, leur commensale et leur convive, elle goûte à tous les aliments excepté l’huile : en boire, pour elle c’est la mort. Quelque rapide que soit sa destinée, car sa vie est limitée à un court intervalle, elle se plaît à la lumière et vaque à ses affaires eu plein jour. La nuit, elle demeure en paix, elle ne vole ni ne chante, mais elle reste blottie et sans mouvement.

Pour prouver que son intelligence est loin d’être bornée, il me suffit de dire qu’elle sait éviter les pièges que lui tend l’araignée, sa plus cruelle ennemie. Celle-ci se place en embuscade, mais la mouche la voit, l’observe, et détourne son essor pour ne pas être prise dans les filets et ne pas tomber entre les pattes de cette bête cruelle. À l’égard de sa force et de son courage, ce n’est point à moi qu’il appartient d’en parler, c’est au plus sublime des poëtes, à Homère. Ce poëte, voulant faire l’éloge d’un de ses plus grands héros, au lieu de le comparer à un lion, à une panthère, ou à un sanglier, met son intrépidité et la constance de ses efforts, en parallèle avec l’audace de la mouche, et il ne dit pas qu’elle a de la jactance, mais de la vaillance. C’est en vain, ajoute-t-il, qu’on la repousse, elle n’abandonne pas sa proie, mais elle revient à sa morsure. Il aime tant la mouche, il se plaît si fort à la louer, qu’il n’en parle pas seulement une fois ni en quelques mots, mais qu’il en rehausse souvent la beauté de ses vers. Tantôt il en représente un essaim qui vole autour d’un vase plein de lait ; ailleurs, lorsqu’il nous peint Minerve détournant la flèche qui allait frapper Ménélas à un endroit mortel, comme une mère qui veille sur son enfant endormi, il a soin de faire entrer la mouche dans cette comparaison. Enfin, il décore les mouches de l’épithète la plus honorable, il les appelle serrées en bataillons, et donne le nom de nations à leurs essaims.

La mouche est tellement forte, que tout ce qu’elle mord, elle le blesse. Sa morsure ne pénètre pas seulement la peau de l’homme, mais celle du cheval et du bœuf. Elle tourmente l’éléphant, en s’insinuant dans ses rides, et le blesse avec sa trompe autant que sa grosseur le lui permet. Dans ses amours et son hymen, elle jouit de la plus entière liberté : le mâle, comme le coq, ne descend pas aussitôt qu’il est monté ; mais il demeure longtemps à cheval sur sa femelle qui porte son époux sur son dos et vole avec lui, sans que rien trouble leur union aérienne. Quand on lui coupe la tête, le reste de son corps vit et respire longtemps encore.

Mais le don le plus précieux que lui ait fait la nature, c’est celui dont je vais parler : et il me semble que Platon a observé ce fait dans son livre sur l’immortalité de l’âme. Lorsque la mouche est morte, si on jette sur elle un peu de cendre, elle ressuscite à l’instant, reçoit une nouvelle naissance et recommence une seconde vie. Aussi tout le monde doit-il être convaincu que l’âme des mouches est immortelle, et que, si elle s’éloigne de son corps pour quelques instants, elle y revient bientôt après, le reconnaît, Je ranime et lui fait prendre sa volée. Enfin elle rend vraisemblable la fable d’Hermotimus de Clazomène, qui disait que souvent son âme le quittait, et voyageait seule, qu’ensuite elle revenait, rentrait dans son corps, et ressuscitait Hermotimus.

La mouche, cependant, est paresseuse ; elle recueille le fruit du travail des autres, et trouve partout une table abondante. C’est pour elle qu’on trait les chèvres ; que l’abeille, aussi bien que pour les hommes, déploie son industrie ; que les cuisiniers assaisonnent leurs mets, dont elle goûte avant les rois, sur la table desquels elle se promène, vivant comme eux et partageant tous leurs plaisirs.

Elle ne place point son nid et sa ponte dans un lieu particulier, mais, errante en son vol, à l’exemple des Scythes, partout où la nuit la surprend, elle établit sa demeure et son gîte. Elle n’agit point, comme je l’ai déjà dit, pendant les ténèbres : elle ne veut pas dérober la vue de ses actions et ne croit pas devoir faire alors ce qu’elle rougirait de faire en plein jour.

La Fable nous apprend que la mouche était autrefois une femme d’une beauté ravissante, mais un peu bavarde, d’ailleurs musicienne et amateur de chant. Elle devint rivale de la Lune dans ses amours avec Endymion. Comme elle se plaisait à réveiller ce beau dormeur, en chantant sans cesse à ses oreilles et lui contant mille sornettes, Endymion se fâcha, et la Lune irritée la métamorphosa en mouche. De là vient qu’elle ne veut laisser dormir personne, et le souvenir de son Endymion lui fait rechercher de préférence les jolis garçons, qui ont la peau tendre. Sa morsure, le goût qu’elle a pour le sang, ne sont donc pas une marque de cruauté, c’est un signe d’amour et de philanthropie : elle jouit comme elle peut et cueille une fleur de beauté.

Il y eut chez les anciens une femme qui portait le nom de Mouche : elle excellait dans la poésie, aussi belle que sage. Une autre Mouche fut une des plus illustrés courtisanes d’Athènes. C’est d’elle que le poète comique a dit :

         La Mouche l’a piqué jusques un fond du cœur.

Ainsi, la muse de la comédie n’a pas dédaigné d’employer ce nom et de le produire sur la scène ; nos pères ne se sont point fait un scrupule d’appeler ainsi leurs filles. Mais la tragédie elle-même parle de la mouche avec le plus grand éloge, quand elle dit :

         Quoi ! la mouche peut bien, d’un courage invincible          Fondre sur les mortels, pour s’enivrer de sang,          Et des soldats ont peur du fer étincelant !

J’aurais encore beaucoup de choses à dire de la Mouche, fille de Pythagore, si son histoire n’était connue de tout le monde.

Il y a une espèce particulière de grandes mouches, qu’on appelle communément mouches militaires ou chiens : elles font entendre un bourdonnement très-prononcé ; leur vol est rapide ; elles jouissent d’une très-longue vie et passent l’hiver sans prendre de nourriture, cachées surtout dans les lambris. Ce qu’il y a de plus extraordinaire chez elles, c’est qu’elles remplissent la tour de rôle les fonctions de mâles et de femelles, couvrant après avoir été couvertes, et réunissant, comme le fils de Mercure et d’Aphrodite, un double sexe et une double beauté. Je pourrais ajouter encore bien des traits à cet éloge ; mais je m’arrête, de peur de paraître vouloir, comme dit le proverbe, faire d’une mouche un éléphant.

Lucien de Samosate (120 - 192).

*

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LE COCHE ET LA MOUCHE

Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé, Et de tous les côtés au soleil exposé, Six forts chevaux tiraient un Coche. Femmes, Moine, Vieillards, tout était descendu. L'attelage suait, soufflait, était rendu. Une Mouche survient, et des Chevaux s'approche ; Prétend les animer par son bourdonnement ; Pique l'un, pique l'autre, et pense à tout moment Qu'elle fait aller la machine, S'assied sur le timon, sur le nez du Cocher ; Aussitôt que le char chemine, Et qu'elle voit les gens marcher, Elle s'en attribue uniquement la gloire ; Va, vient, fait l'empressée ; il semble que ce soit Un Sergent de bataille allant en chaque endroit Faire avancer ses gens, et hâter la victoire. La Mouche en ce commun besoin Se plaint qu'elle agit seule, et qu'elle a tout le soin ; Qu'aucun n'aide aux Chevaux à se tirer d'affaire. Le Moine disait son Bréviaire ; Il prenait bien son temps ! une femme chantait ; C'était bien de chansons qu'alors il s'agissait ! Dame Mouche s'en va chanter à leurs oreilles, Et fait cent sottises pareilles. Après bien du travail le Coche arrive au haut. Respirons maintenant, dit la Mouche aussitôt : J'ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine. Ça, Messieurs les Chevaux, payez-moi de ma peine.


Ainsi certaines gens, faisant les empressés, S'introduisent dans les affaires : Ils font partout les nécessaires, Et, partout importuns, devraient être chassés.

Jean de LA FONTAINE

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Dans ses Histoires naturelles (1874), Jules Renard brosse des portraits étonnants des animaux que nous connaissons bien :

Les mouches d’eau

Il n’y a qu’un chêne au milieu du pré, et les bœufs occupent toute l’ombre de ses feuilles.

La tête basse, ils font les cornes au soleil. Ils seraient bien, sans les mouches.

Mais aujourd’hui, vraiment, elles dévorent. Âcres et nombreuses, les noires se collent par plaques de suie aux yeux, aux narines, aux coins des lèvres même, et les vertes sucent de préférence la dernière écorchure.

Quand un bœuf remue son tablier de cuir, ou frappe du sabot la terre sèche, le nuage de mouches se déplace avec murmure. On dirait qu’elles fermentent.

Il fait si chaud que les vieilles femmes, sur leur porte, flairent l’orage, et déjà elles plaisantent un peu :

« Gare au bourdoudou ! » disent-elles.

Là-bas, un premier coup de lance lumineux perce le ciel, sans bruit. Une goutte de pluie tombe.

Les bœufs, avertis, relèvent la tête, se meuvent jusqu’au bord du chêne et soufflent patiemment.

Ils le savent : voici que les bonnes mouches viennent chasser les mauvaises.

D’abord rares, une par une, puis serrées, toutes ensemble, elles fondent, du ciel déchiqueté, sur l’ennemi qui cède peu à peu, s’éclaircit, se disperse.

Bientôt, du nez camus à la queue inusable, les bœufs ruisselants ondulent d’aise sous l’essaim victorieux des mouches d’eau.

*

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Yves Paccalet, dans son magnifique "Journal de nature" intitulé L'Odeur du soleil dans l'herbe (Éditions Robert Laffont S. A., 1992) évoque les métamorphoses de la mouche :

12 mai

(Fontaine-la-Verte)


Il paraît qu'on n'a pas vu de printemps si pluvieux depuis des lustres. Chez les insectes, le cycle des copulations et des métamorphoses est en retard.

Les voici quand même, ces folies hexapodes.


Or et jade

Transfiguration de merde

Mouche verte


Faux arachnide

Dard innocemment brandi

Mouche-scorpion


Buée d'ailes

Gouttes de cuivre vert

Mouche tachinaire

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Dans Un peu plus loin sur la droite (Éditions Viviane Hamy, 1996), roman policier de Fred Vargas, la discussion d'ouverture du roman entre Marthe, la "vieille pute" du quartier et Louis, l'électron libre du ministère de l'Intérieur, récemment congédié, met la mouche à l'honneur :


Prenons une mouche, par exemple.

- Prends une mouche, par exemple, dit Louis. [...]

Et ta mouche, alors ? demanda Marthe en sortant du bar et en plaquant d'une main un sac en plastique sur sa tête. Tu me parlais d'une mouche. [...]

Donc prenons une mouche. La mouche est entrée dans la maison et elle énerve tout le monde. Des tonnes de battements d'ailes à la seconde. C'est fortiche, une mouche, mais ça énerve. Ça vole dans tous les sens, ça marche au plafond sans trucage, ça se fout partout là où il ne faut pas, et surtout, ça trouve la moindre goutte de miel égarée. L'emmerdeuse publique. Exactement comme lui. Il trouvait du miel là où tout le monde pensait avoir bien nettoyé, n'avoir pas laissé de trace. Du miel ou de la merde, bien sûr, pour une mouche tout se vaut. Le réflexe imbécile est de foutre la mouche dehors. C'est la bourde. Car une fois dehors, que fait la mouche ?

Louis Kehlweiler paya sa bière, salua tout le monde et sortit du bar. Il n'avait aucune envie de rentrer chez lui. Il irait se poser sur le banc 102. Quand il avait démarré, il avait quatre bancs et maintenant cent trente-sept, plus soixante-quatre arbres. Depuis ces bancs et ces marronniers, il avait capté des tas de choses. Il aurait pu raconter ça aussi, mais il avait tenu bon. Il pleuvait à verse à présent.

Car une fois dehors, que fait la mouche ? Elle fait l'imbécile deux ou trois minutes, c'est entendu, et puis elle s'accouple. Et puis elle pond. Ensuite, on a des milliers de petites mouches qui grandissent, qui font les imbéciles, et puis qui s'accouplent. Donc, rien de plus inconséquent que de se débarrasser d'une mouche en la mettant dehors. Ça démultiplie la puissance de la mouche. Faut la laisser dedans, la laisser faire ses trucs de mouche, et prendre patience jusqu'à ce que l'âge la rattrape et qu'elle fatigue. Tandis qu'une mouche dehors, c'est la menace, le grand danger. Et ces crétins qui l'avaient mis dehors. Comme si, une fois dehors, il allait s'arrêter. Mais non, ce serait pire. Et évidemment, ils ne pouvaient pas se permettre de lui taper dessus avec un torchon comme il arrive qu'on procède avec une mouche.

[...]

Marthe tourna la tête vers Kehlweiler. Ce type, c'était un ruban à mouches. Toutes les informations venaient lui coller dessus sans qu'il ait à lever le petit doigt. C'était un gars comme ça, tout le monde venait lui raconter ses salades. C'était infernal, à la longue.

- Prends une mouche, par exemple, dit Marthe.

- Oui ?

- Non, laisse tomber.

Marthe reposa son menton dans ses mains. La mouche, elle croit qu'elle va traverser la pièce sans se faire repérer, sereine. Elle va donner droit dans Ludwig, elle se colle dessus. Ludwig il extirpe doucement ses informations, merci, et il la libère. Il était tellement ruban à mouches qu'il en avait fait sa profession, qu'il ne savait même plus faire autre chose.

*

*

Fred Vargas, (encore elle) auteure de Sans feu ni lieu (Éditions Viviane Hamy, 1997) s'intéresse souvent aux expressions françaises qui comportent des noms d'animaux, en particulier dans ce roman, une métaphore utilisant la mouche :


"Clairmont jeta sa cigarette dans la sciure.

- Vous croyez peut-être que 'ai une mouche dans le casque, murmura-t-il en tapotant la tête de Nicole Verdot, pliée d'humilité à ses pieds. Mais je vous conseille de vérifier votre matériel personnel d'abord.

Marc acquiesça, passif et consentant. Il n'avait jamais entendu l'expression "avoir une mouche dans le casque". Il supposa qu'elle était l'équivalent d'avoir une araignée au plafond., d'avoir un grain, en plus corsé, à cause du bruit paniquant de la mouche et de son vol d'ahurie, et cette formule lui plut beaucoup. Au moins, il n'était pas venu pour rien. Cette nouvelle acquisition le consolait d'avoir manqué l'omelette de Mathias. Bien sûr qu'il avait une mouche dan le casque, c'était indéniable, mais pas pour les raisons que croyait le vieux Clairmont. Clément avait une grosse mouche dans le casque aussi. Et puis Lucien, avec ses tranchées de guerre. et puis l'Allemand, avec ses foutus crimes. Mais pas Marthe. Marc regardait la main du vieux qui palpait inlassablement la statuette inachevée. Clairmont avait une mouche dans le casque aussi, une variété de mouche très commune.

[...]

- Je veux dire : tu t'en fous autant que tu veux le faire croire ? Aucun doute ne grésille dans un recoin de ta tête ?

- Ça grésille dans un recoin en permanence, tu le sais parfaitement.

- Oui. C'est la mouche qui fait ce petit bruit.

- La mouche ?

- La mouche dans le casque. C'est le beau-père du crapaud qui dit cela. Que penses-tu de ce type ?

[...]

- ... C'est l'empreinte du tueur, c'est sa marque de fabrique, sa trace inévitable. Sa signature, en quelque sorte, l'empreinte de sa mouche.

- Sa mouche ?

- Oui, la mouche dont tu parlais tout à l'heure, la mouche que le tueur a dans le casque.

Marc hocha la tête.

- Une énorme mouche à merde, compléta-t-il.

- C'est tout à fait cela, dit Louis."

[...]

- Je sais, poursuivit Louis. J'ai questionné Merlin sur la vie de son beau-père, et le vieux ne l'a jamais lâché d'une semelle, à son grand dam. Mais il a pu, comme le Sécateur, se tenir à carreau pendant toutes ces années refréner sa ...

- Sa mouche, proposa Marc. Le vol cinglé de la mouche à merde dans son casque épais.

- Si tu veux, dit Louis en balayant l'air de sa main comme pour chasser l'insecte. A moins que le troisième violeur soit encore un autre type, un complice inconnu du Sécateur. [...]

- Oui, dit Marc. Je comprends q e tu aies passé la nuit debout. Mais dans le fond, ça ne nous avance en rien. Ça nous ajoute un crime, c'est vrai, mais on savait déjà que la mouche du type était de l'affaire ancienne.

- Laisse un peu tomber cette mouche, je t'en prie.

[...]

Marc lui tendit le bloc ouvert et Louis grimaça.

- Qu'est-ce que c'est que cette saleté ? Un de tes diables putrides ou quoi ?

- C'est un agrandissement par quarante de la mouche de Clairmont, expliqua Marc en souriant. La mouche qu'il a dans le casque.

Louis secoua la tête, un peu navré. Marc tourna la page.

- Et ça, dit-il, c'est une autre mouche agrandie.

Louis tourna le bloc dans un sens, dans un autre, cherchant un repère dans un fatras de traits enchevêtrés, troués de grands vides.

- On n'y comprend rien, dit-il, en rendant le bloc à Marc.

- C'est parce qu'elle est insondable. C'est la mouche du tueur.

[...]

- Tu n'as jamais tourné cinq fois ton sucre dans le café et évité de marcher sur les lignes, par terre ?

- Jamais.

- Tant pis pour toi, mon vieux. Mais sache que c'est comme cela que ça marche, en cent fois pire,quand tu as une grosse mouche dans le casque.

- Pardon ?

- Un grain. Et celle du tueur, c'est une effroyable mouche qui fait son miel des foutus signes du Destin qui jonchent la vie quotidienne. Il a vu le poème, depuis son strapontin, "Je suis le Ténébreux, le Veuf, l'Inconsolé...", un début qui saisit, non ? II l'a revu le soir en rentrant, serré dans le wagon bondé, le nez écrasé sur les vers... "Le Prince d'Aquitaine à la Tour abolie"... Et peut-être le lendemain encore, et le surlendemain... "Les soupirs de la sainte et les cris de la fée"... Suggestif, pour un violeur, ne crois-tu pas ? Un texte abscons, cryptique, où chacun peut loger sa folie... Il le cherche, il le guette, il le trouve... Et pour finir, il l'adopte, il l'absorbe et il en fait le pivot de sa rage meurtrière. C'est comme ça que ça marche, avec certaines mouches.

[...]

Quand sa migraine leva un peu sa tenaille, Marc regarda Merlin qui, encadré de deux flics, remuait ses lèvres de batracien de manière incohérente et mécanique. Une mouche dans le casque, à n'en pas douter, une monstrueuse mouche aussi effarante que celle qu'il avait dessinée à Nevers. Ce spectacle conforta Marc dans sa terreur des crapauds, encore qu'il sût confusément que cela n'avait rien à voir.

[...]

Merlin avait projeté deux autres meurtres après celui de Julie Lacaize : l'un, rue de la reine-Blanche, et l'autre, le dernier, rue de la Victoire. Marc fronça les sourcils, alla récupérer le plan de Paris abandonné sur le buffet de la cuisine et revint s'asseoir sur sa vieille planche. Rue de la Reine-Blanche... Mon front est rouge encore du baiser de la Reine... Choix parfait, la reine blanche, la pureté immaculée, l'évidence même. Pour la mouche bien sûr, la mouche monstrueuse aux yeux aux mille facettes. Et la rue de la Victoire en clôture. Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron... Un impeccable raisonnement de mouche. Marc examina le plan du 9e, Rue de la Victoire, à deux pas de la Tour-des-Dames, elle-même croisant la rue Blanche, le tout à deux cents mètres de la Tour-d'Auvergne, elle-même croisant la rue des Martyrs. Et ainsi de suite, marc posa le plan dans l'herbe. Un jeu de piste terrifiant, où tout finit par faire sens et s'emboîter sans faille jusqu'au vertige. L'infaillible logique de la mouche, et Paris qui finit en bouillie."

*

*

Dans le roman policier de Fred Vargas intitulé Dans les Bois éternels (Éditions Viviane Hamy, 2006), Adamsberg se retrouve confronté à tout un village de Normands, dont le curé n'est pas des moindres !


"Le curé alluma une pipe, suivant des yeux la jeune mouche qui passait en vol rasant au-dessus de son clavier. Il prépara sa main, en forme de couvercle rond, frappa sur la table et la manqua.

- Je n'essaie pas de la tuer, expliqua-t-il, mais de l'attraper. Je m'intéresse en amateur aux fréquences des vibrations émises par les ailes des mouches. Elles sont beaucoup plus rapides et stridentes quand elles sont piégées. Vous verrez cela.

Il rejeta un gros rond de fumée et les regarda, la main toujours pliée en forme de capsule. [...]

La main du curé s'abattit sur la mouche, qui s'échappa entre le pouce et l'index.

[...]

Le curé abattit sa main et, ce coup-ci, la mouche se trouva prise au piège, émettant aussitôt un bourdonnement accentué.

- Vous l'entendez ? dit-il. Sa réponse au stress ?

- En effet, dit poliment Veyrenc.

- Adresse-t-elle un signal à ses semblables ? Ou met-elle en route l'énergie nécessaire à la fuite ? Ou existe-t-il un émoi chez l'insecte ? C'est la question. Vous avez déjà écouté le son d'une mouche qui agonise ?

Le curé avait approché son oreille de sa main, semblant compter les milliers de battements-seconde des ailes de la jeune mouche.

*

*

"15 juin

Les mouches de roche. Elle dégoulinent des troncs et des falaises en coulées soyeuses. Elles sont manne sacrée. Le mois de juin où les bêtes ont besoin de toute leur vigueur pour s'aimer constituait un problème dans le cycle de la vie. Comment faire la soudure entre le réveil de mai et l'abondance de juillet ? La nature a prévu les mouches. Ces pauvres insectes sont offerts en pâture. Ils sont destinés à fournir l'énergie pendant les semaines de pénurie. Dans quinze jours, une fois l'office rempli, ils disparaîtront. Ils auront connu une brève existence, sacrifiée à l'intérêt biologique commun. Pourtant, ils n'oublient pas de vivre. Au moindre rayon, ils vibrionnent, tremblent d'une vibration légère et s'accouplent. Un affairement qui ressemble au tressaillement d'une joie tue. Ils me plaisent tellement que je me tords les chevilles à tenter de les éviter sur les galets de plages."

Sylvain Tesson, Dans les Forêts de Sibérie, Gallimard, 2011.

 

Jean Teulé raconte l'histoire de Fleur de tonnerre (Éditions Julliard, 2013), une empoisonneuse bretonne du XIXème siècle, notamment son arrestation :


Une grosse mouche d'été à reflets verts tournoie dans l'air, se pose au bout du nez d'un des deux gendarmes qui la chasse d'un souffle ascendant à relent d'ail. Elle va sur une main de l'autre cogne, sentant trop la sueur, qui s'en débarrasse d'un mouvement de doigt. Le vrombissement de son vol agace. [...]

Le casse-burnes drosophile vrombissant atterrit sur la barbe, s'égare pari les poils noir d'Hippolyte Vannier qui l'en dégage d'un revers de main tout en cherchant à quoi se trouve noué le poignet de la seconde manche du corsage. [...]

Les deux gendarmes debout la rasseyant avec brutalité. La mouche bourdonante passe devant la cuisinière qui lance loin, de ses poignets ligotés, ses paumes s'ouvrant puis se claquant sur l'insecte exterminé comme par la gueule d'un lézard. Les gendarmes surpris, en un réflexe, ont plongé la pogne au pommeau de leur épée qu'ils tirent du fourreau quand Hippolyte vannier leur fait signe de se calmer.

*

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Dans Temps glaciaires (Éditions Flammarion, 2014) de Fred Vargas, le lecteur bénéficie une fois de plus des leçons philosophiques étranges du commissaire Adamsberg :


Adamsberg s'adossa au mur, pensif, le bras levé, l'index tendu en une étrange position.

- Qu'est-ce que vous faites ? lui demanda Danglard.

- Quoi ?

- Avec ce doigt ?

- Oh ça ? C'est une mouche. Elle était tombée dans un fond de porto. Je l'ai ramassée.

- Oui mais qu'est-ce que vous faites ?

- Rien, Danglard. J'attends qu'elle sèche.

Veyrenc avait ôté les chaussures de Victor et les jetait lourdement au sol.

- Tu 'as plus besoin de rester là, dit Adamsberg à Amédée, assis comme un servant sur le lit de son frère. Il va dormir comme une masse jusqu'au matin. C'est juste une cuite éclair. Il est tombé dans la bouteille de porto, il faut qu'il sèche, c'est tout.

- Qu'il sèche ?

- C'est cela, dit Adamsberg en regardant la mouche frotter ses ailes engluées l'une contre l'autre. Il sera dispo demain après-midi.

A présent, la mouche frottait ses pates avant. Elle tenta une avancée d'un centimètre sur l'ongle d'Adamsberg, s'essuya de bouveau, puis décolla.

- Ca va lentement, un homme, dit-il.

*

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Arts visuels :


Marcel Duchamp, Torture-morte, 1959, Centre Pompidou, Paris.

Mouches collées sur plâtre peint, papier monté sur bois, dans une boîte en verre.




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